Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » connaît trois axes de réforme majeurs.
Le premier est la fusion entre la direction générale des impôts et la direction générale de la comptabilité publique.
Cette fusion se situe dans la continuité des actions entreprises au cours des dernières années : création d'une application informatique commune et introduction, d'abord pour les grandes entreprises, puis pour les PME, d'un interlocuteur fiscal unique. Elle est aussi cohérente avec les préconisations que j'avais faites dès 2000 dans mon rapport La direction générale des impôts à l'heure des réformes : pour une modernisation du service public de l'impôt.
Je disais alors que l'intégration dans une même administration des services de la direction générale des impôts et du Trésor public s'imposait pour supprimer les cloisonnements et les superpositions.
J'indiquais également qu'une unité d'animation et de gestion au niveau national et au niveau local était indispensable.
Je soulignais enfin la nécessité de prendre en compte l'impact de la réforme sur le réseau local de la direction générale de la comptabilité publique, très étendu, et qui pouvait donc faire l'objet, si l'on n'y prenait pas garde, de coupes claires.
Dans ce contexte, l'esprit de cette réforme, monsieur le secrétaire d'État, reçoit de la part de la commission des finances une première appréciation positive. La réforme vise à créer ce qui est indispensable : un service fiscal unique pour les particuliers, avec un seul patron sur le plan national et départemental. Pour autant, le réseau des 3 172 trésoreries n'est pas sacrifié, car celles-ci pourraient se voir adjoindre des missions d'assiette, notamment au profit des collectivités locales.
La clé de la réforme réside désormais dans les questions de statuts et de rémunérations. Les négociations devraient s'engager en 2008 et je m'attacherai à les suivre.
Le deuxième axe de réforme réside dans la lutte contre la fraude.
M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, a été investi de la fonction de chef de file de la lutte contre la fraude. Notre commission des finances a examiné à plusieurs reprises ces questions, notamment à travers un récent rapport d'information que j'ai présenté, intitulé, à la suite d'une enquête de la Cour des comptes.
Nos travaux montrent que le véritable enjeu de la lutte contre la fraude est tout autant dans le contrôle fiscal, ou la répression par les amendes, que dans le recouvrement. Or cette fonction de recouvrement est perfectible, car elle touche à des questions de coordination entre administrations. Il en est ainsi du fonctionnement des bureaux d'exécution des peines, dont l'efficacité est amoindrie par un déni de compétence en matière de recouvrement des amendes, tant par les greffes que par le Trésor public.
Troisième et dernier axe de réforme : l'informatisation de l'État, dont la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » est un maître d'oeuvre essentiel.
Les actions en cours sont considérables : création d'une informatique fiscale unique, développement d'une nouvelle application de gestion, en remplacement de Accord-LOLF, intitulée Chorus, lancement d'une application de paye unique pour l'ensemble des services de l'État.
Ces chantiers sont décisifs pour la réforme de l'État. Ils doivent à mon sens relever plusieurs défis.
Le premier défi consiste à respecter les délais et les budgets prévisionnels. Or aucun indicateur n'est fourni à ce sujet dans le projet annuel de performances, et je le regrette. Je suis très inquiet, en outre, des rumeurs d'une annulation du marché pour le déploiement de Chorus, dont la clôture était prévue à la fin du mois. Une nouvelle procédure devrait voir le jour au premier trimestre de l'année 2008, ce qui menace le calendrier de mise en oeuvre de ce système informatique essentiel pour la gestion des administrations. Chorus doit permettre la suppression des lourdeurs qui pénalisent les réussites de la LOLF.
Le deuxième défi vise à dégager des gains de productivité. Or ceux-ci ne sont jamais chiffrés en amont. Comme le relève la Cour des comptes dans un récent référé sur l'application fiscale Copernic, dont les coûts complets avoisinent pourtant 1, 8 milliard d'euros, « l'administration fiscale ne tire pas suffisamment parti de Copernic pour réorganiser ses tâches et ses services et donc pour dégager les gains de productivité importants qui, au même titre que l'amélioration du service rendu, constituent le retour sur investissement du programme ». La notion de retour sur investissement doit apparaître dans les projets annuels de performances.
Le troisième et dernier défi consiste à éviter les cloisonnements. S'agissant de l'opérateur national de paye, une interface avec les quarante systèmes de ressources humaines des ministères sera difficile à réaliser. Un chantier d'harmonisation, à défaut d'unification, de ces systèmes informatiques est nécessaire.
Toutes ces questions nous renvoient à ce que le Parlement attend, en termes de performances, de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».
Le Parlement attend, tout d'abord, que l'efficacité de la fonction fiscale de l'État soit mesurée. Les indicateurs existent dans ce domaine et ils sont plus que satisfaisants, à l'exception des indicateurs de recouvrement du contrôle fiscal et des amendes contentieuses, qui peuvent encore progresser.
Le Parlement attend, ensuite, un retour sur investissement des dépenses réalisées en matière informatique ou de formation. On peut ainsi déplorer qu'aucun indicateur de performance n'existe pour l'École nationale d'administration ou les instituts régionaux d'administration, qui sont dans le périmètre de la mission, alors que l'adéquation de la formation aux besoins en compétences des élèves de ces écoles, mais aussi des administrations, devrait pouvoir faire l'objet d'enquêtes.
Le Parlement attend, enfin, que les administrations d'état major puissent mesurer la qualité de leur expertise. Il en est ainsi de la direction du budget, qui ne propose pas d'indicateur de performance, alors que des indicateurs relatifs à la qualité de la prévision de certaines dotations budgétaires pourraient être construits.
Sous le bénéfice de ces remarques, la commission des finances invite le Sénat à adopter les crédits de la mission et les deux comptes spéciaux qui y sont rattachés, sous réserve d'un amendement que je présenterai tout à l'heure.