Intervention de Annie David

Réunion du 1er décembre 2006 à 22h00
Loi de finances pour 2007 — État b

Photo de Annie DavidAnnie David :

Il y aurait beaucoup à dire sur la situation financière des réseaux de bibliothèques universitaires sur l'ensemble de notre territoire, et nous comprenons très bien la préoccupation que fait naître la situation particulière de la Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg, que vous avez rappelée, monsieur le ministre, et dont notre collègue Philippe Richert nous a fait part en commission.

Néanmoins, je ne peux que réitérer la dénonciation des mécanismes budgétaires de la LOLF, qui renvoient dos à dos les priorités de la politique budgétaire tant de l'enseignement supérieur dont nous débattons ce soir que de l'ensemble des budgets qui suivront.

Ainsi, mes chers collègues, par cet amendement, vous amputez le programme « recherche culturelle et culture scientifique » pour abonder celui de la « formation supérieure et recherche universitaire », donnant ainsi le sentiment que le budget de la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle est considéré comme une simple variable d'ajustement, alors que c'est le budget de votre ministère dans son ensemble qui est insuffisant, monsieur le ministre !

En effet, le milliard d'euros annoncé n'est pas véritablement attribué, et c'est bien ainsi qu'il aurait fallu abonder ce budget, comme l'a brillamment démontré mon collègue Ivan Renar lors de son intervention dans la discussion générale.

Par cet amendement, et son caractère de variable d'ajustement, c'est un signal bien négatif que vous envoyez aux acteurs de la vulgarisation scientifique en France !

À l'heure où vous prônez le rapprochement entre la recherche et l'industrie, n'est-il pas contradictoire de vouloir amputer les crédits du palais de la Découverte, de la Cité des sciences et de l'industrie, dont la première fonction, selon le ministre de la culture, est « de permettre le rassemblement d'acteurs de culture et de statut social différents pour favoriser tous les dialogues » ?

Alors que, par ailleurs, l'éducation nationale constate que les jeunes se détournent des filières scientifiques et que l'on parle même de désertification massive, comment accepter de diminuer les crédits de la diffusion de la culture scientifique ?

Il est indispensable pour nous de maintenir les budgets du palais de la Découverte et de la Cité des sciences, qui remplissent une indispensable mission de démocratisation de la culture scientifique, sauf à dire que notre pays renonce au progrès, à la raison même, et à l'avenir.

Dans ce monde lézardé par les sectarismes et la violence, la lutte contre l'illettrisme scientifique est plus que jamais un enjeu crucial pour peser sur les choix environnementaux, éthiques et sociaux qui résultent des avancées scientifiques elles-mêmes.

Dans une société où la technique et la technologie sont omniprésentes, comment concevoir que la diffusion de la culture scientifique puisse être en recul ?

Il faut véritablement, mes chers collègues, que nous sortions de l'un des aspects de la pensée unique selon laquelle « il est fatal qu'il soit fatal que la culture soit toujours traitée après... », et la culture scientifique encore après !

D'autant que les sciences et les techniques sont au coeur des grandes problématiques auxquelles sont confrontés l'ensemble de nos concitoyens. Il n'est, pour s'en persuader, que d'examiner le rôle qu'elles jouent dans la plupart des grands débats de société, qu'il s'agisse du réchauffement climatique, de l'avenir de l'énergie nucléaire, de la « mal-bouffe », des organismes génétiquement modifiés, des biotechnologies, ou des nombreux bouleversements juridiques, économiques ou sociaux induits par le développement de l'Internet et des technologies de l'information...

On mesure toute l'importance de démocratiser l'accès à la culture scientifique, car c'est aussi un enjeu de la démocratie tout court. Il n'y a pas de démocratie sans généralisation et partage des savoirs, sans citoyens éclairés...

Il est plus que nécessaire de démocratiser la culture scientifique, de développer sa large diffusion, afin de permettre que chacun puisse, en connaissance de cause, maîtriser, peser sur les choix scientifiques qui dessineront le monde de demain.

Mes chers collègues, si nous pouvons partager les inquiétudes de M. Richert, notamment concernant la Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg, il nous semble néanmoins impossible d'opérer une ponction sur les crédits destinés à la diffusion culturelle.

Telle est la raison pour laquelle nous ne participerons pas au vote sur cet amendement.

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