Tout à l’heure, lors des prises de parole sur l’article 6, mes collègues ont expliqué avec maints détails les raisons de notre totale opposition à l’article 6, qui, comme le précédent, est emblématique du présent projet de loi. Il constitue une injustice majeure et fondamentale.
L’injustice est majeure, parce que, en choisissant de relever à 67 ans l’âge auquel nos concitoyens pourront percevoir une retraite sans décote, le Gouvernement va frapper très durement les salariés qui ont connu une carrière difficile, chaotique, alternant périodes de chômage et d’emploi, le plus souvent sous contrat à durée déterminée.
L’injustice est majeure, parce que ce sont nos concitoyens les plus modestes, les plus fragiles, notamment les femmes, qui seront les premières victimes de cet allongement de la durée du travail.
Les femmes perçoivent une pension de retraite de 40 % inférieure à celles des hommes. Bien que ce fait ait été souligné à de multiples reprises, je le répète, ne désespérant pas qu’il soit enfin pris en considération. Les femmes ne sont que 44 % à avoir effectué une carrière complète, contre 86 % pour les hommes, et près de 35 % travaillent jusqu’à 65 ans pour éviter toute décote.
Qui plus est, l’inégalité existe aussi entre femmes puisque, toutes les études le montrent, les mères d’au moins deux enfants perçoivent une pension de retraite inférieure de 25 % à celle des femmes qui n’ont pas eu d’enfant.
L’injustice est majeure, disais-je, parce que cet allongement aura un impact sur la santé de nos concitoyens. Comme nous l’avons indiqué lors de la discussion générale, vivre plus longtemps ne signifie pas vivre en bonne santé. Or, en raison de l’allongement de la durée d’activité que vous proposez, la santé de nos concitoyens sera directement touchée et précarisée. Nous assisterons mécaniquement à un transfert de charge sur la caisse d’assurance maladie.
Croyez-vous que le fait de relever l’âge légal d’obtention d’une pension à taux plein va faciliter le passage de la situation d’actif à celle de retraité ? Pensez-vous sérieusement que nos concitoyens verront dans cette mesure de régression sociale l’opportunité de travailler plus longtemps ? Pensez-vous que le taux d’employabilité de cette catégorie de salariés va mécaniquement augmenter, que les personnes actuellement privées d’emploi au moment de leur départ à la retraite – telle est la situation de six salariés sur dix, et ce depuis plusieurs années – vont subitement en trouver un d’ici à leur soixante-septième anniversaire ?
Mes chers collègues, vous connaissez ces données par cœur. Vous avez fait les comptes : ce sera tout bénéfice pour la Caisse nationale d’assurance vieillesse, les salariés prenant leur retraite deux ans plus tard. Manifestement, ce n’est pas le moment de parler des déficits colossaux des ASSEDIC qui ne manqueront pas de résulter du dispositif qui nous est soumis…