Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » disposera en 2008 de 3, 77 milliards d'euros en crédits de paiement, contre 3, 84 milliards d'euros en 2007. Cette baisse de 1, 9 % des crédits de paiement ne traduit cependant que partiellement la diminution du nombre des bénéficiaires de la dette viagère, dans la mesure où la moyenne d'attribution à chaque ressortissant continuera de progresser de 3, 27 % en 2008.
Cette mission constitue donc l'exemple type, de par sa configuration, son objet, mais aussi son évolution démographique, d'un budget susceptible de s'intégrer parfaitement dans la révision générale des politiques publiques, la RGPP, décidée par le Président de la République.
Pour être menée à bonne fin, une telle initiative appelle une réflexion prospective portant sur les deux axes fondamentaux de cette mission : la nécessité de parvenir à une juste indemnisation de nos combattants et de leurs familles ; le besoin impérieux de refonder une véritable politique de la mémoire.
En ce qui concerne le premier point, je voudrais rappeler que les derniers gouvernements ont apporté beaucoup plus d'avancées que les précédents. La plus importante, la « décristallisation », demandée par le Président de la République en 2006, a été largement engagée en 2007. La retraite du combattant a bénéficié de plusieurs augmentations successives. Le plafond majorable de la retraite mutualiste du combattant a été relevé. Les crédits pour les aides attribuées par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, l'ONAC, en particulier au profit des veuves d'anciens combattants, ont été augmentés. Enfin, les crédits d'appareillage, notamment en faveur des grands mutilés, ont été abondés.
Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit le financement des mesures décidées en 2006 et en 2007. Ainsi, la « décristallisation » sera prolongée grâce à l'attribution de 118 millions d'euros de crédits, dont 24 millions d'euros pour les nouveaux bénéficiaires, notamment 3 800 conjoints. La consolidation des relèvements indiciaires de la retraite du combattant bénéficiera, pour tenir compte de l'augmentation de la population concernée, de 5 millions d'euros supplémentaires. Enfin, les crédits pour les aides attribuées par l'ONAC connaissent une nouvelle augmentation, d'un montant de 4, 5 millions d'euros, en faveur notamment des veuves d'anciens combattants.
Quelques demandes restent cependant en attente. Il en est ainsi du relèvement du plafond de l'allocation différentielle pour les conjoints survivants. Quant à la revalorisation de la référence indiciaire de la retraite du combattant jusqu'à l'indice 48, annoncée par le Président de la République, il me semble qu'un calendrier de mise en oeuvre serait le bienvenu.
Il convient de se féliciter de la bonne application des dispositifs prévus pour l'indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale. Cependant, monsieur le secrétaire d'État, je souhaite que vous nous fassiez part des possibilités d'accorder aux autres orphelins de guerre des droits à réparation.
Par esprit de justice, je m'interroge également sur la possibilité d'étendre ces droits aux pupilles de la Nation, et le dispositif d'indemnisation au cas des incorporés de force dans les formations paramilitaires allemandes, RAD et KHD.
Conscients des problèmes de financement que poseraient ces mesures, monsieur le secrétaire d'État, nous sommes bien entendu à votre écoute quant à l'évaluation de leur coût.
J'appellerai enfin à une réflexion sur les militaires participant aux opérations extérieures, les OPEX, qui souhaiteraient se voir attribuer la carte du combattant, par alignement sur ce qui a été accordé voilà quelques années aux anciens combattants d'Afrique du Nord, dès quatre mois en intervention. Bien entendu, les conditions d'obtention devraient faire l'objet d'un examen approfondi, notamment au regard de la réglementation actuelle concernant l'attribution du titre de combattant.
Vous avez déjà ébauché des réponses significatives sur ces sujets : le nouveau relèvement de 2 points de la retraite du combattant ; l'évolution à 681 euros du plafond de l'allocation différentielle ; et les réflexions engagées à propos de l'extension, d'une part, de la campagne double et, d'autre part, des décrets de 2000 et 2004.
Il reste que ces démarches doivent être guidées par le souci permanent d'atteindre la juste indemnisation de ceux qui ont combattu pour notre pays, afin de faire cesser une revendication permanente qui sied mal au sujet et qui utiliserait la variable d'ajustement démographique pour améliorer indéfiniment la réparation.
En effet, si le prix du sacrifice doit être légitimement compensé, le devoir accompli ne crée pas pour autant de droits supplémentaires. Ce doit être là notre fil conducteur.
Ce constat établi, il convient maintenant de s'attacher à la redéfinition de la mémoire, qui, à mon sens, deviendra l'un des fondements de notre mission lorsque les vivants ne seront plus là en aussi grand nombre pour rappeler les valeurs essentielles que nous souhaitons transmettre.
À cet égard, certes, je reconnais que la mémoire n'a pas été abandonnée, monsieur le secrétaire d'État, et je voudrais rappeler le bilan des actions qui ont été réalisées ces dernières années : la construction à Douaumont du mémorial des soldats musulmans « morts pour la France » ; le nouveau Centre européen du résistant déporté, le CERD, au camp du Struthof ; le mémorial de la guerre d'Algérie au quai Branly ; enfin, l'achèvement de la reconstruction complète du cimetière de Mers el-Kébir.
Je voudrais dire aussi ma satisfaction de constater que ce budget pour 2008 « n'oublie pas la mémoire ». Je relève ainsi que 700 000 euros sont alloués aux célébrations du 90e anniversaire de l'armistice de 1918.
J'apprécie également que les crédits consacrés aux lieux de mémoire soient augmentés, en 2008, de près de 1 million d'euros pour les opérations au Mont-Valérien et à Zeitenlick, en Grèce. La dotation habituelle permettra de poursuivre la restauration des nécropoles nationales.
Par ailleurs, 3 millions d'euros sont prévus pour doter en capital la fondation pour la mémoire de la guerre d'Algérie, dont la création est prévue en 2008. Je m'interroge cependant sur le rôle que remplira cette fondation, notamment au regard des lieux de mémoire.
Il serait également intéressant de se pencher sur l'éventualité de la reconnaître d'utilité publique, afin d'étendre son champ d'action.
Vous me permettrez encore de souligner la contribution apportée par le Sénat dans le rapport de contrôle sur les lieux de mémoire, grâce à mon humble collaboration, mais surtout grâce au travail de notre regretté collègue Jacques Baudot, à qui je voudrais rendre ici un hommage particulier.