Avec cet article 6, monsieur le secrétaire d’État, nous abordons la seconde mesure d’âge que vous prétendez indispensable et urgente pour préserver notre système de retraite par répartition.
Cet article est la conséquence mécanique de l’article 5, qui relève de deux ans la possibilité, et non l’obligation, de faire valoir ses droits à la retraite.
Il prévoit un relèvement progressif de deux ans de l’âge du bénéfice d’une pension à taux plein, qui passe de 65 à 67 ans.
La raison qui sous-tend cette seconde mesure est toujours la même : l’allongement de la durée de vie nécessiterait un allongement du temps passé à travailler.
Cette mesure ne réglera aucun des problèmes qu’elle prétend résoudre, car cette apparente évidence ne tient pas face à la réalité de la société dans laquelle nous vivons.
D’une part, le recul de l’âge légal de la retraite à 62 ans contraint les salariés ayant commencé à travailler tôt à cotiser au-delà de la durée légale.
D’autre part, pour la majorité de nos concitoyens, l’âge moyen du départ en retraite se situe d’ores et déjà au-delà de la borne d’âge légal des 60 ans, en raison d’une entrée plus tardive dans la vie active. Aujourd’hui, en effet, un retraité sur dix doit attendre ses 65 ans pour prendre une retraite sans décote.
Cette apparente évidence ne tient pas compte non plus de la réalité de la situation de l’emploi. L’obligation de travailler plus longtemps pourrait, à la rigueur, se justifier si les entreprises gardaient leurs seniors – elles licencient en moyenne à 58 ans – et si l’économie créait les emplois nécessaires pour intégrer les chômeurs et les jeunes qui entrent sur le marché du travail.
Comme ce n’est pas le cas, vous allez simplement reporter le déficit du régime vieillesse vers l’assurance chômage et rendre illusoire un retour à l’équilibre en 2018. La ficelle est un peu grosse à l’heure où vous vous préparez, comme tous les gouvernements en Europe, à présenter un budget de rigueur dont l’effet sera précisément de tuer la reprise et l’emploi.
Économiquement inefficaces pour préserver financièrement notre système de retraites, ces mesures d’âge sont également socialement injustes. Le passage de 65 à 67 ans pour une liquidation, sans décote, des carrières discontinues dont traite cet article est proprement scandaleux. C’est une ignominie sociale, car cette mesure conduira inéluctablement à une diminution des pensions versées.
En procédant ainsi, vous pénalisez encore plus tous ces salariés qui, par exemple, ont déjà eu à subir l’injustice du licenciement économique, de l’emploi précaire ou du temps partiel imposé. Vous leur infligez en quelque sorte une double peine.
Ces mesures concernent plusieurs générations d’actifs qui sont entrées dans la vie professionnelle depuis une vingtaine d’années et qui arriveront à l’âge de la retraite au moment où entreront en vigueur les dispositions de cet article 6. Ces générations subiront donc de plein fouet le relèvement de la borne d’âge de 65 à 67 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein.
Cet article 6 est, de nouveau, révélateur de la conception purement utilitariste du travail qui est la vôtre. Nous y sommes radicalement opposés et nous le manifesterons à travers nos amendements.