Monsieur le ministre, l’âge légal actuel du départ à la retraite constitue le bouclier social des citoyens les plus modestes. Il est le bouclier social de celles et de ceux qui ont travaillé jeunes, de celles et de ceux qui ont été brisés par une vie de labeur. Quand donc comprendrez-vous que des ouvriers et des employés qui, leur vie durant, ont travaillé dur préfèrent aujourd’hui partir à la retraite à 60 ans, serait-ce avec une décote ?
Et vous voulez les faire travailler deux ans de plus ! Mais combien de temps leur restera-t-il à vivre en bonne santé, ou même à vivre tout court ? La réforme que vous proposez est en réalité tournée tout entière contre le peuple, et vous voulez nous faire croire que c’est pour le peuple que vous l’avez conçue !
La réforme des retraites fait partie des problèmes majeurs qui, dans ce pays, nécessitent un vrai consensus. Les grands principes inscrits dans la Constitution et plus particulièrement notre modèle social – l’État-providence, la Sécurité sociale – commandent que des enjeux comme celui des régimes de retraite fassent l’objet d’un consensus national, car nos régimes de retraite sont au cœur de notre modèle collectif.
Pour aboutir à un consensus national sur la réforme, au cœur de la méthode, il eût fallu la négociation, la vraie négociation, laquelle n’a rien à voir avec la simple consultation et le simulacre de discussion que vous avez mis en œuvre. Vous n’avez pas cherché à réaliser le pacte social qui aurait bénéficié du soutien le plus large des Français, par-delà leurs opinions. Vous avez préféré le scénario du bras de fer et le passage en force, quitte à dresser une France contre une autre.
Face à un tel enjeu, nous avions besoin, pour les décennies suivantes, d’un gouvernement rassembleur. Au lieu de quoi, nous n’avons que le plus grand commun diviseur ! Quelle est donc cette gouvernance, qui consiste en permanence à dresser une partie de la France contre une autre ?
Clairement, massivement et à plusieurs reprises, les mouvements sociaux ont indiqué au Gouvernement que sa réforme était inacceptable. Que demandent-ils, sinon l’ouverture de vraies négociations ? Mais vous préférez, et le Président de la République en tête, nier l’ampleur de la mobilisation. Il est vrai que ce ne sont pas des habitués du Fouquet’s qui défilent dans la rue !
Bref, contrairement à ce que la majorité prétend, l’alternative n’est pas entre cette réforme et le chaos, mais entre une réforme injuste et inefficace, d’une part, et une autre réforme possible, juste, équilibrée et durable, d’autre part : celle que nous proposons, celle qu’a présentée Jean-Pierre Bel. C’est pourquoi nous soutenons et voterons cette motion référendaire.