Monsieur le ministre, dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie, vous avez souhaité placer au centre de notre système de soins le médecin traitant, tout en laissant une liberté de choix aux patients. Nous constatons aujourd'hui que ces derniers ont majoritairement choisi comme médecin traitant leur médecin généraliste, reconnaissant de facto la spécificité que ces professionnels réclament et qui ne leur a pas été entièrement accordée lors de la mise en place de la réforme. Ce déni est d'ailleurs l'une des raisons de leur défiance.
Ainsi, par la force des choses, les médecins généralistes sont devenus des acteurs incontournables du monde de la santé alors que, paradoxalement, la médecine générale connaît à l'heure actuelle une certaine crise.
En effet, les problèmes de démographie médicale, et notamment d'accès aux soins de premier recours, sont inquiétants et risquent, si nous n'agissons pas, de se pérenniser. Certes, pour faire face à cette situation, vous avez récemment lancé, monsieur le ministre, un plan d'action en faveur de la démographie médicale, afin d'enrayer la véritable pénurie de médecins constatée dans certaines régions. Toutes les mesures mises en place permettent de répondre aux problèmes qui se posent sur le terrain, mais cette évolution ne peut se faire que lentement, car il faut dix ans pour former un médecin.
Ce n'est pas ce gouvernement, que nous soutenons, qui a limité le numerus clausus afin de réduire l'offre médicale, et donc les dépenses de santé. Au contraire, il l'augmente progressivement, d'année en année. Mais il ne peut pas le faire dans des proportions énormes, car l'appareil universitaire doit assurer une formation complexe, qui exige des moyens humains et financiers considérables.
Les mesures que vous avez prises ces derniers mois, monsieur le ministre, et qui visent notamment à soutenir les médecins actuellement en exercice dans des zones sous-médicalisées, sont donc très appréciées et vont dans le bon sens.
Par ailleurs, le dispositif permettant de faire connaître la médecine générale aux étudiants de deuxième cycle, grâce à la mise en place de stages, est encore parcellaire et expérimental.
Il faut faire plus pour rendre attractive la médecine générale, car là est bien le problème. Nous devons absolument rendre ses lettres de noblesse à cette discipline, ce qui passe en premier lieu par la mise en place d'une filière universitaire de médecine générale. En effet, la reconnaissance que vous avez proposée en 2004, monsieur le ministre, ne suffit pas.
La médecine générale doit être reconnue au même titre que toutes les disciplines universitaires, mais il faut aussi lui permettre de conserver sa spécificité clinique dans le monde médical : un exercice de la médecine centré sur les soins de premier recours, de proximité, de synthèse, et surtout sur la continuité du soin dans un système ambulatoire.
Les pistes pour la mise en place d'une telle filière ont été diagnostiquées et approuvées depuis longtemps par les principaux acteurs de ce secteur.
Il faut accroître la visibilité de la discipline en nommant des professeurs titulaires qui seront de véritables acteurs des enseignements de premier et deuxième cycles des études médicales.
Il faut aussi faire découvrir à tous les étudiants la pratique de la médecine générale, particulièrement sa spécificité ambulatoire, en facilitant la réalisation de stages de premier et de deuxième niveaux qui permettent de présenter les aspects positifs de cet exercice de la médecine, notamment en zone rurale, ou bien encore au sein de structures privées lorsque les terrains de stages sont insuffisants, comme c'est le cas en pédiatrie et en gynécologie. Il est temps de sortir du « 100 % CHU » afin que les étudiants bénéficient d'une véritable approche de la médecine générale.
Il faut également offrir aux étudiants qui le souhaitent la possibilité de mener une carrière universitaire en créant, au sein des services universitaires de médecine générale ambulatoire, des postes de chef de clinique, de maître de conférences et de professeur titulaire de médecine générale.
Mais il nous faut encore aller au-delà en donnant, d'une part, des garanties aux résidents et internes de médecine générale quant à la titularisation d'une partie des enseignants actuels associés à la discipline, en vue de l'encadrement des futurs chefs de clinique de médecine générale et, d'autre part, la possibilité aux résidents ayant validé les mêmes enseignements théoriques et pratiques que leurs collègues internes de pouvoir accéder au DES, le diplôme d'études spécialisées.
Monsieur le ministre, ces réformes sont attendues par les représentants de cette filière. Je vous serais donc reconnaissant de bien vouloir me faire connaître votre sentiment sur ces différentes propositions.