Intervention de Dominique Bussereau

Réunion du 12 octobre 2005 à 15h00
Règlement définitif du budget de 2004 — Débat sur les crédits du ministère de l'agriculture et de la pêche

Dominique Bussereau, ministre :

Je tiens d'abord à vous remercier, monsieur de Montesquiou, d'avoir analysé les difficultés de la politique agricole commune.

Lorsque j'ai succédé à Hervé Gaymard, le 30 novembre 2005, comme le président Arthuis l'a amicalement rappelé, ma première préoccupation a été de poursuivre les efforts de mon prédécesseur pour simplifier la conditionnalité que vous estimez, à juste titre, beaucoup trop complexe.

Nos efforts ont porté leurs fruits, car peu d'incidents ou de problèmes liés aux contrôles au titre de la conditionnalité se sont produits.

Je compte aller plus loin puisque j'annoncerai prochainement la mise en place d'un système d'autodiagnostic, dont j'ai déjà fait part au Parlement. Ce dispositif permettra de ne faire intervenir le contrôle qu'en bout de course, et donc de prendre en compte, auparavant, la parole de l'exploitant agricole qui aura décidé, dans une démarche volontaire, d'élaborer un diagnostic. Il s'agit en quelque sorte d'inverser la charge de la preuve.

Quant aux droits à paiement unique, les DPU, ils constituent une usine à gaz d'une incroyable complexité, avec plusieurs tours de métallisation !

Nous avons effectué un tour d'Europe avec des responsables agricoles et plusieurs parlementaires, sénateurs et députés, que je remercie de nous avoir accompagnés, afin d'étudier les différents dispositifs en place - couplage, découplage, DPU à l'échelon régional, comme cela se passe en Allemagne.

Nous avons donc tenté de choisir le système le moins complexe d'entre tous, même si, je le reconnais, il n'est pas d'une simplicité « biblique », si vous me permettez l'expression.

Les agriculteurs recevront vers le 15 octobre les dossiers relatifs aux droits à paiement unique.

Les chambres d'agriculture et les différentes organisations professionnelles ont accepté le principe de réunions d'information qui seront tenues dans la quasi-totalité des cantons en vue d'expliquer le système.

Les agriculteurs disposeront d'un délai allant jusqu'à la fin de l'année prochaine pour se mettre à jour afin de recevoir leurs aides au 1er décembre 2006.

Dans le cadre de notre réflexion, nous avons abordé différents problèmes, en particulier celui des agriculteurs décédés ou encore des exploitants agricoles de mauvaise volonté, ou qui refuseraient de souscrire des clauses.

Le système de clause pour lequel nous avons opté présente l'avantage d'éviter de passer par une réserve nationale, qui serait une nouvelle usine à gaz, en permettant de créer au fil des années une relation directe entre le cédant et le repreneur et de se mettre à jour de l'évolution de l'exploitation.

Ainsi, me semble-t-il, peu d'agriculteurs prendront le risque de se faire qualifier de chasseurs de primes, d'autant que nous avons mis en place un certain nombre de mesures coercitives que vous avez rappelées.

J'ajoute que nous avons essayé de donner une priorité à l'installation des jeunes et à certaines cultures difficiles.

Je reconnais, cependant, que tous ces dispositifs nécessitent des efforts de la part des agriculteurs, et je donne ma parole de tout mettre en oeuvre pour que les choses se déroulent de la manière la plus sereine et la plus facile possible à cet égard, tout en ne perdant jamais de vue l'objectif qui a été celui des différents gouvernements, à savoir que la « ferme France » ne perde aucun euro.

Comme je vous l'ai indiqué, nous avons déjà constitué une petite réserve qui nous permet d'effectuer de légères modulations, notre souhait étant de faire en sorte que le montant que percevra un agriculteur à la fin de l'année 2006 soit le plus proche possible de celui qu'il reçoit aujourd'hui. Tel est le sens de mes efforts.

En tout cas, croyez-bien, monsieur le sénateur, que j'adhère à votre message tendant à la simplification. Comme vous le constaterez, cette dernière, avec la suppression de règlements anciens et la modernisation du code rural, est au coeur du projet de loi d'orientation agricole.

Monsieur Jean Boyer, je vous remercie des propos que vous avez tenus au sujet de l'assurance récolte, qui constitue un succès. Je prends note de la nécessité d'améliorer encore les dispositions qui sont prévues à cet égard aux articles 18 et 19 du projet de loi d'orientation agricole.

S'agissant du BAPSA, vous avez rappelé à juste titre le montant du déficit qui s'élevait à 3, 2 milliards d'euros à la fin de 2004. Ce dernier résulte du cumul suivant : il s'agit d'abord du coût de la mensualisation des pensions de retraites et de la retraite complémentaire obligatoire - une très bonne mesure du gouvernement Raffarin - qui, avec le phénomène de rattrapage, représente le versement de deux mois supplémentaires de pensions de retraite en 2004 ; il s'agit ensuite d'une diminution de 840 millions d'euros de la recette de la taxe sur le tabac, conséquence de la politique de santé publique ; il s'agit enfin d'une baisse de recettes de 960 millions d'euros, due à un changement de système de comptabilisation des recettes et des dépenses, dont je vous épargne les détails techniques.

Aujourd'hui, nous devons trouver des solutions pour mettre fin à ce déficit et rembourser cette dette.

En ce qui concerne les effectifs du ministère de l'agriculture et de la pêche, il importe certes de simplifier. Comme vous le constaterez dans le cadre du projet de loi de finances pour 2006, nous prévoyons d'accomplir des efforts importants en matière de réduction des effectifs, tout en assumant les missions du ministère. Ainsi que vous l'avez indiqué, nous allons procéder au regroupement et au déménagement des offices agricoles sur un site unique, à Montreuil, afin d'améliorer leur travail.

Par ailleurs, la loi d'orientation agricole prévoit la création d'une agence unique de paiement, afin de simplifier les démarches des agriculteurs qui auront ainsi un interlocuteur unique pour les paiements du premier pilier et le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles, ou CNASEA, pour les paiements du deuxième pilier.

Je me permets enfin d'attirer votre attention, monsieur le sénateur, sur le fait que, si les personnels du ministère peuvent paraître trop nombreux, à entendre les chiffres importants que vous indiquez, la moitié d'entre eux sont des enseignants : près de 17 000 dispensent des enseignements agricoles dirigés non seulement vers le monde agricole, mais aussi vers l'ensemble de la ruralité et des Français.

L'enseignement agricole compte seulement 18 % de fils d'agriculteurs.

La filière cheval, à laquelle le président Arthuis et beaucoup d'entre vous sont attachés, attire de plus en plus de jeunes et crée des emplois : elle représente près de 75 000 emplois aujourd'hui dans notre pays.

L'enseignement agricole comprend également la formation à tous les métiers de l'environnement, de la jardinerie, à des métiers nouveaux, notamment d'aide à la personne en milieu rural.

La mission « enseignement agricole » nécessite des effectifs nombreux afin de dispenser des formations pour les futurs acteurs du monde agricole, mais aussi pour l'ensemble de la société française.

L'enseignement agricole a en effet la particularité d'être un enseignement de terrain. Souvent fondé sur l'alternance, il récupère de nombreux jeunes en échec dans le système scolaire classique. De ce fait, il joue un rôle actif d'intérêt collectif au sein de notre République.

Tourné vers les utilisateurs, au contact des réalités, inspiré par les agriculteurs, l'enseignement agricole est un exemple de réussite de l'enseignement républicain.

Je me devais de rappeler cette mission essentielle de l'enseignement agricole, qui est au coeur des dépenses de personnels du ministère de l'agriculture et de la pêche.

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