Séance en hémicycle du 6 octobre 2010 à 14h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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  • motion référendaire
  • peuple
  • référendum

La séance

Source

La séance est ouverte à quatorze heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L’ordre du jour appelle la nomination des membres de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l’évaluation interne.

Conformément à l’article 8 du règlement, la liste des candidats remise par les bureaux des groupes a été affichée.

Cette liste sera ratifiée s’il n’y a pas d’opposition dans le délai d’une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le mardi 5 octobre 2010 que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité (2010-77 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du mercredi 6 octobre 2010, quatre décisions du Conseil sur des questions prioritaires de constitutionnalité (nos 2010-39, 2010-43, 2010-45 et 2010-59 QPC).

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

J’informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du conseil d’administration de l’Institut des hautes études pour la science et la technologie.

Conformément à l’article 9 du règlement, j’invite la commission de la culture, de l’éducation et de la communication à présenter une candidature.

La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

J’informe le Sénat que la question orale n° 994 de M. Raymond Vall est retirée du rôle des questions orales, à la demande de son auteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L’ordre du jour appelle l’examen de la motion (n° 4, 2010-2011) de M. Jean-Pierre Bel, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, Jacqueline Alquier et Michèle André, MM. Serge Andreoni, Bernard Angels et Alain Anziani, Mme Éliane Assassi, MM. David Assouline, Bertrand Auban et Robert Badinter, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Bérit-Débat, Jacques Berthou et Michel Billout, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Yannick Botrel et Martial Bourquin, Mme Bernadette Bourzai, M. Michel Boutant, Mme Nicole Bricq, M. Jean-Pierre Caffet, Mmes Claire-Lise Campion et Monique Cerisier-Ben Guiga, MM. Yves Chastan, Pierre-Yves Collombat, Roland Courteau, Jean-Claude Danglot, Yves Daudigny, Yves Dauge et Marc Daunis, Mmes Annie David, Michelle Demessine, Christiane Demontès et Évelyne Didier, MM. Claude Domeizel, Alain Fauconnier, Jean-Luc Fichet, Guy Fischer, Thierry Foucaud, Jean-Claude Frécon, Bernard Frimat, Didier Guillaume, Jacques Gillot, Serge Godard et Jean-Pierre Godefroy, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Claude Haut, Edmond Hervé, Robert Hue, Claude Jeannerot et Ronan Kerdraon, Mme Marie-Agnès Labarre, MM. Serge Lagauche, Gérard Le Cam et Jacky Le Menn, Mmes Claudine Lepage et Raymonde Le Texier, MM. Marc Massion, Pierre Mauroy, Gérard Miquel et Jean-Jacques Mirassou, Mmes Renée Nicoux et Isabelle Pasquet, MM. Georges Patient, François Patriat et Jean-Claude Peyronnet, Mme Gisèle Printz, MM. Marcel Rainaud, Jack Ralite, Daniel Raoul, Paul Raoult, Ivan Renar et Thierry Repentin, Mmes Patricia Schillinger et Mireille Schurch, M. Jean-Pierre Sueur, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, René Teulade, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera et Jean-François Voguet, tendant à proposer au Président de la République de soumettre au référendum le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites.

La parole est à M. Jean-Pierre Bel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous avez certainement vu, comme moi, l’immense banderole qui était déployée lors des grandes manifestations dans lesquelles se sont exprimés des millions de Françaises et de Français. On pouvait y lire l’invite suivante : « Mesdames et messieurs les sénateurs, ne votez pas cette réforme injuste ».

Pour ma part, j’ai trouvé certes inhabituel, mais aussi important que les forces vives de la nation se tournent vers le Sénat pour lui confier ses espoirs et ses inquiétudes. Cette lourde responsabilité confère à nos débats une gravité qui n’a échappé à personne. C’est dans cet esprit que nous abordons un sujet essentiel dans la vie des Français.

Nous nous exprimons dans un contexte particulier, dans un moment de grande tension, de mobilisation, aussi, dont nous devons tenir compte.

Des millions de nos concitoyens – près de trois millions à chaque manifestation – ont défilé dans les grandes villes de France, le 7 septembre, le 23 septembre et le 2 octobre derniers. Ils s’apprêtent à recommencer le 12 octobre prochain. Parallèlement, ils mettent en place des modalités d’action, des initiatives qui vont évoluer dans les jours à venir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

C’est une mobilisation sociale qui ne faiblit pas, une mobilisation qui n’a cessé de croître, même si le Premier ministre a fait mine de ne guère s’en soucier en déclarant que les manifestants se trompaient.

D’un autre côté, il y a le débat parlementaire ou, plutôt, l’absence de débat. En effet, le débat qui aurait dû avoir lieu à l’Assemblée nationale a été escamoté, censuré, refusé au mépris des droits les plus élémentaires de l’opposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Ainsi serons-nous les premiers à pouvoir aller au fond des choses.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Ce contexte nous impose un seul devoir : ne pas manquer ce rendez-vous, donc prendre le temps nécessaire au débat afin de mettre en lumière les injustices de toute nature qui structurent le projet de loi…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

… et de faire entendre nos propositions alternatives.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La réforme des retraites est, à l’évidence, un enjeu majeur. Elle mérite donc un vrai débat, un grand débat national au terme duquel les Françaises et les Français doivent pouvoir s’exprimer. Or, monsieur le ministre, vous entendez au contraire faire passer cette réforme au galop, sans véritable écoute ni négociation : une contre-vérité affirmée aux Français ; des syndicats mis devant le fait accompli ; des parlementaires privés de débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le ministre, je veux le dire ici avec force : ni le Président de la République, ni le Gouvernement auquel vous appartenez, ni vous-même n’avez reçu de mandat pour faire c e que vous faites !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Vous avez même été élus sur un engagement qui consistait à ne surtout pas le faire. En effet, lors de la campagne pour l’élection présidentielle, Nicolas Sarkozy s’était solennellement engagé à ne pas remettre en cause l’âge légal de départ à la retraite.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Et il avait même confirmé ce propos après son élection.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

À l’époque, Christiane Demontès le soulignait hier, Mme Laurence Parisot avait tenté de le faire revenir sur sa position. Il avait refusé de transiger avec le MEDEF, déclarant clairement qu’il n’avait pas reçu de mandat du peuple français sur ce point et que, par conséquent, il ne se sentait pas habilité à agir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Quelle crédibilité peut-on accorder à la parole politique quand elle est ainsi bafouée au plus haut niveau ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Vos projets sur les retraites ont été engagés sans mandat, ils se sont poursuivis sans débat.

Le dialogue social, pourtant essentiel pour la réussite et la légitimité d’une réforme d’une telle ampleur, n’a pas eu lieu. Les syndicats n’ont été associés ni à la conception ni à la conduite de votre réforme. Tout juste ont-ils, à l’occasion, été conviés pour la forme, pour la photo, sans que la négociation collective ait lieu pour autant.

La réforme a ainsi été conçue dans l’opacité des cabinets ministériels et entre conseillers de l’Élysée, loin de la place publique, loin des partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Non content de cette situation, vous avez escamoté le débat parlementaire. À l’Assemblée nationale, vous avez fait jouer tous les moyens de procédure pour évacuer le débat :…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

… commission à huis clos, procédure d’urgence, temps programmé et, pour finir, censure des débats par le président Accoyer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Vous avez ainsi bafoué les droits les plus élémentaires du Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Vous avez privé les parlementaires de faire tout simplement leur travail, niant ainsi la souveraineté même du Parlement.

Au Sénat, nous vous amènerons à respecter le temps du débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Prendre le temps du débat, c’est laisser l’opposition s’exprimer, mais c’est aussi et surtout écouter des propositions qui, vous pourrez le constater, sont toutes constructives, sérieuses et financées, contrairement à ce que j’ai entendu hier.

Monsieur le ministre, le Président de la République considère le projet de loi portant réforme des retraites comme la « réforme majeure du quinquennat ». Nous n’oublions pas la longue série de mesures qui ont précédé ce projet de loi et qui mettent à mal le lien social. Nous avons été atterrés de voir comment a été conduite une réforme de cette importance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Oui, la situation est grave. Pourtant, c’est encore bien peu si l’on considère le fond du dossier, si l’on analyse la philosophie qui inspire votre projet de loi et les mesures concrètes qui le traduiront dans la réalité et dans le quotidien des Français. Ne nous payons pas de mots, la principale caractéristique de ce projet de loi est d’être injuste !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Il est injuste parce que la mesure phare du report de l’âge légal de départ à la retraite touche d’abord les plus faibles dans le monde du travail !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Votre réforme frappe les ouvriers, dont l’espérance de vie est inférieure de sept années à celle des cadres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Ils jouiront d’autant moins de leur retraite qu’ils y accéderont usés et en moins bonne santé. Est-ce cela que vous appelez une réforme juste ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Votre réforme frappe plus particulièrement les femmes qui, pour un tiers d’entre elles, à la suite de carrières précaires ou à temps partiel, sont déjà obligées de travailler jusqu’à soixante-cinq ans pour avoir accès à une retraite sans décote. Est-ce cela que vous appelez une réforme juste ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Votre réforme frappe aussi les 300 000 personnes qui, chaque année, partent à la retraite à 60 ans alors qu’elles ont déjà cotisé deux années de plus que nécessaire, sans bénéficier pour autant d’un mécanisme de surcote.

Demain, ces personnes-là devront travailler plus longtemps encore, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

… et ce alors même qu’elles ont commencé à travailler jeunes et qu’elles mériteraient de jouir d’une retraite amplement méritée. Est-ce cela que vous appelez une réforme juste ?

Tous ceux que je viens de nommer vont payer le prix fort pour votre réforme alors que celle-ci ne sera guère payante pour eux. Cela non plus ne correspond pas à notre conception d’une réforme juste !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

En revanche, comment ne pas le voir, votre réforme épargne vos puissantes relations, les convives du Fouquet’s et les amis du Président de la République !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Votre réforme épargne les revenus du capital puisque sur les 45 milliards d’euros qui seront nécessaires en 2020, seuls 2 milliards d’euros proviendront des revenus du capital.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Votre réforme épargne aussi les revenus du patrimoine. La contribution des 1 000 plus gros bénéficiaires du boulier fiscal oscillera entre 500 euros et 700 euros, somme pour eux tout à fait symbolique, une aumône gracieusement octroyée aux régimes de retraites.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

C’est tellement caricatural, grossier, inconscient aussi au regard de l’état de notre pays et de la dégradation continue des finances publiques ! Et tout cela, monsieur le ministre, pour une réforme qui ne règle rien !

La précédente réforme des retraites, qui porte le nom du Premier ministre, et que l’on disait financée à 100%, n’est déjà plus suffisante. Et avec la réforme actuelle, il manquera dès l’année prochaine 25 milliards d’euros !

Vous l’aurez compris, votre projet de loi est injuste socialement et inefficace économiquement. C’est pourquoi nous proposons un autre chemin. Je demande aux membres de la majorité qui, trop souvent, nous reprochent ne pas avoir de propositions, de bien vouloir les écouter.

Contrairement à l’idée que vous avez tenté, sans succès, d’instiller dans les esprits, nous ne sommes pas dans le refus de la réforme. Nous ne sommes pas dans l’esquive. Tout comme nos collègues de l’Assemblée nationale, nous ne nous arrêtons pas au milieu du chemin. Nous ne nous contentons pas de dénoncer votre pratique de la réforme ni de contester le projet que vous nous présentez.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Personne ne peut nier la nécessité d’une réforme, mais d’une réforme qui apporte des solutions et de véritables avancées.

Oui, nous portons un autre projet. Nous prônons une réforme globale, alors que les données démographiques constituent l’unique axe sur lequel s’appuie votre projet de loi. La réforme que nous proposons est indissociable d’une autre politique de l’emploi, en direction des jeunes et des seniors en particulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. Jean-Pierre Bel. Notre projet alternatif de réforme des retraites a l’efficacité pour objectif et la justice pour boussole. La justice, c’est d’abord de garantir le niveau de vie des retraités, aujourd’hui dégradé, par votre faute.

M. le rapporteur s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

En effet, les réformes Balladur et Fillon ont provoqué une baisse des pensions allant jusqu’à 20 %. C’est une perte sèche de pouvoir d’achat, monsieur le rapporteur !

La justice, c’est le partage des efforts, alors que, aujourd’hui, 90 % des efforts sont demandés aux seuls salariés. C’est pourquoi nous proposons de nouvelles ressources, notamment en mettant les revenus du capital à contribution. Cela signifie une augmentation des prélèvements sociaux sur les bonus et sur les stock-options, conformément aux propositions de la Cour des comptes, et l’application de la contribution sociale généralisée, la CSG, sur les revenus du capital qui en sont actuellement exonérés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. Jean-Pierre Bel. Si notre projet était adopté, les contributions des revenus du capital s’élèveraient à 19 milliards d’euros dès 2010 et à 25 milliards en 2025, contre 2 milliards seulement avec votre projet !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Parallèlement, nous acceptons une hausse modérée des cotisations patronales et salariales, de 0, 1 point par an, au cours des dix années à venir.

La justice, c’est aussi de prendre en compte la pénibilité et d’en tirer des conséquences concrètes en termes d’ouverture des droits à pension.

Nous devons acter un principe simple : toute période de travail pénible – travail de nuit, à la chaîne ou port de charges lourdes – doit ouvrir droit à une majoration des annuités et permettre de partir plus tôt à la retraite.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

L’efficacité, c’est de faire une réforme durable alors que votre projet n’apporte aucune solution pérenne, pas même à moyen terme. À cette fin, contrairement à vous, nous ne ferons pas preuve d’une négligence coupable à l’égard du Fonds de réserve pour les retraites, le FRR, créé comme un facteur de sécurité et de stabilité par Lionel Jospin. Depuis 2002, vous ne l’avez plus alimenté, allant même parfois jusqu’à le ponctionner !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. Jean-Pierre Bel. Vous avez ainsi transformé le Fonds de réserve pour les retraites en un fonds de retrait sans réserves !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Nous proposons au contraire d’alimenter le FRR de manière régulière, par la création d’une surtaxe de 15 % de l’impôt sur les sociétés acquitté par les banques qui, une fois n’est pas coutume, fournirait leur contribution à l’effort national !

Bravo ! et applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Nous proposons enfin des points d’étape réguliers, tous les cinq ans, avec l’ensemble des partenaires sociaux, ainsi qu’une clause de rendez-vous globale sur le système des retraites en 2025.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

C’est ainsi que nous parviendrons à inscrire les choses sur le long terme et à procéder à une réforme durable des retraites.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. Jean-Pierre Bel. L’efficacité, c’est aussi être pragmatique, en cohérence avec la société et les modes de vie d’aujourd’hui. Ainsi, comment pouvez-vous sérieusement imposer aux seniors de travailler plus longtemps, alors que la France est la lanterne rouge de l’Europe pour le taux d’emploi des personnes âgées de 55 à 64 ans ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Quel est le sens et la faisabilité de vos propositions dans un tel contexte ? Pour notre part, nous proposons de dépasser largement votre réforme, purement comptable, en prenant le problème de l’emploi des seniors à bras-le-corps. Nous voulons un vrai accompagnement des salariés, nous voulons favoriser la formation des seniors. Nous considérons qu’il faut revoir les méthodes de travail dans les entreprises, en généralisant le tutorat et les binômes, en aménageant les conditions de travail des plus de 55 ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. Jean-Pierre Bel. Pourquoi ne pas mettre en place un mécanisme de bonus-malus, par exemple la modulation d’un point de cotisation patronale en fonction de la part des seniors parmi les salariés ? Faute d’appréhender l’emploi des seniors dans sa globalité et dans sa complexité, votre projet de loi passe totalement à côté d’un enjeu majeur du monde du travail d’aujourd’hui. Vous ne réussirez jamais la quadrature du cercle : forcer des gens à travailler plus longtemps alors qu’au-delà d’un certain âge, aujourd’hui, il devient souvent presque impossible de trouver un emploi !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Nous proposons, en somme, d’aller vers la retraite choisie. Ce n’est pas une formule magique ; ce n’est pas « raser gratis ». C’est au contraire une vraie réforme de société, qui permettra d’aller vers un système de retraite à la fois universel et personnalisé. C’est la seule manière de s’adapter aux rythmes de travail et de vie d’aujourd’hui et de tenir compte des parcours et des perspectives de chacun.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis des mois, on nous affirme que les mesures du présent projet de loi sont inéluctables, on fait appel à de fausses évidences sur l’augmentation de l’espérance de vie, sans jamais tenir compte des différences que l’on constate selon les métiers. Depuis des mois, on dépeint notre pays comme un village gaulois qui résisterait obstinément au changement, en oubliant que nos voisins espagnols ou allemands se sont d’abord donné le temps de la discussion, de la négociation et de la mise en œuvre. Chez eux, on peut partir à la retraite au terme de 35 ans de cotisation sans être lourdement pénalisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Pourtant, en matière de retraite, pas plus qu’ailleurs, il n’y a de fatalité. Une vraie réforme des retraites est possible. Elle est finançable. Elle est même souhaitable dès lors qu’elle s’inscrit dans une approche globale de notre économie et de notre société.

Mes chers collègues, cette motion référendaire n’est en aucun cas l’expression de notre volonté de nous défausser de notre responsabilité de parlementaires qui doivent se saisir de toutes les grandes réformes indispensables à notre pays. Nous ne souhaitons pas davantage nous substituer à l’expression nécessaire de la démocratie sociale en proposant des référendums sur tous les sujets.

La parole présidentielle, pourtant solennellement affirmée, est aujourd’hui véritablement trahie.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. Jean-Pierre Bel. Il faut que Nicolas Sarkozy décide enfin de tout remettre à plat, qu’il reprenne les choses à l’endroit. Plutôt qu’un débat sur l’identité nationale, ne serait-il pas plus utile et bienvenu d’engager un débat national afin de déterminer si le Président peut faire l’exact contraire de ce qu’il avait proposé aux Français : le maintien de l’ouverture des droits à la retraite dès l’âge de 60 ans ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Madame la présidente, c’est dans cet esprit que j’ai l’honneur, au nom du groupe socialiste, du groupe communiste républicain et citoyens et des sénateurs du parti de gauche, de demander à notre assemblée d’adopter la motion référendaire que nous avons déposée.

Faute de débat et d’écoute, nous utilisons cet ultime recours. Nous lançons un appel, solennel et grave, à tous les républicains qui n’acceptent pas le caractère injuste, inique de ce projet de loi, un appel à nos nombreux collègues qui, au fond d’eux-mêmes, n’acceptent pas le caractère éminemment choquant du texte qui nous est proposé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Oui, je lance un appel à toutes celles et à tous ceux qui, comme nous, croient que la République française n’est elle-même que lorsqu’elle est démocratique et sociale : ne votez pas cette réforme injuste !(Les sénateurs du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG se lèvent et applaudissent longuement.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Mme la présidente. Mes chers collègues, j’ai le plaisir de saluer la présence dans notre tribune d’honneur de M. Zalmaï Zabuly, sénateur de la République islamique d’Afghanistan, qui effectue, toute cette semaine, une visite de travail auprès de notre assemblée, en compagnie de deux fonctionnaires du Sénat afghan.

Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Qu’il me soit permis de rappeler que c’est grâce au soutien des administrateurs de l’Assemblée nationale et du Sénat français qu’ont pu être formés, sous l’égide du Programme des Nations unies pour le développement, au cours de l’été 2005, les cent premiers fonctionnaires des deux assemblées composant le Parlement afghan. Depuis cette date, c’est plus d’une cinquantaine de parlementaires et de fonctionnaires de ces assemblées qui auront pu être informés ou formés grâce à la coopération de notre Sénat, à Paris ou à Kaboul.

En regard de la présence militaire française en Afghanistan, il importe de rappeler cette coopération pacifique, au service de la démocratie.

J’adresse, en notre nom à tous, la bienvenue à notre collègue Zalmaï Zabuly auquel je souhaite un séjour fructueux et agréable dans notre pays !

Applaudissements

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, hier, une motion référendaire, signée par les membres du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyens et des sénateurs du parti de gauche, a été déposée en séance par les présidents de ces deux groupes.

Cette motion met en œuvre, pour la première fois devant notre commission, la nouvelle procédure adoptée à l’article 46 de la révision constitutionnelle de juillet 2008, qui a réformé l’article 11 de la Constitution en permettant d’organiser un référendum d’initiative parlementaire bénéficiant d’un soutien populaire.

Sur la forme, tout d’abord, je vous indique que, malheureusement, la loi organique nécessaire à la mise en œuvre de cette nouvelle procédure de référendum n’a pas été adoptée. Elle n’est même pas encore déposée à l’état de projet.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Ce simple fait suffit, en toute logique, à conduire la commission à émettre un avis défavorable sur cette motion. Cela dit, je ne veux pas donner l’impression de me réfugier derrière cet argument technique et facile. Je suis d’accord avec les signataires pour dire que la question des retraites est, très légitimement au cœur des préoccupations de tous nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Pour autant, les quatre arguments développés par les auteurs de la motion ne me paraissent pas convaincants.

Tout d’abord, premier argument, vous opposez au Président de la République le fait que la réforme ait été engagée sans mandat du peuple.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Outre que la Constitution déclare que « tout mandat impératif est nul », c’est l’inaction du Gouvernement qui pourrait être jugée gravement fautive face à la situation dégradée des comptes sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Ensuite, c’est votre deuxième argument, vous affirmez l’absence de concertation avec les partenaires sociaux ainsi que le manque de respect du Parlement qu’aurait illustré le débat à l’Assemblée nationale. Je ne puis vous suivre sur l’un ou l’autre de ces terrains : la concertation suppose que les deux parties s’y montrent consentantes, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

M. Dominique Leclerc, rapporteur. … et l’Assemblée nationale a adopté ce texte dans les règles !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Votre troisième argument, selon lequel la pénibilité de certains métiers n’est pas prise en compte…

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Le texte reconnaît l’invalidité, pas la pénibilité !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

… me paraît, dois-je le répéter, quelque peu caricatural, si j’en juge par le temps que nous avons passé sur cette question en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Vous savez bien que la France sera le premier pays à reconnaître officiellement la pénibilité !

Applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Enfin, votre quatrième et dernier argument, par lequel vous soutenez que des projets alternatifs sont concevables, me convient parfaitement. Je plaide moi-même, et depuis longtemps, pour que l’on réfléchisse à l’opportunité d’une réforme systémique.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

Vous aurez compris, mes chers collègues, que la commission est défavorable à la motion référendaire.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, voulez-vous, oui ou non, sauvegarder notre système de retraite ?

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste

Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Oui !

Mmes et MM. les sénateurs du groupe CRC-SPG scandent : « Oui ! » en martelant leurs pupitres.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

À cette question la réponse est évidemment : oui ! Les partenaires sociaux, les partis politiques que j’ai consultés, …

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. … et chacun de nous en sommes d’accord : nous voulons une réforme des retraites parce que nous voulons sauvegarder le système de retraite par répartition !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Pour conduire cette réforme, il faut demander un effort à tous les Français…

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. Or, il n’est jamais populaire de demander des efforts. Il faut du courage pour le faire, monsieur le président du groupe socialiste !

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Dans ce monde de plus en plus difficile, gouverner demande du courage, …

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

… et nous n’en manquons pas !

Avec le Président de la République, notre majorité en témoigne une nouvelle fois, comme elle a su le faire déjà en 1993, en 2003 et en 2007-2008…

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. La motion déposée par le parti socialiste est un moyen d’éviter le débat sur le fond.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. Comme vous n’êtes pas à l’aise sur le fond, comme vous n’avez pas de projet, vous vous interrogez sur la forme. En déposant cette motion, vous ne faites pas autre chose. Vous réclamez la mise en œuvre de la procédure de référendum, mais encore aurait-il fallu que vous votiez la révision constitutionnelle, mesdames, messieurs les sénateurs, ce qui n’a pas été le cas.

Bravo ! et applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. Demander l’application d’une procédure contenue dans une réforme que vous n’avez pas voulue relève de la même logique que celle que vous développez dans le débat sur la réforme des retraites !

Applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. –Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Aujourd’hui, alors que l’Assemblée nationale a voté cette réforme après de longs débats, de jour et de nuit, alors que le débat parlementaire se poursuit au Sénat, comme il est normal dans une démocratie telle que la nôtre, vous nous dites que la représentation nationale n’est pas qualifiée pour débattre des retraites…

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. … et vous brandissez votre demande de référendum !

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Je considère quant à moi que la représentation nationale est qualifiée pour discuter des retraites !

Monsieur le président du groupe socialiste, puis-je vous demander de respecter le règlement de l’Assemblé nationale, sur lequel vous avez fait des commentaires qui ne me semblent pas opportuns ?

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Si l’on suivait votre logique, il faudrait recourir au référendum chaque fois que l’on veut réformer les retraites. Pourtant, lorsque vous étiez aux responsabilités, vous n’avez pas organisé de référendum pour revenir sur la réforme des retraites de 1993, alors que vous n’aviez de cesse de réclamer son abrogation !

Vous prétendez avoir fait une réforme des retraites quand vous avez créé le Fonds de réserve pour les retraites, mais vous l’avez fait sans organiser un référendum ! Sans doute ne s’agissait-il pas d’une réforme : c’est la seule explication que je puisse trouver !

Et puis, monsieur Bel, avez-vous oublié que le Fonds de réserve pour les retraites à peine créé, Mme Aubry l’a immédiatement ponctionné pour financer les 35 heures

M. Jean-Pierre Bel fait un signe de dénégation.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

, notamment le Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, le fameux FOREC !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Elle est la première à l’avoir fait !

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. Vous nous reprochez aujourd’hui d’utiliser ce fonds pour financer les retraites ; Mme Aubry l’a utilisé, à peine créé, pour financer les 35 heures : cherchez l’erreur !

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Avec cette réforme, nous entendons répondre à l’urgence des déficits de nos régimes de retraites en rétablissant leur équilibre, construire des solutions dans la durée pour que les générations futures puissent à leur tour bénéficier de notre système par répartition, qui est un système solidaire…

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. C’est pour cela que nous allons débattre, article par article, amendement par amendement, et nous prendrons le temps qu’il faut !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Vous êtes un ministre en sursis ! Dans trois semaines, vous aurez du temps libre !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Nous examinerons tous les sujets clés de cette réforme des retraites : l’âge bien sûr, parce c’est le socle d’un système par répartition, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Mais vous, vous voulez un système par capitalisation !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

… mais aussi la santé au travail, la pénibilité, les carrières longues, les inégalités de retraite entre les hommes et les femmes, les différences entre le secteur public et le secteur privé, les travailleurs handicapés, les seniors... De multiples questions se posent. Elles feront l’objet de débats approfondis, et le Gouvernement ne les laissera pas sans réponse.

Si vous deviez consulter nos concitoyens par référendum, quelle question leur poseriez-vous ? Leur demanderiez-vous : « Consentez-vous à payer plus d’impôts et de cotisations pour équilibrer notre système de retraites ? »

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Ou bien : « Consentez-vous à payer plus de quarante milliards d’euros d’impôts et de taxes supplémentaires ? » comme le propose le parti socialiste.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Il s’agirait d’un véritable bombardement fiscal qui ruinerait notre compétitivité, pénaliserait l’emploi et diminuerait le pouvoir d’achat des Français. La réponse à ces questions est toute trouvée, ce serait : « non » !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. Les Français ne voudront pas de votre proposition de réforme des retraites !

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Puisque Mme Aubry appelle à une baisse des retraites, vous pourriez formuler votre question autrement : « Acceptez-vous une baisse de votre pension de 10 % pour financer les retraites ? » Là encore, la réponse serait évidemment : « non » !

Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Pourtant, si l’on ne touche pas à l’âge de départ à la retraite, pour rétablir l’équilibre, il faudra baisser les pensions, de 10 % aujourd’hui et de 15 % en 2025. Telle est la réalité et personne ne souhaite, évidemment, en arriver là, surtout pas le Gouvernement et sa majorité !

Votre référendum ne servirait à rien ; il ne résoudrait rien, il ne permettrait d’avancer sur rien ! Surtout ne rien décider : telle est votre ligne de conduite !

Sur un sujet aussi vaste que les retraites, le choix du référendum est une impasse.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. Nous devons écouter les Français, mais nous devons aussi savoir prendre nos responsabilités. Les Français n’attendent pas l’inaction. Ils attendent, même si c’est difficile, que l’on réponde à leurs préoccupations. Ils attendent que nous garantissions nos régimes de retraite par répartition, et nous le faisons ! Ils attendent que nous prenions en compte la situation de ceux qui ont eu des carrières longues ou pénibles, et nous le faisons ! Ils attendent que nous agissions sur les vraies causes des écarts de pensions entre les hommes et les femmes, et nous le faisons. Le débat au Sénat sera sans doute l’occasion d’enrichir encore notre texte sur ce point !

Applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Enfin, les Français attendent que nous prenions en compte la situation des retraités les plus modestes : nous l’avons fait et nous continuons de le faire, notamment pour les agriculteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Çà, vous ne risquez pas d’oublier les agriculteurs !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement ne se réfugie pas dans l’incantation ni dans l’idéologie, il assume ses responsabilités et affronte la réalité !

Vous prétendez, monsieur Bel, que le Président de la République n’aurait pas de mandat pour agir en matière de retraite : c’est probablement parce que vous n’avez jamais agi dans ce domaine ; vous parlez d’expérience !

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Permettez-moi de vous livrer un scoop : nous avons connu la pire crise économique que le monde ait eu à affronter ? Je vous demande de bien vouloir considérer et de garder présent à l’esprit que cette crise a changé la donne pour longtemps en matière de retraites. Nous vous le rappellerons, notamment lorsque nous évoquerons les mesures de financement.

Nous aurions pu ne rien faire, comme vous le souhaitez, ne rien changer, attendre que les déficits de nos régimes de retraite se creusent toujours plus. Mais la première qualité d’un homme d’État, c’est de s’adapter et de ne pas oublier la réalité, comme le fait le Président de la République française !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Quand ils ont élu le Président de la République, les Français lui ont donné mandat de choisir l’action et la responsabilité et non pas de se réfugier dans l’immobilisme.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. Ce n’est pas parce que le parti socialiste a un problème avec les retraites qu’il nous faut, nous, renoncer à assumer nos responsabilités devant les Français. C’est pourquoi nous avons déposé ce projet de loi !

Bravo ! et applaudissementssur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – Huées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, une réforme des retraites ne peut se faire sans l’accord très large de nos concitoyens. Or, c’est loin d’être le cas : le Gouvernement reste sourd à leur voix dont l’écho lui parvient, tant par les manifestations monstres des 7 et 23 septembre et du 2 octobre derniers, que par les sondages successifs réalisés à la demande des médias, par l’interpellation de l’opposition parlementaire à l’Assemblée nationale et, ici même, au Sénat, lors de la réunion de la commission des affaires des sociales et, depuis hier, dans l’hémicycle.

Enfin, et ce n’est pas le moindre des paradoxes – quoi qu’en pense M. le rapporteur de la commission des affaires sociales –, je vous rappelle que le Président de la République a lui-même déclaré, dans un passé pas si lointain – en 2007 – qu’il n’avait pas été mandaté, donc élu, pour modifier l’âge légal d’ouverture des droits à la retraite des Français. Le président de notre groupe, Jean-Pierre Bel, l’a rappelé fort à propos voici quelques instants !

Dans ces conditions, il apparaît indispensable de prendre la voie référendaire pour demander aux Français, qui sont les premiers concernés, de trancher les points clés du projet du Gouvernement : en premier lieu, le recul de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans, mais aussi le déport de 65 à 67 ans de l’âge d’obtention d’une pension à taux plein.

Monsieur le ministre, une réforme des retraites est effectivement nécessaire, notamment pour des raisons de financement. Personne ne le réfute, nous ne cessons de le déclarer nous-mêmes, et il faut beaucoup de surdité sélective, ou de mauvaise foi, pour ne pas l’entendre ! En revanche, la réforme que vous nous soumettez est à la fois injuste, brutale, inefficace et inéquitable, comme le soulignent à juste titre toutes les grandes confédérations syndicales de notre pays et comme l’ont rappelé Christiane Demontès au cours de la discussion générale et Jean-Pierre Bel à l’instant même.

Les confédérations syndicales dénoncent par ailleurs une concertation en trompe-l’œil qui, en fait, n’a trompé personne. Nos concitoyens n’étant pas des naïfs. Ils ont bien compris que seul le MEDEF était écouté au plus haut sommet de l’État sur ce dossier des retraites, comme sur bien d’autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Tout d’abord, rappelons que la question des retraites ne peut pas se limiter à ses dimensions comptables. Elle est par essence sociétale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Elle nécessite de plus une véritable négociation avec les représentants du monde du travail, négociation qui, malgré vos dénégations, monsieur le ministre, n’a pas eu lieu. Elle requiert enfin un débat de fond, dans lequel les thèmes de l’emploi et du travail devraient être abordés afin que la retraite par répartition retrouve la confiance de toutes les générations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Que proposez-vous en réponse à cet enjeu majeur pour nos concitoyens ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Premièrement, vous proposez un projet de loi injuste.

Les salariés qui ont commencé à travailler dès leur jeune âge devront cotiser plus longtemps que les autres, sans amélioration de leur pension. Or, 50 % des nouveaux retraités de la Caisse nationale d’assurance vieillesse ont d’ores et déjà cotisé, à 60 ans, au moins un trimestre au-delà d’une carrière complète, sans acquérir pour autant de droits nouveaux. Si le dispositif de départ anticipé pour carrière longue devait être maintenu, cela reviendrait à laisser de côté toutes celles et tous ceux qui ont commencé à travailler à 18 ans et qui devront cotiser 44 ans.

Les salariés qui sont sans emploi au moment où ils partent à la retraite, soit près de six Français sur dix, seront amenés à rester au chômage, en maladie ou en invalidité plus longtemps, avec des allocations bien souvent plus faibles que leurs droits à la retraite.

Les situations de travail pénible ne sont pas reconnues par le projet de loi, qui s’adresse uniquement aux salariés ayant déjà des troubles de santé à l’âge de 60 ans. La réforme est injuste pour les salariés exposés à la pénibilité, qui ont une espérance de vie réduite, en moyenne, de trois à quatre ans par rapport à l’ensemble des salariés. Enfin, en l’état actuel des propositions du Gouvernement, la traçabilité de la pénibilité ne s’appuie pas sur les caisses de retraite et ne permet aucune action de prévention ni de compensation.

M. Roland Courteau fait un signe d’assentiment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Les fonctionnaires subissent une réduction de leur pouvoir d’achat à travers un rattrapage du taux de cotisation salarial, celui-ci passant de 7, 85 % à 10, 55 %, sans compensation et en période de gel des salaires. Et la valeur du point devrait être gelée pendant trois ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Les conditions d’accès au minimum garanti seront plus restrictives, ce qui amputera les droits des fonctionnaires les plus modestes, notamment les femmes.

Les salariés aux carrières incomplètes voient l’âge du départ sans pénalités – les fameuses décotes – reculer de 65 ans à 67 ans entre 2016 et 2021.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Les femmes seront particulièrement concernées et dramatiquement pénalisées, ce qui est inadmissible : près de 30 % d’entre elles partent actuellement à la retraite à 65 ans.

Les bas salaires seront défavorisés, dans le secteur public comme dans le secteur privé. Un complément de pension au titre du minimum contributif est versé à 42 % des nouveaux retraités du secteur privé et à 75 % de ceux qui partent à la retraite à 65 ans. Avec cette réforme, les bas salaires auront donc plus de difficultés à accéder aux mesures qui compensent partiellement la faiblesse de leurs droits à la retraite.

Le projet de loi prévoit la prise en compte des indemnités journalières perçues au titre d’un congé de maternité dans le calcul des pensions des mères de famille. Outre le fait que ces périodes ne sont pas considérées comme un temps de cotisation, ce qui a une incidence sur les départs anticipés pour carrière longue, cette mesure est très insuffisante au regard des écarts de pension entre les femmes et les hommes.

Ceux qui ont cotisé à plusieurs régimes de retraite sont aujourd’hui pénalisés. Le projet de loi évoque à peine la situation de ces polypensionnés, alors qu’ils représentent près de 40 % des nouveaux retraités…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Deuxièmement, monsieur le ministre, vous proposez un projet de loi brutal. Cela a été répété à de nombreuses reprises lors de la discussion générale qui s’est tenue toute la journée d’hier et la nuit dernière.

Le texte combine deux paramètres dans des délais très brefs : d’une part, un recul des bornes d’âge de quatre mois par année civile entre 2011 et 2016 et, d’autre part, une augmentation d’un trimestre, dès 2013, de la durée des cotisations pour une retraite à taux plein, portée à 41, 25 années.

Dans les fonctions publiques, une révision à la baisse du montant des pensions affectera tous les départs anticipés des mères de trois enfants qui déposeront leur dossier à compter du 1er janvier 2011. Alors même que l’emploi des séniors est une priorité, cette décision incitera les femmes fonctionnaires concernées à partir à la retraite le plus rapidement possible.

Troisièmement, monsieur le ministre, vous proposez un projet de loi inefficace.

Celui-ci ne vise que le court terme. J’ai déjà eu, hélas ! l’occasion de le déplorer à cette tribune, voilà quelques semaines, lorsque nous avons examiné le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale. L’équilibre financier à l’horizon de 2018 n’est assuré que par le transfert vers l’assurance chômage et vers l’assurance maladie de charges qui ne sont pas comptabilisées.

Votre réforme des retraites aura ainsi un effet direct sur les comptes de l’assurance chômage à partir de 2015, effet dont le pic culminera entre 440 millions d’euros et 530 millions d’euros en 2018, selon les estimations de l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce, l’UNEDIC.

M. Roland Courteau fait un signe d’assentiment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Rien n’est prévu pour équilibrer le système de retraite au-delà de 2018, bien que vous vous en défendiez par des assertions nullement convaincantes, et les déficits continueront à se creuser, alors même que le recul des bornes d’âge aura produit tout son effet et que le Fonds de réserve pour les retraites aura été liquidé.

Enfin, le texte ne répond pas à la situation de l’emploi, qui conditionne pourtant en grande partie l’avenir des retraites. La création d’une aide à l’embauche des séniors ignore des questions aussi fondamentales que les conditions de travail et les aménagements de fin de carrière.

Quatrièmement, monsieur le ministre, vous proposez un projet de loi inéquitable.

Comme cela a déjà été souligné, ce sont essentiellement les travailleurs salariés qui doivent prendre en charge les conséquences de la crise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Ils fournissent 85 % de l’effort financier, principalement à travers le recul de l’âge légal de départ à la retraite de 60 ans à 62 ans d’ici à l’année 2016. Le recours à la fiscalité, notamment par le biais de la fiscalité sur les contribuables les plus fortunés et de la taxation des revenus des capitaux, reste symbolique et concourt seulement à 15 % des financements.

Le projet est également inéquitable pour les plus jeunes générations, car il dilapide, et c’est déplorable, les ressources du Fonds de réserve pour les retraites afin d’éponger une partie des déficits dus à la crise. Or, ce fonds est destiné à faire face, dès 2020, à l’arrivée à l’âge de départ à la retraite des générations nombreuses du papy-boom. On crée ainsi les conditions d’une augmentation des déficits futurs, qui reposeront alors sur les seules épaules des plus jeunes générations.

Or, il existe d’autres solutions pour résorber les déficits dus à la crise. Les orateurs de mon groupe et moi-même en avons évoqué certaines lors des récentes discussions sur la dette sociale. Nous y reviendrons dans la suite de nos travaux.

Votre choix de siphonner sans délai le Fonds de réserve pour les retraites est en définitive, quoique vous en disiez, monsieur le ministre, un mauvais coup porté aux générations futures, à nos enfants. Plus qu’une erreur, c’est une faute dont vous aurez, ainsi que monsieur le Président de la République, à rendre compte devant nos concitoyens, devant ces générations futures et devant l’Histoire.

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Triste projet en vérité, monsieur le ministre, éloigné de toute perspective de réforme solidaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Où serait le progrès si la « sauvegarde » de notre système de retraite devait se traduire par des inégalités croissantes : plus d’individualisme, davantage d’insécurité et de précarité pour les uns, et toujours plus de privilèges pour les autres ?

Dans ces conditions, la consultation de notre peuple par voie référendaire s’impose !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Que ce mauvais exemple ne vous laisse pas croire à mon indulgence !

La parole est à M. Jean Louis Masson.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Madame le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tous les pays membres de l’Union européenne ont été obligés de prendre des mesures sérieuses afin d’équilibrer leur régime de retraites. Si la France détenait une recette miracle pour maintenir la retraite à 60 ans, cela se saurait.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Les miracles, c’est pour la droite ! Nous, nous n’avons que des solutions !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

S’il existait une martingale, nos voisins allemands, luxembourgeois, hollandais ou suédois, qui ne sont pas plus bêtes que nous, l’auraient probablement découverte.

Si l’on veut assurer l’avenir de notre système de retraites, il nous faut prendre un certain nombre de mesures, dont le relèvement de l’âge de départ à la retraite.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Pas la peine de prendre la parole si c’est pour tenir de tels propos !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Je suis favorable au relèvement de l’âge légal de départ à la retraite de 60 ans à 62 ans. Et il est probable que ceux qui occuperont notre place dans une quinzaine d’années seront amenés à revenir sur ce seuil, du fait de l’allongement constant de la durée de la vie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Cela dit, monsieur le ministre, la réforme que vous nous proposez m’inspire deux observations.

La première concerne le relèvement de 65 ans à 67 ans de l’âge auquel il est possible de bénéficier d’une retraite dite complète.

Lorsqu’une personne part à la retraite après vingt ans d’activité, sa pension est calculée au prorata de ses vingt annuités. Dès lors, il n’y a aucune raison de la taxer une nouvelle fois en exigeant qu’elle cotise plus longtemps. Lui demander de travailler jusqu’à 65 ans – et demain 67 ans – est une forme d’injustice puisque, en définitive, elle percevra non pas une retraite à taux plein, mais une retraite proportionnelle à ses vingt années de travail. Ce système me semble donc receler une injustice de nature mathématique. Je m’en suis ouvert au rapporteur du projet à l’Assemblée nationale, qui est par ailleurs un parlementaire de la Moselle. Je comprends d’autant moins cet acharnement à relever l’âge de la retraite prétendument complète de 65 ans à 67 ans que cette disposition affectera surtout les personnes les plus modestes.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Mais pas du tout !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

C’est inadmissible, monsieur le ministre. Ceux qui vont trinquer, ce seront les personnes en situation difficile, par exemple les caissières d’hypermarchés qui travaillent souvent à mi-temps, ce qui ne leur assure déjà qu’une toute petite retraite. En portant l’âge de la retraite à taux plein à 67 ans, vous allez créer des cohortes de personnes qui percevront des allocations du minimum vieillesse, à défaut de toucher une retraite.

Il me paraît indécent de relever à 67 ans l’âge ouvrant droit à la perception d’une retraite que je qualifierai de retraite proportionnelle sans abattement, car il ne s’agit pas d’une retraite à taux plein, j’insiste sur ce point, monsieur le ministre. Prétendre le contraire relève de l’hypocrisie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

M. Jean Louis Masson. Monsieur le ministre, lorsque l’on traverse une situation difficile, comme c’est le cas actuellement, tout le monde doit faire des efforts. Il est donc légitime de relever à 62 ans l’âge de départ à la retraite. En revanche, il me paraît là encore indécent que le Président de la République s’accroche à certaines réformes disproportionnées, comme il le fait par exemple avec le bouclier fiscal.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC-SPG et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Un gouvernement responsable ne peut pas demander des efforts aux salariés et aux plus pauvres de nos concitoyens et ne rien exiger des « super-riches », dont certains, je le rappelle, font la une de l’actualité.

En conclusion, j’approuve le fond de la réforme, qui consiste…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

…à porter l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans. En revanche, je ne saurais cautionner la politique actuelle du Gouvernement, une politique à deux vitesses au profit des plus riches, particulièrement des bénéficiaires du bouclier fiscal. C’est, je le répète, indécent !

En conséquence, je m’abstiendrai lors de la mise aux voix de la motion référendaire.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

M. Robert Tropeano. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous savons aujourd'hui qu’une très grande majorité de Français n’approuvent pas ce projet de réforme des retraites. Non pas qu’ils désapprouvent l’idée même d’une réforme, mais parce qu’ils ont bien compris, et ce malgré une large campagne de communication financée par des fonds publics

M. Jean-Louis Carrère applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

Aujourd’hui, monsieur le ministre, et c’est l’objet de la motion qui vient de nous être présentée par Jean-Pierre Bel, le moment est venu pour vous et pour votre majorité d’entendre les Français.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

De les entendre et enfin de les considérer. Le président du Sénat n’a-t-il pas déclaré récemment sur cette question : « Qu’on le veuille ou non, il y a des interrogations dans le pays, il faut y répondre ! » Voilà des propos plein de sagesse qu’il serait bon de mettre en pratique. Alors, quelle réponse adresser aux Français ?

Dans un premier temps, il faut, je le répète, les entendre et les écouter. C’est une nécessité, car toute réforme des retraites qui ne recevrait pas leur approbation serait vouée à l’échec.

Dans un second temps, il nous faut bâtir, ensemble, une autre réforme, recommencer à zéro et prendre tout le temps nécessaire pour négocier véritablement avec les partenaires sociaux et les forces politiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

La réforme doit se construire collectivement et chacune des sensibilités politiques et syndicales de ce pays doit pouvoir apporter sa pierre à l’édifice.

C’est de cette façon, et uniquement de cette façon, que pourra être trouvé le consensus indispensable à la réussite d’une telle réforme, mais qui fait aujourd’hui cruellement défaut. Or, sur le plan de la méthode, vous avez, si je puis dire, fait le minimum syndical : vous avez tout juste pris le temps de recevoir les partenaires sociaux, de mesurer la température ambiante et de faire quelques photos.

En juin 2010, deux mois seulement après la fin de ce que vous avez habilement appelé « les négociations avec les partenaires sociaux » – mais qui étaient davantage de simples « consultations » –, vous déposiez sur le bureau de l’Assemblée nationale un projet de loi portant réforme des retraites.

Deux mois, c’est bien peu pour préparer une réforme de cette ampleur, qui touche au patrimoine commun de tous les Français, à savoir le système des retraites par répartition. Ce système, construit après-guerre, est au cœur de notre modèle social, et fait encore notre fierté.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

À cela, s’ajoute le fait que vous avez, une fois de plus, engagé la procédure accélérée, empêchant ainsi que le débat parlementaire puisse prendre tout le temps nécessaire. Pourquoi, monsieur le ministre, vouloir traiter ce dossier en urgence et dans la précipitation ? Comment s’étonner dès lors du caractère bâclé de ce texte ?

Après les services publics, après La Poste, après les collectivités territoriales, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

… vous vous attaquez au système par répartition pour le démanteler et lui substituer des modèles risqués et inadaptés, des modèles reposant sur un système financier en crise. Vous croyez moderniser quand vous êtes à rebours de l’histoire en ne tenant pas compte des leçons de la très grave crise financière mondiale dans laquelle nous nous trouvons.

Alors, monsieur le ministre, devant un tel enjeu, et parce que la retraite est un droit fondamental auquel les Français sont profondément attachés, pourquoi autant d’empressement ? Pourquoi priver les Français d’un droit d’expression sur un enjeu de société aussi important ?

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

C’est l’objet de cette motion référendaire que, pour ma part, je voterai, convaincu que l’ensemble des citoyens de notre pays doivent pouvoir se prononcer sur l’objet même du projet de loi et dire si, oui ou non, ils l’approuvent. Ne doutant ni de leur bon sens ni de leur réponse négative, je suis certain que les Français vous obligeront alors à revoir votre copie et à produire un nouveau texte nécessairement plus juste, plus ambitieux et plus respectueux des valeurs de notre République.

Mes chers collègues, puisque l’article 11 de la Constitution prévoit la possibilité de soumettre au référendum tout projet de loi portant sur des réformes relatives à la politique sociale de la nation, ce qui est le cas avec ce texte, il ne faut pas s’en priver.

Le Président de la République avait promis qu’il ne toucherait pas à la retraite à 60 ans, cela a été rappelé par plusieurs orateurs, notamment par Jean-Pierre Bel tout à l’heure. C'est la raison pour laquelle, faute d’avoir reçu le mandat du peuple français lors de son élection au suffrage universel pour le faire, et parce que cette réforme, véritable enjeu majeur de société, aura des conséquences pour l’ensemble de nos concitoyens, il m’apparaît que c’est aux Français de se prononcer sur cette réforme.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

Ensuite, il reviendra aux représentants du peuple que nous sommes de construire un autre projet, de proposer une voie alternative, au-delà des clivages politiques et dans la recherche sincère du consensus le plus large possible. Il est temps d’entrer dans une démocratie sociale et politique apaisée et responsable.

Aujourd’hui, 71 % des Français rejettent massivement la réforme telle que vous l’envisagez. Lors des manifestations qui ont eu lieu, près de trois millions de salariés sont descendus dans la rue…

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Tropeano

… pour manifester leur opposition à la réforme qui nous est proposée.

Les Français, les classes moyennes et les plus modestes d’entre eux, sont inquiets quant à l’avenir de leur retraite. Leur contestation est légitime, car le projet de loi pose de nombreux problèmes, comme l’ont souligné plusieurs orateurs hier et cette nuit, notamment mes collègues du RDSE, Jean-Pierre Plancade et Françoise Laborde.

Monsieur le ministre, vous prétendez rétablir l’équilibre financier de notre régime de retraite. C’est faux, car le compte n’y est pas. En outre, votre réforme se fera aux prix de nouveaux sacrifices que supporteront encore une fois les plus Français les plus modestes et les classes moyennes.

Tout d’abord, vous pénalisez les personnes qui ont commencé à travailler très tôt et qui devront cotiser plus longtemps que les autres. Pourtant, ces personnes connaissent souvent des conditions de travail très pénibles et ont une espérance de vie inférieure à la moyenne. Certes, vous proposez un dispositif leur permettant de partir un peu plus tôt, mais cela leur impose malgré tout une durée de cotisation très importante, … beaucoup trop importante !

Cette question soulève un autre problème : celui de l’emploi des seniors. En France, le taux d’emploi de la tranche des 55-64 ans n’atteint que 40 % alors que l’Union européenne avait fixé un objectif de 50 % pour 2010. En repoussant l’âge de départ à la retraite, vous risquez d’augmenter chômage et précarité et, par conséquent, de diminuer le niveau des pensions. En effet, près de 70 % des Français qui liquident leur retraite aujourd’hui sont sans emploi.

Vous pénalisez les femmes, qui ont souvent des carrières incomplètes. Actuellement, les retraites des femmes sont inférieures de 38 % à celles des hommes et plus de la moitié d’entre elles perçoivent une pension de moins de 900 euros, ce qui est inacceptable ! Cette disparité reflète parfaitement les inégalités professionnelles qui se cumulent tout au long de la carrière entre les hommes et les femmes : inégalité de salaires, inégalité d’accès à des postes de responsabilités, précarité et temps partiel subi.

Certes, vous proposez de prendre en compte les indemnités journalières de maternité dans le salaire annuel qui sert au calcul du droit à pension, mais cette mesure ne sera applicable qu’aux indemnités versées à compter du 1er janvier 2012.

Par ailleurs, je doute que cette mesure permette de compenser le retard que l’on constate en matière d’égalité entre les femmes et les hommes. En revanche, il est à craindre qu’en reculant l’âge légal de la retraite et l’âge d’annulation de la décote, vous condamniez ces femmes à une plus grande précarité : elles sont actuellement plus nombreuses à liquider leurs droits à la retraite à 65 ans, faute de n’avoir pu rassembler le nombre de trimestres nécessaires pour toucher une retraite à taux plein. Mais dans la mesure où le taux d’emploi des femmes de plus de 60 ans est très faible ; elles sont nombreuses, avant 65 ans, à connaître une situation de chômage ou de précarité.

Vous pénalisez également les salariés qui exercent un métier pénible et dont l’espérance de vie est, de facto, réduite. Sur cette question, je ne peux que regretter que les négociations sur la pénibilité n’aient pas avancé. De ce point de vue, les mesures que vous préconisez sont très nettement insuffisantes et surtout injustes, puisque vous confondez pénibilité et incapacité.

Le Président de la République, au lendemain de la manifestation du 7 septembre dernier, s’est dit attentif aux préoccupations qui s’étaient exprimées. Ce énième effet d’annonce n’a malheureusement pas rassuré les Français sur l’avenir de leur retraite, car il ne règle en rien les problèmes de fond.

Pour engager une telle réforme, un grand débat de société, public, aurait été nécessaire, mais vous l’avez refusé. Le recours au référendum demandé par la présente motion est probablement l’ultime possibilité pour permettre la tenue de ce grand débat, à travers tout le pays, afin d’associer tous les Français à la construction d’une nouvelle réforme des retraites.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, parce que la réforme que vous proposez concerne les retraites de tous les Français, sans exclusive, elle doit être la réforme des Français. Elle doit se faire avec eux et non contre eux, voire sans eux. C’est pourquoi je voterai la motion référendaire.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Monsieur le ministre, vous voulez rester sourd à la revendication sociale qui monte dans le pays contre votre réforme. Vous venez d’en faire une démonstration assez caricaturale dans votre troisième discours.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Depuis un mois, vous n’avez de cesse de tenter de minimiser les journées d’action et de manifestation organisées par les confédérations syndicales et largement suivies par les salariés et les citoyens, qui les approuvent à 70 %, la même proportion d’entre eux étant hostile à votre réforme des retraites.

Certes, vous n’en êtes pas à votre coup d’essai. Déjà, à l’occasion du changement de statut de La Poste, antichambre de sa privatisation, de la privatisation de GDF ou du bouclier fiscal, vous avez ignoré la contestation populaire. Même vos échecs électoraux ne semblent pas vous émouvoir.

Nous l’avons bien compris. Vous avez une mission : mettre en œuvre le programme des marchés financiers

Protestations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … c’est-à-dire la casse systématique du pacte social issu de la Résistance qui unit notre communauté nationale.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Et pour ce faire, le Président de la République, le Gouvernement et vous-même vous employez à diviser notre peuple, à faire peur, à stigmatiser des catégories sociales, à faire des étrangers des boucs émissaires, à substituer l’ordre public à la question sociale.

Jusqu’ici, vous vous êtes appuyé sur le programme du candidat Nicolas Sarkozy en 2007, validé par le suffrage universel lors de son élection. Il est vrai que le candidat Sarkozy n’avait caché ni ses objectifs ultralibéraux ni ses affinités avec les habitués du Fouquet’s.

Murmures sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

C’est la vérité, vous ne pouvez pas le contester !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il avait dit aussi qu’il était le candidat du pouvoir d’achat, de la revalorisation du travail. Cela, vous n’en parlez guère, tant les résultats sont loin des objectifs affichés et les discours oubliés !

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Ils vont chercher la croissance avec les dents !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mais revenons aux retraites.

L’argument du programme présidentiel n’est plus de mise aujourd’hui – vous ne l’avez d'ailleurs pas évoqué – puisque Nicolas Sarkozy déclarait à la presse en janvier 2007 : « le droit à la retraite à 60 ans doit demeurer, de même que les 35 heures continueront d’être la durée hebdomadaire du temps de travail ».

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Pourtant, en cette même année 2007, Laurence Parisot dévoilait son programme dans le petit bréviaire du MEDEF, Besoin d’air, que d’autres orateurs ont évoqué. Je vous en recommande la lecture, mes chers collègues, car on y trouve tout le programme du Gouvernement. Mme Parisot considérait que l’abaissement de l’âge de la retraite de 65 ans à 60 ans en 1982 avait constitué une « erreur historique ». De toute évidence, Mme Parisot semble ne pas connaître le suffrage universel !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Le Président, alors, faisait mine de résister : « Elle a droit de dire cela, mais moi je dis que je ne le ferai pas pour un certain nombre de raisons. La première, c’est que je n’en ai pas parlé pendant ma campagne présidentielle. Ce n’est pas un engagement que j’ai pris devant les Français et je n’ai pas mandat pour faire cela. Et cela compte, vous savez, pour moi. » Je crois comprendre qu’il parlait là du mandat du peuple.

À l’évidence, vous avez bien du mal à vous réclamer du programme présidentiel ou d’un quelconque mandat du peuple !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Exactement !

En fait, vous ne pouvez vous réclamer que d’un seul mandat : celui du MEDEF.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

D’ailleurs, Mme Parisot s’est récemment targuée, sur son blog me semble-t-il, d’avoir, avec son livre, imposé le débat économique dans la campagne présidentielle et d’être à l’origine de « décisions économiques majeures prises par le Gouvernement ».

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il s’agit de la réduction de l’impôt de solidarité sur la fortune pour investissement dans une PME, du renforcement du crédit d’impôt-recherche, de la réforme de la taxe professionnelle ou encore, j’ajoute cette mesure, car elle figurait dans le livre de Mme Parisot, de la suppression de la clause de compétence générale des collectivités territoriales, que le Gouvernement veut absolument faire voter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Et les parlementaires de la majorité avalent tout !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, vous êtes donc, à l’évidence, en phase totale avec le MEDEF !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Le peuple est donc fondé à vous demander des comptes.

Quels arguments avancez-vous pour justifier aujourd’hui cette réforme qui ne figurait pas dans le programme quinquennal du Président de la République ?

Vous invoquez l’évolution démographique ? Elle était connue bien avant 2007, et vous affirmiez même, en 2003, en avoir maîtrisé les conséquences jusqu’en 2018 ou 2020 !

Votre argument choc, c’est la crise : il n’y a plus d’argent ! Parlons-en et soyons précis. La crise, c’est celle du capitalisme financier, c’est le résultat de la folie spéculative, de la déconnexion entre la finance et l’économie réelle, qui a mis le monde au bord du gouffre.

En 2009, vous avez volé au secours des incendiaires – les banques, les financiers, les actionnaires –, en leur ouvrant un crédit de 360 milliards d’euros sans contrepartie.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Dans le même temps, le Président de la République, qui n’est jamais avare de paroles, se faisait fort de « moraliser le capitalisme » dans le monde.

En France, les résultats ont été rapides : les banques se portent à merveille. Ainsi, le bénéfice de BNP-Paribas en 2009 a bondi de 93 % et les entreprises du CAC 40 ont dégagé près de 50 milliards d’euros de profits. Quant aux jetons de présence des membres des conseils d’administration de ces entreprises, ils ont connu une progression de 18 % en 2009.

Ne vient-on pas d’apprendre que le directeur général de Carrefour – grand employeur de « femmes précaires », travaillant à temps partiel avec des salaires de misère aujourd'hui et des retraites honteuses demain – va partir, après trois ans de bons et loyaux services aux actionnaires, avec une retraite de 500 000 euros par an ?

Huées sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Pour financer les 45 milliards d’euros de votre plan pour les retraites, vous prévoyez de ne prélever que 2 milliards d’euros sur les revenus du capital ! Croyez-vous que nos concitoyens sont à ce point aveugles et sourds ? Ne serait-il pas juste – un terme que vous affectionnez et que vous avez utilisé à plusieurs reprises – de leur demander leur avis sur votre réforme ? D’autant que, contrairement à ce que vous soutenez, il existe des projets alternatifs, mais ils procèdent, à l’évidence, de conceptions et de modes de financement différents de ceux que vous prônez.

Pour notre part, nous considérons que la retraite à 60 ans est un droit et un acquis d’années de luttes démocratiques pour une vie meilleure !

Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – Mmes et MM. les membres du groupe CRC-SPG scandent : « La retraite à 60 ans ! » en martelant leur pupitre.

Sourires sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

La retraite à 60 ans, c’est le droit de partir en bonne santé ! Je vous rappelle que l’espérance de vie en bonne santé d’un ouvrier est de 69 ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

L’emploi est un enjeu majeur, mais vous n’en parlez jamais ! La création de 100 000 emplois rapporterait 1, 5 milliard d’euros de recettes aux régimes de protection sociale.

L’emploi doit être la priorité pour les jeunes dont le taux de chômage et de précarité est aujourd’hui insupportable. À la différence de l’Allemagne et de l’Espagne, il y a en France un renouvellement des générations. Et il est insupportable de voir que nos jeunes sont au chômage ! Voilà la réalité !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nous proposons trois voies pour financer la retraite à 60 ans à taux plein : d’abord, faire cotiser les revenus du capital au même taux que les salaires, ce qui ne serait pas un luxe ; ensuite, moduler les cotisations patronales en fonction de l’emploi, car, jusqu’à présent, les exonérations que vous avez décidées n’ont guère incité les entreprises à créer des emplois ; enfin, supprimer les exonérations de cotisations patronales, qui sont inefficaces en termes de créations d’emploi.

D’autres propositions ont été faites, en premier lieu par les organisations syndicales. Mais force est de constater qu’il n’est plus question du dialogue social, dont le Président de la République se voulait le champion. Encore un oubli des promesses de Nicolas Sarkozy !

Certes, vous avez rencontré les organisations syndicales. Mais, comme elles étaient unanimement opposées à votre projet, vous n’avez ouvert aucune négociation !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Aujourd’hui, les organisations syndicales, soutenues par la grande majorité de nos concitoyens, continuent, avec détermination et toujours dans l’union, à vous demander de véritables négociations avec, pour objectif, une réforme des retraites juste et efficace. Négocier, c’est prendre en considération les propositions qui émanent des partenaires sociaux.

Monsieur le ministre, l’interruption brutale du débat à l’Assemblée nationale et l’engagement de la procédure accélérée, conjugués à votre fébrilité ne sont pas de bonnes réponses ! On vous croirait engagé dans une partie de poker menteur. Vous parlez de possibles améliorations du texte, sans préciser lesquelles. Auriez-vous peur que leur faiblesse n’accroisse encore le mécontentement ? Ou croyez-vous, au contraire, décourager la future mobilisation du 12 octobre en les annonçant la veille ?

Je crains que vous n’ayez mal compris les organisations syndicales, les salariés et la grande majorité du peuple. Votre réforme n’est pas la bonne. Il faut retirer ce projet, ouvrir une véritable négociation qui prenne en compte des propositions alternatives faites principalement par les représentants des salariés. Voilà pourquoi nous vous demandons, monsieur le ministre, et à travers vous au Président de la République, de consulter le peuple lui-même. Un ministre ne peut ignorer que, même si le référendum prévu par la révision constitutionnelle de 2008 n’est pas encore applicable, car vous ne voulez pas le faire appliquer…

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Depuis quand l’avez-vous votée ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

… le Président de la République, avec l’actuel article 11 de la Constitution – je n’en rappellerai pas les termes, car je suis persuadée que vous les connaissez – peut consulter le peuple sur un sujet qui touche aux questions économiques et sociales concernant l’ensemble du pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

D’autant que c’est dans l’esprit de la réforme !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il faut demander au peuple s’il veut de votre réforme. S’il répond par la négative, vous serez dans l’obligation, vous et votre Gouvernement, d’ouvrir une véritable négociation avec les partenaires sociaux sur un projet alternatif.

C’est la raison pour laquelle, après nos collègues socialistes, j’invite le Sénat à voter la motion référendaire qui nous est soumise.

Mmes et MM. les sénateurs du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste se lèvent et applaudissent longuement.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne souscrivons pas à la plupart des motifs invoqués pour soutenir la présente motion référendaire, et encore moins à ses conclusions.

On nous explique que la réforme des retraites serait engagée sans mandat du peuple, sous prétexte que le Président de la République se serait engagé à maintenir l’âge d’ouverture des droits de départ à la retraite à 60 ans. Quel drôle d’argument !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. Chers collègues de l’opposition, en démocratie parlementaire, la première règle est de s’écouter.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP. –Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Hier, vous avez joué au foulard ; aujourd'hui, vous jouez au loup. Il vous reste la marelle et les billes ! Arrêtez donc !

Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

En démocratie parlementaire, il n’y a pas de mandat impératif. Le mandat donné par le peuple est celui qu’il a voulu donner à l’actuelle majorité, laquelle, contrairement à d’autres, prend aujourd’hui ses responsabilités en s’efforçant de sauver la retraite par répartition.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Le peuple français est aujourd’hui en position de trancher par le biais de sa représentation nationale !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. Quant à l’opinion publique, elle n’est pas si hostile à la réforme que vous voulez bien le dire.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. Chacun a bien conscience qu’il est devenu nécessaire d’agir. Le déplacement de la borne d’âge d’ouverture des droits, la principale mesure du texte, n’a rien de choquant. Elle est en phase avec les mesures adoptées par nos partenaires européens et avec l’accroissement de l’espérance de vie.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. Chers collègues de l’opposition, si vous ne voulez pas nuire à votre espérance de vie, ne vous énervez pas !

Rires sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Je vous entends crier depuis le début de l’après-midi, alors que moi, je n’ai pas encore pris la parole !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. Vous réclamez le pouvoir pour le peuple, et vous empêchez ses représentants de s’exprimer !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Les auteurs de la motion critiquent aussi le mode de financement de la réforme. Ils dénoncent le fait qu’elle ferait porter la quasi-totalité du financement par les assurés eux-mêmes : « 85% des efforts sont exigés des salariés, et seulement 15% des revenus du capital. »

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. C’est la logique même de notre système de retraite par répartition !

Marques appuyées de désapprobation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Il existe une toute petite part de financement par l’impôt, liée aux mesures de solidarité, mais, par nature, la retraite est assurantielle ! Elle est liée au travail. Si vous n’êtes plus favorables à la répartition, mes chers collègues, il faut le dire !

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. Mais je ne crois pas que tel soit le cas !

Marques de désapprobation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Vous, vous êtes spécial !

Quant aux projets alternatifs, vous avez raison, il en existe, et d’ailleurs, nous en portons un. Si, à court terme, des mesures paramétriques d’urgence telles que celles qui nous sont proposées s’imposent, nous considérons en revanche que nous ne ferons pas à moyen terme l’économie d’une réforme structurelle consistant à remplacer l’annuité par le point ou les comptes notionnels. Il nous faut, dès maintenant, ouvrir l’horizon d’une telle réforme.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Enfin, selon les auteurs de la motion, le projet gouvernemental serait insuffisamment débattu et concerté. Cela soulève la seule véritable question qui devrait se poser ici : comment débattre au mieux d’une réforme des retraites ?

Pour les auteurs de la motion, la procédure référendaire serait l’outil idéal. Or, le référendum est un mode de consultation très spécifique dont les limites sont bien connues : on répond à celui qui pose la question, et rarement à la question.

En l’occurrence, nous avons affaire à une réforme hautement technique. Mais, admettons que nous votions cette motion et que les retraites soient réformées par référendum. Comment rédigerez-vous la question ?

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Ce sera moins difficile que pour la Constitution européenne !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

« Êtes-vous favorables à un relèvement de l’âge d’ouverture des droits à 62 ans ? » Ce serait un peu réducteur. Ou bien : « Êtes-vous favorables à ce que les retraites soient réformées ? » Au contraire, ce serait un peu large. La question est bien compliquée à formuler. À l’évidence, un débat référendaire ne permettrait pas d’explorer comme il se doit les arcanes techniques d’une telle réforme.

En réalité, ce n’est ni par référendum ni dans la rue qu’il convient de réformer les retraites, mais ici même, au Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About. C’est d’ailleurs ce qui justifie votre propre existence.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Pour des parlementaires, demander un référendum sur une telle question pourrait même s’apparenter à une démission.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. –Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Il revient au Parlement de débattre de toutes ces questions et c’est pourquoi, mes chers collègues, le groupe de l’Union centriste ne votera pas la motion référendaire.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Longuet.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais assurer le service minimum, car cette motion est absolument contraire à notre engagement de parlementaires élus au suffrage universel direct ou par les grands électeurs.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

C’est bien parce que nous sommes convaincus de l’utilité du Parlement que nous ne pouvons accepter cette motion.

Je me tourne vers nos collègues socialistes et communistes pour leur dire qu’ils ont été malavisés en déposant cette motion référendaire. Je n’évoquerai pas en cet instant Le coup d’État permanent ou les mânes de François Mitterrand, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. … qui a condamné à bien des reprises le recours au référendum. Je rappellerai simplement que, en décembre 1981, lorsque M. Pierre Mauroy, alors Premier ministre, a présenté son projet de loi d’orientation autorisant le Gouvernement à prendre, par ordonnances, diverses mesures d’ordre social, notamment celle qui fixait à 60 ans l’âge légal de départ à la retraite, il n’a organisé aucun débat, pas même au Parlement.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

C’était le mandat du Président de la République !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Il n’a fait le contraire de ce qu’il avait dit, lui !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. Or, cette disposition était contraire à nos convictions.

Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. Je me tourne vers l’autre côté de l’hémicycle. Les quatre raisons avancées par nos collègues socialistes et communistes pour défendre l’idée d’un recours au référendum sont autant de justifications de la nécessité absolue du travail parlementaire.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Pour ces raisons, sans abuser de votre temps, je vous demande, mes chers collègues, de repousser la motion référendaire.

Vifs applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais m’efforcer d’apaiser ce débat agité, mais je ne sais pas si je vais y parvenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Non, c’est M. Longuet qui s’est énervé, ce qui doit d’ailleurs le gêner !

Monsieur le ministre, vous avez déclaré que Mme Martine Aubry avait ponctionné le Fonds de réserve pour les retraites pour financer les 35 heures. Vous comprendrez que cela appelle une réaction de ma part.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

M. Claude Domeizel. Monsieur le ministre, vous avez menti !

Eh oui ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste

C’est une habitude !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

D’ici à la fin de la discussion de ce projet de loi, j’espère vous en apporter la preuve en consultant les comptes du Fonds de solidarité vieillesse où était consigné, j’insiste sur ce terme, le Fonds de réserve pour les retraites.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Je peux m’expliquer !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

M. Claude Domeizel. Depuis sa création, le FFR a surtout été alimenté durant la période où Lionel Jospin était Premier ministre.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Depuis, on n’y verse que le strict minimum. Il en résulte que, aujourd’hui, le Fonds s’élève à seulement 38 milliards d’euros, alors que l’on escomptait 150 milliards d’euros en 2020.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Cette situation vous conduit à un raisonnement surprenant. Vous considérez que dans la mesure où l’on n’atteindra pas les 150 milliards d’euros prévus en 2020, contrairement aux engagements qui avaient été pris, on peut utiliser ce fonds dès maintenant. Ce raisonnement est pour le moins spécieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Pourquoi prendre une telle décision alors que la loi Fillon, du nom de notre Premier ministre, avait aplani tous les problèmes jusqu’en 2020 ? Aujourd’hui, vous admettez que tel n’est pas le cas et vous anticipez l’utilisation du Fonds de réserve pour les retraites. Mais la bosse démographique de 2020 ne va pas disparaître pour autant.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

M. Claude Domeizel. Comment allez-vous gérer cette situation catastrophique ? Ou plutôt, « comment allons-nous faire ? », car, j’espère bien que vous ne serez plus là en 2020 !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

M. Claude Domeizel. En utilisant dès maintenant le Fonds de réserve pour les retraites, vous brûlez les meubles pour vous chauffer !

Voilà ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

En fait, monsieur le ministre, la précipitation qui a présidé à l’élaboration de ce projet de loi place les assurés sociaux dans l’impossibilité de choisir en toute connaissance de cause. Prenons l’exemple du minimum garanti. Certaines personnes, qui ont décidé de partir en pensant disposer de conditions acceptables, vont, contre toute attente, voir leur pension baisser de 300 euros par mois, ce qui est considérable !

Et que dire de la suppression du dispositif de départ anticipé pour les mères de trois enfants ayant quinze années d’activité. Je ne reviens pas sur les raisons qui vous amènent à prendre cette décision. Mais avouez qu’il était déraisonnable d’annoncer, au mois de mai ou au mois de juin, que cette disposition prendrait effet dès le 13 juillet, alors que le projet de loi n’est même pas voté. Imaginez l’affolement que vous avez créé chez les fonctionnaires. J’en veux pour preuve le nombre de demandes de renseignements que les directions des ressources humaines des hôpitaux et des caisses de retraite, particulièrement la CNRACL, ont eu à traiter. Les assurés sociaux se sont précipités. Des départs importants pourraient désorganiser certains services. C’est surtout vrai dans les hôpitaux, puisque les infirmières risquent de partir en masse afin de bénéficier d’une pension à jouissance immédiate.

Monsieur le ministre, vous me répondrez sans doute que l’article 1er A dispose que « la nation réaffirme solennellement le choix de la retraite par répartition au cœur du pacte social qui unit les générations ». Certes, mais tout le reste du texte réalise exactement le contraire.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Je ne dis pas que le système par répartition va disparaître, mais je constate que vous êtes en train de l’affaiblir.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Dès lors, ceux qui le pourront se tourneront vers le système assurantiel.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Il suffit pour s’en convaincre de regarder la publicité de la Fédération française des sociétés d’assurance qui fleurit depuis quelque temps. À qui ce message s’adresse-t-il ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

À ceux qui en auront les moyens.

En rabotant le système par répartition, vous nous faites passer d’un système universel, qui fonctionnait à la satisfaction de tous, à un système sélectif.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

M. Claude Domeizel. C’est inadmissible ! Pour toutes ces raisons, nous voterons contre le projet de loi. Comme je l’ai indiqué hier, mais je tiens à le répéter en cet instant : les grandes conquêtes sociales ont été réalisées pas la gauche, et toutes les régressions par la droite !

Applaudissements prolongés sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Vives protestations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi portant réforme des retraites constitue une question de société majeure, puisqu’il touche au pacte républicain. Ce constat et le débat qui vient de se dérouler renforcent ma conviction que seul le peuple souverain doit trancher.

En prônant le recours au référendum, les élus peuvent en effet se mettre en porte-à-faux. Toutefois, et c’est le plus important, la démocratie est toujours renforcée lorsqu’elle sollicite le peuple. Tel est le sens de cette motion référendaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

M. Claude Jeannerot. Mes chers collègues, pourquoi avez-vous peur du peuple ?

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Le recours au référendum trouve sa justification autour de quatre arguments.

Le premier tient aux conditions mêmes d’émergence du projet que nous examinons. Comme l’a rappelé mon collègue et ami Jean-Pierre Bel, le Président de la République s’était engagé, pendant sa campagne, à ne pas modifier l’âge légal de départ à la retraite. Après son élection, il confirmait cette volonté, faute, disait-il, d’avoir reçu un mandat du peuple pour le faire.

Aujourd’hui, vous soutenez que, « entre temps, les conditions ont changé ! Il y a eu la crise ». Soit ! Mais convenez au moins, cher Nicolas About, que seul le peuple peut délier le Président de la République de cette parole donnée.

Le deuxième argument est porté par le peuple lui-même. À trois reprises au cours des derniers jours, près de 3 millions de nos concitoyens ont clairement exprimé leur opposition à votre projet de loi. Certes, ils connaissent la situation de notre pays et ils savent qu’une vraie réforme est nécessaire. Ils comprennent que l’allongement de l’espérance de vie au cours des dernières années modifie les conditions de l’équilibre du système des retraites. Néanmoins, ils pressentent que l’effort sera supporté par les plus fragiles, par ceux qui, précisément, bénéficieront le moins de ces dispositions. Et ils ne manquent pas d’arguments à vous opposer, arguments que nous n’avons de cesse de développer depuis hier.

Bref, ce projet, nous l’avons dit à plusieurs reprises, est perçu comme injuste et inefficace. Ne sous-estimez pas cette opposition qui s’inscrit sur un fond d’inquiétude généralisée : inquiétude pour l’avenir de la jeunesse – un jeune sur quatre est sans emploi –, inquiétude aussi pour l’avenir de notre économie.

Nos concitoyens savent que la pérennité du système de retraite passe par une politique de l’emploi active et dynamique. Or ils constatent chaque jour l’augmentation inexorable du chômage. Pour cette seule raison, comment peuvent-ils croire que vous parviendrez, sans les appauvrir davantage, à restaurer l’équilibre financier des régimes de retraites ? C’est pourquoi toutes les générations sont présentes dans la rue, nous avons pu le constater hier encore devant le Sénat.

Des personnes retraitées, qui ne sont pourtant pas directement impliquées par votre projet de réforme, sont venues intercéder pour leurs enfants. Mes chers collègues, entendez la voix de ces hommes et de ces femmes !

Ils savent que cette réforme s’est engagée sans aucune concertation réelle avec leurs représentants. Certes, vous l’avez dit, il y a eu des rencontres formelles ; mais, depuis le début du processus, le Gouvernement ne cesse de leur répéter : « On discute avec vous, mais il n’y a qu’une seule voie possible, celle que nous avons définie… »

À cette carence manifeste de dialogue social s’ajoute, et c’est mon troisième argument, un véritable déni démocratique. Non seulement la volonté des citoyens est niée, mais l’expression de leurs représentants – que vous semblez vouloir défendre, chers collègues de la majorité, en contrant cette procédure référendaire – est également bafouée.

En témoignent les discussions marathon qui se sont déroulées à l’Assemblée nationale ! Comment comprendre le recours à la procédure accélérée, par ailleurs de plus en plus systématique, sur un tel sujet de société ? N’était-il pas impératif, sur cette question plus que sur toute autre, de laisser les débats se développer avec la sérénité et la durée nécessaires ? Au contraire, vous semblez vouloir en finir au plus vite sur ce sujet. Les conditions de ce débat, comprenez-le, ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. C’est pourquoi il faut maintenant redonner la parole aux citoyens.

Au-delà de ces raisons – qui seraient en elles-mêmes suffisantes – un autre motif plus décisif encore appelle le recours au référendum : nous voulons pouvoir offrir à nos concitoyens un véritable choix.

Vous proposez un réaménagement comptable. Nous, nous pensons, avec nos concitoyens, qu’une véritable réforme est nécessaire, mais nous pensons aussi, avec eux, qu’il n’y a pas de fatalité à leur proposer des changements injustes et inefficaces.

Non, il n’y a pas qu’une seule solution : la vôtre ! Par le recours au référendum, nous voulons tout simplement créer les conditions du débat et permettre à nos concitoyens de choisir entre plusieurs voies : celle que nous proposons permet de préserver un système de retraite juste et pérenne. Nous ne sommes pas là, mes chers collègues, simplement pour nous opposer : nous avons la volonté de construire un système de retraite tout à la fois pérenne et juste pour tous. Au service de cette volonté, nous avons un projet. Alors, acceptez de regarder notre ambition et de confronter nos projets respectifs !

Dans le temps qu’il me reste, je ne prendrai que quelques exemples.

Pour assurer votre pseudo-réforme, vous proposez de faire peser 90 % des besoins de financement sur les salariés et les retraités ; les hauts revenus sont épargnés et vous ne sollicitez les revenus du capital et du patrimoine qu’à la marge. Non, monsieur About, cette réforme n’est pas gravée dans le marbre ! Nous vous proposons pour notre part de faire contribuer les revenus du capital à hauteur de 19 milliards d’euros en 2010 et de 25 milliards d’euros à partir de 2025.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Jeannerot

Vous voulez aussi capter les ressources du Fonds de réserve pour les retraites. Mes collègues ont amplement traité cette question, je n’y reviens donc pas. Sachez que nous refusons cette politique à courte vue.

Pour faciliter l’emploi des seniors, vous vous contentez de renforcer le tutorat. Nous, nous voulons aller plus loin en accompagnant vraiment les salariés : un rendez-vous destiné à envisager l’évolution de la situation des salariés de plus de quarante-cinq ans devrait être mis en place.

Je n’évoquerai pas la pénibilité puisque j’ai presque épuisé mon temps de parole.

Oui, mes chers collègues, nos projets sont incompatibles ; ils ne sont construits ni sur les mêmes critères ni sur les mêmes valeurs : c’est pourquoi nous sollicitons aujourd’hui l’arbitrage de nos concitoyens !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à plusieurs reprises, dans cette enceinte, a été évoquée la promesse électorale du candidat Nicolas Sarkozy, qui déclarait, en janvier 2007, qu’il ne toucherait pas à l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans.

Devenu Président de la République, il avait même réaffirmé devant Mme Parisot, montrant que pour quelques semaines encore il tenait son engagement, qu’il n’y toucherait pas. Le respect du mandat, « cela compte pour moi », avait-il déclaré.

Cette déclaration pose deux questions. La première n’a pas encore été évoquée dans cet hémicycle. Bien entendu, il n’y a pas de mandat impératif. Un président de la République peut s’engager solennellement sur un sujet et, au vu d’une situation inédite, imprévue, être amené à prendre d’autres décisions. En France, on n’avait jamais parlé du trou des retraites. Le Président de la République, soudain contraint de trouver de l’argent, s’est alors dit que le report de l’âge légal de départ à la retraite pouvait être la solution.

On peut entendre de tels changements, même s’ils sont quelque peu surprenants. Mais alors, pourquoi avez-vous donné un tel ton au débat depuis plusieurs mois ? Si même M. Nicolas Sarkozy, soutenu par M. Woerth et par l’UMP, pensait qu’on ne pouvait pas toucher à l’âge légal de départ à la retraite, c’est que son maintien n’est pas une hérésie, une folie socialiste qui ferait couler la nation et la retraite par répartition, c’est que l’idée pouvait être mise sur la table et qu’il existe d’autres solutions.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Je le souligne, parce que les commentateurs se sont parfois laissés prendre par le matraquage : oui, il existe d’autres solutions, bien que vous affirmiez, contrariant ainsi une idée qui a été défendue par l’actuel Président de la République, que l’on ne peut que de jouer sur l’âge légal ! Vous soutenez que le mandat n’est pas impératif. Même si l’on vous prenait au mot, vous devriez vous expliquer sur ce sujet.

Que s’est-il donc passé ? Pourquoi ne pas avoir cherché d’autres sources de financements ? Vous ne l’avez pas fait, parce que vous êtes prisonniers de ceux pour qui vous voulez aujourd'hui gouverner contre vents et marées, contre la majorité des Français, à savoir ceux qui détiennent le capital, …

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

… ceux qui appartiennent à vos cercles de financement ! Dès lors, vous perdez tout réalisme. Vous êtes contraints, si vous n’allez pas chercher une contribution du côté du capital, de la trouver du côté des salariés et des retraités.

Et M. Woerth ose nous dire, du haut de cette tribune, que les Français savent qu’il faut faire un effort ! Les Français savent, bien sûr, qu’un effort est nécessaire. La plupart d’entre eux savent, depuis qu’ils sont nés, que pour gagner leur vie, joindre les deux bouts, il faut faire des efforts.

Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Et c’est vrai aujourd’hui encore plus qu’hier ! Et on vient leur dire qu’ils doivent faire un effort supplémentaire pour les retraites, alors que les bonus et les stock-options continuent d’être distribués, que les banques sont réapprovisionnées sur l’argent du contribuable sans contrepartie ! Pour les Français, c’est scandaleux et révoltant !

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Je tiens à rappeler que, sur les 14 millions de retraités que compte notre pays, quatre millions vivent avec moins de 900 euros par mois, seuil de pauvreté retenu par l’Union européenne. Ces Français, ils ne font pas d’efforts ?

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Dans la tranche supérieure, située à peine en dessous de 1 100 euros, on compte encore quelques millions de retraités. Ces Français, ils ne font pas d’efforts ?

Par ailleurs, en relevant l’âge de départ à la retraite, le niveau des pensions, déjà très bas, va automatiquement baisser.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Nous pouvons en faire la démonstration économique.

J’en viens à la seconde question que soulève la déclaration de Nicolas Sarkozy.

Certes, il n’y a pas de mandat impératif. Mais lorsque le Président de la République, après avoir pris, devant les Français, l’engagement de ne pas toucher à l’âge légal de départ à la retraite, revient sur sa position, ce qui devient impératif, c’est d’instaurer un dialogue social, d’écouter ceux qui expriment leur désaccord. Lorsque François Mitterrand est devenu Président de la République, trois mois après son élection, il a fait voter à l’Assemblée nationale des dispositions concrétisant les engagements qu’il avait pris durant sa campagne.

Heureusement, nous avons des responsables syndicaux comme on en trouve peu dans le monde. Ils ont fait preuve d’un grand sens des responsabilités, malgré l’ampleur de l’attaque qu’ils subissaient. Ils ont su garder leur sang-froid jusqu’à la limite de ce qu’il est possible de supporter pour un syndicaliste lorsqu’il est attaqué sur un point fondamental de notre pacte social. MM. Chérèque et Thibault disent eux-mêmes qu’il n’y a jamais eu de négociation, ni même de réelle concertation.

Le Gouvernement a déposé son texte au début de l’été, pendant les vacances ; on pouvait s’attendre à ce qu’il laisse le Parlement s’exprimer. Or, à l’Assemblée nationale, le débat a été écourté. Il est donc de la responsabilité du Sénat de sauver la parole démocratique, la confiance du peuple envers sa représentation nationale. Comme l’a souligné Jean-Pierre Bel, c’est au Sénat…

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

… que revient l’honneur de relever ce défi.

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’UMP, essayez d’être à la hauteur de l’honneur qui nous est fait dans cet hémicycle.

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

M. Bruno Sido. Votre temps de parole est épuisé !

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Je conclus, mes chers collègues !

Les journalistes ne sont pas les seuls à s’interroger sur la radicalisation du mouvement, sur la tension sociale. Je le dis ici avec solennité : la façon de gouverner de Nicolas Sarkozy n’est plus viable pour notre pays. Lorsque l’on pousse les gens à bout, lorsqu’on les méprise à ce point, on prend la responsabilité de provoquer un conflit social majeur et de casser la paix sociale !

Afin d’éviter d’en arriver là, il faut voter la motion référendaire et rejeter la réforme des retraites proposée par le Gouvernement !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Nous passons à la discussion de l’article unique de la motion référendaire.

En application de l'article 11 de la Constitution et des articles 67 et suivants du règlement, le Sénat propose au Président de la République de soumettre au référendum le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites (734, 2009-2010).

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Avant de mettre aux voix cet article, je donne la parole à M. Jean-Louis Carrère, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Monsieur le ministre, il est illogique de contester l’appel au référendum lorsque l’on est membre d’un gouvernement qui a tenté de promouvoir cette procédure ; il est pitoyable de le faire en s’abritant derrière le refus d’une partie des élus de voter cette procédure référendaire.

Dans une démocratie, il y a de l’espace pour une majorité et pour une minorité.

Nous ne contestons pas le fait que ce texte a été promu par une majorité. Nous vous demandons simplement de le mettre en œuvre pour que nous puissions l’appliquer.

Mais il y a la lettre, et il y a l’esprit. Vous nous dites qu’il n’est pas possible de l’appliquer, qu’il est encore prématuré d’y avoir recours et que, dans ces conditions, on ne peut soumettre ce texte à référendum.

Mes chers collègues, c’est faire fi de l’esprit de la révision constitutionnelle. Même si nous n’y étions pas favorables, nous sommes bien obligés aujourd'hui d’en tenir compte. C’est dans l’esprit de cette révision votée par la majorité que nous vous demandons d’adopter cette motion référendaire.

Dans sa brève intervention, en passager un peu fugace, le président du groupe UMP, Gérard Longuet, nous a dit tout à l’heure que voter cette motion, c’était nier le pouvoir des parlementaires, c’était démissionner. J’ignore quelle est votre origine politique, cher collègue, mais il me semble que certains des membres de votre groupe viennent du gaullisme. Or la procédure référendaire était l’un des éléments fondateurs de la consultation populaire. Je suis donc très étonné des arguments que vous avancez. Je les considère spécieux, pour ne pas dire un petit peu douteux !

Pour le reste, monsieur le ministre, il y a plus sérieux encore ! La réforme des retraites que vous avez engagée touche au pacte social. À l’heure où elle est contestée avec force par l’opinion publique de notre pays, et ce jusque dans vos rangs, il me semble qu’il est tout à fait possible et envisageable de consulter le peuple.

Certes, la question sera complexe à formuler, mais cela ne doit pas constituer un obstacle. Une commission qui prendrait le temps de la réflexion serait sans aucun doute en mesure d’élaborer une question et de la proposer au Président de la République.

Tous ces arguments étant balayés, un peu de quiétude ! Bien sûr, nous ne demandons pas à parvenir à une réforme aboutie par voie référendaire. Non ! Nous souhaitons simplement savoir si le peuple considère que le Gouvernement s’est conduit comme il attendait qu’il se conduise pour mener à bien cette réforme. Si la réponse est « non », il faudra reprendre les travaux à zéro. Voilà ce que nous vous demandons !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Dans son intervention, le président Bel a critiqué votre réforme, monsieur le ministre, et fait des propositions. Et il vous l’a dit : les propositions du parti socialiste sont cohérentes et financées. En retour, monsieur le ministre, vous ne nous avez opposé que cynisme, caricatures et mensonges. Vous n’avez tenu compte de rien !

Alors, ce débat sert-il ? En tout cas, il ne sert pas la démocratie ! En effet, nous n’assistons pas dans cet hémicycle à un débat serein : ce que nous voyons, c’est un Gouvernement aux abois et des parlementaires qui essaient de faire avancer leurs propositions sans obtenir aucune réponse.

Vous nous dites, monsieur le ministre, que nous sommes contre la réforme. Non, nous sommes pour !

M. le ministre s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Monsieur le ministre, si nous demandons aux Français par référendum : « Voulez-vous que les impôts augmentent ? », ils répondront : « Non ! » En revanche, si nous leur demandons : « Voulez-vous une réforme des retraites juste et équitable ? », ils répondront : « Oui ! »

Rires et exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

On ne voit pas pourquoi ils répondraient autre chose !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Si nous leur demandons : « Voulez-vous conserver la retraite à soixante ans ? », ils répondront : « Oui ! » Si nous leur demandons : « Voulez-vous que les revenus du capital contribuent à financer les retraites, et pas uniquement les revenus du salariat ? », là encore ils répondront : « Oui ! »

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Voilà ce que nous souhaitons leur demander.

Oui, nous voulons une réforme des retraites, mais, non, monsieur le ministre, nous ne voulons pas de la vôtre ! Nous n’en voulons pas tout simplement parce que vous culpabilisez les citoyens, parce que vous culpabilisez les salariés, parce que vous culpabilisez celles et ceux qui ont le moins, celles et ceux qui souffrent, celles et ceux qui ont des métiers pénibles, celles et ceux qui arrivent à soixante ans cassés, fourbus.

La réforme de la retraite que vous nous présentez est injuste socialement et inefficace économiquement.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Elle n’est pas financée sur la durée. Vous savez très bien qui aura à en souffrir.

Vous ne souhaitez pas discuter, monsieur le ministre. Vous avez dit au président Bel que nous manquons de courage, que nous ne voulons rien faire, que nous ne voulons pas que la représentation nationale soit qualifiée. Or, c’est vous, monsieur le ministre, qui êtes en train de disqualifier la représentation nationale en refusant de discuter avec l’opposition. La représentation nationale est là pour porter la voix des citoyens, de ceux qui l’ont élue.

Aujourd'hui, plus de 70 % de nos concitoyens trouvent que votre réforme est injuste. Vous ne discutez pas avec eux, vous ne discutez pas avec les syndicats, vous ne discutez pas avec le Parlement. Après l’échec du « travailler plus pour gagner plus », vous nous proposez aujourd'hui de « travailler plus longtemps pour gagner moins qu’avant ». La voilà la réalité de ce que vous nous proposez aujourd'hui !

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que notre pays n’arrive pas à intégrer ses jeunes, que 25 % des moins de vingt-cinq ans sont au chômage, de même que plus de 400 000 seniors, vous pouvez retourner le problème dans tous les sens, les mesures que vous nous proposez ne régleront pas ces problèmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Monsieur le ministre, vous qualifiez cette réforme d’avancée, nous considérons, comme l’a très bien dit Christiane Demontès tout à l’heure, qu’elle va conduire à un recul social, recul que nous cherchons à empêcher.

Lorsque le peuple est dans la rue, lorsque les parlementaires veulent débattre, monsieur le ministre, il faut leur donner la parole. Avec cette motion référendaire, nous voulons tout simplement permettre à nos concitoyens de prendre la parole afin qu’ils disent clairement ce qu’ils veulent. Tel est le sens de cette motion.

Le groupe socialiste regrette vraiment que les propositions constructives, efficaces et cohérentes que le président Bel a présentées tout à l’heure aient été foulées au pied. Nous déplorons que l’on nous ait opposé les mêmes litanies que celles que nous entendons depuis des semaines.

Finalement, c’est clair, nous n’avons pas la même conception de la vie politique et de la démocratie que vous, monsieur le ministre. Nous voulons nous appuyer sur les corps intermédiaires, sur les syndicats, sur la société, discuter avec tout le monde. Vous voulez discuter entre vous. C’est bien regrettable !

J’espère que cette motion référendaire sera adoptée afin que le peuple puisse donner son avis. Si, comme nous le pensons, comme nous le craignons, tel n’est pas le cas, il y aura d’autres rendez-vous.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, il ne faut jamais gouverner contre le peuple. S’il ne faut certes pas verser dans le populisme, il faut aussi éviter l’autisme.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à situation exceptionnelle, solution exceptionnelle ! Force est de constater que c’est à la fois le Gouvernement et ceux qui le soutiennent qui sont responsables des conditions – elles ont été rappelées à l’instant – qui nous ont conduits à réclamer une procédure référendaire : une parodie de débat, un débat tronqué à l’Assemblée nationale, un Président de la République qui tourne le dos à ses propres engagements et, enfin, un Gouvernement et une majorité qui refusent d’écouter et de comprendre ce que disent les millions de salariés, jeunes et moins jeunes, qui s’expriment dans la rue et qui sont déterminés à être entendus.

Alors que l’article 1er A entend graver dans le marbre le principe de la retraite par répartition pour les générations futures, ce principe est puissamment bafoué dans le reste du texte. Il faut donc lever cette ambigüité.

La question qui se pose est simple : une société aboutie comme la nôtre a-t-elle les moyens, à l’aube du XXIe siècle, de mettre en œuvre un système de retraite basé sur les fondamentaux inscrits dans le pacte républicain issu de 1945, tout en l’adaptant, bien sûr, aux nouvelles conditions économiques et sociétales ? En ce qui nous concerne, nous avons la prétention de penser que c’est possible. Nous aurons d’ailleurs l’occasion, au cours de ce débat, comme l’ont fait tout à l’heure Jean-Pierre Bel et d’autres, de démontrer la faisabilité des mesures que nous avons l’honneur de revendiquer.

Nous avons l’impression qu’un blocage a lieu ici aussi : chaque fois que nous essayons de faire progresser le débat, le Gouvernement, répondant en cela aux injonctions du Président de la République, tente de l’accélérer, de l’empêcher. Ce faisant, jour après jour, heure après heure, on s’aperçoit que le Gouvernement tourne le dos aux ambitions qu’il affiche pourtant dans son texte.

Comme vient de le déclarer excellemment mon collègue Didier Guillaume, en cas de blocage, il ne faut pas avoir peur de faire appel au peuple pour sortir par le haut. Il sera très facile de formuler une question qui permette au peuple d’être enfin écouté et, nous l’espérons, entendu.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

Lors de chacune des journées de mobilisation organisées par l’intersyndicale depuis la rentrée, près de 3 millions de personnes ont manifesté contre le projet du Gouvernement sur les retraites. Il y a un rejet massif de votre politique, monsieur le ministre, toutes les enquêtes d’opinion le prouvent. Ce sont les jeunes en particulier – pour 80 % d’entre eux – qui s’opposent à votre projet de loi. Vous avez pourtant déclaré, monsieur le ministre : « Je veux dire aux jeunes de vingt ans que c’est justement pour eux que nous faisons cette réforme ».

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

On peut dire des choses justes !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

Votre propagande grossière a échoué, et le peuple s’est retourné contre vous !

Le mouvement se durcit, les appels à la grève reconductible se multiplient, en particulier dans les secteurs des transports et de la pétrochimie. Et, contrairement à ce que peut dire l’UMP, notamment Jean-François Copé, il s’agit là d’une attitude responsable. La retraite à soixante ans relève de l’intérêt général. Voilà pourquoi nous vous ferons plier !

Pour répondre à M. Longuet, je précise que les syndicalistes n’ont pas demandé le débat parlementaire qui a lieu actuellement. Ils ont demandé aux parlementaires de les entendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

En effet, rien ne justifie de reculer l’âge légal du droit à la retraite à soixante-deux ans. Rien ne justifie non plus de porter l’âge de la retraite à taux plein à soixante-sept ans et d’allonger une nouvelle fois la durée de cotisation.

La France est plus riche que jamais. Si moins de personnes travaillent proportionnellement au nombre de retraités, elles produisent plus de richesses. Tout le problème est que celles-ci sont accumulées par quelques privilégiés, de façon indécente, comme en témoigne l’affaire Bettencourt.

Le Gouvernement veut faire payer deux fois par les salariés l’allongement de la durée de vie : d’abord en reculant l’âge du départ à la retraite, qui entraînera une baisse des pensions, laquelle fait le lit de la capitalisation ; ensuite en rendant obligatoire l’assurance-dépendance. Dans les deux cas, les grands gagnants seront les sociétés privées d’assurance.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

Il y a d’autres moyens de financer les retraites, y compris en revenant sur les lois Balladur-Fillon, comme le démontre la proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale par les députés du Front de Gauche.

Sarkozy n’a aucune légitimité pour imposer ce recul ! C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cette motion référendaire.

La retraite à soixante ans, ce sont les Français qui l’ont voulue. Ils ont voté pour elle. Elle figurait dans le programme de l’Union de la Gauche quand les électeurs ont donné la majorité à cette dernière en 1981, après neuf ans de débats acharnés avec la droite sur ce sujet.

Après l’adoption de la retraite à soixante ans, jamais la droite n’a osé proposer devant les électeurs de la remettre en cause. Et surtout pas le candidat Sarkozy ! Lors de la dernière présidentielle, il affirmait sans ambigüité dans son programme : « Le droit à la retraite à 60 ans doit demeurer ». Alors qu’on lui demandait s’il reviendrait sur ce droit, il déclarait le 27 mai 2008 sur RTL : « J’ai dit que je ne le ferai pas […]. Je n’en ai pas parlé pendant ma campagne présidentielle. Ce n’est pas un engagement que j’ai pris devant les Français. Je n’ai donc pas de mandat pour faire cela. Et ça compte, vous savez, pour moi. » On ne peut mieux dire...

En passant en force, le Gouvernement contraint les salariés à de coûteux jours de grève. Malgré une mobilisation massive contre le texte, il refuse pourtant de le retirer, arguant que ce n’est pas à la rue de décider.

Alors chiche ! Donnons la parole au peuple ! En démocratie, seul le vote du peuple peut défaire ce que le vote du peuple a fait. Il appartient donc aux Français de décider s’ils veulent ou non de la réforme injuste que leur propose le Gouvernement.

Un référendum constituerait une issue démocratique et pacifique au conflit actuel sur les retraites. Il suffirait pour cela que Nicolas Sarkozy accepte d’y soumettre son projet.

En démocratie, le vote devrait être la règle, et non pas l’exception mendiée. D’ailleurs, si la dernière modification de la Constitution était passée en loi organique, nous pourrions proposer une pétition pour un référendum d’initiative populaire. Ce droit est prévu par l’article 11 de la Constitution, modifié par la réforme du 23 juillet 2008.

Il permet de soumettre un projet de loi à référendum si un cinquième des parlementaires, soutenu par un dixième des électeurs inscrits, le demandent. Par conséquent, si un référendum n’est pas organisé, c’est bien parce que nous sommes sous le régime du coup de force permanent, qui prévaut depuis la forfaiture initiale de l’escamotage du « non » au référendum de 2005.

Apparemment, vous n’avez pas le courage de vous en remettre à notre souverain, le peuple. Pis encore, vous le méprisez. Hier, nous entendions M. About comparer le projet à une potion amère que des enfants seraient contents d’avoir bu lorsqu’ils seraient guéris…

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

C’est la France qui doit absorber la potion !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

Non, monsieur About, des millions de manifestants, ce ne sont pas des enfants. Non, monsieur About, le peuple qui aujourd’hui s’oppose à votre politique est clairement conscient de l’injustice de cette politique.

Pour nous, élus de la République, ce mépris du peuple souverain est une faute impardonnable : si vous refusez la mise en place d’un référendum, c’est la rue qui vous châtiera.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – M. Robert Tropeano applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Je souhaiterais simplement faire quelques remarques.

Oui, messieurs les ministres, chers collègues, j’ai voté la retraite à 60 ans, et je suis fier de l’avoir fait car elle répondait – et elle répond toujours – à une exigence de justice sociale. Si vous la remettez en cause aujourd’hui, ce n’est pas seulement pour des raisons de financement. Non ! C’est aussi par idéologie. Reconnaissez-le : chaque fois que la gauche a été à l’origine d’une conquête sociale, il vous a fallu la remettre en cause ou tenter de le faire, par un moyen ou par un autre. C’est donc une revanche sociale que vous cherchez aujourd’hui à prendre !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Par ailleurs, vous n’avez pas le droit de vous asseoir sur les engagements pris par le candidat Sarkozy à l’élection présidentielle, lequel avait annoncé qu’il ne reviendrait pas sur la retraite à 60 ans… ou alors, c’est que de telles promesses n’étaient en fait que de simples slogans publicitaires.

Certains nous invitent à faire preuve de courage, mais de quel courage s’agit-il ? Est-ce du courage que de demander à des personnes ayant commencé à travailler à 18, 19 ou 20 ans de continuer à le faire bien au-delà de 60 ans ? Est-ce du courage que de demander à des hommes et des femmes usés ou brisés par une vie de travail de continuer à le faire alors que leur espérance de vie est déjà des plus réduites ?

Je vais vous dire ce que serait faire preuve de courage en la matière : ce serait de mettre vraiment à contribution le capital, ce que vous ne faites pas.

Approbations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Monsieur le ministre, l’âge légal actuel du départ à la retraite constitue le bouclier social des citoyens les plus modestes. Il est le bouclier social de celles et de ceux qui ont travaillé jeunes, de celles et de ceux qui ont été brisés par une vie de labeur. Quand donc comprendrez-vous que des ouvriers et des employés qui, leur vie durant, ont travaillé dur préfèrent aujourd’hui partir à la retraite à 60 ans, serait-ce avec une décote ?

Et vous voulez les faire travailler deux ans de plus ! Mais combien de temps leur restera-t-il à vivre en bonne santé, ou même à vivre tout court ? La réforme que vous proposez est en réalité tournée tout entière contre le peuple, et vous voulez nous faire croire que c’est pour le peuple que vous l’avez conçue !

La réforme des retraites fait partie des problèmes majeurs qui, dans ce pays, nécessitent un vrai consensus. Les grands principes inscrits dans la Constitution et plus particulièrement notre modèle social – l’État-providence, la Sécurité sociale – commandent que des enjeux comme celui des régimes de retraite fassent l’objet d’un consensus national, car nos régimes de retraite sont au cœur de notre modèle collectif.

Pour aboutir à un consensus national sur la réforme, au cœur de la méthode, il eût fallu la négociation, la vraie négociation, laquelle n’a rien à voir avec la simple consultation et le simulacre de discussion que vous avez mis en œuvre. Vous n’avez pas cherché à réaliser le pacte social qui aurait bénéficié du soutien le plus large des Français, par-delà leurs opinions. Vous avez préféré le scénario du bras de fer et le passage en force, quitte à dresser une France contre une autre.

Face à un tel enjeu, nous avions besoin, pour les décennies suivantes, d’un gouvernement rassembleur. Au lieu de quoi, nous n’avons que le plus grand commun diviseur ! Quelle est donc cette gouvernance, qui consiste en permanence à dresser une partie de la France contre une autre ?

Clairement, massivement et à plusieurs reprises, les mouvements sociaux ont indiqué au Gouvernement que sa réforme était inacceptable. Que demandent-ils, sinon l’ouverture de vraies négociations ? Mais vous préférez, et le Président de la République en tête, nier l’ampleur de la mobilisation. Il est vrai que ce ne sont pas des habitués du Fouquet’s qui défilent dans la rue !

Bref, contrairement à ce que la majorité prétend, l’alternative n’est pas entre cette réforme et le chaos, mais entre une réforme injuste et inefficace, d’une part, et une autre réforme possible, juste, équilibrée et durable, d’autre part : celle que nous proposons, celle qu’a présentée Jean-Pierre Bel. C’est pourquoi nous soutenons et voterons cette motion référendaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce projet de loi est très révélateur d’une méthode de Gouvernement dont il est facile de distinguer les trois phases.

La première phase, c’est ce qu’on appelle la surdramatisation. Évidemment, les faits démographiques sont incontestables… Mais leurs conséquences sont connues et identifiées depuis longtemps ! Ils ne justifiaient donc aucunement une procédure d’urgence pour ce projet de loi. Au contraire, c’est de la crise économique qu’il aurait fallu traiter en priorité ! Au lieu de considérer celles et ceux qui en portent la responsabilité, au lieu de considérer celles et ceux qui sont les plus favorisés de notre société, le Gouvernement a visé les salariés les plus humbles, pourtant déjà victimes de la récession. En s’attaquant à leur retraite, il leur a imposé la double peine. La retraite est un droit acquis et non un avantage social !

La deuxième phase, c’est celle du clivage, devenu spécialité du Président de la République, clivage entre le public et le privé, clivage entre les générations ou encore entre les groupes sociaux.

Enfin, la troisième phase réside dans le projet lui-même, qui multiplie les écrans de fumée. Deux d’entre eux retiennent particulièrement l’attention : le pillage du FRR, déjà plusieurs fois évoqué, et la prolongation de la CADES, que même les députés de la majorité ont récemment refusée !

Il en résulte un projet pris en otage par le MEDEF – nous l’avons déjà longuement exposé –, par les marchés financiers, par les agences de notation, et enfin par les amis du Président de la République.

Cette situation exige manifestement que soit aujourd’hui demandé l’avis de l’ensemble des citoyens de notre pays. §

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, la réforme des retraites est un enjeu majeur pour chacun d’entre nous, pour chaque Française, pour chaque Français. Elle aura des conséquences directes sur nos modes de vie et sur l’avenir de notre pays.

Certes, comme l’ont très bien expliqué Jean-Pierre Bel et les intervenants de notre groupe, une réforme s’impose. Cependant, celle que vous nous proposez va à l’encontre de toute solidarité nationale et des valeurs que nous, femmes et hommes de gauche, nous portons.

Parce qu’elle aura des conséquences à long terme, cette réforme doit relever d’un vrai choix de société et non pas, comme on y assiste aujourd’hui au Sénat ou hier à l’Assemblée nationale, d’une course contre la montre. Elle doit évidemment prendre en compte l’allongement de la durée de vie, mais également les mutations actuelles du monde du travail, en particulier l’éclatement des carrières et des parcours professionnels.

Pour une réforme juste et durable, le niveau des retraites doit être garanti et tous les revenus doivent être mis à contribution. Malgré les fortes mobilisations de ces dernières semaines, le Gouvernement reste inflexible. J’ai même entendu un collègue parler ici de « tohu-bohu » : voilà qui est méprisant pour le peuple ! Voilà pourquoi nous nous opposons fermement à cette réforme, voilà pourquoi nous ne battrons pas en retraite et nous voterons la motion référendaire, car il ne faut pas avoir peur du peuple.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis le début de ces débats, vous répétez à l’envi que la question des retraites est essentielle, importante et incontournable. Vous nous le dites et vous nous le redirez, tout à l’heure et dans les jours qui viennent !

Pourtant, comment ne pas faire le constat paradoxal que vous voulez confisquer ce débat prétendument fondamental, et adopter votre réforme dans le dos du peuple ? Oui, monsieur le ministre, votre réforme se fait dans le dos des Français ! Lorsque vous n’écoutez pas ce que vous disent les organisations syndicales, vous vous moquez du peuple ! Et lorsque vous n’écoutez pas ce que vous dit la rue, vous vous moquez du peuple !

J’ajouterai que, lorsque vous entrez dans cet hémicycle en déclarant que vous ne reviendrez pas, dans le cadre du débat parlementaire, sur le passage de l’âge légal de départ en retraite de 60 ans à 62 ans, sur le passage de l’âge du départ à taux plein de 65 ans à 67 ans, vous vous moquez également du Parlement. Tout à l'heure, avec M. Longuet vous nous avez dit que nous, sénateurs, devrions nous réjouir d’avoir cette responsabilité de participer à la réforme des retraites.

M. le ministre s’entretient avec Mme la présidente de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Monsieur le ministre, vous voyez, vous ne prenez même pas la peine de m’écouter en ce moment. C’est bien la preuve que vous vous moquez de ceux qui s’expriment dans cet hémicycle !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Ne vous énervez pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Vous en avez tout à l’heure appelé au respect du Parlement. Si vous le respectiez vous-même, vous ne nous auriez jamais imposé une procédure accélérée, c'est-à-dire une forme de démocratie expédiée ! Vous auriez donné à l’Assemblée nationale et au Sénat le temps de débattre !

Différentes façons de consulter le peuple existent.

Le référendum est la première d’entre elles. Comment ne pas s’étonner de votre ignorance constitutionnelle, lorsque vous prétendez nous donner une leçon et nous dites qu’il n’est pas possible d’y recourir ? Que faites-vous de l’article 11 ?

Cet article prévoit qu’un référendum peut être organisé sur toute question économique ou sociale. Il a permis de consulter le peuple sur des sujets extrêmement complexes, tels que l’adhésion de la Grande-Bretagne à l’Europe, le Traité européen ou encore le statut de la Nouvelle-Calédonie.

Mais il y a une autre manière de consulter le peuple : c’est l’élection présidentielle !

Exclamations ironiques sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Or, quand le Président de la République déclare lui-même qu’il ne va pas porter devant le corps électoral une réforme sur une question aussi essentielle, de nature à marquer solennellement son mandat, on a envie de lui dire, comme à vous d’’ailleurs, chers collègues de la majorité : « Ayez le courage d’inscrire ces propositions dans votre programme pour l’élection présidentielle ! Ayez le courage d’affronter le peuple à ce moment-là ! »

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Robert Tropeano applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme nombre d’entre vous, je suis moi-même un élu local. Et, en tant que maire, je suis quotidiennement au contact de mes concitoyens.

Or, depuis mon élection au Sénat voilà deux ans, je n’ai été que très rarement interpellé sur la plupart des sujets dont notre Haute Assemblée a été saisie. Mais nombreux sont ceux qui sont venus me voir sur la question dont nous débattons aujourd'hui afin de me faire part de leur inquiétude pour eux-mêmes, pour les membres de leur famille, pour l’avenir.

Lorsque je me suis rendu dans les manifestations organisées par les syndicats, …

Sourires sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

… j’y ai rencontré beaucoup de personnes peu habituées à s’y rendre. Peut-être même était-ce une première pour nombre d’entre elles.

Monsieur le ministre, vous auriez tout intérêt à mesurer la portée d’un tel mouvement de fond et à entendre le message que les citoyens vous adressent, ainsi qu’à la majorité, à l’ensemble du Gouvernement et au Président de la République lui-même ! Ce qu’ils veulent vous exprimer, c’est leur inquiétude légitime et, au-delà, le profond sentiment d’injustice qu’ils éprouvent à l’encontre non pas du principe d’une réforme des retraites, mais des solutions que vous prétendez leur imposer !

Ceux qui vous interpellent sont nos concitoyens les plus exposés, les moins protégés ! Ce sont ceux qui ont commencé à travailler dès leur jeune âge ou qui – c’est le cas de nombreuses femmes – ont des carrières incomplètes !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Et vous avez fait quoi pour eux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

C’est cela le courage dont vous parliez, monsieur le ministre ? Faire des plus pauvres les premiers contributeurs de votre réforme ?

Ce que nous vous demandons, c’est que la parole leur soit donnée, qu’ils puissent s’exprimer sur vos propositions ! Le vrai courage, monsieur le ministre, serait de reconnaître le mouvement social et son ampleur ! Il serait de respecter vos concitoyens et, par conséquent, d’interroger la nation !

C’est la conviction du groupe socialiste, et c’est aussi la mienne.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Robert Tropeano applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Monsieur le ministre, sachez que la présente motion référendaire est une chance pour vous ! En consultant nos concitoyens par référendum, vous pourrez connaître leur état d’esprit et leur sentiment sur la réforme que vous leur proposez.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Et cette fois il n’y aurait pas deux chiffres, celui de la police et celui des autres !

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Les manifestations des jours derniers ne vous ont pas éclairé sur la détermination et l’inquiétude de nos concitoyens. Vous ne voyez dans ces mobilisations que stagnation ou recul, alors que les personnes qui descendent dans la rue pour exprimer leur refus d’une telle réforme sont de plus en plus nombreuses !

Dès lors, puisque vous refusez d’entendre les critiques, puisque vous les traitez avec mépris

Exclamations sur les travées de l ’ UMP

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Car, compte tenu de leur parcours professionnel – faut-il rappeler leur combat pour l’égalité réelle dans la société d’aujourd'hui ? –, les femmes seront doublement pénalisées par une telle réforme !

Monsieur le ministre, la présente motion référendaire vous donne l’occasion d’entendre ce que les femmes ont à vous dire sur leur réalité actuelle, sur leur avenir… Il ne faut pas avoir peur de leur donner la parole. Saisissez-vous de cette chance, offrez-leur la possibilité de s’exprimer et écoutez ce qu’elles vous diront !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Robert Tropeano applaudit également

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voterons évidemment la présente motion ; notre collègue Nicole Borvo Cohen-Seat a clairement expliqué pourquoi.

Toutefois, je souhaite également rappeler un élément de fond. Les gouvernements qui se sont succédé depuis 2007 n’ont eu de cesse de démanteler les acquis sociaux. Ce que d’aucuns appellent le « détricotage » du code du travail…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

… a des conséquences terribles sur les conditions de vie des salariés.

Et là, on continue à s’attaquer au code du travail ou à la protection sociale ! Je pourrais ainsi évoquer la privatisation rampante de l’assurance maladie ou les conditions de travail de plus en plus difficiles des salariés !

Et voilà aujourd'hui une loi de régression sociale comme nous n’en avons jamais connu ! Une loi injuste socialement et inefficace économiquement !

La droite affirme la main sur le cœur vouloir réduire les inégalités salariales ! Parlons-en, des inégalités salariales ! Aujourd’hui, le salaire des femmes est, en moyenne, inférieur de 20 % à celui des hommes. Avec votre réforme, les écarts de pensions de retraite entre les femmes et les hommes seront de 40 % !

En fait, ce qui intéresse M. Sarkozy et, avec lui, la droite la plus dure, c’est la remise en cause de la retraite à 60 ans ! Le Président de la République a donné à sa majorité la mission d’accrocher la retraite à 60 ans pour tous à son tableau de chasse ! C’est cela la vérité !

Mais ne nous méprenons pas ! Le mécontentement s’amplifie chaque jour, et les mobilisations du 12 octobre en seront une illustration très importante.

Nous le voyons bien, il est absolument indispensable de rejeter cette réforme, qui est une loi de régression sociale pour les Françaises et les Français ! Ce sont les humbles, les plus pauvres, les habitants des quartiers populaires qui en feront les frais !

Certains ont même eu le cynisme d’affirmer qu’il était normal de prendre aux plus pauvres puisqu’ils sont les plus nombreux ! Ainsi, on exonère les revenus du capital et on fait payer les salariés, les retraités, les personnes modestes ou en situation de précarité…

C'est la raison pour laquelle il est absolument nécessaire d’approuver la présente motion référendaire. §

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix la motion n° 4, tendant à proposer au Président de la République de soumettre au référendum le projet de loi portant réforme des retraites.

Je rappelle que, en application de l’article 68 du règlement du Sénat, l’adoption par le Sénat d’une motion concluant au référendum suspend, si elle est commencée, la discussion du projet de loi.

Je rappelle également que la commission et le Gouvernement ont émis un avis défavorable.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Voici le résultat du scrutin n° 5 :

Nombre de votants327Nombre de suffrages exprimés326Majorité absolue des suffrages exprimés164Pour l’adoption141Contre 185Le Sénat n'a pas adopté.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Je rappelle qu’il a été procédé à l’affichage de la liste des candidats aux fonctions de membres de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l’évaluation interne.

Le délai fixé par le règlement est expiré.

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, la liste est ratifiée et je proclame membres de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l’évaluation interne MM. Joël Bourdin, Claude Domeizel, Thierry Foucaud, Jean-Pierre Fourcade, Yann Gaillard, Adrien Gouteyron, Jean-Jacques Jégou, Gérard Miquel, Jean-Pierre Plancade et Simon Sutour.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

J’informe le Sénat que la commission des lois m’a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats qu’elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de réforme des collectivités territoriales.

Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l’article 12 du règlement.

(Texte de la commission)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites [projet n° 713 (2009-2010), texte de la commission n° 734 (2009-2010), rapports n° 733, 727 et 721 (2009-2010)].

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Mon rappel au règlement est fondé sur les articles 13 à 23 du règlement relatifs aux travaux des commissions.

Je veux dénoncer en cet instant les conditions dans lesquelles sont examinés les amendements en commission, en particulier ceux qui sont déposés par les membres de l’opposition.

Je tiens à préciser que mes propos ne sont dirigés ni contre Mme la présidente de la commission des affaires sociales, Muguette Dini, ni contre M. le rapporteur, Dominique Leclerc, et encore moins contre les collaborateurs de ladite commission : ils font les uns et les autres ce qu’ils peuvent dans le temps qui leur est octroyé.

En réalité, je souhaite dénoncer la vitesse à laquelle nous sommes amenés à travailler, à mal travailler, y compris en commission. Le temps imparti à nos travaux interdit systématiquement tout travail de fond.

Sur le présent projet de loi comme sur d’autres, nous examinons les amendements déposés « au kilo », « à la louche ». Nous procédons à un examen à la chaîne, sans qu’il soit question de ne pas tenir la cadence. Ce n’est pas sérieux et c’est pour le moins regrettable. Tous les sénateurs, sur quelques travées qu’ils siègent, ne cessent de se plaindre, à juste titre, de cette dérive.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs de l’Ump

Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Pas tous, mais un certain nombre ! Dont acte.

Par ailleurs, manifestement, les amendements déposés par les membres de l’opposition sont moins bien traités que ceux qui émanent de la majorité. On ne peut que constater deux poids deux mesures !

Protestations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Certains de nos collègues de la majorité protestant, je souhaite rappeler dans quelles conditions se sont déroulés les travaux hier soir, lors de la réunion de la commission pendant l’heure du dîner.

Furent appelés successivement les amendements n° 1 à 24, sur lesquels furent émis d’emblée des avis défavorables. Puis, arriva l’amendement n° 25, qui, lui, fut examiné car il émanait de la majorité, et il reçut un avis favorable, ce dont je me réjouis car c’est un amendement intéressant. Mais il est un peu ennuyeux que la commission n’ait pas jugé bon d’examiner un amendement similaire, déposé juste avant par les membres du groupe socialiste – la situation aurait été identique si les signataires avaient été les membres du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Ensuite, la litanie reprit ; les amendements n° 26 à 34 furent rejetés. L’amendement n° 35 ayant été déposé par les membres de la majorité, il fut examiné un petit peu…

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Je déplore que le seul fait d’émettre un avis défavorable fasse office d’analyse, de débat, de sentence. Ce n’est plus acceptable !

Madame la présidente, pourriez-vous faire savoir en haut lieu que nous souhaitons d’autres conditions de travail afin que la démocratie soit respectée ? Nous ne voulons plus que le seul fait de débattre soit considéré comme de l’obstruction.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Robert Tropeano applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Guy Fischer, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Les membres du groupe CRC-SPG partagent l’analyse de Mme Le Texier. Les conditions de travail qui nous sont aujourd’hui imposées méritent que l’on s’y attarde.

Nous avons une certaine expérience…

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

… de la vie parlementaire et de l’examen de textes lourds. Dans le présent cas de figure, nous savons que, lors de la conférence des présidents – elle aura lieu dans un peu plus d’une heure –, des décisions qui auront certainement une incidence sur le déroulement de nos débats, notamment sur l’examen d’amendements d’ordre financier, seront prises.

Bien sûr, nous travaillons en collaboration avec tous les services du Sénat. Cependant, force est de reconnaître que, malheureusement, les conditions dans lesquelles le débat de ce jour s’engage ne permettent pas de travailler sérieusement, notamment de pouvoir donner et obtenir des explications lors de la présentation des différents amendements.

Je comprends que M. le rapporteur, Mme la présidente de la commission des affaires sociales, avec l’assistance des services, le Gouvernement puissent appréhender la situation de manière plus globale. Mais, pour notre part, nous estimons intolérables de telles conditions de travail. Il fallait que ce soit dit et répété.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à Mme Colette Giudicelli, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Giudicelli

Monsieur Fischer, vous n’avez pas assisté hier soir aux travaux de la commission, puisque les membres de votre groupe avaient décidé de ne pas y participer.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

De toute façon, notre présence ne sert à rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Giudicelli

Je suis quelque peu étonnée, car nous avons l’impression de travailler en parfaite harmonie avec nos collègues de l’opposition.

Madame Le Texier, vous avez décrit les conditions de travail en commission en visant l’appel en bloc, si je puis dire, de plusieurs amendements, puis leur rejet. Mais vous avez oublié d’indiquer que, pour justifier une telle pratique, M. le rapporteur a constaté que ces amendements étaient semblables…

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Giudicelli

… et visaient, par exemple, à supprimer un article ou encore avaient tous des incidences financières sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Ce matin, nous avons été saisis de vingt-cinq amendements dont l’objet était identique, mais qui étaient relatifs soit aux vendeurs de perruques, soit aux vendeurs de poisson, aux restaurateurs, aux vendeurs de je ne sais quoi… La commission était alors tout à fait à même de procéder globalement à leur examen.

Je remercie Mme la présidente de la façon constructive dont le travail se déroule au sein de la commission, aussi bien avec les membres de la majorité qu’avec ceux de l’opposition. Je félicite M. le rapporteur du travail et des explications qu’il donne en prenant le temps nécessaire à l’examen du texte.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Acte est donné de ces rappels au règlement.

Dans l’examen du projet de loi, nous en sommes parvenus à la discussion des articles.

TITRE Ier

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Chapitre Ier

Pilotage des régimes de retraite

À la sous-section 4 de la section 1 du chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est inséré un paragraphe 1er A ainsi rédigé :

« Paragraphe 1 er A

« Objectifs de l’assurance vieillesse

« Art. L. 161-17 A. - La Nation réaffirme solennellement le choix de la retraite par répartition au cœur du pacte social qui unit les générations.

« Tout retraité a droit à une pension en rapport avec les revenus qu’il a tirés de son activité.

« Les assurés doivent pouvoir bénéficier d’un traitement équitable au regard de la retraite, quels que soient leurs activités professionnelles passées et le ou les régimes dont ils relèvent.

« Le système de retraite par répartition poursuit les objectifs de maintien d’un niveau de vie satisfaisant des retraités, de lisibilité, de transparence, d’équité intergénérationnelle, de solidarité intragénérationnelle et de pérennité financière. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

À la lecture du projet de loi, vous n’avez visiblement pas tiré toutes les conséquences de l’article 1er A, qui résulte de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement déposé par les députés communistes et les députés du Parti de gauche.

Cet amendement s’inscrivait dans une logique globale et constituait le préambule d’une proposition alternative que vous avez écartée, prévoyant d’assurer un financement pérenne et solidaire des régimes de retraite, notamment afin de développer les droits des salariés, particulièrement des plus précaires.

Aujourd’hui, il est réduit à une simple pétition de principe, tout comme l’est l’article 1er de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites. Celui-ci dispose que « la nation réaffirme solennellement le choix de la retraite par répartition au cœur du pacte social qui unit les générations. »

Et pourtant, cela ne vous a pas empêchés de développer, depuis, des mesures qui remettent en cause la solidarité entre les générations, comme le cumul emploi-retraite, les reports des limites d’âge ou, tout simplement, votre politique en matière d’emploi ? qui retarde de plus en plus l’accès des jeunes à l’emploi. Ces problèmes sont précis.

Et pour la répartition, on sait ce qu’il en est : qu’il s’agisse du plan d’épargne retraite populaire, le PERP, ou du plan d’épargne pour la retraite collectif, le PERCO, les propositions ne cessent de se multiplier, sous forme de recommandations, bien sûr.

Tout est fait pour favoriser l’épargne individuelle et donner l’illusion à nos concitoyens que le système par répartition, intrinsèquement solidaire, serait à bout de souffle et qu’en dehors de la capitalisation il n’y aurait point de salut.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Votre discours alarmiste, couplé à un assèchement savamment organisé des comptes de la sécurité sociale, consiste à accroître l’inquiétude des jeunes.

Selon un sondage daté de 2008, près de neuf jeunes actifs sur dix se disent inquiets lorsqu’ils pensent à leur retraite, soit 88 % d’entre eux, dont près de la moitié, 45 %, se disent très inquiets. C’est précisément sur cette peur que vous rebondissez pour imposer ce projet de loi qui en est la démonstration : toujours plus de capitalisation et toujours moins de solidarité !

Ce mécanisme où l’anxiété nourrit votre force de réforme, qui nourrit elle-même l’anxiété, vous conduira, c’est en tout cas ce que vous espérez, à la suppression insidieuse des mécanismes solidaires des retraites.

Cette réforme vous entendez la mener en 2018, c’est-à-dire quand ses effets ne seront plus suffisants pour financer les retraites. Elle prendra la forme d’un basculement de système : le passage aux comptes notionnels, proposé, d’ailleurs, par notre commission.

Enfin, pour conclure, je voudrais dire à quel point le dernier alinéa de cet article nous laisse profondément perplexes.

Il dispose que « le système de retraite par répartition poursuit les objectifs de maintien d’un niveau de vie satisfaisant des retraités ».

Connaissant les choix idéologiques qui sont les vôtres, on est en droit de se demander à quelle hauteur vous placez le « niveau de vie satisfaisant des retraités ».

Particulièrement lorsque l’on sait que l’article 24 prévoit de réformer les conditions d’accès au minimum garanti et, par voie de conséquence, de peser sur les plus petites pensions des fonctionnaires, c’est-à-dire celles n’excédant pas 1 070 euros.

Pire, selon l’INSEE et le Conseil d’orientation des retraites, le COR, qui a remis en 2009 un rapport similaire à celui de l’INSEE, il y aurait en France 990 000 retraités, soit près d’un million, qui vivraient en dessous du seuil de pauvreté, c’est-à-dire avec moins de 900 euros par mois.

Ce sont donc bien 10 % des retraités de notre pays qui peinent chaque mois et tentent de survivre. Cette situation est naturellement la conséquence de la massification du chômage, de l’explosion de la précarité et de l’effondrement des salaires.

Nous avons vu naître, en France, ce qui n’existait pas jusque-là, les retraités pauvres !

Aussi, monsieur le rapporteur, puisque vous êtes l’auteur de l’amendement réformant l’article 1er A, j’ai pour vous une question : à quoi correspond, selon vous, « un niveau de vie satisfaisant » ? Et comment entendez-vous permettre aux futurs retraités de vivre dignement, sans mettre à contribution ceux qui ont eu un niveau de vie indécent ?

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 1er A pourrait pratiquement être adopté tel quel. Mais nous ne pouvons nous soustraire à un débat de fond sur ce que l’on attend d’un texte portant réforme des retraites.

Tout, dans cet article, introduit à l’Assemblée nationale sur l’initiative du groupe de la Gauche démocratique et républicaine, pourrait procéder de la déclaration d’intention s’il ne fallait nous entendre sur les principes, avant même de débattre du fond.

Ainsi, la nation, c’est-à-dire la communauté des habitants de ce pays – salariés ou non, travailleurs indépendants, jeunes, de nationalité française comme d’origine étrangère, retraités et inactifs –, fait de la retraite par répartition le fondement de notre pacte social, cher au président Larcher, me semble-t-il.

Il s’agit donc de confirmer l’engagement ferme de la Résistance, tel que traduit en son temps par le programme « Les Jours heureux » du Conseil national de la Résistance, c’est-à-dire ce qui, dans le préambule de la Constitution de 1946, affirme clairement que la vieillesse n’est pas un obstacle insurmontable et que les personnes âgées ont droit au soutien de l’ensemble de la collectivité nationale.

Mais que le principe soit réaffirmé ne suffit pas en soi à donner quelque qualité à la pseudo-réforme qui nous est proposée aujourd’hui.

« Proposée » n’est, d’ailleurs, pas tout à fait le mot qui convient, puisque le texte en a été dicté depuis le siège du MEDEF, et que la réforme dont nous allons débattre entend clairement faire porter la quasi-totalité de l’effort sur les salariés et sur les retraités : aux uns, toujours plus de cotisations et de durée d’affiliation, sous peine de décote ; aux autres, toujours moins de pension et une paupérisation largement encouragée.

C’est un peu comme si le pacte intergénérationnel devenait une sorte de punition, tant pour les salariés que pour les retraités, et comme si la retraite, avec la pension qui l’accompagne, devenait la récompense, de plus en plus réduite, des sacrifices et des efforts consentis, comme si, en fait, la reconnaissance des principes passait par une sorte de mise à l’épreuve.

La défense et la garantie du pouvoir d’achat des retraités appellent cependant des réponses d’une tout autre nature.

Poser la question des retraites, c’est poser les vraies questions.

Quelle part de la richesse nationale sommes-nous prêts, dès maintenant et pour l’avenir, à consacrer à la prise en compte des attentes des retraités, notamment en termes de niveau de pensions ?

Sommes-nous prêts, pour ne donner qu’un exemple, à ne plus supporter le scandale de la faiblesse des retraites agricoles, véritable aumône piteusement financée par une fiscalité dédiée parfaitement insuffisante, qui font des retraités agricoles et, singulièrement, des conjoints collaborateurs – d’ailleurs, le plus souvent, des conjointes collaboratrices – les nouveaux pauvres des régions rurales de notre pays ?

Sommes-nous décidés, dans le même ordre d’idées, à créer les conditions d’une prise en charge collective de la dépendance, plus opératoire et efficace que l’actuel système d’allocation d’autonomie qui varie selon les départements avec la capacité budgétaire des assemblées locales ?

Sommes-nous décidés à consacrer une part plus significative de la richesse créée pour financer les retraites, permettant de fait aux pensionnés de bénéficier d’un pouvoir d’achat digne de ce nom, dans la France de 2010 ?

L’affirmation des principes nous engage sur la durée mais aussi dans l’immédiat.

Oui à la retraite par répartition, oui au légitime partage des richesses qui découle de notre pacte social unissant la nation dans la diversité de ses membres !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de René Teulade

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous entrons dans le vif du sujet avec ce premier article ajouté par l’Assemblée nationale et modifié par les travaux de notre commission.

Cet article réaffirme le choix du système de retraite par répartition.

Mes collègues du groupe socialiste, que ce soit à l’Assemblée nationale ou au Sénat, vous ont présenté nos propositions et ont exprimé pourquoi nous refusions votre réforme.

Vous vous refusez à entendre nos arguments. Quand nous vous parlons de nos propositions, comme cela a été fait cet après-midi, vous répondez « déficit financier ». Vous n’entendez pas les parlementaires mais vous n’entendez pas non plus les manifestants qui veulent – ils nous l’ont dit et ils vous l’ont dit aussi – une autre réforme.

En effet, l’avenir des retraites constitue, comme l’ensemble des problèmes économiques et sociaux, une question vivante et mouvante, pour laquelle il n’y a pas une solution définitive mais nécessairement des adaptations progressives et successives en fonction des réalités du moment.

Concernant le financement, votre réforme frappera les plus faibles, non les plus favorisés.

Cela n’a pas besoin d’être démontré, aujourd’hui, tout le monde appelle à une réforme fiscale, même dans vos rangs.

Pourquoi la solidarité nationale, qui s’exprime par l’impôt ne participerait-elle pas au financement de la protection sociale ? Aucun dogme, aucun grand principe nous interdit de faire financer les retraites par l’impôt, en adjonction aux cotisations sociales.

Un point d’augmentation des cotisations sociales et patronales rapporterait 9 milliards d’euros par an. Mais vous vous obstinez à modifier l’âge d’ouverture des droits.

Et, contrairement à ce que vous dites, monsieur le ministre, vous ne sauvez pas le régime par répartition pour tous les Français. Votre réforme obligera les salariés, notamment les plus faibles, à recourir, s’ils le peuvent, aux régimes par capitalisation, pour bénéficier d’une retraite décente.

D’ailleurs, au Danemark, que vous citez souvent, pour alléger le système de retraite, un système d’épargne retraite a été mis en place dès 1964.

Après coup, il s’est avéré que la liberté de choix créait des injustices entre les salariés en capacité de souscrire une retraite complémentaire et ceux, les plus faibles revenus, qui n’avaient pas les moyens financiers d’abonder une épargne retraite. Et je ne parlerai pas ici des risques liés au placement sur les marchés financiers de ces produits.

La retraite – on a pu le démontrer – participe de la logique du travail. C’est sur cette base, la rémunération socialisée du travail et la création de richesse, et sur elle seule, que peut et doit reposer le contrat intergénérationnel, les mécanismes de répartition et de solidarité qui lui sont associés.

Il est clair que, quelles que soient les évolutions démographiques, dont l’impact est important, nous ne le contestons pas, ce sont l’emploi, la croissance, la répartition des richesses, c’est-à-dire, en définitive, la nature des politiques économiques et sociales, qui déterminent la capacité de nos systèmes de retraite à tenir les engagements de ce contrat de solidarité entre les générations.

C’est sur ce point politique fondamental que nous divergeons.

Nous ne sommes pas dans l’obstruction mais dans les propositions, pour garantir un système juste de retraite pour nos concitoyens, le seul capable de maintenir la solidarité des générations et la cohésion d’une société fraternelle, moderne et performante.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme l’ont rappelé nos collègues, c’est à la demande des députés de gauche, que cet article additionnel précédant l’article 1er a été adopté.

Il ne s’agit pas seulement d’une déclaration incantatoire destinée à nous rassurer et à endormir nos concitoyens. Ce n’est pas une vague promesse sans effet aucun. Ils ont cherché, par ce simple biais, à vous imposer, chers collègues, un choix que la présente réforme se gardait bien de faire.

En 2003, la précédente réforme des retraites, ébauchée par le ministre du travail d’alors, appelé depuis à d’autres fonctions, débutait par ce rappel solennel.

Cet article est, sur le fond, le texte même de l’article 1er de la loi de 2003, court, clair et précis, définissant officiellement l’intention du Gouvernement de l’époque.

Ce qui est surprenant, c’est que nous n’avions rien eu de tel au départ. Vous n’aviez même pas pris la peine de proposer un préambule revenant sur les décisions prises par les dirigeants français et soutenues par nos concitoyens depuis 1945. C’est à croire que le régime de retraite par répartition vous gène et que vous n’en voulez décidemment plus. Il est vrai que plusieurs personnalités de droite, à commencer par Mme Parisot, présidente du MEDEF, ont fait état de positions très claires sur la question, estimant que la retraite par capitalisation était préférable. Nous avons craint que les engagements de 2003 ne soient passés aux oubliettes de l’histoire. Si tel avait été le cas, nous aurions estimé que vous aviez le devoir de le présenter ainsi aux Français.

Cet engagement rappelé, nous allons pouvoir débattre sur des bases dont je ne sais si elles seront plus saines. Toujours est-il que, avec ce préambule, vous avez admis vouloir conserver le régime de retraite par répartition. Il s’agit maintenant de voir quels sont les moyens à mettre en œuvre pour une réforme juste et financée. Le texte que le Gouvernement nous soumet aujourd’hui nous propose tout l’inverse !

En réaffirmant votre soutien au régime de retraite par répartition, vous ne pouvez en toute logique accepter de poursuivre dans cette voie. En ne réitérant pas l’engagement solennel de 2003, vous pouviez donner corps à ce texte et confirmer cette opération de démantèlement du système par répartition. Désormais, il faut tout revoir en profondeur. C’est ce à quoi nous nous emploierons.

En effet, comment reconnaître la nécessité de maintenir le régime de retraite par répartition et le principe de solidarité intergénérationnel tout en organisant, dans le même temps, une paupérisation du système actuel, ce qui ne pourra que conduire à son abandon dans les prochaines années ?

Je m’explique. Votre texte repose sur des prévisions fantaisistes. Vous augmentez l’âge légal de départ à la retraite, le faisant passer de 60 ans à 62 ans, et, parallèlement, vous reculez l’âge de la retraite à taux plein, le faisant passer de 65 ans à 67 ans. Vous vous appuyez pour ce faire sur une donnée démographique, arguant du fait que notre pays comptera de plus en plus de retraités pour de moins en moins d’actifs. Soit ! Il me semble cependant que vous oubliez l’évolution de la productivité qui peut changer grandement ce rapport de force : si deux actifs en 2050 produisent autant que quatre actifs en 2010, les perspectives financières sont quelque peu à revoir...

Je ne souhaite pas entrer dès maintenant dans une querelle de chiffres, nous en aurons tout le loisir. Je constate simplement que vos prévisions sont contestables. Ce qui est plus ennuyeux en revanche, c’est que l’allongement de la durée de cotisation est une simple mesure comptable. Le taux d’activité en France des personnes de plus de 55 ans est déjà l’un des plus faibles. En d’autres termes, quand on atteint 55 ans, on a plus de risque d’être au chômage ou en activité réduite qu’être encore employé. Vous vous contentez d’allonger la durée de cotisation sans tenir compte de cette donnée. Aussi un chômeur âgé de plus de 55 ans continuera-t-il à être chômeur deux années de plus avant de devenir un retraité. La belle affaire !

Vous ne réglez nullement le problème des retraites, vous ne faites que le déplacer. Vous vous employez à vider les caisses de l’assurance chômage pour financer celles des retraites. Joli tour de passe-passe comptable, mais personne n’est réellement dupe !

Au regard des éléments que contient ce texte, cet article ne suffira pas à faire diversion.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Cet article est fondamental, car il est au cœur de ce que nous considérons comme la principale supercherie de cette réforme. Vous prétendez qu’il y a urgence. C’est d’ailleurs sur ce thème que vous avez centré votre communication : à vous croire, il faut aller vite, c’est très grave. Nous ne pourrons plus regarder nos enfants dans les yeux. Si notre génération ne pérennise pas le système, ils ne pourront pas avoir de retraite….

Vous pouviez assumer votre idéologie en affirmant que la seule façon de pérenniser le système, c’était d’aller vers les fonds de pension et les assurances, comme aux États-Unis ou dans d’autres pays ? Car c’est cela, votre programme !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

C’est vous qui le dites !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

M. David Assouline. Vous n’avez pas voulu assumer la réalité de votre idéologie libérale et parlez encore de régime de retraite par répartition, parce que vous avez présente à l’esprit l’échéance de 2012 et que vous savez que vous allez droit à l’échec en vous présentant ainsi, car les Français sont attachés à ce système.

Mme Bariza Khiari applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Vous prétendez que vous partagez les principes énoncés à l’article 1er A, mais vous asséchez le régime de retraite par répartition dans les articles suivants et ne le pérennisez pas.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

C'est la raison pour laquelle les jeunes, qui ne croient pas que le système sera à l’équilibre en 2025 et en 2050, se dirigeront de plus en plus vers des assurances privées ou des assurances complémentaires. C’est de cette façon que l’on tue le système par répartition !

Certes, vous m’opposerez que je vous fais un mauvais procès, puisque vous proposez aujourd'hui une réforme dans le cadre du régime actuel. Cependant, celle-ci ne pérennise ce dernier que jusqu’en 2012, c’est-à-dire jusqu’à l’élection présidentielle. Ensuite, rien n’est prévu !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Qu’est-ce qu’il raconte ?

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Vous avez donc œuvré largement pour affoler le pays, affirmant qu’il y avait urgence, qu’il fallait faire vite, mais vous avez fait exactement l’inverse !

Laissez-moi vous exposer les éléments chiffrés de notre proposition pour que nous puissions les comparer aux vôtres et que vous vous expliquiez. Car vous avez tendance à toujours nier les solutions de remplacement que nous formulons. Peut-être vos collaborateurs feront-ils l’effort de vous fournir quelques arguments sur nos estimations à nous.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Cessez de mépriser les gens !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Monsieur Woerth, un ministre ne se retourne pas pour interrompre celui qui parle. Je vous demande de respecter les parlementaires.

À l’Assemblée nationale, vous vous êtes permis d’insulter une députée en employant un terme que je me garderai de répéter ici. Ne commencez pas à vous énerver, nous avons encore de longues heures à passer ensemble !

Protestations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Un sénateur du groupe socialiste

Il a raison, David !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Pour pérenniser le système de retraite par répartition, il faut que l’équilibre soit atteint en 2025. Or, dans votre proposition, à cette date, le capital sera taxé à hauteur de 2, 2 milliards d’euros, la part des revenus du travail s’élèvera à peu près à 7, 9 milliards d’euros et les mesures démographiques permettront de dégager 22 milliards d’euros ; par mesures démographiques, il faut bien sûr entendre celles qui pèsent d’abord sur les salariés ! En d’autres termes, il manquera 13 milliards d’euros pour équilibrer les comptes de la caisse des retraites.

J’en viens à la proposition socialiste. En 2025, les prélèvements sur les revenus du capital représenteront 18 milliards d’euros. Il est inutile de m’opposer que ce sera le bombardement fiscal : pour la majorité des Français, le bombardement fiscal, ce n’est pas cela ! Et ce ne seront pas les petites économies qu’ils possèdent qui permettront d’atteindre le montant que j’annonce. Nous pensons plutôt à tous les compléments de salaires, bonus, stock-options et autres qui, aujourd’hui, ne participent pas à cet effort.

Pour les revenus du travail, une progressivité de 0, 1 % est prévue, qui permettra d’atteindre 18 milliards d’euros en 2025. Nous ne nions pas la nécessité des mesures démographiques, il en faut, mais elles doivent contribuer dans une juste proportion, soit 8, 5 milliards d’euros. Avec ce montage, nous parviendrons en 2025 à l’équilibre parfait, grâce à des recettes d’un montant de 45 milliards d'euros. C’est ce qu’il manque d’après les prévisions du Conseil d’orientation des retraites et cela correspond à l’objectif que nous nous étions fixé. C’est dire qu’il y a une pérennité possible du système de retraite par répartition.

Après avoir fait tout ce tintamarre, vous ne cherchez pas à démontrer que l’équilibre pourra être atteint en 2025. Pis, votre financement ne vous permet de passer le cap de 2012 que parce que vous pillez le Fonds de réserve des retraites – 35 milliards d'euros – mis en place par Lionel Jospin. Et vous avez le toupet de dire que les socialistes n’ont jamais rien fait ! La vérité, c’est que, sans l’argent que les socialistes ont mis de côté quand ils étaient au Gouvernement, votre réforme ne serait même pas financée au premier centime !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Vives protestations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, « la Nation réaffirme solennellement le choix de la retraite par répartition au cœur du pacte social qui unit les générations ». Voilà le principe, je serais tenté de dire le postulat, qui ouvre l’article 1er A du projet de loi avec un lyrisme qui n’a échappé à personne, mais qui, malheureusement, est contredit par la réalité du texte.

Je veux rappeler à mon tour que notre système de retraite, fruit des travaux du Conseil national de la Résistance, date de 1945 et est fondé sur un pacte intergénérationnel aux termes duquel les actifs paient pour les générations précédentes.

Or les effets conjugués du choc démographique et de la crise économique, cumulés à l’allongement considérable de l’espérance de vie, induisent un rapport entre cotisants et retraités beaucoup plus pénalisant que par le passé. Au demeurant, personne, je pense, ne saurait déplorer l’augmentation de l’espérance de vie de nos concitoyens.

Il en résulte qu’une réforme est absolument nécessaire ; tout le monde s’accorde sur ce point. Nous sommes face à un problème sociétal difficile à régler, mais qu’une société qui se revendique comme évoluée a le devoir de résoudre, sans pour autant remettre en cause le principe qui prévalait en 1945. Et c’est bien parce que ce problème est complexe qu’il justifie ou aurait justifié du temps, de la concertation, du dialogue et, surtout, un impératif de justice.

Vous avez choisi de mépriser cette méthode. D’ailleurs, vous avancez dans ce projet avec le soutien, j’ai failli dire la complicité du groupe UMP et restez sourds à la mobilisation. Nous nous trouvons donc au cœur d’un débat dont nous éprouverons le prolongement et les conséquences.

Mes chers collègues, il est encore temps d’écouter notre avertissement et de marquer une pause, au lieu d’imposer des solutions présentées comme simples alors qu’elles sont en réalité simplistes, inefficaces et injustes.

En effet, les cotisations reposent aujourd’hui essentiellement sur les salaires. Il est donc impératif d’élargir l’assiette en ne s’interdisant pas de trouver d’autres ressources, comme celles que vient de présenter à l’instant David Assouline.

Aujourd'hui, le constat est simple et clair pour l’ensemble des Français. Ce sont toujours aux mêmes que l’on demande des efforts : 85 % de l’effort pour les salariés et le travail et 15 % seulement pour les hauts revenus ! Ce sont aux femmes, aux jeunes, aux retraités, aux retraités, bref aux plus démunis que vous demandez de se serrer la ceinture, alors que, scandaleusement, le bouclier fiscal permet à certains foyers de se faire rembourser des sommes de 300 000 euros ou de 400 000 euros, ce qui est parfaitement indécent.

Pour notre part, nous pensons qu’il est possible d’agir afin de sauver notre système de retraite par répartition, qui constitue une application fondamentale du principe de solidarité cher à notre République. Ce régime a fait la preuve de ses avantages, et la crise financière a montré a contrario à l’étranger les limites de la retraite par capitalisation, son inefficacité et ses dangers.

Sous couvert de rechercher un équilibre, le Gouvernement privilégie une approche strictement comptable dans laquelle les salariés ne constituent qu’une variable d’ajustement. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, vous procédez à un véritable dévoiement du terme « répartition », puisque, si répartition il y a, elle se limite à la répartition des efforts qui tombent toujours sur les mêmes, je veux parler des salariés.

La répartition, la vraie, c’est l’expression forte et juste de notre système de solidarité. Et il est bon de favoriser ce principe dans le monde où nous vivons, tant l’égoïsme sévit dans les esprits et dans les faits.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, il y a de votre part une forme d’escroquerie intellectuelle à revendiquer ce principe de répartition, alors que vous le niez tout au long de ce texte. Voilà qui, de fait, disqualifie cet article.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Robert Tropeano applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Claude Bérit-Débat, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, dans son programme, le Conseil national de la Résistance avait prévu « une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours ».

Aujourd’hui, je n’ai pas peur de dire que votre texte revient sur cet acquis majeur de notre pacte républicain.

Ce texte ne constitue rien de moins qu’une régression, qui va à l’encontre de ce que les Français attendaient. Ils espéraient un vrai débat, une véritable concertation ; ils voulaient une réforme juste, équitable et efficace.

Votre projet de loi est tout l’inverse : il est brutal, injuste, inégalitaire et inefficace, comme l’a démontré avec talent notre collègue Christiane Demontès.

Je partage, bien sûr, l’inquiétude et la colère de ces millions de Français qui se sont exprimés lors des manifestations et dont vous refusez d’entendre les légitimes revendications.

S’agissant de cet article 1er A, nous ne pouvons, bien entendu, qu’approuver les principes fondateurs qui y sont rappelés. Toutefois, on ne peut se contenter de les reprendre seulement pour la forme. Ces principes nous engagent, alors que les dispositions de ce texte de loi vont à l’encontre même de ce qu’ils représentent. On n’a pas le droit de les bafouer ainsi.

Prenons l’alinéa 4 : il réaffirme que « la retraite par répartition [est] au cœur du pacte social qui unit les générations ».

Écrire cela, c’est faire semblant d’oublier que ce projet de loi va rendre le droit à la retraite moins accessible.

Écrire cela, c’est d’autant plus malvenu qu’il y est fait référence au droit à une pension et à un traitement équitables, quels que soient l’activité ou le régime de cotisation.

Mais où est l’équité dès lors que l’on allonge la durée de cotisation à taux plein sans tenir compte de l’âge d’entrée dans la vie active ?

J’attends d’ailleurs, monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, que vous nous apportiez quelques éclaircissements sur ce qu’a déclaré le Premier ministre, dimanche dernier, au cours d’une émission télévisée.

Trouvez-vous juste que quelqu’un qui a commencé à travailler à 18 ans soit obligé de cotiser quarante-quatre ans ? Défendre une telle mesure, c’est faire insulte aux travailleurs qui ont des carrières longues. Et je suis curieux de savoir comment on peut affirmer que ce texte leur permettra de toucher une retraite plus élevée.

Par ailleurs, comment oser parler d’équité quand le texte confond sciemment pénibilité et invalidité ? Comment oser parler d’équité quand on voit le sort qui y est réservé aux femmes ?

Plutôt que d’équité, c’est d’injustice qu’il s’agit, et même de cynisme, comme le montrent les dispositions concernant les seniors et les chômeurs.

Et que penser du dernier alinéa de l’article, qui fait référence au maintien d’un niveau de vie satisfaisant et à des objectifs de transparence, de solidarité et de pérennité financière ?

De quelle solidarité s’agit-il quand les salariés vont devoir supporter, cela a été dit avant moi, 85 % au moins du poids de la réforme, alors que les revenus du capital seront, encore une fois, protégés ?

Qui peut croire que le projet de loi contribuera à assurer la pérennité financière ? On vide le Fonds de réserve des retraites ; on rogne sur les droits des femmes ; on se livre à des opérations comptables entre assurance chômage et assurance vieillesse ; on méconnaît la pénibilité et on rend la situation de millions de seniors encore plus difficile.

Mais, en fin de compte, on ne résout rien !

La meilleure preuve que ce texte n’a de réforme que le nom que vous lui donnez, monsieur le ministre, la voici : en 2018, il faudra encore y revenir !

Non, décidemment, les Français n’ont pas été respectés et ne le sont toujours pas. Après avoir escamoté le débat, le Gouvernement estime doctement qu’ils se trompent !

Quant au Parlement, il n’est pas plus respecté ! On lui impose, encore une fois, la procédure accélérée, comme s’il fallait empêcher à tout prix qu’il puisse légiférer sereinement.

Cet article 1er A est donc un artifice, un cache-misère bien mince pour masquer l’énormité de la régression sociale qu’impose le texte.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, de notre côté, nous avons fait des propositions responsables, pour une réforme des retraites juste, équitable et efficace. Elles vous ont été rappelées par Jean-Pierre Bel, notre président de groupe. Nous n’aurons de cesse, tout au long du débat, de vous les exposer et nous attendons que vous les preniez en compte !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Robert Tropeano applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, notre dispositif de retraite est l’aboutissement d’un long processus historique et politique qui a conduit à la création d’un système par répartition, base de notre modèle social, s’appuyant sur la solidarité entre les générations.

Aujourd’hui, monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, face à des mutations socio-économiques, mais aussi à cause de certaines dispositions que vous avez prises, lesquelles ont mécaniquement entrainé une diminution du niveau des pensions, notre système de retraite est remis en question par ce que vous appelez une « réforme » qui, en réalité n’en est pas une.

En effet, dans une réforme digne de ce nom, on fait des choix pour régler des problèmes, en apportant un mieux aux personnes qu’elles concernent. Ici, rien de tel ! Votre projet de loi ne règle rien quant à l’équilibre financier du système des retraites ; sa mise en œuvre ne fera qu’aggraver la vie quotidienne des salariés et des futurs retraités.

Depuis que vous avez présenté votre projet de loi, monsieur le ministre, vous n’avez de cesse de laisser croire que l’allongement de la durée du temps de travail est une « fatalité », qu’il n’est pas possible de faire autrement, parce que l’homme vit plus longtemps.

Mais pourquoi vit-il plus longtemps ?

Parce qu’il a, de ses mains, sur des décennies, amélioré son outil de travail ; parce qu’il a, par son intelligence, son savoir, fait progresser la science. Ce sont autant d’avancées qui sont dues à l’œuvre humaine et qui doivent servir l’homme !

Il s’agit donc non pas d’une fatalité, mais d’un progrès humain, qu’il nous appartient de mesurer et de restituer, de redistribuer à l’homme qui en est à l’origine, et ce de façon juste et durable.

Mais quelle société voulons-nous ? Une société où il faut travailler, travailler encore, travailler toujours plus ? Et pour gagner quoi, au bout du compte ? Le droit de partir à la retraite à 67, 69 ou 70 ans, fatigué, usé, physiquement, moralement, ou les deux, après avoir passé sa vie à travailler ou à rechercher du travail ?

Il y a un temps pour tout, pour étudier, pour travailler, pour se cultiver, pour les loisirs, pour sa famille, et un temps pour soi.

En maintenant l’âge de départ à la retraite à 60 ans, nous permettons à ceux qui veulent partir de le faire, parce qu’il y a une vie après le travail ; dans cette logique, d’une certaine façon, nous redistribuons le travail. Ne l’oublions pas, les deux tiers des actifs âgés de 55 à 65 ans n’ont actuellement pas d’emplois, quand, dans le même temps, le taux de chômage avoisine les 10 % et que les 18-25 ans n’ont jamais été dans une situation aussi précaire.

Monsieur le ministre, je déplore que cette prétendue réforme soit à l’image de la société actuelle, qui renie l’humain au profit d’intérêts économiques ne servant qu’une poignée d’individus quand tant d’autres subissent !

Je déplore la brutalité de vos mesures. Elles ne visent qu’à répondre à la pression conjuguée des marchés financiers et des agences de notation, qui exigent une réduction des budgets publics et sociaux dans tous les pays européens.

Les citoyens attendent de nous autre chose : que nous construisions un système de retraite où s’articulent aspirations individuelles et effort collectif, un système découlant d’un vrai choix de société et non d’un choix financier !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ayant déjà évoqué lors de mon intervention précédente le fameux alinéa 4 de l’article 1er A, je me contenterai de vous le relire : « La Nation réaffirme solennellement le choix de la retraite par répartition au cœur du pacte social qui unit les générations. » À l’évidence, c’est tout le contraire qui est fait au travers de ce projet de loi, puisqu’on y affaiblit le régime par répartition.

Je voudrais m’arrêter un instant sur ce qui est écrit à l’alinéa 6, auquel, monsieur le ministre, vous faites vous-mêmes référence. Je le lis : « Les assurés doivent pouvoir bénéficier d’un traitement équitable au regard de la retraite, quels que soient leurs activités professionnelles passées et le ou les régimes dont ils relèvent. »

Monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, le jeudi 25 mars dernier, lors d’une séance de questions d’actualité au Gouvernement, je vous avais interrogé sur ce sujet. Rappelez-vous, c’était quatre jours après votre défaite aux régionales et, la veille, le Président de la République avait déclaré : « Je ne passerai pas en force. » Il parlait des retraites, bien sûr… Mon propos se terminait ainsi : « Monsieur le ministre, la prise en compte des critères humains devra l’emporter sur l’utilisation abusive de la calculette. Il s’agit avant tout d’un choix de société, et non de simples ajustements financiers. »

Aujourd’hui, la question qui se pose est la suivante : faut-il une réforme, ou pas ?

Moi, je vous réponds « oui » ! Mais cette réforme, nous devons l’aborder sans tabou, en partant du principe que, depuis 1945, la société a changé. Personnellement, je suis prêt à tout entendre, mais ne nous trompons pas d’objectif : il s’agit de faire une vraie réforme. Je suis au regret de vous le dire, votre réforme n’en est pas une ; ce ne sont que des ajustements opérés la calculette à la main !

Pour prendre une image, je dirai que, pour aborder le dossier des retraites, deux portes d’entrée s’offrent à nous. Elles sont aussi importantes l’une que l’autre : il y a, d’un côté, l’équilibre de l’ensemble des régimes, et je suis bien placé pour le savoir, et, de l’autre, le montant des pensions. Or, depuis le début, j’entends parler de la première, mais quasiment jamais de la seconde !

Selon moi, si ces deux voies ont la même valeur, je considère que le problème doit avant tout être étudié à l’aune du montant des pensions. Et c’est ce à quoi l’alinéa 6 fait référence.

Vos démonstrations et vos affirmations ont toutes le même point de départ : l’équilibre des régimes. C’est, pour vous, le critère majeur, et au diable le montant des pensions ! C’est cela qui est grave, car je reste convaincu que vous abordez ce projet et cette « réformette » sous un mauvais angle !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Les principaux alinéas de cet article 1er A méritent d’être relus et appellent quelques commentaires.

Alinéa 4 : « La Nation réaffirme solennellement le choix de la retraite par répartition au cœur du pacte social qui unit les générations. » Je pense que nous pouvons tous être d’accord avec une telle affirmation.

Alinéa 5 : « Tout retraité a droit à une pension en rapport avec les revenus qu’il a tirés de son activité. » Globalement, nous approuvons ce principe général, étant entendu qu’il faut tout de même traiter de manière particulière les pensions destinées à ceux qui n’ont eu que de petits revenus et que rien ne nous oblige à accorder des retraites dorées à ceux qui ont déjà bénéficié de revenus très importants, indûment octroyés.

Alinéa 6 : « Les assurés doivent pouvoir bénéficier d’un traitement équitable au regard de la retraite, quels que soient leurs activités professionnelles passées et le ou les régimes dont ils relèvent. » Là, on s’appuie sur la notion de solidarité nationale, ce qui implique qu’on fait appel à la fiscalité. Tout n’est donc pas uniquement financé par les cotisations.

Souvent, les gens croient qu’un système de retraite par répartition est totalement et strictement redistributif. Or ils se trompent : un effort spécifique doit être fait pour maintenir un minimum vieillesse et pour assurer un revenu à des personnes qui ont connu de longues périodes de chômage et de précarité.

Autrement dit, s’il y a une réforme à faire, c’est pour aller dans le sens d’un système encore plus redistributif, afin que ceux qui ont souffert dans leur vie professionnelle n’aient pas à subir une double ou triple peine.

J’en viens à l’alinéa 7 : « Le système de retraite par répartition poursuit les objectifs de maintien d’un niveau de vie satisfaisant des retraités, de lisibilité, de transparence, d’équité intergénérationnelle, de solidarité intragénérationnelle et de pérennité financière. »

J’ai été étonné, monsieur le ministre du travail, que vous rejetiez l’idée d’un référendum, puisque vous êtes si sûr de vous et que vous pensez qu’il n’y a pas d’autre solution.

À nous, la gauche, vous posez cette question : comment entendez-vous financer les retraites ? Nous voilà véritablement à fronts renversés !

La droite est titillée par l’idée de passer à un système à points, à un système conventionnel ou à un système de capitalisation. Les centristes le disent dans des communiqués de presse. M. le rapporteur a déclaré qu’il était pour un autre système. Et, souvent, en commission, on a entendu des collègues de droite dire qu’il fallait envisager un autre système.

Donc, vous n’êtes pas vraiment pour la répartition. Vous l’acceptez aujourd’hui, mais cela vous titille de passer à autre chose parce que tout ce qui est collectif, ce n’est pas votre culture, c’est la culture de la gauche !

Protestations sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Mais assumez donc d’être de droite !

Aujourd’hui, nous sommes à fronts renversés dans la mesure où, quand M. le ministre nous interroge et que nous lui répondons qu’il faut aussi recourir à la fiscalité, on a l’impression que la gauche ne s’en remet pas uniquement à la répartition. Mais, s’il faut aussi utiliser la fiscalité, c’est parce qu’on a réduit la masse salariale : l’argent va de moins en moins aux salaires et de plus en plus au capital.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Résultat de ce transfert : on assèche les bases des cotisations ! C’est la raison pour laquelle, aujourd’hui, on est obligé de faire appel à la fiscalité.

De même, quand les patrons délocalisent pour pouvoir faire des bénéfices encore plus importants, cela fait croître le chômage. Et plus il y a de chômeurs, moins il y a de cotisations : là encore, on assèche la masse salariale !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Donc, il faut bien s’appuyer aussi sur la fiscalité. Alors, bien sûr, monsieur le ministre, vous nous dites que ce n’est pas possible parce qu’il n’y a plus de sous ! Eh oui, on sait bien que vous êtes dépensier !

Rires sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Il faut savoir aussi que, dans le cadre de la concurrence européenne, on baisse l’ensemble des impôts par peur de faire partir les entreprises. On baisse l’impôt sur les sociétés en France et en Allemagne. On s’aligne sur le moins-disant fiscal, on s’aligne sur le moins-disant social.

C’est donc toute une politique qu’il faut revoir. Si l’on veut conserver un système par répartition, qu’on maintienne l’emploi, qu’on maintienne une masse salariale suffisante pour pouvoir le financer ! Sinon, bien sûr, on est obligé de faire appel à la fiscalité !

Applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Cet article 1er A, qui a un contenu à la fois générique et fondamental, aurait pu fournir l’occasion d’une bonne entrée en matière. Or, avec la procédure proposée, vous avez cherché à empêcher un débat en profondeur sur ce système solidaire.

Au demeurant, alors même que nous n’avions pas encore commencé nos travaux, on nous expliquait, à coups d’entretiens télévisés, d’articles de presse, de conférences radiophoniques, que le débat sénatorial ne toucherait pas au cœur de la réforme – c'est-à-dire la réforme attendue par les agences de notation –, mais que des aménagements à la marge étaient possibles, sur des questions comme la place des femmes et celle des handicapés, la pénibilité ou les polypensionnés.

Les femmes salariées auront sans doute apprécié d’être considérées comme un problème mineur ! De même, sans doute, que nos anciens mineurs atteints d’asbestose, à l’instar des plombiers chauffagistes ayant manipulé l’amiante au fil de leur vie professionnelle, ou tous ces salariés dont le travail est devenu une véritable souffrance sans que cela vous trouble plus que ça !

Nous ne pouvons partager cette manière de voir et de faire. Nous ne pouvons partager vos propositions.

Non, l’allongement de la vie active, que ce soit par l’accroissement de la durée de cotisation ou par le recul de l’âge du départ en retraite, n’est pas inéluctable !

Non, le régime de retraite par répartition n’est pas irrémédiablement voué à la faillite à plus ou moins longue échéance, contrairement à ce que vous clamez en permanence !

Non, il n’est pas utile de faire croire aux jeunes générations que leur retraite ne sera pas payée !

Vous avez voulu présenter vos mesures comme des mesures de bon sens, mais cette rhétorique a fait long feu. Les manifestants vous l’ont dit, les Français le confirment à plus de 70 %, et je suis certaine que, le mardi 12 octobre, ils vous le rediront encore clairement.

Regardons la réalité. Notre pays compte plus de 25 millions de personnes en situation d’activité : il n’en a jamais compté autant ! Il est même probable que, l’évolution des mœurs et des structures familiales aidant, le mouvement de féminisation de la population active, largement entamé dans les années soixante et soixante-dix, se poursuivra, conduisant la quasi-totalité des adultes en âge de travailler à se trouver en situation d’activité, à l’exception de ceux qui feront des études et de ceux que leur état physique privera de la possibilité de travailler.

Notre pays n’a jamais été aussi riche, et les gains de productivité sont tels, depuis plusieurs décennies, que le travail d’un seul salarié aujourd’hui vaut celui de plusieurs il y a vingt, trente ou cinquante ans. La France est d’ailleurs l’un des pays où la productivité est la plus élevée en Europe.

Pour mesurer la richesse du pays, nous disposons d’un paramètre de mesure, le produit intérieur brut, c'est-à-dire la valeur ajoutée totale. La France produit aujourd’hui plus de 1 000 milliards d’euros de valeur ajoutée. Quand on sait que le déficit de l’assurance vieillesse est de 5, 5 milliards d’euros, on mesure d’emblée l’effort à accomplir.

Et si tant est qu’il existe un déficit structurel, ne convient-il pas de faire en sorte, non pas de rationner les dépenses de l’assurance vieillesse, mais de renforcer les moyens d’accroître les recettes nécessaires à la pérennisation du système ?

Nous avons, sur cet article, compte tenu des conditions d’ouverture du débat, déposé des amendements contenant des propositions relatives au financement des régimes de retraite.

En effet, de deux choses l’une : ou bien on assume notre attachement à la retraite solidaire par répartition ou bien on cherche à mettre en place une autre réponse, et c’est ce que vous proposez. Avec votre projet, la retraite solidaire deviendrait peau de chagrin.

De fait, pour la CNAV, la réforme actuellement proposée ne réglera aucun des problèmes posés du point de vue des déficits.

Nous, nous sommes pour plus de recettes au bénéfice de l’assurance vieillesse. Nous sommes attachés à ce que les retraités aient des ressources leur permettant de vivre décemment. C’est aussi une mesure de respect, de solidarité envers ceux qui ont produit les richesses sur lesquelles nous construisons l’avenir de notre pays. Rappelons que ce sont plus de 12 millions de nos compatriotes qui sont concernés.

Nos amendements visent à financer le système par répartition. Les cotisations des uns permettent de financer la retraite de ceux qui ont déjà payé celle de leurs aînés.

De plus, nos propositions, en supprimant des dépenses faites par l’État pour exempter certains de cette contribution solidaire, participeraient à la réduction du déficit de l’État.

Aussi, j’espère que nous pourrons avoir un vrai débat sur le système par répartition et son financement afin de pérenniser véritablement le système et faire en sorte que déclaration de principe qui ouvre le texte proposé pour l’article L. 161–17 A ait tout son sens.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

M. Martial Bourquin. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes tous d’accord sur le fait qu’il fallait, sans aucun doute, une réforme des retraites.

Ah ! sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Plusieurs orateurs, notamment vous, monsieur le ministre, nous ont expliqué hier que ce gouvernement a osé faire cette réforme, qu’il est courageux, que nous, nous n’avons pas osé.

Debut de section - Permalien
Un sénateur de l’Ump

C’est vrai, vous n’êtes pas courageux !

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Et il nous a demandé d’élever le niveau du débat : je résume à peine...

Si nous sommes d’accord pour dire qu’il faut une réforme des retraites, nous ne sommes en aucun cas d’accord avec cette réforme-là.

Sur la forme, d’abord, nous pensons qu’il faut toujours respecter la personne à laquelle on porte la contradiction. Les élus qui siègent à gauche de cet hémicycle n’ont pas la même opinion que vous. Ils n’ont pas à entendre que le niveau de leurs interventions doit être rehaussé ! Simplement, ils ne partagent pas du tout votre façon d’envisager cette réforme !

Prendre un ton condescendant en priant ses contradicteurs de bien vouloir élever le niveau, cela ne témoigne pas d’un grand respect pour ceux qui ne sont pas d’accord avec soi !

Sur le fond, on peut dire que, à plusieurs égards, nous n’avons pas du tout les mêmes valeurs.

Par exemple, comment peut-on demander à des personnes qui travaillent beaucoup, dans des conditions très difficiles, qui pratiquent les trois-huit, qui effectuent des tâches pénibles, de cotiser deux années de plus et, dans le même temps, restituer 30 millions d’euros à Mme Bettencourt ?

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Ce n’est pas possible ! Je ne peux pas le croire !

Sourires sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Mais si, cela se fait, et il faut le dire !

Oui, dans le même temps, vous signez des chèques aux plus gros contribuables français en vertu de ce scandale qu’est le bouclier fiscal !

Pourquoi, sur ces questions de fond, êtes-vous inaudibles ? Pourquoi y a-t-il trois millions de personnes dans la rue ? Parce qu’elles ressentent cela comme une profonde injustice !

Nous avons connu une crise financière terrible et tous, dans cet hémicycle, à gauche comme à droite, nous nous demandions comment nous allions en sortir. Eh bien, ces personnes ont le sentiment, à la sortie de la crise, d’être les seules à payer ! Les traders, eux, sont tranquilles !

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Il y a aussi un trader qui a été condamné à cinq ans de prison !

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Le bouclier fiscal est maintenu et, pendant ce temps-là, beaucoup de salariés se retrouvent au chômage !

Comment expliquer que, sur un sujet comme celui-ci, on n’ait à aucun moment évoqué le fait que 4 200 000 personnes sont inscrites à Pôle emploi ? On ne nous dit pas non plus combien d’argent rentrerait dans les caisses de retraite si elles n’étaient pas chômage !

Pourquoi se garde-t-on d’expliquer que le chômage de masse coûte très cher à notre protection sociale et aux retraites ? Car vous ne le dites jamais ! La raison, c’est que vous êtes habitués à ce chômage de masse, qui est presque organisé !

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Vous êtes résignés devant la situation économique et sociale de notre pays.

Nous, nous avons une autre conception. Puisque vous voulez qu’on élève le niveau, allons-y !

Le Président de la République a dit voilà quelque temps, au plus fort de la crise, que les stocks options, c’était fini, que les bonus, c’était fini, que les retraites chapeaux, c’était fini ! Chiche ! Mettons tout cela dès aujourd’hui à l’ordre du jour ! Proposez une fiscalisation des bonus, proposez une fiscalisation des retraites chapeaux : soyez-en sûrs, nous les voterons avec vous ! Et nous aurons cette union nationale dont il était question hier.

C’est, en effet, un authentique scandale de voir cette opulence à côté de plus de 4 millions de chômeurs. Quand il y a cette pauvreté, cette précarité, ce n’est pas possible de continuer à demander toujours aux mêmes de faire des sacrifices ! Et voilà qu’on leur demande maintenant de cotiser deux années de plus ! Telle est la réalité ! Vous n’êtes pas compris et vous ne serez pas compris parce que ceux qui souffrent aujourd’hui ressentent comme une profonde injustice ce que vous préparez !

Vous êtes en train de faire payer très cher une crise à celles et ceux qui la subissent aujourd’hui et ne sont pour rien dans sa genèse. À l’origine de la crise, il y a les banquiers, il y a ceux qui ont élaboré des montages financiers invraisemblables dans l’immobilier ! Mais, pour avoir une bonne notation, on fait payer le prix fort à celles et ceux qui travaillent, qui se lèvent tôt et qui font la richesse de ce pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

M. Martial Bourquin. Je veux bien élever le niveau. Je veux bien avoir un vrai débat, mais il faut qu’il porte sur le fond. Or ce débat sur le fond, nous ne l’avons pas. Vous essayez de vous abriter derrière la technique. Parler du fond, c’est se demander qui paie. Eh bien, ce sont toujours les mêmes qui paient !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à M. Jean-Louis Carrère, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Je voudrais rappeler quelques éléments essentiels qui devraient guider notre débat.

S’agissant de la réforme des retraites, oui, nous y sommes favorables !

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Vous ne cessez de proclamer votre attachement à la répartition. On pourrait vous dire : « Répartition, répartition, répartition ! », comme quelqu’un avait dit jadis : « L’Europe, l’Europe, l’Europe ! », mais nous ne voulons pas vous faire un procès d’intention. Cela étant, imaginons un seul instant, que nous tombions d’accord sur cette volonté affichée de pérenniser le système par répartition. Eh bien, travaillons-y ! Engageons ce dialogue qui doit nous permettre de trouver une solution, voire un compromis, sur le financement de ce système de retraite ! Et refusons d’adopter un mode de financement qui, précisément, met à mal le système par répartition !

Or il y a une incohérence grave entre la volonté que vous affichez et les propositions que vous faites.

Nous ne demandons pas mieux que de travailler avec vous à la mise en place d’un nouveau mode de financement du système de retraite par répartition. M. le président de la commission des finances fait des propositions sur la réforme fiscale : débattons-en et intégrons la question du financement des retraites à cette nouvelle problématique. Mais pas de la manière que vous nous imposez !

Par ailleurs, votre méthode de négociation est totalement inacceptable – et je reste mesuré – dans une démocratie.

Notre motion référendaire a été rejetée par 180 voix contre 140. Dont acte. Il n’en reste pas moins que les 140 sénateurs qui ont voté pour représentent aujourd’hui 70 % des Français.

Non ! sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Ne faites pas un débat droite-droite ! Vous nous dites que le Sénat apportera des solutions : c’est faux ! Vous ne pourrez pas apporter de solutions, chers collègues de la majorité, parce que vous n’avez pas le pouvoir de les proposer. Comment ferez-vous croire à l’opinion publique que la majorité à laquelle vous appartenez proposera des solutions à l’occasion de ce débat, alors qu’elle ne les a pas trouvées avant ?

Si vous voulez vraiment établir ce consensus objectif que vous feignez d’appeler de vos vœux, discutez avec la gauche ! Discutez avec les organisations syndicales, dont nous pourrons reprendre à notre compte certaines revendications !

C’est au terme de ce débat républicain, au sein duquel nous aurons pris toute notre place, que nous pourrons bâtir un régime de retraite digne de ce nom. Si ce débat n’a pas lieu, en revanche, à votre idéologie de droite, farouche et revancharde

Exclamations sur les travées de l ’ UMP

Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, sur l’article.

Marques d’impatience sur les travées de l ’ UMP.

Sourires sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

Cet article 1er A, ajouté lors du débat à l’Assemblée nationale, pourrait être acceptable moyennant l’adoption des quelques amendements que l’opposition a déposés. Il tend, en effet, à réaffirmer le principe d’un régime de retraite par répartition.

Mais la question est de savoir de quel régime de retraite par répartition il s’agit.

Je ne reviendrai pas sur les limites de cette réforme profondément injuste, soulignées par Martial Bourquin et d’autres collègues, et en particulier sur ses conséquences pour les femmes, qui seront considérablement pénalisées par la réforme que vous voulez instaurer.

Je ne reviendrai pas non plus sur le fait que ce texte ne pérennise pas le système sur le plan financier. Il suffit pour s’en convaincre de se reporter au tableau intitulé « Impact financier de la réforme sur l’ensemble des régimes de retraite », qui figure à la page 42 du rapport : il fait apparaître que, après l’entrée en vigueur de la réforme, le déficit cumulé sera encore, en 2018, de 65 milliards d’euros. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle vous prévoyez de siphonner le FRR.

J’insisterai, pour ma part, sur un argument dont il a été peu question depuis le début de ce débat, celui que le Gouvernement a matraqué pendant des mois pour démontrer le caractère inéluctable de cette réforme : la comparaison avec nos principaux voisins européens.

À y regarder de plus près, monsieur le ministre, il apparaît que, sur ce point, pardonnez-moi, mais vous avez menti !

L’Allemagne a effectivement décidé de fixer à 67 ans l’âge permettant de bénéficier d’une retraite à taux plein. Mais cette mesure s’appliquera en 2029, et non en 2023 ! Et le taux de natalité, dans ce pays, est très inférieur à celui de la France.

Au Royaume-Uni, la même mesure a été décidée, mais elle n’entrera en vigueur qu’en 2036 !

En Espagne, cette réforme s’appliquera en 2025, si toutefois elle n’est pas abandonnée d’ici là, comme il en est fortement question.

Et il convient en outre de rappeler qu’en Allemagne et au Royaume-Uni la durée de cotisation permettant de bénéficier d’une retraite à taux plein est respectivement de vingt-cinq années et de trente années.

Par conséquent, le régime de retraite qui sortira de cette réforme sera le plus défavorable de toute l’Europe !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Caffet

À cause de cette réforme injuste et inique, les Français seront, du point de vue du régime de retraite, les moins favorisés des salariés européens !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Je vous rappelle, mes chers collègues, que la commission se réunira de dix-neuf heures trente à vingt heures trente. Nous ferons en sorte, comme d’habitude, de travailler le plus rapidement possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de réforme des collectivités territoriales.

La liste des candidats établie par la commission des lois a été affichée conformément à l’article 12 du règlement.

Je n’ai reçu aucune opposition.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Jean-Jacques Hyest, Jean-Patrick Courtois, François-Noël Buffet, Yves Détraigne, Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Sueur et Mme Nicole Borvo Cohen-Seat ;

Suppléants : MM. Gérard Collomb, Pierre-Yves Collombat, Mme Jacqueline Gourault, MM. Charles Guené, Jean-René Lecerf, Jacques Legendre et Jacques Mézard.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Roger Romani.