Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, entre cures d’austérité à l’intention de nos concitoyens et signes de docilité à destination des marchés, les collectifs budgétaires se succèdent et sont même particulièrement nombreux cette année. Manifestement, ce qui guide aujourd’hui la politique du Gouvernement, c’est le souci de gagner la confiance d’investisseurs, chaque jour plus volages, quitte à trahir celle des Françaises et des Français.
De ce point de vue, il n’est pas inutile de reprendre rapidement l’historique du naufrage qui nous réunit ce soir.
À l’origine, le financement des collectivités locales en France était tout simplement – et plutôt bien, d’ailleurs – assuré par une direction de la Caisse des dépôts et consignations. Puis, au cours des années quatre-vingt, cette direction a été progressivement privatisée. Au gré des fusions et des acquisitions, cela a donné Dexia, une banque emblématique d’un modèle économique fondé sur le profit aveugle.
Pendant des années, les dirigeants de Dexia se sont adonnés à une spéculation sans mesure, finançant leurs placements de long terme par des dettes à court terme, ce qui leur octroyait effectivement des taux de rentabilité vertigineux, s’élevant parfois jusqu’à 15 %, 18%, voire 20% ! Ainsi exposée à un risque maximal, Dexia a naturellement subi de plein fouet la crise des subprimes, autre avatar de ce système.
Face au risque systémique, cela a été dit, ce sont alors 6 milliards d’euros de fonds publics, pour moitié français, qui ont été appelés au secours en 2008. Pendant ce temps, les deux dirigeants se retiraient, plus ou moins discrètement d’ailleurs, pour l’un, avec 600 000 euros par an de retraite chapeau, et, pour l’autre, probablement pris de remords, avec seulement 800 000 euros de parachute doré.
Depuis, on nous dit que la gestion est irréprochable et que si, contrairement aux rassurantes promesses de 2008, Dexia est encore acculée trois ans après, ce n’est dû qu’à une inexplicable crise des dettes souveraines ; comme si ce n’était pas une réplique de la précédente…
Devant un tel scénario, on ne peut, comme vous le faites, monsieur le ministre, se contenter d’invoquer la nécessité de prévenir le risque systémique. Nos concitoyens comprennent en effet très bien que, une fois de plus, alors qu’on leur demande sans cesse plus d’efforts, c’est encore de l’argent public qui éponge les gabegies du privé.
Il est plus qu’urgent de briser ce modèle mortifère. Pourtant, au lieu de passer enfin à l’offensive politique qu’attendent les Français, le Gouvernement préfère se contenter d’accompagner indolemment l’évolution de l’époque.