Intervention de Thierry Repentin

Réunion du 28 juin 2005 à 22h15
Services à la personne et mesures en faveur de la cohésion sociale — Article 17 bis

Photo de Thierry RepentinThierry Repentin :

Nous demandons la suppression de trois articles concernant le logement, qui ont été introduits par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement. Il s'agit de trois mesures qui ne sont pas vraiment susceptibles de remédier à l'actuelle crise du logement, mais que l'on tente néanmoins de faire passer en force.

Certes, un changement de gouvernement est intervenu et, dans son discours de politique générale, le Premier ministre, se pliant à la loi du genre, embrassant de très nombreux sujets pour prouver qu'il s'intéresse à tous les aspects de la vie de nos concitoyens, a dû annoncer un certain nombre de mesures relatives au logement. C'est ainsi que nous les retrouvons dans un texte où elles n'avaient pas leur place à l'origine.

Vous proposez donc de mettre en place un nouveau dispositif censé mieux garantir les risques d'impayés de loyer dans le secteur privé et, pour ce faire, vous demandez au 1 % logement d'être en quelque sorte le réassureur, le financeur du risque que les compagnies d'assurance ne veulent pas assurer. Ce n'est pas très sérieux !

Vous justifiez votre choix en partant du constat - tout à fait juste, lui - selon lequel les assureurs privés pratiquent la discrimination en acceptant d'assurer les seuls bailleurs qui louent à des locataires rentrant dans leur scoring, c'est-à-dire à des locataires ne présentant pour ainsi dire aucun risque : des salariés titulaires d'un CDI et dont les revenus sont au moins quatre fois supérieurs au montant du loyer ; bref, des locataires idéaux, qu'on ne trouve plus, tant le monde du travail s'est précarisé.

Vous nous dites qu'avec un tel système les ménages défavorisés vont pouvoir accéder à un logement du parc privé.

Une question se pose : combien devront débourser le 1% logement, mais aussi l'Etat, à travers le crédit d'impôt offert aux propriétaires en contrepartie de la souscription d'une assurance, pour qu'un assureur privé accepte de signer un contrat d'assurance lorsqu'il s'agit de loger une personne à bas revenu ? Sans doute beaucoup, et même beaucoup trop ! Nous attendons une réponse : peut-être l'aurons nous ce soir...

Les assureurs sont là pour faire des profits et non pas pour mettre en oeuvre une politique sociale du logement, sauf à la faire payer très cher à la collectivité. Le mécanisme ne peut pas fonctionner pour les personnes défavorisées.

Pour inciter les propriétaires privés à loger des personnes à bas revenu, il faut que les aides personnelles au logement retrouvent leur pouvoir solvabilisateur. Je me permets de vous rappeler que le Conseil national de l'habitat n'a pas dit autre chose dans son rapport de novembre dernier sur les risques locatifs : il rappelait que « les aides personnelles au logement constituent la colonne vertébrale d'un système de solvabilisation et de prévention des risques locatifs ».

Il faut donc rendre le fonctionnement des FSL plus performant et revenir sur le désengagement de l'Etat tel qu'il a été décidé dans la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales.

S'il s'agit de faire jouer au l % le rôle de réassureur pour développer le marché locatif de logements à loyer intermédiaire, comme l'indique le Gouvernement, le système peut mieux fonctionner auprès des assureurs, car les risques assurantiels sont moindres. Mais, là encore, quelle est l'efficacité sociale du dispositif ? Qu'entendez-vous par loyer intermédiaire ? S'agit-il des nouveaux loyers conventionnés de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, qui peuvent atteindre 15 euros par mètre carré de surface utile, soit le double des loyers intermédiaires, notamment des loyers PLS du parc social ?

Nous souhaiterions avoir des éléments précis sur le contenu du cahier des charges et notamment sur les obligations sociales.

Pourquoi ne pas avoir tout simplement étendu le système du Locapass, qui fonctionne très bien, au lieu de faire un tel cadeau aux assureurs ?

Enfin, nous craignons qu'une telle extension du champ d'intervention du 1 % logement ne remette en cause son action auprès des locataires du parc social public qui, à travers le Locapass, bénéficient d'une aide non négligeable, tant sous la forme d'une avance gratuite pour le dépôt de garantie que pour les risques d'impayés de loyer.

Sur ce point, monsieur le ministre, nous vous demandons de nous confirmer que le Locapass sera bien maintenu pour les locataires du parc public.

Nous ne pensons pas qu'une logique assurantielle puisse constituer une réponse adaptée à la question du risque locatif.

Par ailleurs, nous ne pouvons pas accepter que toutes les règles du jeu soient renvoyées à un cahier des charges, lui aussi approuvé par décret, dont nous ne connaissons ni le contenu ni l'esprit.

Nous proposons donc de supprimer cet article, ainsi que deux autres relatifs au logement, en vous demandant trois mois de travail en commun avec les parlementaires qui se sont attelés à cette tâche afin de faire en sorte que le projet de loi « Habitat pour tous » ne soit pas dépouillé de trois des dispositifs susceptibles de lui conférer de l'envergure.

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