Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je voudrais ajouter un mot sur la retraite. Le Gouvernement répète qu’il n’y a pas d’argent : il faut donc quelque part la blesser ou en détruire une dimension.
Mais nous connaissons tous ici un peu l'histoire. Quand la retraite a été inventée puis développée dans la forme choisie par les Françaises et les Français après la guerre, au moment même où était créée la sécurité sociale, y avait-il de l'argent en France ? Non ! Le pays était en ruine !
Et, malgré cela, une audace constructive, y compris pour régler la question de la ruine, a permis de donner les éléments d'une vie meilleure aux travailleurs, qui les réclamaient et les avaient mérités par le rôle qu'ils avaient joué dans la Résistance et par le combat à la Libération.
Aussi, je voudrais que l’on cesse de dire qu’il n’y a pas d’argent, d’autant qu’on sait qu’il y en a. Nous avons un exemple historique français où il n'y en avait pas et où on a fait. C’était mon premier argument.
Deuxième argument, et je reviens sur ce que je disais tout à l’heure : à la conférence de Philadelphie – tout de même, ça compte ! –, le Débarquement n’a pas encore eu lieu, nous sommes en mai 1944 et les Alliés se réunissent pour discuter non pas de l’ONU – ce sera plus tard –, pas des accords de Bretton Woods – ce sera également plus tard –, pas de la déclaration des droits et libertés – ce sera plus tard en 1948 –, mais des nouveaux droits sociaux ! Après une guerre de trente ans, de 1914 à 1945, ils pensent en effet qu’il est temps pour la vie humaine d’inventer ces nouveaux droits sociaux.
Vous rendez-vous compte que la France, qui a joué un rôle considérable dans cette élaboration grâce au travail du Conseil national de la Résistance, est aujourd’hui en train non pas d’être en tête, mais de prendre la dernière place ? Vous cassez ces acquis.
Troisième argument, – j’aperçois Robert Badinter, François Autain et Pierre Mauroy était présent tout à l’heure – j’étais au Gouvernement en 1982, mais je lis dans les journaux tous les jours combien le gouvernement actuel se dispute, invente des choses, recourt à ceci ou à cela. Si vous saviez la joie – tu peux en témoigner, Robert – que nous avions en 1982 dans notre gouvernement quand nous avons proposé la retraite à 60 ans.