Intervention de Bariza Khiari

Réunion du 6 octobre 2010 à 14h30
Réforme des retraites — Article 1er A

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme l’ont rappelé nos collègues, c’est à la demande des députés de gauche, que cet article additionnel précédant l’article 1er a été adopté.

Il ne s’agit pas seulement d’une déclaration incantatoire destinée à nous rassurer et à endormir nos concitoyens. Ce n’est pas une vague promesse sans effet aucun. Ils ont cherché, par ce simple biais, à vous imposer, chers collègues, un choix que la présente réforme se gardait bien de faire.

En 2003, la précédente réforme des retraites, ébauchée par le ministre du travail d’alors, appelé depuis à d’autres fonctions, débutait par ce rappel solennel.

Cet article est, sur le fond, le texte même de l’article 1er de la loi de 2003, court, clair et précis, définissant officiellement l’intention du Gouvernement de l’époque.

Ce qui est surprenant, c’est que nous n’avions rien eu de tel au départ. Vous n’aviez même pas pris la peine de proposer un préambule revenant sur les décisions prises par les dirigeants français et soutenues par nos concitoyens depuis 1945. C’est à croire que le régime de retraite par répartition vous gène et que vous n’en voulez décidemment plus. Il est vrai que plusieurs personnalités de droite, à commencer par Mme Parisot, présidente du MEDEF, ont fait état de positions très claires sur la question, estimant que la retraite par capitalisation était préférable. Nous avons craint que les engagements de 2003 ne soient passés aux oubliettes de l’histoire. Si tel avait été le cas, nous aurions estimé que vous aviez le devoir de le présenter ainsi aux Français.

Cet engagement rappelé, nous allons pouvoir débattre sur des bases dont je ne sais si elles seront plus saines. Toujours est-il que, avec ce préambule, vous avez admis vouloir conserver le régime de retraite par répartition. Il s’agit maintenant de voir quels sont les moyens à mettre en œuvre pour une réforme juste et financée. Le texte que le Gouvernement nous soumet aujourd’hui nous propose tout l’inverse !

En réaffirmant votre soutien au régime de retraite par répartition, vous ne pouvez en toute logique accepter de poursuivre dans cette voie. En ne réitérant pas l’engagement solennel de 2003, vous pouviez donner corps à ce texte et confirmer cette opération de démantèlement du système par répartition. Désormais, il faut tout revoir en profondeur. C’est ce à quoi nous nous emploierons.

En effet, comment reconnaître la nécessité de maintenir le régime de retraite par répartition et le principe de solidarité intergénérationnel tout en organisant, dans le même temps, une paupérisation du système actuel, ce qui ne pourra que conduire à son abandon dans les prochaines années ?

Je m’explique. Votre texte repose sur des prévisions fantaisistes. Vous augmentez l’âge légal de départ à la retraite, le faisant passer de 60 ans à 62 ans, et, parallèlement, vous reculez l’âge de la retraite à taux plein, le faisant passer de 65 ans à 67 ans. Vous vous appuyez pour ce faire sur une donnée démographique, arguant du fait que notre pays comptera de plus en plus de retraités pour de moins en moins d’actifs. Soit ! Il me semble cependant que vous oubliez l’évolution de la productivité qui peut changer grandement ce rapport de force : si deux actifs en 2050 produisent autant que quatre actifs en 2010, les perspectives financières sont quelque peu à revoir...

Je ne souhaite pas entrer dès maintenant dans une querelle de chiffres, nous en aurons tout le loisir. Je constate simplement que vos prévisions sont contestables. Ce qui est plus ennuyeux en revanche, c’est que l’allongement de la durée de cotisation est une simple mesure comptable. Le taux d’activité en France des personnes de plus de 55 ans est déjà l’un des plus faibles. En d’autres termes, quand on atteint 55 ans, on a plus de risque d’être au chômage ou en activité réduite qu’être encore employé. Vous vous contentez d’allonger la durée de cotisation sans tenir compte de cette donnée. Aussi un chômeur âgé de plus de 55 ans continuera-t-il à être chômeur deux années de plus avant de devenir un retraité. La belle affaire !

Vous ne réglez nullement le problème des retraites, vous ne faites que le déplacer. Vous vous employez à vider les caisses de l’assurance chômage pour financer celles des retraites. Joli tour de passe-passe comptable, mais personne n’est réellement dupe !

Au regard des éléments que contient ce texte, cet article ne suffira pas à faire diversion.

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