Le plan de redressement qui nous est proposé vise clairement à éviter que le groupe ne fasse faillite, victime d’un surcroît de dettes impossible à couvrir !
L’affaire Dexia suffit à démontrer que la stricte logique privée et l’exigence de rentabilité financière conduisent à cette faillite. Or la proposition qui nous est faite ne règle pas cette question.
Nous le savons bien, la nationalisation est un mot tabou, au moins en France – la Belgique, elle, a purement et simplement choisi cette voie –, pour les libéraux. On nous dit même qu’il s’agit de mesures dépassées. Pourtant, on tourne autour et on parle de solliciter la garantie de l’État moyennant rémunération. Comme on le ferait d’une sorte d’engagement hors bilan, tendant à limiter les effets de ce que nous n’allons pas manquer de voir.
L’État ira chercher sur les marchés les ressources lui permettant d’accorder sa garantie. Il la fera rémunérer et constatera sans doute en bout de chaîne les moins-values les plus diverses. Celles-ci vont de la déperdition des titres de Dexia, qui est déjà avérée – l’action est désormais aux alentours de 55 centimes à 60 centimes, alors qu’elle valait encore 3, 20 euros à la fin de l’année 2008 –, aux conséquences de la dépréciation des actifs gérés. Sans oublier les intérêts relatifs à la souscription du financement de la garantie.
L’affaire est d’ailleurs tellement bien ficelée que la Caisse des dépôts et consignations, appelée avec la Banque postale à reprendre le portefeuille de titres de dette publique locale en attendant de le développer à son tour, a demandé et obtenu que le plafond de garantie, dans un premier temps, soit supérieur sur ce créneau au risque de dépréciation encouru.
Il faut dire que si le résultat de la Caisse des dépôts disparaissait en tout ou partie dans la reprise des actifs de Dexia, le budget général s’en porterait sans doute assez mal !
En d’autres termes, la clientèle si particulière des collectivités servira probablement à asseoir l’équilibre financier de l’opération. En effet, les collectivités, obligées de renégocier leurs prêts pour éviter la dérive des taux, paieront pour une part la facture du redressement de Dexia.
Quand l’article 4 prévoit une garantie de refinancement rubis sur l’ongle en quelque sorte pour les actifs « ordinaires » de Dexia et une garantie minorée, partageant les coûts éventuels de dépréciation pour les actifs de « dette publique locale », il ne fait qu’accepter une certaine forme de laxisme pour un segment et de rigueur pour l’autre.
Dans le montage de l’article 4, ni Dexia ni la Caisse des dépôts n’ont le moindre intérêt à accorder aux collectivités locales quelque « faveur » que ce soit, qu’il s’agisse d’un abandon de créances, d’un moratoire de remboursement, même temporaire, ou d’un rééchelonnement éventuel des emprunts...
C’est là une situation que nous ne pouvons tout à fait accepter. C’est le sens de l’un de nos amendements, d’autant que les investissements des collectivités sont un facteur important de maintien de l’activité économique et de l’emploi, ce dont nous aurions grand besoin aujourd'hui.
Il importe que le présent projet de loi ouvre clairement la voie à la structuration d’un véritable pôle financier public, intégrant notamment au titre de ses missions prioritaires le financement des collectivités locales. La création d’un établissement public de financement s’appuyant sur la Caisse des dépôts et consignations et la Banque postale, entre autres, aurait été le prolongement indispensable aux propositions de garantie que vous nous proposez dans ce projet de loi de finances rectificative.
Or aucune proposition en ce sens ne nous a été présentée par le Gouvernement. Rien pour le moment dans la présentation que vous venez de faire, monsieur le ministre, ne nous laisse supposer que vous acceptez de vous engager dans une démarche de constitution d’une banque publique dédiée au financement des collectivités territoriales dans laquelle l’État pourrait pleinement faire entendre ses exigences pour contribuer efficacement aux politiques publiques.
Un tel positionnement du Gouvernement, s’il était maintenu au cours de nos débats, ne nous permettrait pas d’approuver le présent projet de loi de finances rectificative.