Si la notion de théâtre privé renvoie d’abord à un statut économique, celui de société commerciale ne percevant pas de subvention directe émanant de l’État, elle désigne aussi une réalité artistique issue d’une longue tradition théâtrale.
Le théâtre privé perpétue un modèle d’exploitation théâtrale indépendant qui a longtemps caractérisé la vie du théâtre français, avant même l’essor considérable qu’a connu le théâtre subventionné.
Animé par des professionnels passionnés, le théâtre privé présente en France une forte spécificité. La directrice du théâtre Saint-Georges, Marie-France Mignal, nous en expose les traits : « Nous perpétuons un modèle d’exploitation indépendant qui a longtemps caractérisé la vie du théâtre français ». Elle ajoute : « Nous ne nous contentons pas d’animer un lieu, nous sommes nos propres producteurs, nous choisissons et défendons nos spectacles, prenons des risques ».
Cet engagement, nous le retrouvons chez les salariés qui travaillent dans ces salles de spectacles. C’est pourquoi nous devons avant tout refuser d’accentuer les difficultés multiples que rencontrent les salariés et passionnées du théâtre privé dans leur travail.
Cette exception française fait des théâtres privés des lieux de création incontournables, qui demeurent plus que jamais un terrain de découverte, de promotion et de diffusion d’œuvres originales et de nouveaux talents. Il est donc essentiel de défendre ces lieux de création face à la menace que représente la réforme du Gouvernement.
Les salariés relevant de la convention collective des théâtres privés du 25 novembre 1977 se trouvent, tout comme les techniciens de la production cinématographique dont nous avons parlé précédemment, dans une situation précaire et fragile.
Certains observateurs n’ont d’ailleurs pas hésité à souligner le lien entre une certaine forme de précarité inhérente au théâtre privé et son apport essentiel au meilleur de la création dramatique. Ainsi, le critique Jean-Jacques Gautier écrivait-il en 1968 « Dullin, Baty et Jouvet n’ont jamais été subventionnés. On peut même dire que le meilleur de leur œuvre a été réalisé dans la gêne, l’inquiétude du lendemain, l’impécuniosité chronique... ».
Historiquement, nous le voyons, le théâtre privé se sera heurté à beaucoup de difficultés, ce qui nous ramène à la situation actuelle.
Ce n’est pas sans mal que les salariés du théâtre privé cotisent, et ce depuis bien des années. Ce problème ne va pas s’atténuer avec le temps, et surtout pas avec les dispositions qui nous sont proposées.
C’est la raison pour laquelle je vous demande, mes chers collègues, de réserver un accueil favorable à cet amendement.