Par conséquent tenons compte de cette expérience, vous l'avez vous-même dit, monsieur le garde des sceaux, le bon critère pour juger une loi est celui de son utilité ou de son inutilité.
En 1955, j'étais enfant ; pied-noir, j'ai entendu déjà tous ces discours sur le rétablissement de l'ordre public accompagnés de mouvements autoritaires du menton. Au bout du compte, ces discours n'ont servi à rien d'autre qu'à aggraver les conditions dans lesquelles nous vivions tous ; l'état d'urgence s'est fini comme il finit toujours quand il est appliqué pour museler la misère sociale.
C'est l'égoïsme social qui sépare les Français, qui les jette les uns contre les autres ! C'est lui qu'il faut vaincre. La loi a été inutile pour régler les problèmes en Algérie, elle a été inutile pour régler les problèmes en Nouvelle-Calédonie. Appliquée sur le sol de la métropole, elle est encore inutile, et elle est offensante pour notre patrie, à ses yeux et aux yeux de l'étranger.
Nous ne disons rien de plus et rien de moins : cette loi est inutile et provocatrice. Entendez-le et, s'il vous plaît, respectez-nous : nous aimons la France et nos concitoyens au moins autant que vous, et nous n'avons pas de leçons à recevoir !