La séance est ouverte à dix heures.
Le procès-verbal de la séance du jeudi 18 mai 2006 a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.
J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Georges Treille, qui fut sénateur des Deux-Sèvres de 1977 à 1995.
Nous aurons l'occasion de lui rendre hommage dans cette assemblée.
M. le Président a reçu de M. le Premier ministre une lettre en date du 22 mai 2006 annonçant, dans le cadre des dispositions de l'article L.O. 297 du code électoral, la fin, le 27 mai 2006, de la mission temporaire confiée à M. Francis Giraud, sénateur des Bouches-du-Rhône, auprès du ministre de la santé et des solidarités et du ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche.
Acte est donné de cette communication.
M. le Président du Sénat a reçu de M. Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, le rapport 2005 sur les opérations de la Banque de France, la politique qu'elle met en oeuvre dans le cadre du système européen de banques centrales et les perspectives de celle-ci, conformément à l'article L. 143-1 du code monétaire et financier.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il sera transmis à la commission des finances.
La parole est à M. Dominique Braye, auteur de la question n° 1039, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le ministre, ma question traite des frais d'écolage dus par la commune de résidence à la commune d'accueil, qui reçoit dans ses écoles élémentaires des enfants ne demeurant pas sur son territoire.
En posant le principe d'un accord entre commune de résidence et commune d'accueil pour le financement de la scolarité des enfants fréquentant une école privée sous contrat située hors du territoire de leur commune de résidence, comme cela était déjà prévu en cas d'inscription dans une école publique située dans une autre commune, l'article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales semble avoir fait application d'un principe de parité entre enseignement privé et enseignement public pour la répartition intercommunale des charges scolaires.
Pourtant, monsieur le ministre, ce principe de parité n'est qu'apparent puisque n'ont pas été étendues à l'enseignement privé sous contrat l'ensemble des dispositions visant l'enseignement public. L'enseignement privé se trouve donc dans une position beaucoup plus avantageuse que l'enseignement public.
Ainsi, un maire qui peut refuser le financement des frais de scolarité d'élèves de sa commune inscrits dans l'école publique d'une commune voisine, au motif qu'il a organisé dans ses écoles tous les services nécessaires à l'accueil dans des conditions optimales des enfants de sa commune, se trouve néanmoins actuellement obligé de payer pour les enfants dont les parents ont fait le choix - leur choix ! - de l'école privée.
Cette disparité de traitement, en dehors de son injustice, entre les établissements d'enseignement sous statut public et sous statut privé, pénalise fortement les petites communes, notamment rurales, qui ont consenti des efforts considérables pour conserver une capacité d'accueil suffisante à leur école publique et pour créer des services périscolaires de cantine et de garderie permettant d'accueillir, dans les meilleures conditions, tous les enfants.
Cette disparité met aussi quelquefois en grand danger, vous le savez, monsieur le ministre, l'existence même de l'école publique communale, dont on ne soulignera jamais assez l'importance dans la vie de ces petites communes !
Ainsi, dans le département des Yvelines, sur les 8 900 élèves de l'enseignement primaire privé sous contrat, 3 900 sont inscrits dans une école privée située hors de leur commune de résidence.
Dans mon département, 230 communes sur 262 - soit près de 90 % - sont ainsi concernées, dont une grande majorité de petites communes rurales, pour lesquelles cette obligation de financement des écoles privées hors commune crée une très lourde charge financière supplémentaire et menace la pérennité de leur école publique.
Monsieur le ministre, trouvez-vous normal que l'enseignement privé soit ainsi favorisé par les dispositions en vigueur et que le financement de l'école privée soit porté à la charge du contribuable local lorsque ce dernier finance déjà l'école publique de sa commune, que celle-ci peut accueillir tous les élèves de son territoire, et ce dans d'excellentes conditions puisque tous les services ont été mis en place ?
Le choix de donner à ses enfants une éducation relevant de l'enseignement privé ou de l'enseignement public est une liberté fondamentale pour tous les parents - nous y sommes d'ailleurs très fortement attachés -, mais cela ne devrait en aucun cas impliquer pour les collectivités locales et pour les contribuables locaux une obligation de financer le choix de l'enseignement privé, sauf naturellement si, comme pour l'enseignement public, les communes de résidence n'ont pas mis en place toutes les conditions nécessaires à l'accueil optimal de leurs enfants !
Comment expliquer, monsieur le ministre, que les communes soient amenées à contribuer financièrement au fonctionnement des établissements privés sous contrat situés hors de leur territoire alors qu'elles ne sont pas contraintes de le faire pour les établissements privés situés dans leur périmètre ?
Je vais répondre !
Quelles mesures entendez-vous donc prendre, monsieur le ministre, pour rétablir une égalité de traitement entre les établissements privés entre eux et, surtout, entre l'enseignement public et l'enseignement privé au moment où de nombreux préfets - dont celui des Yvelines - ne savent pas comment appliquer ces dispositions dans leur département ou les appliquent de façon différente d'un département à l'autre ?
Monsieur le sénateur, l'article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a pour objet d'assurer une meilleure application de la loi dite « Debré » qui prévoit, comme vous l'avez souligné, la parité du financement entre les écoles publiques et les écoles privées.
Avant même l'adoption de l'amendement déposé au Sénat par M. Charasse, le principe de la contribution des communes pour les élèves scolarisés à l'extérieur de leur commune de résidence s'appliquait déjà aux écoles privées comme aux écoles publiques.
Toutefois, ce principe n'était assorti d'aucun dispositif permettant de résoudre les conflits éventuels surgissant entre les communes.
Désormais, en l'absence d'accord entre les communes, le préfet pourra, sur le fondement de l'article 89, intervenir ainsi qu'il le fait pour l'enseignement public afin de fixer la répartition des contributions entre les deux communes, celle de départ et celle d'accueil.
Cet article vise à mettre en place un règlement des conflits entre communes et, je le souligne, ne modifie pas le périmètre de la compétence de la commune pour la prise en charge des dépenses de fonctionnement des écoles situées hors de son territoire, qu'elles soient publiques ou privées sous contrat, qui scolarisent des élèves résidant dans cette commune.
M. Dominique Braye prend des notes.
Voulez-vous que je répète cette phrase-clé, monsieur Braye ?
La modification législative apportée par l'article 89 de loi du 23 avril 2005 vise, quant à elle, à préciser les limites de la contribution qui peut être mise à la charge de la commune de résidence pour un élève scolarisé dans une école privée sous contrat d'association située sur le territoire d'une autre commune.
L'article 89 de la loi du 23 avril 2005 prévoit que le coût par élève ne peut être supérieur à celui qu'aurait représenté pour la commune de résidence ce même élève s'il avait été scolarisé dans une école publique.
Des ambiguïtés sont apparues quant à l'interprétation à donner à cette disposition.
Une table ronde réunissant l'ensemble des parties concernées - l'Association des maires de France, les représentants de l'enseignement privé, le ministère de l'intérieur et le ministère de l'éducation nationale - s'est tenue sur l'initiative du Gouvernement.
Dans l'attente de la décision du Conseil d'État saisi d'un recours - elle sera probablement rendue d'ici à la fin de l'année -, cette réunion a permis de décider que chaque situation particulière serait examinée localement entre l'ensemble des parties concernées.
Monsieur le ministre, il s'agit d'un problème très important pour les petites communes.
Pour être scolarisé hors de sa commune dans l'enseignement public, l'élève doit avoir une dérogation du maire de la commune de résidence, sauf dans trois cas que vous connaissez. Si la dérogation n'est pas donnée par le maire de la commune de résidence, la commune ne paie rien.
En revanche, un élève qui va dans l'enseignement privé n'a pas besoin de dérogation, et la commune paie systématiquement !
Il y a donc une disparité entre l'enseignement privé et l'enseignement public.
Par ailleurs, contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le ministre, le périmètre est bien changé ! Nous demandions tout simplement une parité entre enseignement public et enseignement privé, afin que les maires qui ont consenti, avec l'argent du contribuable, de très gros efforts pour mettre en place des services de cantine, de garderie matin et soir, et qui ont la capacité d'accepter ces enfants sur leur commune, puissent les scolariser !
Si les parents font le choix de l'enseignement privé, c'est à eux d'en assumer la charge et non aux contribuables, d'autant que, dans les petites communes rurales, cette fuite ruine tous les investissements des mairies et met les écoles publiques communales en danger ! Or on ne rappellera jamais assez, monsieur le ministre, l'importance qu'a, dans ces petites communes rurales, l'existence d'une école publique communale !
Je voudrais donc que l'enseignement privé ne bénéficie pas d'un avantage et qu'il soit traité de la même façon que l'enseignement public, à la condition, naturellement, que les communes aient fait l'effort d'accueillir dans des conditions optimales tous les enfants !
Je confirme bien que le périmètre n'est pas changé et que les modalités d'application sont très difficiles.
Je rappelle à M. Braye que c'est au Sénat qu'a été voté l'amendement de M. Charasse, qui, dans son application, pose les problèmes que vous avez soulignés.
J'ai d'ailleurs cosigné avec le ministre de l'intérieur une circulaire pour demander aux préfets d'arranger les choses sur le plan local.
Attendons ensemble, monsieur le sénateur, à la fois les résultats du groupe de travail et la décision du Conseil d'État. Nous y verrons, je le pense, plus clair à ce moment-là.
Étant, à l'époque, rapporteur de la commission saisie au fond, je me souviens bien de ce débat !
La parole est à Mme Muguette Dini, auteur de la question n° 1033, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les incertitudes nées de la loi du 13 août 2004 relative, notamment, aux transferts des TOS, les personnels techniciens, ouvriers et de service, aux départements.
L'article 82 prévoit que, « le département assure l'accueil, la restauration, l'hébergement ainsi que l'entretien général et technique » et que, « pour l'exercice des compétences incombant à la collectivité de rattachement, le président du conseil général s'adresse directement au chef d'établissement ».
Ce dernier encadre et organise le travail des personnels TOS placés sous son autorité et assure la gestion du service de demi-pension, conformément aux modalités d'exploitation définies par la collectivité compétente.
Pourtant, l'article 67 de cette même loi précise que les TOS exerçant leurs missions dans les collèges resteront membres de la communauté éducative et continueront à concourir directement aux missions du service public de l'éducation nationale, tout en relevant au quotidien de l'autorité fonctionnelle du principal.
Je souhaiterais donc connaître précisément les responsabilités respectives du département et de l'État dans le cadre des missions spécifiques de restauration au sein des collèges.
La jurisprudence actuelle a établi que l'intoxication alimentaire, du fait du non-respect des règles d'hygiène, était significative d'une faute du chef d'établissement, de nature à engager la responsabilité pleine et entière de I'État. Dans leurs attendus, les juges considèrent que le chef d'établissement, en tant que représentant de l'État au sein de l'établissement, est tenu de prendre toutes les dispositions afin d'assurer la sécurité des personnes et des biens, l'hygiène et la salubrité de l'établissement.
Monsieur le ministre, en cas d'intoxication alimentaire dans un collège, qui sera tenu pour responsable ? Sera-ce l'État, représenté par le chef d'établissement qui a l'autorité fonctionnelle sur les TOS, ou le département, qui est l'employeur des TOS, mais qui, conformément à la loi, a délégué son autorité fonctionnelle au chef d'établissement ?
Madame le sénateur, je pense que la réponse que je vais vous apporter intéressera certainement M. Mercier, qui préside un département avec le talent qu'on lui connaît, ainsi que M. le président Philippe Richert. C'est une question très importante à laquelle ils sont très attentifs.
Comme vous le soulignez, l'article 82 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a confié la compétence du service de restauration aux départements pour les collèges et aux régions pour les lycées.
En conséquence, dans l'hypothèse où une faute est commise dans l'organisation du service de restauration, la responsabilité de la personne responsable du service - en l'espèce, le département pour les collèges et la région pour les lycées - pourra être recherchée.
La responsabilité des départements et des régions découle dans ce cas non pas du transfert des personnels techniciens, ouvriers et de service, mais de la compétence qui leur a été confiée par la loi en matière de restauration.
Par ailleurs, aux termes de l'article 8 du décret du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux d'enseignement, le chef d'établissement, en qualité de représentant de l'État au sein de l'établissement, « prend toutes dispositions, en liaison avec les autorités administratives compétentes, pour assurer la sécurité des personnes et des biens, l'hygiène et la salubrité de l'établissement ».
Ainsi, sa mission consiste notamment à porter à l'attention de la collectivité de rattachement de son établissement les éventuels dysfonctionnements constatés et à prendre, dans l'attente de l'intervention de la collectivité, les mesures propres à éviter les dommages.
Aussi, dans l'hypothèse où il serait établi que le chef d'établissement n'a pas pris les mesures appropriées, la responsabilité de l'État pourrait également être engagée.
Ce sont ces quelques précisions que je souhaitais vous apporter concernant la responsabilité de l'État ou de la collectivité dans le domaine de la restauration scolaire. J'ajoute qu'il n'est pas interdit de penser que cette responsabilité pourrait être partagée dans certains cas.
La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé, auteur de la question n° 1035, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le ministre, il y a un an, les Français disaient « non » à la Constitution européenne. Ce vote a provoqué deux réactions. Certains ont voulu culpabiliser les Français ; d'autres, comme moi, qui ont voté « oui », ont plutôt cherché à comprendre pourquoi 54 % d'entre eux avaient rejeté une Constitution qui mettait en place une économie sociale de marché et qui était un embryon de pouvoir politique pour l'Europe.
Un sondage publié récemment montre que 74 % des Français sont inquiets des conditions dans lesquelles s'effectuent le démantèlement de nos tarifs douaniers et de nos quotas de production, les échanges libéraux entre l'Europe et le reste du monde. Je fais partie de ces Français !
En mettant en place le cycle de Doha, on a progressivement déréglementé nos barrières douanières et mis en compétition frontale des pays dits émergents avec des économies possédant des règles, un modèle social et un certain niveau de vie. Aujourd'hui, nous constatons que ces pays dits émergents sont devenus des puissances « submergentes ».
Qui peut aujourd'hui nier que la monnaie, qui est l'un des moyens essentiels des échanges, n'est pas soumise partout aux mêmes règles ?
Qui peut aujourd'hui nier que la Chine est le premier atelier du monde de la contrefaçon, qui porte atteinte à nos PME, alors que ce n'est pas le cas en Europe ?
Qui peut nier que l'existence d'un code du travail dans les pays dits développés et son refus dans d'autres pays placent notre classe sociale la plus laborieuse dans des conditions difficiles ?
Mon but est non pas de remettre en cause la mondialisation, mais de faire un examen de la situation et, à l'instar du médecin, vérifier la tension du malade, prendre sa température, etc.
Dans le domaine des échanges, cette mondialisation, qui a consisté à placer entre les mains de technocrates le pouvoir politique qui appartient aux élus, aboutit à un divorce entre le pouvoir démocratique et le pouvoir technocratique. Je demande donc que soient mis en place des indicateurs afin de mesurer le respect des règles fixées par l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC.
Tout le monde ne respecte pas ces règles et ne fait pas preuve de la même loyauté. Dès lors, des couches de misère apparaissent, des divorces entre des gouvernements démocratiques et leur peuple se font jour, et nous nous retrouvons dans la situation que nous connaissons aujourd'hui.
Je suis favorable à la libéralisation de l'économie, mais pas dans n'importe quelle condition ni sans en mesurer les conséquences ou sans respecter les règles fixées par l'OMC. Tel est l'objet de ma question.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Mme Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur, qui n'a pas pu être présente ce matin pour répondre directement à votre question. Je vais donc vous communiquer sa réponse.
La libéralisation du commerce international et l'émergence de pays en développement de plus en plus compétitifs ont renforcé le besoin d'un cadre de concurrence loyale.
Le Gouvernement comprend donc votre souhait de pouvoir disposer d'un indicateur synthétique permettant de noter les comportements des uns et des autres. Votre proposition rejoint notre volonté de tout faire pour garantir le respect des règles de l'OMC par nos partenaires.
Il convient tout d'abord de rappeler que les membres de l'OMC disposent d'outils efficaces pour examiner le respect de ces règles par tous. Chaque membre de l'OMC est soumis à une « revue » par ses pairs. Il faut renforcer ce processus de surveillance multilatérale, en particulier concernant les grands pays émergents. En cas de non-respect des règles de l'OMC, les États membres qui s'estiment lésés peuvent avoir recours à l'organe de règlement des différends.
Toutefois, la situation est plus complexe pour les domaines qui ne relèvent pas des règles de l'OMC, notamment pour certaines normes sociales et environnementales ainsi que pour les taux de change. Comme vous le savez, les discussions sur les normes sociales ont été exclues de l'agenda de négociation du cycle de Doha.
Par ailleurs, les négociations à l'OMC sur le lien entre l'environnement et le commerce sont très limitées, en raison tant des réticences des pays en développement que des organisations non gouvernementales.
J'indique cependant que les pays développés ont le pouvoir, dans le cadre des préférences commerciales unilatérales qu'ils accordent aux pays en développement, de privilégier les pays respectant un certain nombre de critères objectifs annoncés à l'avance.
Enfin, le Gouvernement mène régulièrement des enquêtes, par l'intermédiaire des missions économiques à l'étranger, sur les difficultés que les entreprises françaises rencontrent dans l'accès à des marchés tiers.
Il suit attentivement ce dossier et agit dans les enceintes compétentes, en collaboration avec la Commission européenne. Il participe aussi à la lutte contre la contrefaçon, car c'est un fléau qu'il faut combattre.
Au-delà de ces considérations, ce débat doit se poursuivre. Le Gouvernement, en particulier ma collègue Christine Lagarde, reste à l'écoute des travaux du groupe de travail parlementaire sur la mondialisation, que vous animez.
La parole est à M. Pierre Hérisson, auteur de la question n° 1040, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Je souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les difficultés que rencontrent les gens du voyage pour souscrire ou renouveler certaines polices d'assurance et pour accéder aux crédits auprès des organismes bancaires.
Les difficultés d'accès aux dispositifs assurantiels concernent trois types de police : la garantie des véhicules, la garantie caravane-véhicule roulant et la garantie multirisque habitation.
Or il ressort principalement que les difficultés signalées pour l'accès aux assurances et aux crédits relèvent non pas d'une problématique tarifaire, mais d'un refus de garantie. En outre, elles ne relèvent pas uniquement d'une aversion au risque plus important de la part des mutuelles et des sociétés d'assurances vis-à-vis d'assurés ayant un mode de vie particulier, ni d'une enquête de sinistralité connue permettant de quantifier le risque et de rattacher les personnes itinérantes à un tarif spécifique. Les refus allégués visent les gens du voyage quelles que soient leurs conditions matérielles d'existence, qu'ils soient itinérants, semi-itinérants ou sédentaires.
Les principaux critères de différenciation semblent tenir à des signes distinctifs d'appartenance aux gens du voyage : détention d'un carnet de circulation, mention « sans domicile fixe » sur les cartes grises ou adresse de domiciliation.
Les publics autres que les gens du voyage, mais placés dans des situations objectivement identiques, ne rencontrent pas de problèmes de garantie, qu'il s'agisse des particuliers assurant leur caravane ou des commerçants ambulants et professions itinérantes assurant leurs véhicules.
Il pourrait s'agir d'un problème de domiciliation, puisque les sociétés d'assurances motivent leur attitude par le fait que les gens du voyage ne pourraient justifier d'un domicile fixe. Elles ne reconnaissent pas l'adresse de la commune de rattachement - et, par voie de conséquence, la loi du 3 janvier 1969 - ni celle de la domiciliation - c'est la loi du 29 juillet 1998 -, qui sont couramment usitées par les administrations publiques.
Cependant, au-delà de la question de l'accessibilité aux assurances et aux crédits, et alors que l'instauration d'une taxe d'habitation pour les résidences mobiles dès le 1er janvier 2007 est envisagée, que devient le principe républicain d'oeuvrer par et pour le droit commun ?
En ma qualité de président de la Commission nationale consultative des gens du voyage, permettez-moi de poser la question suivante : comment donner du sens et de la crédibilité à la mission qui m'a été confiée par M. le Premier ministre, dans l'objectif de favoriser l'insertion des gens du voyage, alors qu'ils ne peuvent pas remplir leurs obligations citoyennes pour cause de discrimination avérée ?
En conséquence, monsieur le ministre, je vous demande quelles mesures vous entendez adopter pour permettre aux gens du voyage de remplir leur devoir d'être assurés et pour garantir leur droit d'accéder aux crédits dans les mêmes conditions que chacun de nos concitoyens, c'est-à-dire dans le droit commun.
Monsieur le sénateur, M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie étant retenu ce matin, il m'a prié de vous communiquer sa réponse.
Tout d'abord, pour la plupart des risques, la loi ne prévoit pas d'obligation d'assurance.
Comme l'ensemble de nos concitoyens, les gens du voyage doivent tout naturellement négocier les conditions de leurs couvertures d'assurances, en particulier les tarifs, avec les compagnies concernées. Il en est de même pour la négociation de crédits bancaires avec les établissements financiers.
Le Gouvernement agit en faveur de l'accès du plus grand nombre aux garanties et au crédit, dans le respect, bien entendu, de la liberté contractuelle entre les établissements financiers et les consommateurs.
Dans cet esprit, il convient de réfléchir aux pistes qui pourraient permettre aux gens du voyage d'accéder à une meilleure couverture assurantielle.
Vous évoquez la domiciliation des gens du voyage. M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a saisi les organisations professionnelles du secteur de l'assurance et de la banque de cette question.
Il leur a demandé de lui faire connaître les mesures nécessaires pour améliorer l'information des établissements financiers sur la législation en vigueur, s'agissant notamment des dispositions de la loi du 3 janvier 1969 et de la loi du 29 juillet 1998.
Comme vous l'avez indiqué, de telles dispositions offrent aux gens du voyage la possibilité de se domicilier dans les centres communaux d'action sociale ou dans les locaux d'associations préalablement agréées.
Une telle faculté doit répondre aux préoccupations des sociétés d'assurances, qui souhaitent bénéficier - elles le rappellent chaque fois qu'elles en ont l'occasion - d'un point de contact fixe leur permettant de se mettre aisément en rapport avec leurs assurés.
En outre, le Gouvernement propose que la mise en oeuvre de cette information et les difficultés évoquées puissent faire l'objet d'un examen approfondi par la Commission nationale consultative des gens du voyage.
Cette commission, que vous présidez, monsieur le sénateur, a pour mission d'étudier avec l'ensemble des ministères concernés les problèmes spécifiques rencontrés par les gens du voyage.
Sur de tels sujets, il est donc important que la concertation puisse avoir lieu en partenariat avec cette commission nationale, qui a, me semble-t-il, vocation à devenir le centre du dispositif, de la réflexion et in fine de la prise de décision.
Monsieur le ministre, vous avez précisé que, même s'il n'y a pas d'obligation d'assurance, tous les acteurs concernés souhaitent que le droit commun s'applique bien à un corps social aujourd'hui composé à plus de 90 % par des personnes de nationalité française. Je profite de l'occasion qui m'est offerte pour insister sur ce dernier point, car ce n'est pas toujours ainsi que les choses sont comprises sur le terrain.
Vous avez également rappelé que des problèmes de droits et de devoirs, au sens général du terme, et de respect de la légalité se posaient dans un certain nombre de domaines.
Néanmoins, j'ai bien compris que vous comptiez sur la commission consultative nationale que j'ai l'honneur de présider pour étudier ce dossier difficile, ainsi que bien d'autres sujets, notamment le stationnement, l'habitat, la fiscalité locale, les prestations sociales et familiales et la reconnaissance de certains métiers. Vaste discussion !
Il y a urgence à traiter un certain nombre de problèmes qui, si nous n'y prenons pas garde, prendront rapidement la forme d'un péril social.
J'ai bien noté dans vos propos que nous pourrions compter sur le soutien du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie pour engager des discussions avec la Fédération bancaire française et avec les organismes représentant les compagnies d'assurances. Cela devrait nous aider à améliorer la situation.
Les gens du voyage qui veulent s'assurer ou trouver un crédit bancaire doivent actuellement s'adresser à une seule société, qui, je tiens à le dire, réside à Monaco !
Nous pouvons, me semble-t-il, faire mieux et essayer de trouver des solutions.
Certes, il n'y a pas d'obligation de partenariat. Mais, dès lors que les personnes concernées n'ont plus d'interlocuteur pour pouvoir négocier un contrat d'assurances ou un crédit bancaire, le problème est à traiter d'urgence.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.
La parole est à M. Bernard Dussaut, auteur de la question n° 1042, adressée à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État.
Monsieur le ministre, les coopératives agricoles constituent un outil essentiel de gestion du territoire.
Alors que nous traversons une période très sensible dans les régions viticoles, ces structures constituent un élément incontournable de survie économique pour une partie des producteurs.
Dans ce contexte, l'instruction parue au Bulletin officiel des impôts n° 57 du 29 mars 2006 suscite une émotion très vive.
Son objet initial était de préciser les conditions dans lesquelles les coopératives ou leurs unions peuvent rendre des services à des sociétés dont elles détiennent des participations. Mais son champ d'intervention est en réalité beaucoup plus large, puisque cette instruction instaure une taxation des ventes directes aux consommateurs des produits des adhérents des coopératives agricoles.
Monsieur le ministre, les sociétés coopératives agricoles s'étonnent de l'instruction publiée, d'autant plus qu'une concertation avait été établie sur leur initiative avec le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie aux mois de janvier 2005 et de mars 2005 en vue d'une clarification de la notion de vente au détail lorsqu'elle a lieu dans un magasin distinct.
En effet, la fiscalisation existe déjà lorsque le lieu de vente est extérieur à la coopérative et elle n'est nullement remise en question par le secteur coopératif dans ce cadre particulier.
La profession a formulé des observations : il n'en a absolument pas été tenu compte !
Tous les magasins seront donc dorénavant fiscalisés, qu'ils soient ou non distincts de l'établissement principal. On ne prendra plus en compte le fait que les ventes aient lieu dans la coopérative, dans un local accolé ou dans un local nettement distinct.
On fait donc porter dorénavant la taxation sur la vente au détail en opposition à la vente en gros, alors même que les coopératives ne vendent que les produits élaborés à partir des apports de leurs associés coopérateurs en conformité avec les règles de l'exclusivisme.
Les adhérents des sociétés coopératives agricoles craignent que le maintien de cette instruction ne constitue un pas de plus vers la disparition du statut particulier des coopératives agricoles, après l'obligation qui leur a été faite d'une immatriculation au registre du commerce.
Par ailleurs, examinée sous un angle purement pratique, cette instruction instaure des contraintes qui vont considérablement alourdir la gestion des structures. Les sociétés coopératives demandent expressément le retrait de la double comptabilité exigée pour la vente aux consommateurs.
La viticulture est une profession qui souffre. Or c'est elle qui est en premier lieu concernée par de telles dispositions.
Monsieur le ministre, jugez-vous réellement opportun de porter aujourd'hui une atteinte grave au statut fiscal des coopératives agricoles, avec pour incidence particulière dans le secteur de la viticulture l'émergence d'une concurrence déloyale en faveur des vignerons indépendants ? Avez-vous l'intention de revenir sur cette instruction, qui met à mal un tissu socio-économique fondamental dans nos territoires ? Enfin, engagerez-vous une réelle concertation avec les représentants des sociétés coopératives agricoles ?
Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser l'absence de M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, qui m'a demandé de vous communiquer sa réponse.
Comme vous le savez, le régime d'imposition des coopératives agricoles est un régime d'exception, qui est justifié par le respect des obligations liées au régime spécifique des coopératives.
Historiquement, la vente par les coopératives d'une partie de leur production sur le site même de la coopérative était considérée comme une activité civile non assujettie à l'imposition sur les sociétés.
S'agissant d'un point de vente artisanal ou considéré comme tel, cette dérogation se justifiait pleinement.
Mais, dans la pratique, nombre de coopératives ont structuré leur point de vente en ouvrant de véritables magasins, qui ne vendent d'ailleurs parfois pas exclusivement les produits de la coopérative.
Or, à coté de ces coopératives - la raison ne peut que l'accepter, monsieur le sénateur -, les petits commerces, qui sont les points de vente traditionnels, sont soumis à l'impôt sur les sociétés et à l'ensemble de la fiscalité des entreprises.
C'est pourquoi, si l'on veut conserver le régime spécifique des coopératives agricoles, il faut faire preuve de rigueur dans son application, afin d'éviter les distorsions de concurrence et d'éventuelles dérives qui ne seraient pas acceptables.
Lors des consultations menées avec M. le ministre de l'agriculture et de la pêche, les représentants des coopératives ont d'ailleurs indiqué au Gouvernement avoir conscience de telles difficultés.
Le Gouvernement a donc décidé de préserver le régime des coopératives tout en renforçant ses conditions d'applications dans le sens que je viens d'expliquer. C'est l'objet de l'instruction fiscale du 29 mars 2006, qui est toute récente.
Cela étant, mon collègue M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, ne méconnaît pas les remarques émises, d'une manière d'ailleurs assez répétitive, par les représentants des coopératives viticoles.
C'est la raison pour laquelle il a tenu à engager avec eux un dialogue constructif, dialogue qui est actuellement en cours. Ainsi, une réunion a été organisée à son cabinet le 17 mai dernier et une nouvelle réunion aura lieu cet après-midi même. Les parlementaires seront informés de l'évolution de ces discussions.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments que je souhaitais porter à votre connaissance sur ce dossier.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse, qui me satisfait partiellement.
J'ai bien noté votre intention de réengager une concertation, notamment dans le cadre de la réunion du 17 mai dernier et de la réunion de cet après-midi.
Toutefois, ce que nous espérons, c'est que l'on puisse effectivement revenir sur cette instruction, qui pénalise réellement les coopératives, en particulier les coopératives agricoles.
À la question : « Est-il opportun de toucher au statut fiscal des coopératives dans cette période ? », je n'ai pas de réponse. De toute évidence, ce n'était absolument pas le moment !
Néanmoins, je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.
La parole est à M. René-Pierre Signé, auteur de la question n° 1056, adressée à M. François Loos, ministre délégué à l'industrie.
Malgré le respect que je porte à M. Hamlaoui Mékachéra et l'admiration que j'ai pour les anciens combattants, je déplore que M. le ministre délégué à l'industrie ne soit pas présent pour répondre à une question aussi importante sur une entreprise qui veut survivre. C'est donc M. le ministre délégué aux anciens combattants qui va y répondre. Avouez que la symbolique n'est pas excellente !
Monsieur le ministre, la fermeture de l'usine de production DIM de Château-Chinon, annoncée lors du comité central d'entreprise du groupe Dim Branded Apparel, qui s'est tenu le lundi 15 mai 2006, a provoqué la stupeur et la colère des salariés et des élus.
Le plan de restructuration de l'entreprise concerne toute la France, mais la situation est particulièrement dramatique à Château-Chinon, dans la mesure où la fermeture pure et simple du site est programmée. Ce sont ainsi quatre-vingt-quinze personnes qui sont visées par un licenciement et autant de familles qui sont durement touchées.
Une fois encore, un groupe industriel s'abrite derrière la sauvegarde de la compétitivité pour justifier la destruction de l'emploi dans une région déjà durement atteinte par les plans sociaux et profondément marquée par le départ de ses fleurons industriels.
En conséquence, monsieur le ministre, je vous demande de prendre en considération les conséquences sociales et territoriales de cette fermeture annoncée et de m'indiquer les moyens que vous envisagez de mettre en oeuvre afin de répondre à l'inquiétude extrême des salariés.
Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser l'absence de M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Toutefois, ce n'est pas à vous que je rappellerai que l'unicité d'un Gouvernement est entière et que, par conséquent, l'un de ses membres peut très bien répondre à une question portant sur une matière n'entrant pas dans sa sphère de compétence.
Cela étant, dans le cas de marques renommées, comme DIM, qui est un fleuron de notre industrie, tout doit être mis en oeuvre afin de lui permettre de perdurer. Cela passe par l'innovation, la création et l'investissement.
Le Gouvernement s'est fortement impliqué dans ces trois directions. Trois pôles de compétitivité ont été labellisés dans le secteur textile. Le crédit d'impôt collection a été doublé depuis l'an dernier et le dispositif Oséo pour le textile a été renforcé il y a quinze jours.
S'agissant des restructurations, le Gouvernement sera particulièrement vigilant, monsieur le sénateur, sur la manière dont l'entreprise procèdera pour aider les salariés touchés à retrouver un emploi. Une attention particulière sera accordée à la main d'oeuvre féminine, très présente dans ce type d'activité. De manière injuste, les femmes sont en effet très souvent les premières victimes de ce fléau.
Sachez que les représentants des salariés seront reçus cet après-midi par M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
Par ailleurs, la loi de programmation pour la cohésion sociale impose également à DIM de contribuer au développement économique des territoires touchés par la restructuration. L'entreprise devra favoriser des actions susceptibles de créer dans le bassin de Château-Chinon autant d'emplois qu'elle en aura supprimé.
M. le ministre délégué à l'industrie recevra d'ici à quinze jours le président de la maison mère de DIM, ainsi que le président de DIM, notamment pour leur rappeler les règles élémentaires qui doivent être appliquées.
Quant à la prise en considération des conséquences sociales et territoriales de cette fermeture annoncée, sachez que nous avons proposé à la Commission européenne de prolonger en 2007 et en 2008 le bénéfice des aides à finalité régionale pour le bassin de Château-Chinon, alors même que les zones couvertes en France seront réduites de moitié après 2006.
Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement est pleinement mobilisé sur ce dossier.
Monsieur le ministre, vous nous dites, et je vous en remercie, que ce dossier est l'une des préoccupations du Gouvernement. Mais nous ne sommes pas dans la même logique que vous !
Vous ne parlez que de plan social. C'est donc que vous considérez que le plan d'orientation stratégique est définitivement adopté et que les licenciements seront bien réels, ce qui n'a pas encore été dit, même si nous nous doutons bien que la décision sera prise le 20 juin de fermer le site de Château-Chinon. Si une réduction d'effectifs est à la rigueur envisageable, nous ne voulons pas de la fermeture de ce site !
Les salariés, les syndicats et les élus feront à M. le ministre, s'il les reçoit - un rendez-vous a été demandé -, des contre-propositions montrant que le site de Château-Chinon est parfaitement viable et que le transfert en Chine occasionnera de nombreux inconvénients, en particulier une perte en termes de savoir-faire, de ponctualité et de compétitivité des salariés de Château-Chinon.
Ces salariés ont été soumis aux pires conditions : ils ont amputé leurs vacances, travaillé les jours fériés, fait face à des commandes imprévues. Ils ont mis en oeuvre la flexibilité, la mutabilité et l'adaptabilité, qui, dit-on, riment avec plein-emploi. Sûrement pas ! Malgré tout cela, ils seront licenciés ! C'est très choquant. En outre, la fermeture totale du site de Château-Chinon fera perdre, brutalement, à cette ville plus de 50 % de sa taxe professionnelle. C'est désastreux. Ce n'est pas acceptable pour nous.
Monsieur le ministre, je vous remercie de me dire que DIM appliquera un plan social, que des reconversions seront prévues, mais ce n'est pas ce que nous souhaitons. Nous voulons que le site ne disparaisse pas !
J'espère que nous aurons l'occasion de rencontrer M. Gérard Larcher ou M. François Loos parce que nous avons des contre-propositions à leur faire, qui pourraient, selon nous, sauver le site.
La parole est à M. Michel Mercier, auteur de la question n° 1045, adressée à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.
Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur la mise en oeuvre de l'article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, qui a rendu obligatoire le financement de la scolarité des enfants inscrits dans une école privée sous contrat située dans une commune dont ils ne sont pas résidents par leur commune de résidence.
Dans mon département, comme dans de nombreux autres, cette question est mal perçue et mal vécue, notamment par les maires, qui se trouvent à la croisée de deux exigences constitutionnelles contradictoires, sans pouvoir parvenir à une solution équilibrée : d'un côté, la liberté pour les parents de choisir l'école de leur enfant ; de l'autre, le principe d'autonomie financière des collectivités territoriales.
L'article 89 de la loi du 13 août 2004 fait application d'une fausse symétrie entre le financement des écoles publiques et celui des écoles privées. Ainsi, un enfant peut être inscrit dans une école publique d'une commune autre que celle où il réside, à condition que le maire accorde une dérogation. S'agissant d'une école privée sous contrat, il s'agit d'une décision des parents, qui va pourtant s'imposer au maire, lequel n'aura plus la liberté de décider d'une dépense communale.
Je conçois parfaitement qu'il ne soit pas facile pour vous, monsieur le ministre, de résoudre la contradiction entre deux règles constitutionnelles aussi fortes, auxquelles nous sommes tous attachés. Néanmoins, ce problème se pose dans des petites communes, mais également dans des très grandes communes, qui comptent de grands établissements privés. Ce sont alors les petites communes qui doivent payer pour les établissements privés de la grande commune.
Monsieur le ministre, où en est le Gouvernement de sa réflexion sur cette question ? Comment envisage-t-il de régler le problème de l'application de cette règle afin que celle-ci ne crée pas de divisions entre les communes, mais également entre les Français ?
Lorsque l'existence de l'école communale d'une petite commune dépend de l'inscription de quelques élèves, qui vont dans l'école de la commune voisine, cela pose des problèmes juridiques, mais aussi relationnels entre les habitants d'une même commune. Certains soutiennent l'école, d'autres pas !
Derrière une apparente symétrie de financement de l'école publique et de l'école privée, l'article 89 soulève bien des questions difficiles à résoudre. Comment le Gouvernement envisage-t-il de régler ces problèmes juridiques pour assurer la paix scolaire dans la commune ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le sénateur, vous posez, comme à l'accoutumée, une question avisée sur un sujet important, qui, à l'évidence, préoccupe de nombreux élus locaux. Je ne m'étonne pas que vous vous en fassiez ainsi l'écho. Cette question appelle une réponse à la fois prudente et précise.
Cette question appelle d'abord une réponse prudente, et ce pour deux raisons. La première est que, comme vous le savez sans doute, la circulaire du 2 décembre 2005 prise pour l'application de l'article 89 de la loi relative aux libertés et responsabilités locales a fait l'objet d'un recours devant le Conseil d'État. La seconde est que, comme vous le soulignez vous-même, l'enjeu de cette question est la conciliation du principe de parité entre école publique et école privée, ainsi que la liberté de choix des parents, à laquelle nous sommes, vous et moi, attachés. La prudence commande donc d'attendre que le Conseil d'État se soit exprimé avant d'apporter une réponse définitive.
Cette question appelle ensuite une réponse précise, et ce également pour deux raisons : d'une part, parce que l'application de l'article 89, qui résulte d'un amendement de votre collègue Michel Charasse, est un sujet à la fois très sensible pour les communes et les familles concernées et relativement complexe d'un point de vue juridique ; d'autre part, parce que vous n'ignorez pas que l'article 89 et la circulaire du 2 décembre 2005 ont suscité des interrogations légitimes, voire des incompréhensions, auxquelles il convient de répondre, même à titre provisoire.
Pour commencer, rappelons la portée de cet article. Il porte sur la prise en charge par les communes de résidence des dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat pour les élèves scolarisés dans une autre commune, dite commune d'accueil. Pour les écoles publiques, cette question est traitée par l'article L. 212-8 du code de l'éducation.
En vertu de l'article L. 442-9 du code de l'éducation, le principe de la répartition des dépenses de fonctionnement par accord entre commune d'accueil et commune de résidence était déjà applicable au financement des écoles privées sous contrat. Mais, faute de procédure de résolution des conflits, aucune disposition ne permettait de surmonter d'éventuels désaccords.
L'article 89 a donc pour objectif et pour effet d'étendre au financement des écoles privées la procédure de résolution des conflits et les modalités de calcul des contributions de la commune de résidence, telles qu'elles sont prévues par les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 212-8.
Cette première précision est, au demeurant, une manière de rappeler que cette procédure n'a vocation à intervenir que dans les cas où aucun accord n'a pu être obtenu pour la prise en charge des dépenses de fonctionnement afférentes aux élèves « non-résidents ».
Lorsqu'il est nécessaire de mettre en oeuvre cette procédure, deux situations se présentent alors.
Si la commune de résidence est dépourvue de capacités d'accueil dans ses établissements scolaires - c'est le premier cas de figure -, il appartient au préfet de déterminer la contribution de celle-ci, après avis du conseil départemental de l'éducation nationale, le CDEN, en tenant compte de ses ressources, du nombre d'élèves concernés et du coût moyen par élève.
C'est dans le second cas de figure, si la commune de résidence dispose de capacités d'accueil dans ses établissements scolaires, qu'il existe à l'évidence une divergence d'interprétation entre l'Association des maires de France et les représentants de l'enseignement catholique, qui représente environ 97 % de l'enseignement privé sous contrat.
Selon l'AMF, la contribution de la commune n'est obligatoire que dans les cas où celle-ci devrait participer au financement d'une école publique extérieure qui accueillerait le même élève, c'est-à-dire, concrètement, si elle a donné son accord à une scolarisation extérieure ou si cette scolarisation extérieure est liée aux obligations professionnelles des parents, à l'inscription d'un frère ou d'une soeur dans un établissement scolaire de la même commune ou à des raisons médicales. Dans tous les autres cas, la commune serait exonérée.
Selon l'enseignement catholique - dont j'ai d'ailleurs rencontré les représentants, voilà quelques jours -, si cette exonération est justifiée s'agissant des écoles publiques - puisqu'il s'agit de dérogations à la carte scolaire -, elle ne saurait s'appliquer aux écoles privées.
Le ministère de l'intérieur, en liaison avec le ministère de l'éducation nationale, a eu à coeur, ces dernières semaines, de susciter un dialogue entre l'Association des maires de France et le Secrétariat général de l'enseignement catholique.
Nous leur avons proposé un modus vivendi, qui devrait être prochainement acté, reposant sur trois principes.
Le premier principe est de conserver à la procédure de fixation des contributions communales par le préfet son caractère résiduel, et donc de privilégier les accords locaux, dans leurs différentes formes.
Le deuxième est de prendre acte de la divergence d'interprétation et de considérer qu'elle doit être tranchée, dans la mesure du possible, dans un cadre national, par le Conseil d'État.
Le troisième principe est donc, dans l'attente de cette clarification, d'appliquer l'article 89, au moins pour tous les cas qui ne font pas l'objet d'une divergence d'interprétation.
Je terminerai en soulignant que le dialogue entre les représentants des maires et ceux de l'enseignement catholique a été marqué par une grande qualité d'écoute réciproque, qui reflète d'ailleurs la réalité du dialogue qui se noue au plan local, dans la plupart des départements. Le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, a d'ailleurs demandé aux préfets, qui étaient réunis hier, de prolonger ce dialogue dans leurs départements.
Je crois, monsieur Mercier, que ce dialogue est de nature à régler la plupart des difficultés rencontrées et à assurer la mise en oeuvre de l'article 89 de la loi relative aux libertés et responsabilités locales dans un climat apaisé et constructif.
M. Michel Mercier. Il est bien normal que ce soit un Auvergnat qui essaie de nous sortir de cette affaire !
Sourires
Votre habileté est grande, comme toujours, monsieur le ministre ; vous avez su tracer un certain nombre de perspectives, mais toutes ne peuvent pas aboutir, vous le savez.
Vous attendez, dites-vous, la décision du Conseil d'État. Or, vous savez bien que l'article 89 est d'application directe, qu'il n'y a donc pas eu de décret et qu'il s'agit simplement de savoir si la circulaire que vous avez prise avec le ministre de l'éducation nationale est ou non contraire à la loi. Mais cette décision ne changera pas la loi en elle-même, le Conseil d'État n'ayant pas ce pouvoir. Il peut se fonder sur la jurisprudence posée par l'arrêt du 29 janvier 1954 « Institution Notre-Dame du Kreisker », qui portait d'ailleurs sur une question extrêmement voisine, pour juger que la circulaire doit être annulée. Donc, il y a là une éventuelle solution.
Vous avez raison sur un point, qui est le plus important : il faut privilégier l'accord local par rapport à toute autre décision, sinon on ne s'en sortira pas.
Si, jusqu'à maintenant, les choses ont fonctionné, c'est parce qu'au fil du temps des accords locaux ont été trouvés, qui allaient au-delà de la loi Barangé, de la loi Debré, de tous les textes relatifs aux écoles privées, et qui, localement, ont permis qu'un modus vivendi soit établi. Chaque fois que le Gouvernement, par l'entremise des préfets, laissera un accord local secret vivre sa vie, nous aurons gagné.
Le pire serait de créer des divisions sur une question aussi importante. Je vous remercie donc, monsieur le ministre, de vouloir privilégier l'accord local par rapport à toute disposition législative d'ordre général qui risquerait, en n'étant pas suffisamment précise, de créer des dissensions.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, auteur de la question n° 1057, adressée à M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire.
Monsieur le ministre, pendant longtemps, la Lorraine, au regard des richesses que lui offrait l'exploitation du minerai de fer et du charbon, fut perçue comme l'Eldorado. Mais cette période est révolue, tant et si bien que l'on parle depuis plusieurs années d'« après-mines ». Cette appellation quelque peu restrictive ne saurait se limiter à la seule gestion de l'arrêt d'activités traditionnelles. Elle cache des problématiques territoriales plus larges et plus complexes que celles qu'impose une simple reconversion.
Cette reconversion du secteur minier ferrifère et charbonnier lorrain est loin d'être achevée dans la mesure où elle doit faire face à de nouvelles difficultés. Je pense à l'ennoyage, à la gestion de l'eau et aux affaissements miniers dramatiques du bassin sidérurgique ferrifère, à propos desquels d'ailleurs mes collègues Gisèle Printz, Daniel Reiner, Jean-Pierre Masseret, président de la région Lorraine, et moi-même n'avons jamais cessé d'interpeller, ici même, le Gouvernement. Je pense également aux nouvelles contraintes qui feront suite à la disparition programmée de Charbonnages de France dans le bassin houiller de Lorraine.
Qui dit « reconversion » dit « requalification urbaine et développement durable ». Entamée lors du précédent contrat de plan État-région, la requalification urbaine des cités minières demeure une priorité à la fois par l'ampleur des travaux restant à réaliser et par l'attente sociale qu'elle constitue. À cette dernière s'ajoutent les problèmes liés à l'alimentation en eau potable, l'assainissement, le traitement des friches et la gestion du foncier.
Ce sont autant de chantiers pour lesquels la région Lorraine, le département et les communes concernées ne pourront, avec la fin du contrat de plan État-région, assumer seuls les coûts financiers induits.
Permettez-moi, pour expliciter mon propos, de prendre l'exemple d'un bassin déjà fragilisé économiquement, le bassin houiller de Lorraine.
Avec la disparition programmée de Charbonnages de France, le bassin houiller de Lorraine doit réussir sa réinitialisation et les collectivités du secteur achever la réhabilitation de leurs cités minières. Ces collectivités devront également faire face à un éventuel transfert des actifs immobiliers encore propriété de Charbonnages de France.
Selon un premier recensement des besoins exprimés en fin d'année 2005, seront encore nécessaires, avant le terme du plan FNADT, le fonds national d'aménagement et de développement du territoire, 70 millions à 100 millions d'euros pour les travaux de voirie et d'assainissement, 20 millions d'euros pour les travaux d'alimentation en eau potable, et 30 millions à 40 millions d'euros pour faire face aux transferts des actifs immobiliers de Charbonnages de France.
Face à de tels chiffres, de tels enjeux, l'État ne peut se désolidariser d'une région qui, par son histoire, son industrie, ses mines et son économie, fit les beaux jours de notre pays. Le gouvernement Jospin l'avait compris, lorsqu'il précisa au moment du plan FNADT, à travers lequel étaient pris en charge à 100% les travaux de voirie et d'assainissement des communes minières, que celui-ci n'était pas signé pour solde de tout compte, qu'il en faudrait certainement d'autres.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaite savoir si l'État entend inscrire un volet « après-mines » lors du contrat de projet qu'il signera avec la région Lorraine, pour qu'ensemble nous réussissions cette reconversion inachevée.
Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. Christian Estrosi, qui, empêché, m'a chargé de vous répondre aussi précisément que possible.
Le Gouvernement attache une grande importance au devenir des bassins miniers, en particulier ceux de la Lorraine et du Nord-Pas-de-Calais.
Sur la seule période 2000-2006, période actuelle des contrats de plan, 21 millions d'euros en Lorraine et 160 millions d'euros dans le Nord-Pas-de-Calais ont été consacrés au volet « après-mines ».
C'est vrai, les gouvernements successifs ont pris, dès l'an 2000 - j'y insiste -, du retard sur ces programmes. Aujourd'hui évalué à un peu plus d'un an de programmation, ce retard est dans la moyenne de ceux qui sont constatés globalement sur d'autres volets et il est d'ailleurs identique à ceux qui ont marqué les précédents contrats de plan.
Je tiens à souligner que le Gouvernement tiendra tous les engagements qu'il a pris sur la restructuration des zones minières dans le cadre des actuels contrats de plan, et ce, même s'il faut plus de temps que prévu à l'origine. C'est un engagement fort, au nom de la solidarité nationale.
Le ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a toujours été favorable à ce qu'un volet « après-mines » soit envisagé dans les futurs contrats de projet pour la Lorraine. Il s'agit de terminer, au nom de la cohésion économique, sociale et territoriale, ce vaste programme commencé voilà une trentaine d'années. Sous l'impulsion du ministre d'État, mon collègue Christian Estrosi et moi-même avons porté cette conviction dans le débat gouvernemental. Et nous avons eu raison.
En effet, dans les futurs contrats de projet 2007-2013, dans la troisième des trois priorités nationales - celle de la cohésion sociale et territoriale - figure un thème intitulé « anticipation et accompagnement des mutations économiques dans les bassins les plus affectés ». C'est dans ce thème que peut et doit s'insérer le futur volet « après-mines ».
C'est d'ailleurs une parole que Christian Estrosi est allé porter devant vous, en Lorraine, en avril dernier, à l'occasion d'une réunion consacrée aux contrats de projet et à laquelle étaient conviés tous les grands élus lorrains, en particulier les parlementaires, dont vous-même, monsieur le sénateur.
Monsieur le ministre, je vous remercie de la réponse que vous venez de m'apporter, au nom de M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire.
J'étais, bien sûr, présent à la préfecture de région lors de la venue de M. Christian Estrosi, car, si je n'assiste pas à toutes les réunions, sur des sujets comme celui-là, je suis en général assez attentif.
J'ai donc noté dans votre réponse que pouvait et devrait s'inscrire un contrat de projet avec la région Lorraine dans le cadre des futurs contrats de projet C'est déjà, en tout cas, une mesure certaine.
Le conseil régional, quant à lui, le 23 mai dernier, a donné mandat à son président pour négocier le contrat de projet avec l'État, notamment le projet intitulé « requalification des territoires post industriels et après-mines ».
Je déplore que le Gouvernement ait préféré reporter la discussion du volet territorial, qui est pourtant très urgente dans notre secteur. En effet, il n'est pas possible d'envisager le développement futur de territoires qui ont été aussi sinistrés sans une politique d'aménagement du territoire.
Je souligne que 80 % des propositions du préfet recoupent celles de la région Lorraine. L'ensemble des élus, toutes tendances confondues, souhaitent en tout cas que l'État soit vraiment présent dans le cadre de ce projet « après-mines ». En effet, les capacités contributives de certaines communes sont tellement faibles que, sans une participation forte des collectivités territoriales plus importantes et de l'État, l'avenir sera très sombre.
La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 1046, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur l'application de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage.
En effet, les schémas départementaux sont aujourd'hui établis, mais la totalité des aires d'accueil n'est pas réalisée, loin de là. Je souhaite donc connaître l'état d'application de cette loi et le niveau de réalisation des objectifs déterminés par les schémas départementaux.
De plus, l'article 3 de cette loi dispose : « Si, à l'expiration d'un délai de deux ans suivant la publication du schéma départemental [...] et après mise en demeure par le préfet restée sans effet dans les trois mois suivants, une commune ou un établissement public de coopération intercommunale n'a pas rempli les obligations mises à sa charge par le schéma départemental, l'État peut acquérir les terrains nécessaires, réaliser les travaux d'aménagement et gérer les aires d'accueil au nom et pour le compte de la commune ou de l'établissement public défaillant. »
Dans ces conditions, je souhaite donc également savoir quelles mesures ont été prises par l'État pour remplir cette obligation en cas de défaillance des communes, sachant que des délais supplémentaires ont déjà été accordés.
Ainsi, dans mon département, la Seine-et-Marne, six ans après l'adoption de cette loi, 196 places ont réellement vu le jour et 78 seulement sont en cours de réalisation, alors que les besoins estimés par la préfecture en janvier dernier s'élèvent à 1 250 places !
Les retards accumulés pénalisent fortement les communes ou les intercommunalités qui ont respecté la loi et investi dans la réalisation d'aires d'accueil.
En nombre très insuffisant, les aires aujourd'hui créées ne permettent pas de garantir aux populations concernées des conditions d'accueil satisfaisantes.
Ce manque place également les communes dans des situations difficiles. En effet, malgré les tarifs attractifs des aires d'accueil - par exemple, deux euros cinquante par jour sur l'aire de ma commune pour un emplacement pouvant accueillir deux caravanes - les stationnements sauvages persistent, provoquant l'exaspération des élus et des administrés, qui ne comprennent pas l'inaction des pouvoirs publics. Les mesures administratives restent trop lourdes - intervention d'huissier et saisine en référé du tribunal de grande instance -, et inopérantes, car l'obtention d'une ordonnance du tribunal demande entre quatre et cinq jours, retardant d'autant l'intervention des forces de l'ordre.
Les communes ayant fait l'effort financier de créer des aires d'accueil sont ainsi doublement pénalisées : non seulement, elles financent l'investissement et le fonctionnement de ces aires, mais elles doivent en outre assumer la prise en charge des branchements électriques et des ponctions d'eau illicites dus aux stationnements illégaux.
L'inaction des pouvoirs publics est insupportable pour les administrés de nos communes : en Seine-et-Marne, sur 186 implantations illégales dénombrées en 2005, seules 57 ont donné lieu à des accords de concours de la force publique pour expulser les occupants.
Dans ces conditions, je souhaiterais savoir quelles mesures compte prendre le Gouvernement pour permettre l'application complète de cette loi, sachant que seule la réalisation de l'ensemble des places prévues permettrait d'accueillir au mieux les gens du voyage, dans un double souci de solidarité et de responsabilisation.
Monsieur le sénateur, le ministre d'État, empêché, m'a demandé de répondre à sa place, comprenant parfaitement que vous souhaitiez obtenir des informations sur l'application du dispositif départemental d'accueil des gens du voyage, prévu, comme vous l'avez rappelé, par la loi du 5 juillet 2000, qui renforce les obligations des communes en la matière.
Ainsi que vous le soulignez, à ce jour, les schémas départementaux ont été signés et publiés. Toutefois, les objectifs de création d'aires d'accueil, fixés très précisément à 44 232 places, ne sont pas encore atteints, du fait des difficultés liées, notamment, à la mobilisation des terrains ou à la recherche de financements. À la fin de l'année 2005, on comptait 366 aires d'accueil en service, représentant 7 746 places, et 68 aires de passage permettant d'offrir 7 339 places, soit un taux global de réalisation de 17 %.
C'est la raison pour laquelle la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a prorogé de deux ans le délai prévu pour la réalisation de ces aires.
Dans ces conditions, s'agissant des mesures prises par l'État en cas de défaillance des communes, la priorité a été accordée au dialogue avec les élus, afin de les inciter à réaliser ces aires d'accueil. C'est pourquoi aucun préfet n'a encore fait usage de la procédure de substitution. Une circulaire interministérielle est cependant en cours d'élaboration, afin d'indiquer aux préfets, en cas de refus manifeste des élus de réaliser les aires, les modalités de mise en oeuvre de leur pouvoir de substitution.
Vous vous préoccupez également de la longueur et du coût, en particulier pour les petites communes, des procédures destinées à obtenir l'évacuation forcée des résidences mobiles en stationnement illicite.
La loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure a apporté des améliorations à cette situation. Outre l'incrimination du stationnement illicite, désormais prévue par l'article 322-4-1 du code pénal, le maire peut mettre en oeuvre la procédure civile d'expulsion en saisissant directement le juge des référés, sans acquitter de frais de justice et sans recourir obligatoirement à un huissier pour constater une occupation illicite.
Ces mesures ne peuvent cependant s'appliquer ni au profit des communes qui n'ont pas encore réalisé leurs aires d'accueil, ni aux fins d'expulsion des personnes stationnant sur les aires aménagées.
Les conflits qui peuvent résulter du défaut de paiement des droits de stationnement ou des dégradations consécutives à l'occupation des aires relèvent d'une procédure de droit commun. Il convient, lorsque de tels faits sont constatés, de saisir le juge judiciaire pour faire prévaloir l'intérêt de la commune.
Pour faire face aux difficultés rencontrées par les communes, le ministre d'État a engagé une réflexion sur la manière d'accélérer sensiblement la procédure d'évacuation forcée des résidences mobiles pour stationnement illicite, tout en respectant les garanties fondamentales. Une procédure accélérée pourrait également être mise en place pour les séjours abusifs sur une aire d'accueil.
Pour réaliser l'objectif fixé par le législateur d'équiper le territoire en aires d'accueil, je vous rappelle que les communes de plus de 5 000 habitants qui ne rempliraient toujours pas leurs obligations légales seraient exclues de ces facilités procédurales.
Je remercie M. le ministre des précisions qu'il a apportées.
Afin d'éclairer mon propos, je précise qu'il n'est pas utile, de mon point de vue, de recourir à des procédures répressives, tant que le taux de réalisation des aires d'accueil prévues par la loi ne le permet pas. En effet, expulser des familles de gens du voyage vers des terrains qui n'existent pas encore pour les recevoir poserait de réels problèmes.
Il est donc nécessaire d'accélérer l'application de cette loi, ce qui ne peut se faire sans dialogue.
Je partage donc votre souci d'accorder la priorité au dialogue avec les élus. Mais il faut le faire avec fermeté et courage, puisque l'on se heurte aux mêmes difficultés que pour l'application de la loi SRU et la construction de logements sociaux. Ce sont toujours à peu près les mêmes élus qui refusent d'accueillir sur leur territoire des populations qu'ils jugent indésirables.
Je compte sur vous, monsieur le ministre, pour faire diligence dans l'application de cette loi.
La parole est à M. Gérard Delfau, en remplacement de M. Daniel Marsin, auteur de la question n° 1041, transmise à M. le ministre délégué aux relations avec le Parlement.
Monsieur le ministre, M. Marsin ayant eu un empêchement de dernière minute, il m'a demandé de vous poser sa question, ce que je fais bien volontiers.
Le projet de loi organique relatif au statut de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin est très attendu par les populations concernées. Or il n'est toujours pas inscrit à l'ordre du jour du Parlement.
Lors des consultations du 7 décembre 2003, une très large majorité des électeurs de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin s'est prononcée en faveur d'une évolution statuaire, conformément aux dispositions de l'article 74 de la Constitution. Depuis la réforme constitutionnelle de 2003, le dispositif de cet article permet aux collectivités d'outre-mer concernées de disposer d'un cadre institutionnel adapté à leurs spécificités, et de bénéficier du principe de spécialité législative.
Ainsi, ce nouveau cadre devrait garantir la stabilité institutionnelle, gage d'un meilleur développement. Malheureusement, cette réforme tant attendue tarde à voir le jour.
Pourtant, lors de son audition par la commission des lois, le 16 novembre 2005, M. François Baroin, ministre de l'outre-mer, indiquait que le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire relatifs au statut de Saint-Barthélemy et Saint-Martin avaient été transmis au Conseil d'État le 4 novembre 2005. Il avait alors estimé que ces textes devaient être examinés par le conseil des ministres avant la fin de l'année dernière, pour être ensuite transmis au Sénat dans les premiers mois de l'année 2006, en application du second alinéa de l'article 39 de la Constitution. C'est finalement le 17 mai que vous avez présenté ces projets de loi en conseil des ministres, mais toujours sans annoncer la date de discussion dans notre assemblée.
Or, et bien que ces projets de loi correspondent à un engagement personnel du Président de la République, la longueur de leur délai de mise en oeuvre et le report des discussions pourraient nous conduire à douter de leur urgence et de leur importance pour le Gouvernement. Cette urgence est pourtant réelle pour les populations visées et les élus que nous sommes.
Il m'apparaît donc essentiel, monsieur le ministre, que le Gouvernement dissipe rapidement l'inquiétude légitime des populations de ces territoires et de leurs représentants : inquiétude quant au calendrier d'une part, mais aussi quant aux conditions de l'engagement financier, indispensable corollaire des importants transferts de compétence envisagés par le projet de loi organique.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaiterais savoir si ce projet de loi sera inscrit à l'ordre du jour du Sénat avant la fin de la session parlementaire, ainsi que l'espèrent les habitants de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.
Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu poser cette question au nom de M. Marsin. Si vous le permettez, je vais vous répondre au nom de M. Baroin, qui est précisément en déplacement à Saint-Barthélemy et Saint-Martin.
Le 7 novembre 2003, à l'Assemblée nationale puis au Sénat, le Gouvernement a fait une déclaration suivie d'un débat sans vote, au cours duquel tous les orateurs ont approuvé le principe d'une consultation des électeurs de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.
Comme vous l'avez justement rappelé, monsieur le sénateur, le Président de la République a décidé d'organiser, le 7 décembre 2003, une consultation des populations de la Martinique, de la Guadeloupe, de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy sur l'évolution institutionnelle et statutaire de leurs collectivités respectives.
Si les électeurs de Guadeloupe et de Martinique ont rejeté l'évolution institutionnelle vers une collectivité unique se substituant au département et à la région, ceux de Saint-Barthélemy, à plus de 95 %, et de Saint-Martin, à plus de 76 %, ont très largement approuvé la perspective de la création, dans chacune de ces îles, d'une nouvelle collectivité d'outre-mer régie par l'article 74 de la Constitution.
Afin de concrétiser cette attente, j'ai présenté au nom de François Baroin, au conseil des ministres du 17 mai dernier, le projet de loi et le projet de loi organique portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer. Ces deux textes comportent naturellement les dispositions nécessaires à la création des deux collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin, mais aussi celles qui sont rendues indispensables, depuis la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, à l'actualisation du statut de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Je vous confirme donc la volonté du Gouvernement d'inscrire ce texte à l'ordre du jour du Parlement ; tout sera fait pour que la Haute Assemblée puisse l'examiner dès que possible.
En tout état de cause, je peux vous assurer, dans le cadre des responsabilités que j'ai l'honneur d'assumer en qualité de ministre délégué aux relations avec le Parlement, de la volonté du Gouvernement de voir ce texte définitivement adopté d'ici à la fin de l'année.
Monsieur le ministre, au nom de mon collègue Daniel Marsin, je vous remercie d'avoir réitéré, dans votre réponse, l'engagement du Gouvernement de faire venir en discussion ce projet de loi devant la Haute Assemblée avant même la fin de cette année.
La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 1013, adressée à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
Monsieur le ministre, en mars dernier, la Cour des comptes publiait un rapport thématique consacré à l'évolution de l'assurance-chômage et formulait un certain nombre de propositions pour accélérer le retour à l'emploi des chômeurs ainsi que pour accroître, dans la mesure du possible, l'efficacité du contrôle de la recherche d'emploi.
Le nombre de sans-emploi en France, malgré une décrue significative au cours des derniers mois, est toujours aussi préoccupant.
En effet, à côté des « personnes sans emploi immédiatement disponibles recherchant un contrat à durée indéterminée à temps plein » figurant dans les statistiques officielles régulièrement publiées, nous savons bien que nombreuses sont celles qui recherchent un contrat à durée déterminée ou un contrat à durée indéterminée à temps partiel, celles qui sont en formation ou dans bien d'autres situations encore. Selon certaines informations, il y aurait, en réalité, plus de quatre millions de personnes inscrites sur les listes de l'ANPE, soit 15 % de la population active. Cette situation m'inspire plusieurs questions.
Je relève tout d'abord un phénomène curieux : comment se fait-il que les 800 agences locales pour l'emploi et les 700 antennes des ASSEDIC coexistent sans une seule implantation commune ?
Pour quelle raison le parcours des chômeurs, des ASSEDIC à l'ANPE, en passant éventuellement par des prestataires privés voire, demain, par des maisons de l'emploi, est-il toujours aussi long et complexe ?
Comment se fait-il que la structure de la liste des demandeurs d'emploi ne corresponde qu'imparfaitement aux besoins des entreprises, que les conditions d'actualisation de cette liste manquent de fiabilité, que le contrôle des versements des allocations de l'assurance chômage demeure, semble-t-il, formel, alors que la réforme de l'allocation de solidarité est toujours en suspens ?
Dans cet esprit, ne conviendrait-il pas de croiser les fichiers de l'ANPE, des ASSEDIC et des organismes de sécurité sociale, afin de combattre les fraudes ?
La Cour des comptes estime également qu'il faut faire progresser la part des formations conventionnées destinées à répondre à des besoins immédiats non satisfaits, en d'autres termes en prise directe avec le monde du travail.
En tout état de cause, de manière plus générale, notre système d'indemnisation, finalement assez généreux, mais aussi en grave difficulté financière, n'a-t-il pas un effet démobilisateur au regard de la recherche d'emploi ? Faut-il continuer à verser des allocations - je pense notamment au RMI, avec tous ses avantages annexes et le travail au noir qui en résulte parfois - sans que les bénéficiaires apportent la moindre contrepartie, alors que collectivités et associations seraient sans doute disposées à les encadrer ?
Je crois que, dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, il faut être à la fois ferme et juste : juste, car il est normal de ne pas laisser un demandeur d'emploi sur le bord du chemin ; ferme, car il est dans son intérêt et dans celui du pays qu'il accepte les propositions qui lui sont faites et réintègre le plus rapidement possible le monde du travail.
Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous éclairer sur ces différents points, et nous rassurer quant à la volonté gouvernementale de rendre plus lisible et plus réaliste l'ensemble du dispositif, qui comporte actuellement, il faut le reconnaître, quelques anomalies ?
Je vous répondrai, monsieur le sénateur, au nom de M. Gérard Larcher, qui m'a demandé de vous prier de bien vouloir excuser son absence.
Au travers du rapport que vous avez évoqué, la Cour des comptes estime que les évolutions importantes intervenues ces dernières années dans le domaine de l'accompagnement des demandeurs d'emploi n'ont pu porter tous leurs fruits. Elle met notamment l'accent sur la complexité des parcours ou sur la problématique des implantations géographiques.
Toutefois, les travaux présentés dans ce rapport concernent, pour l'essentiel, les années 2000 à 2004 ; or la politique menée par le Gouvernement, notamment en 2005 et en 2006, apporte des solutions aux difficultés relevées par la Cour des comptes.
S'agissant de la coopération entre les partenaires du service public de l'emploi, la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale tend à mettre en place une collaboration renforcée visant à atteindre un triple objectif commun à l'ANPE, à l'UNEDIC et au Gouvernement : simplifier les démarches pour les demandeurs d'emploi, dynamiser la recherche d'emploi, optimiser le service rendu aux demandeurs d'emploi et aux entreprises.
Cette convention prévoit également de nouvelles modalités de coordination des responsabilités, avec, en particulier, un rôle renforcé du Comité supérieur de l'emploi et l'institution d'un comité tripartite de suivi.
Enfin, la convention prévoit l'amélioration des instruments de coopération par la mise en oeuvre progressive du dossier unique du demandeur d'emploi, qui, comme vous l'avez indiqué, monsieur le sénateur, est d'ores et déjà une réalité, et par l'élaboration d'un système d'information unique pour l'ANPE et l'UNEDIC porté par une structure commune aux deux institutions, elle-même créée avant le 1er octobre 2006.
S'agissant de la complexité du parcours des demandeurs d'emploi, les délais entre les entretiens à l'UNEDIC et à l'ANPE seront réduits à huit jours en juillet 2006, et à cinq jours en juillet 2007, contre souvent vingt jours aujourd'hui. En outre, plusieurs guichets uniques - un par région - seront mis en place avant la fin de cette année.
De même, depuis le 1er janvier 2006, est mis en oeuvre le suivi mensuel personnalisé des demandeurs d'emploi, élément fort d'amélioration de l'accompagnement par l'ANPE, avec des rendez-vous plus nombreux et un conseiller référent unique. L'État a mobilisé les moyens nécessaires à un déploiement rapide de ce dispositif, en permettant à l'ANPE de recruter 3 200 agents supplémentaires.
Monsieur le sénateur, je puis vous assurer, au nom de mon collègue Gérard Larcher, que le Gouvernement entend bien poursuivre ses efforts, afin que la modernisation du service public de l'emploi se traduise par des améliorations concrètes dans la vie quotidienne des demandeurs d'emploi.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces précisions qui confirment la volonté gouvernementale, qui est d'ailleurs aussi celle du Parlement, d'avancer dans la voie indiquée.
Cependant, mon intervention portait également sur le fait que, sur le terrain, les choses ne sont pas toujours simples. Je suis convaincu que les collectivités territoriales et les associations peuvent contribuer à la recherche de solutions aux problèmes que j'ai soulevés.
C'est la raison pour laquelle j'estime que nous avons toujours intérêt à nous retrouver sur le terrain pour envisager les problèmes de manière beaucoup plus précise. Cela fait partie des souhaits que je voulais formuler.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la question n° 1036, adressée à M. le ministre de la fonction publique.
Nous nous accordons tous, me semble-t-il, pour estimer que la mobilité des fonctionnaires est un incontestable gage de qualité pour la fonction publique. Diverses mesures l'encouragent d'ailleurs, à juste titre.
Cette utile mobilité, cependant, doit être conciliée avec un principe républicain essentiel, celui de la séparation des pouvoirs et des fonctions.
À cet égard, deux questions principales se posent.
En premier lieu, à quelles conditions un fonctionnaire ayant exercé, à quelque titre que ce soit, des fonctions de contrôle, administratif ou financier, d'une collectivité territoriale peut-il servir auprès de cette collectivité, par voie de détachement ou une fois la retraite venue ?
En second lieu, à quelles conditions des magistrats chargés du ministère public et des fonctionnaires de police dont la mission est le renseignement peuvent-ils rejoindre les services d'une collectivité territoriale dans le ressort géographique de laquelle ils exercent leurs fonctions ?
Certes, la loi n° 84-594 du 12 juillet 1984, complétée par le décret n° 2004-715 du 20 juillet 2004, dispose déjà que les départements, les régions et leurs établissements publics ne peuvent engager des fonctionnaires ou d'anciens fonctionnaires ayant exercé, dans le même ressort territorial, au cours des deux années qui précèdent, les fonctions de préfet, de sous-préfet, de secrétaire général de préfecture ou de secrétaire en chef de sous-préfecture.
Toutefois, ce sont là, à ma connaissance, les seules dispositions légales existantes, ce qui laisse fâcheusement en dehors du champ des incompatibilités d'autres catégories de fonctionnaires ayant rempli des missions de contrôle des collectivités territoriales - par exemple les trésoriers-payeurs généraux et les comptables du Trésor ou les directeurs de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes - ou, plus généralement, dont les fonctions exigent une totale indépendance par rapport à elles : magistrats chargés du ministère public, directeurs des renseignements généraux, etc.
Ainsi, le conseil général du Var vient d'engager par voie de détachement, sans aucun délai de carence, le directeur départemental des renseignements généraux, qui était en poste depuis plusieurs années. En dehors de toute considération de personne, cela ne paraît pas conforme à l'esprit de nos institutions républicaines. Une fonction aussi sensible que celle de directeur des renseignements généraux ne tire, en effet, sa légitimité que d'une stricte indépendance par rapport aux pouvoirs locaux.
Dans ces conditions, pensez-vous légitime, monsieur le ministre, d'étendre le champ de la réglementation encadrant les conditions dans lesquelles les fonctionnaires de l'État peuvent servir auprès des collectivités territoriales à d'autres personnes que les hauts fonctionnaires préfectoraux, notamment à celles que je viens d'évoquer ? Dans l'affirmative, quelles dispositions envisagez-vous de prendre ?
Monsieur le sénateur, j'indiquerai tout d'abord que le recrutement auquel vous avez fait référence est conforme au droit.
Si la mobilité entre les fonctions publiques fait partie des déroulements de carrière normaux des fonctionnaires, des dispositions précises ont bien entendu été prévues pour encadrer un certain nombre de cas sensibles.
Ainsi, comme vous l'avez rappelé, les membres du corps préfectoral ne peuvent être recrutés dans les services des départements et des régions de leur ressort territorial qu'au terme d'un délai de deux ans.
En outre, les magistrats des chambres régionales des comptes ne peuvent être recrutés dans une collectivité territoriale du ressort de leur juridiction qu'après un délai de cinq ans.
Par ailleurs, à l'inverse, nul ne peut être nommé membre d'un tribunal administratif ou d'une cour administrative d'appel s'il a exercé depuis moins de trois ans, dans le ressort de ce tribunal ou de cette cour, une fonction de direction au sein des services d'une collectivité territoriale.
Enfin, pour l'ensemble des fonctionnaires, le détachement n'est jamais de droit. Il suppose l'accord de l'administration d'origine.
Telles sont les règles qui s'appliquent à la mobilité des fonctionnaires entre les différentes fonctions publiques.
Voilà, monsieur le sénateur, les éléments de réponse que je peux apporter à la question que vous avez soulevée, en précisant encore une fois que le recrutement auquel vous avez fait allusion est tout à fait conforme au droit.
Je n'ignorais certes pas, monsieur le ministre, que le recrutement que j'ai évoqué était conforme au droit.
Cela étant, ayant posé ma question sans intention polémique - sinon, j'aurais interrogé M. le ministre de l'intérieur -, j'attendais tout de même autre chose que cette réponse en pure langue de bois !
L'affaire que j'ai mise en exergue concerne un département ayant eu pour préfet M. Marchiani, et qui a donc connu le mélange des genres... Pour l'anecdote, la préfecture m'a un jour répondu, à cette époque, alors que je souhaitais parler au préfet, que ce dernier se trouvait en Angola. J'ai ensuite appris qu'il n'y séjournait pas nécessairement au Club Méditerranée !
Quoi qu'il en soit, lorsque j'ai adressé ma question, je souhaitais obtenir une réponse technique, car la réglementation des incompatibilités dans la fonction publique est un véritable sujet de préoccupation. Or, comme vous êtes aussi chargé de la réforme de l'État, monsieur le ministre, je comptais vous entendre au moins reconnaître la réalité du problème et annoncer que vous alliez engager une réflexion.
Depuis, l'actualité a tout de même montré que le mélange des genres, la porosité entre les services de renseignement et les sphères politique ou industrielle n'étaient pas très sains. Ne voulant pas polémiquer, je ne rappellerai pas ici les affaires qui s'étalent dans toute la presse, mais j'insiste sur le fait, monsieur le ministre, que vous devez, puisque la réforme de l'État relève de vos attributions, prendre en considération les problèmes que j'ai soulevés et agir, d'autant que l'on évoque une réunion de l'ensemble des services de renseignement et la constitution d'une structure unique chargée du renseignement intérieur. Toutes les dérives que nous constatons à l'échelon national ne doivent pas se retrouver à l'échelon local.
La parole est à M. André Rouvière, auteur de la question n° 996, adressée à M. le ministre de la fonction publique.
Ma question porte sur l'Institut européen d'administration publique, l'IEAP, installé à Maastricht, aux Pays-Bas, et qui est dirigé, je le rappelle, par un Français.
J'ai visité cet institut en décembre 2005 et, à cette occasion, j'ai pu constater le faible niveau de participation des cadres de la fonction publique française à ses enseignements.
L'IEAP, créé en 1981 lors du premier Conseil européen de Maastricht, est un organisme indépendant, soutenu par les contributions financières de la Commission européenne et des États membres de l'Union européenne, dont, bien entendu, la France. Il a pour vocation de former les agents publics à la gestion des affaires européennes et de développer la recherche en matière d'intégration communautaire.
Or, en 2005, seulement 129 fonctionnaires français, soit 1, 31 % du total des 9 703 participants, ont suivi un séminaire de formation à l'IEAP. À titre de comparaison, il faut savoir que 1 135 participants venaient d'Espagne, 563 d'Italie, 470 d'Autriche, 292 du Royaume-Uni et 260 d'Allemagne.
Malgré l'excellence de notre appareil de formation administrative, il semble bien que l'IEAP soit le seul établissement en mesure de proposer aux cadres de nos fonctions publiques nationale et territoriale, une approche transversale et comparative des politiques communautaires et du management européen, dont il serait dommage de se priver. En effet, la présence de la France au sein des institutions européennes nécessite des efforts toujours plus grands d'adaptation aux méthodes d'administration de nos partenaires.
Je souhaiterais donc connaître votre opinion et éventuellement les mesures de coopération et de partenariat que vous pourriez envisager de mettre en oeuvre, afin de renforcer la participation des fonctionnaires français aux formations délivrées par l'IEAP.
Tout d'abord, monsieur le sénateur, je tiens à vous dire que la France apprécie les prestations offertes par l'IEAP. Elle participe directement à sa gestion : comme tous les autres États membres, elle contribue au budget de l'institut et elle a, par ailleurs, mis un fonctionnaire français à sa disposition, qui en assure la direction.
La faible participation de stagiaires français aux enseignements proposés ne correspond absolument pas à une forme de désintérêt des fonctionnaires français pour les questions européennes. Elle tient au fait que les administrations françaises offrent elles-mêmes un large éventail de formations dans ce domaine.
Avec Mme la ministre déléguée aux affaires européennes, Catherine Colonna, nous venons de faire dresser un bilan exact des organismes de formation aux enjeux européens existant pour les fonctionnaires et agents publics français. Ce rapport, confié à M. Ralph Dassa, directeur général de l'Institut de gestion publique et du développement économique, fait apparaître une offre importante et variée d'actions de formation initiale et continue au sein des administrations françaises et de leurs écoles d'application.
De plus, depuis 1995, le Centre des études européennes de Strasbourg, le CEES, adossé à l'ENA, qui intervient régulièrement, soit directement, soit en appui des formations spécifiques, à la demande des ministères, ainsi que le pôle universitaire d'études européennes de Strasbourg, garantissent aux fonctionnaires et aux étudiants français une formation de très haut niveau, assurée par des intervenants de plusieurs nationalités.
J'ajoute un autre élément qu'il convient de prendre en compte : les frais d'inscription sont sensiblement moins élevés au CEES qu'à l'IEAP. Pour vous donner un exemple, une journée de formation au CEES coûte de 130 à 140 euros, contre 350 à 400 euros à l'IEAP. Aucun gestionnaire public ne peut être insensible à cet argument.
Pour ce qui concerne, enfin, la richesse de l'approche plurinationale des enseignements, la France a toujours souhaité privilégier les expériences européennes pratiques d'apprentissage sur le terrain et d'échanges au sein de nos administrations. J'étais en Allemagne la semaine dernière avec mon homologue : 79 hauts fonctionnaires français travaillent dans les administrations allemandes.
Au-delà de ces relations bilatérales, nous favorisons la mobilité de nos fonctionnaires vers les instances communautaires. Ainsi, aujourd'hui, 183 experts nationaux sont détachés auprès des institutions européennes, ce qui nous classe, pour les cadres de catégorie A, au premier rang des pays de l'Union européenne. Cet effort continu doit être en permanence adapté et amplifié.
Pour répondre totalement à l'inquiétude qui était la vôtre, je puis vous affirmer qu'il n'y a pas de désintérêt des agents de la fonction publique française pour les questions européennes. Simplement, la palette des enseignements offerts les conduit à choisir plutôt le Centre des études européennes de Strasbourg.
Monsieur le ministre, je vous remercie de préciser qu'il n'y a pas d'opposition de principe à l'IEAP de Maastricht. Vous avez fait des comparaisons sur les coûts, mais d'autres constats peuvent être établis.
En France, et notamment à Strasbourg, nous avons des formations de qualité, qui coûtent moins cher, il est vrai. Cependant, un autre facteur doit être pris en compte, à savoir les contacts que nous pouvons nouer. Le constat que je fais pour l'IEAP, je peux le faire pour d'autres organismes européens, comme EUROPOL : il y a peu de Français par rapport à notre participation financière.
Ma question, qui déborde un peu celle que j'ai posée, porte sur le fait - c'est mon sentiment, mais j'espère me tromper - que nous sommes un peu trop absents dans de nombreux organismes européens. Cela m'a été répété à plusieurs reprises : la France n'est pas assez présente, du moins si nous comparons sa participation financière à ces instituts européens et sa participation numérique. Nous payons plus, nous aurions droit à davantage de présence.
Dans de nombreux organismes européens, les Français ont tendance à ne plus occuper les places de décision, ce qui nous pénalise ; ce n'est pas le cas à l'IEAP, dirigé, je le répète, par un Français. Nous aurions intérêt à réfléchir, non pas seulement en termes financiers, mais également en termes relationnels. L'importance des relations, au sein de l'Union européenne, ne doit pas être sous-estimée.
Je ne peux que confirmer la qualité des formations qui sont dispensées à Strasbourg.
Il faut que nous soyons conscients, comme M. le ministre l'a rappelé, de l'intérêt croissant témoigné au niveau européen pour les formations dispensées, notamment, par le CEES et l'ENA, qui sont totalement ouverts à l'international. En plus, les enseignements y sont moins coûteux qu'ailleurs ! Il ne faudrait donc pas délaisser les institutions françaises.
La parole est à M. Thierry Repentin, auteur de la question n° 1053, adressée à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
Monsieur le président, il s'agit d'une question alpine, mais néanmoins internationale !
Monsieur le ministre, je souhaite, par votre intermédiaire, alerter M. Dominique Perben sur l'annonce faite par la commission intergouvernementale de contrôle du tunnel du Fréjus d'une préconisation de percement d'une galerie nouvelle, dite de sécurité, de huit mètres de large, parallèle à l'actuel tunnel existant.
Comme je l'avais exprimé lors de ma précédente question sur ce sujet, le 9 mars 2005, chacun est convaincu de la nécessité de sécuriser les tunnels en France. Ce type de mesures a été rendu indispensable après le drame de l'incendie du tunnel du Mont-Blanc, que nous avons encore tous à l'esprit.
A contrario, de nombreux Savoyards, mais plus largement les populations alpines, s'inquiètent à juste titre de la solution proposée. Celle-ci consisterait tout simplement à percer un deuxième tube susceptible d'être accessible à la circulation permanente, ouvrant ainsi la voie, sans le dire, à un doublement du tunnel. Rappelons pour étayer cette crainte que les pouvoirs publics italiens, par l'intermédiaire du ministre des transports du gouvernement de M. Silvio Berlusconi, avaient avancé une telle idée.
Devant le dimensionnement d'un tel ouvrage, dont le coût financier apporterait une justification à un usage autre que l'amélioration de la sécurité, les déclarations d'intention des deux gouvernements sur la pérennité des modalités d'utilisation de cette galerie ne sont franchement pas de nature à rassurer les populations concernées sur tout l'axe de transit entre l'Italie et la France.
Je pense plus particulièrement, du côté français, aux populations résidant dans l'avant-pays savoyard, dans la cluse de Chambéry, où passent d'ores et déjà en plein centre-ville 100 000 véhicules par jour, au sein de la combe de Savoie et bien évidemment aux habitants de la vallée de la Maurienne. Je souhaite vous indiquer que, récemment, des communes françaises, comme celle de la Motte-Servolex, viennent de délibérer contre ce projet. Le maire de Bardonecchia, du côté italien, qui a fait de la lutte contre le percement de ce nouveau tube l'objet principal de son mandat, a été réélu hier, avec 70 % des voix.
Dans la. réalité, ce nouvel ouvrage pourrait être utilisé pour accroître les capacités de circulation routière dans les Alpes. Nous serions donc en totale contradiction non seulement avec nos engagements internationaux, tels que la convention alpine ratifiée par le Parlement, mais aussi avec l'expérience Modalhor en cours dans la vallée de Maurienne avec la SNCF et RFF, avec l'aspiration des populations riveraines des axes d'accès à cette vallée à voir diminuer la circulation de transit, et, enfin, avec la Charte de l'environnement adoptée par le Congrès le 26 février 2005.
Dire aujourd'hui que le percement d'une nouvelle galerie est la seule condition pour assurer la sécurité de l'actuel tunnel du Fréjus ne convainc pas : d'autres solutions ont été avancées à la suite d'études conduites par le ministère des transports.
Par ailleurs, si telle était la seule solution, envisagez-vous dans un souci de cohérence de l'imposer à tous les autres tunnels existants sur le territoire national ? Dans la négative, le tunnel du Fréjus, ainsi doublé pour la traversée des Alpes, serait une voie de passage que les pouvoirs publics ne manqueraient pas de privilégier, voire même d'imposer, par rapport aux autres, notamment au tunnel du Mont-Blanc.
Ni les élus, ni les associations, ni les populations ne sont dupes face à l'argumentation actuelle qui veut qu'une nouvelle percée de huit mètres de large ne sera utilisée demain que pour accueillir une seule chaussée, dans un sens unique de circulation.
Accepter ce discours, c'est, d'une certaine façon, rejeter la responsabilité sur ceux qui auront à assumer dans l'avenir la gestion de cet équipement et des traversées alpines : ils nous démontreront alors qu'il serait incohérent de ne pas rentabiliser des capacités inexploitées face à une augmentation du trafic routier international. L'ouvrage, lui, sera durable, une fois que seront passés les initiateurs du projet et oubliés leurs engagements.
Aussi, je vous invite à préserver avant tout l'avenir du projet ferroviaire « voyageurs » et « fret » de la liaison Lyon-Turin, à ne pas suivre l'avis préconisé par la commission de contrôle du tunnel et à choisir une solution alternative, plus respectueuse des finances et des aspirations de nos populations en matière de trafic international.
Monsieur le sénateur, je tiens à vous présenter les excuses de Dominique Perben, qui est retenu. Je vais vous apporter les éléments de réponse qu'il m'a fournis.
Malgré les importantes mesures de sécurité qui lui ont été appliquées après le dramatique accident du tunnel du Mont-Blanc en 1999, le tunnel du Fréjus doit être mis en conformité avec les normes de sécurité les plus récentes, tant européennes que françaises. La distance moyenne entre les abris est trop importante.
Par ailleurs, contrairement au tunnel du Mont-Blanc, qui dispose d'une gaine protégée sous la chaussée servant d'issue de secours, la gaine de ventilation du tunnel du Fréjus, située en plafond sous la voûte, n'est pas susceptible de pouvoir être utilisée en toutes circonstances. Si des dispositions d'exploitation et de surveillance extrêmement strictes, ainsi que la mobilisation de moyens de secours importants rapidement opérationnels relativisent aujourd'hui cette non-conformité, il est néanmoins nécessaire de réaliser dans les meilleurs délais les aménagements prévus par la réglementation.
L'accident mortel de juin 2005 ayant rappelé l'urgence des décisions à prendre, Dominique Perben s'est accordé avec son homologue italien sur le principe de la construction d'une galerie de sécurité.
Comme vous le savez, les ministres des transports français et italien ont saisi la commission intergouvernementale chargée du contrôle du tunnel pour qu'elle en précise les caractéristiques, sur la base des recommandations d'un expert indépendant
La commission intergouvernementale leur a proposé les caractéristiques techniques de cet ouvrage non circulé, qui permettra d'assurer dans de bonnes conditions à la fois la sécurité, la rapidité et l'efficacité de l'intervention des moyens de secours et de lutte contre les incendies, mais également l'évacuation des automobilistes en cas de problème.
Ce choix permettra, en outre, de ne pas interrompre la circulation pendant les longs mois de travaux.
Dominique Perben a clairement indiqué que sa décision reposait sur deux principes : ne pas transiger sur la sécurité et ne pas accroître la capacité routière. Je rappelle que cet engagement est conforme à celui que la France a pris en signant la convention alpine, qui impose de ne pas créer de capacité routière nouvelle pour les franchissements alpins.
En toute hypothèse, et sans entrer dans des considérations trop techniques, la réalisation d'une galerie de huit mètres de diamètre ne saurait être une façon de préparer un éventuel doublement du tunnel.
Cette décision n'a donc pas d'influence négative sur la réalisation du projet ferroviaire Lyon-Turin puisque, d'une part, la capacité des itinéraires routiers reste identique et, d'autre part, le coût des travaux n'a pas vocation à être pris en charge par les États.
À ce propos, je rappelle que Dominique Perben a signé avec son homologue italien, au nom du gouvernement français, une lettre adressée à M. Barrot en juillet 2005 dans laquelle ils ont rappelé clairement leur objectif partagé de tout mettre en oeuvre pour lancer les travaux du Lyon-Turin en 2010.
La méthode qui sera suivie consiste donc à franchir, au prix d'un travail rigoureux, les différentes étapes du projet pour respecter cet engagement. Ainsi, la totalité des financements français nécessaires pour la partie internationale, soit 95 millions d'euros pour la période 2005-2009, ont été mis en place.
Avec la collaboration active de tous les élus concernés, le ministre des transports a arrêté le tracé des accès au tunnel transfrontalier, le 17 février dernier.
Par ailleurs, l'engagement de lancer avant l'été prochain l'enquête publique du tunnel international est respecté, puisque celle-ci a débuté le 23 mai dernier.
Enfin, le groupe de travail sur le report modal a été mis en place pour proposer des mesures d'incitation au développement des modes non routiers, afin de donner au Lyon-Turin sa pleine efficacité, notamment au travers du développement de l'autoroute ferroviaire alpine.
C'est donc une politique globale et équilibrée des transports que le Gouvernement mène dans les Alpes, monsieur le sénateur.
Monsieur le ministre, bien évidemment, je ne partage pas votre conclusion sur la politique « équilibrée » des transports dans les Alpes.
On nous dit que les abris de sécurité du tunnel du Fréjus sont trop éloignés les uns des autres pour assurer une sécurité optimale. Il conviendrait donc d'en réaliser de nouveaux, mais de tels travaux nécessitent l'arrêt de la circulation sous le tunnel du Fréjus, ce qui, nous dit-on, est impossible.
Pourtant, le tunnel du Mont-Blanc a été fermé pendant de nombreux mois pour permettre la réalisation des travaux rendus nécessaires par l'incendie. Pendant cette période, tout le trafic s'est reporté sur le tunnel du Fréjus : ce qui fut possible dans un cas l'est aussi, sans doute, dans l'autre.
Par ailleurs, les galeries de sécurité de certains tunnels font moins de trois mètres de large ; or on nous propose une galerie de sécurité d'une largeur de huit mètres, supérieure à celle de bien des tunnels existants.
On nous dit qu'il s'agit uniquement d'une galerie de sécurité, mais les populations locales et les élus qui les représentent ne sont pas dupes ! Dès lors qu'une telle galerie, parallèle à l'actuel tunnel, sera en service, le tunnel du Fréjus sera le point de franchissement des Alpes le mieux sécurisé, et le ministre en exercice alors aura tout le loisir de limiter le trafic des poids lourds, en particulier, entre la France et l'Italie au seul tunnel du Fréjus, exemptant celui du Mont-Blanc.
Cette solution n'est pas acceptable pour les populations concernées, en France comme en Italie.
La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 1037, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.
Ma question porte sur la répartition de plus en plus inquiétante de la population médicale en médecine générale dans les zones déficitaires en offre de soins.
Le diagnostic est unanime : la densité médicale, qui atteint actuellement des sommets avec environ 340 praticiens pour 100 000 habitants, va chuter inéluctablement, au moins jusqu'en 2020, pour atteindre 280 médecins pour 100 000 habitants.
Le risque, selon le professeur Yvon Berland, qui vient de vous remettre le rapport de la commission « Démographie médicale » qu'il présidait, c'est que les régions qui comptent déjà peu de médecins en comptent moins encore à l'avenir. La pénurie de médecins ne touche d'ailleurs pas uniquement les campagnes : comme souvent, le monde rural partage ce problème avec les banlieues défavorisées.
La situation relève d'une simple question de courbe des âges : de nombreux médecins vont partir à la retraite dans les prochaines années et leur départ ne sera pas compensé par l'arrivée de jeunes médecins.
Le numerus clausus, qui avait été diminué ces dernières années, ne permet pas de former en nombre suffisant les étudiants qui se destinent à la médecine, en particulier à la médecine générale. Il faut près de dix ans pour former un médecin, les effets de son récent relèvement ne seront donc pas immédiats.
En Lorraine, par exemple, les chiffres sont assez alarmants : en 2005, pour 137 postes ouverts en médecine générale à l'examen national classant des internes, 53 seulement ont été pourvus, c'est-à-dire un peu plus d'un tiers, la proportion n'étant déjà que de la moitié l'année précédente. Il existe donc, cette année, un déficit de 84 postes en médecine générale. Pour la période 2006-2015, nous avons calculé que 931 médecins généralistes pourront faire valoir leurs droits à la retraite et nous savons d'ores et déjà que plus de la moitié d'entre eux ne seront vraisemblablement pas remplacés. Quatre cantons lorrains, comptant jusqu'à 4 000 habitants, n'ont déjà plus de médecin généraliste.
Certes, des explications sont avancées : l'aspiration au confort de vie des médecins, les conditions éprouvantes d'exercice en milieu rural et, d'une manière générale, le désintérêt des futurs médecins pour la médecine générale.
Monsieur le ministre, au mois de janvier, vous avez informé les parlementaires de la situation de la démographie médicale dans chacun des départements et présenté le plan « démographie des professions de santé ».
Mon département, la Meurthe-et-Moselle, est classé en zone de faible densité médicale. D'ailleurs, nous nous en doutions, car la consultation que nous avions engagée dans quelques cantons à l'occasion de la mise en oeuvre de la circulaire du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire sur l'accès au service public en milieu rural a clairement mis en évidence que l'accès aux soins et la permanence des soins étaient la première préoccupation de la population.
Ce paradoxe permet de constater que les quelques mesures mises en place depuis plusieurs années sont peu efficaces et montre clairement le manque d'anticipation des politiques publiques en matière de santé et d'aménagement du territoire.
Les mesures financières incitatives demeurent très insuffisantes pour enrayer puis inverser la courbe. Certaines d'entre elles font d'ailleurs appel aux collectivités locales, qui n'en ont par nature pas les moyens, et aux organismes sociaux.
Une vraie question est donc posée : le système libéral en matière d'offre de soins, en particulier le libre choix de l'installation, ne paraît-il pas en bout de course, à un moment où la santé de nos concitoyens relève plus que jamais d'une obligation de service public et où le rôle pivot du médecin généraliste dans le parcours de soins vient d'être réaffirmé ?
Je vous demande en conséquence, monsieur le ministre, ce que le Gouvernement compte faire pour remédier à une situation qui devient de plus en plus préoccupante.
Monsieur le sénateur, la question de la démographie médicale est au coeur de notre politique de santé publique et d'assurance maladie.
Je tiens tout d'abord à souligner qu'il n'y a jamais eu autant de médecins dans notre pays, mais il est vrai que leur nombre va diminuer de 9 % d'ici à 2025, ce qui risque, à l'avenir, de créer des problèmes d'accès aux soins.
Vous soulignez l'absence d'une politique cohérente par le passé : vous me donnerez acte que ce reproche ne s'adresse donc pas à notre gouvernement, qui, au contraire, met en oeuvre une politique globale ambitieuse pour prévenir les risques de désertification.
Xavier Bertrand a présenté, le 25 janvier dernier, un plan pour la démographie médicale comportant une série de mesures visant à augmenter le nombre de médecins, à faciliter leur exercice professionnel, notamment en milieu rural, et à encourager spécifiquement leur installation dans les zones déficitaires.
Ainsi, le numerus clausus a été porté en 2006 à 7 000, soit une augmentation de près de 50 % depuis 2002, et ce niveau sera maintenu jusqu'en 2010.
Il est, par ailleurs, essentiel de donner envie aux jeunes médecins de devenir médecin généraliste. Ainsi, à partir du mois de septembre prochain, un stage de médecine générale sera mis en oeuvre au cours du deuxième cycle d'études, afin de faire naître des vocations.
De même, il est important de faciliter les reprises d'activité par de jeunes médecins. Ainsi, le décret permettant aux médecins qui le souhaitent d'exercer sous le statut de collaborateur d'un médecin déjà installé va être examiné au cours du mois de juin par le Conseil d'État.
Le décret alignant la durée du congé de maternité des femmes médecins sur celle du congé de maternité des salariées va paraître très prochainement ; il concernera également les autres professions de santé. Ce décret contribuera à lever un obstacle important au choix de la médecine libérale par les jeunes femmes médecins.
L'assurance maladie et les syndicats de médecins sont également en cours de négociation sur des majorations tarifaires applicables aux médecins installés dans des zones de sous-densité médicale. En Meurthe-et-Moselle, votre département, monsieur le sénateur, quarante-six communes sont concernées par ces dispositions.
Enfin, je vous indique que Xavier Bertrand a réuni, le 4 mai dernier, l'ensemble des partenaires de la permanence des soins pour évoquer le bilan de la mise en oeuvre de ce plan et les améliorations qu'il faut encore apporter au dispositif. Une permanence des soins bien organisée et bien régulée est un facteur majeur pour préserver l'attractivité de l'exercice en zone rurale. Il a notamment été décidé de généraliser la participation des libéraux à la régulation dans l'ensemble des départements et de permettre aux préfets d'étendre dans chacun la permanence des soins au samedi après-midi.
Voilà, monsieur le sénateur, les réponses très concrètes que le Gouvernement apporte aux attentes de la population et de ses élus.
Je vous remercie de ces précisions, monsieur le ministre. Il s'agit effectivement de mesures concrètes. Certaines ont déjà été annoncées au mois de janvier par le ministre de la santé, d'autres existent depuis plusieurs années ; je pense, en particulier, à l'allègement de la taxe professionnelle consenti par les collectivités locales.
Je tiens à cet égard à souligner que leur aide est de plus en plus sollicitée pour la création de maisons médicales, où s'exerce une médecine de groupe, ou pour celle de maisons de santé associant divers professionnels de la santé. Cela ne laisse d'ailleurs pas de désespérer les collectivités locales, car de telles aides ne relèvent pas véritablement de leurs compétences et les financements qui leur sont demandés sont néanmoins assez lourds.
Jusqu'alors, comme nous le constatons depuis plusieurs années, nous n'avons pas pu inverser la tendance.
Un professeur de médecine générale de Nancy vient de proposer deux thèses de doctorat en médecine portant sur ce sujet. À leur lecture, je me suis rendu compte - même si le Sénat avait déjà abordé cette question à l'occasion de l'enquête sur les services publics en milieu rural - que les étudiants avaient mille raisons de ne pas vouloir s'installer à la campagne et que les mesures d'incitation qui leur étaient proposées jusqu'à présent pesaient peu au regard de cette aspiration profonde, liée pour une part à la féminisation de la profession, mais aussi et surtout à la volonté d'exercer la médecine dans des conditions plus confortables.
Nous sommes bien loin du sacerdoce que représentait autrefois cette profession. Je crains que le système du libre choix de l'installation, dans lequel un jeune médecin peut s'installer là où il le souhaite, ne soit parvenu au terme de sa force propulsive. Peut-être serons-nous amenés à exiger, comme pour d'autres professions, que les jeunes médecins s'installent pendant un certain temps à tel endroit plutôt qu'à tel autre. Il s'agit d'une responsabilité globale qui n'incombe pas plus à ce gouvernement qu'au précédent. Permettre à tous nos concitoyens de bénéficier de soins, quel que soit l'endroit où ils habitent, relève en effet de la responsabilité politique.
Pour les pharmaciens, on a défini des zones selon le nombre d'habitants. Ce dispositif n'existe pas encore pour les médecins, mais peut-être devrons-nous bientôt mener cette réflexion. C'est ce qu'attendent de nous nos concitoyens, car ils sont tous appelés, malheureusement, à devenir un jour ou l'autre des patients.
La parole est à M. Dominique Leclerc, auteur de la question n° 1028, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.
Monsieur le ministre, dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie, vous avez souhaité placer au centre de notre système de soins le médecin traitant, tout en laissant une liberté de choix aux patients. Nous constatons aujourd'hui que ces derniers ont majoritairement choisi comme médecin traitant leur médecin généraliste, reconnaissant de facto la spécificité que ces professionnels réclament et qui ne leur a pas été entièrement accordée lors de la mise en place de la réforme. Ce déni est d'ailleurs l'une des raisons de leur défiance.
Ainsi, par la force des choses, les médecins généralistes sont devenus des acteurs incontournables du monde de la santé alors que, paradoxalement, la médecine générale connaît à l'heure actuelle une certaine crise.
En effet, les problèmes de démographie médicale, et notamment d'accès aux soins de premier recours, sont inquiétants et risquent, si nous n'agissons pas, de se pérenniser. Certes, pour faire face à cette situation, vous avez récemment lancé, monsieur le ministre, un plan d'action en faveur de la démographie médicale, afin d'enrayer la véritable pénurie de médecins constatée dans certaines régions. Toutes les mesures mises en place permettent de répondre aux problèmes qui se posent sur le terrain, mais cette évolution ne peut se faire que lentement, car il faut dix ans pour former un médecin.
Ce n'est pas ce gouvernement, que nous soutenons, qui a limité le numerus clausus afin de réduire l'offre médicale, et donc les dépenses de santé. Au contraire, il l'augmente progressivement, d'année en année. Mais il ne peut pas le faire dans des proportions énormes, car l'appareil universitaire doit assurer une formation complexe, qui exige des moyens humains et financiers considérables.
Les mesures que vous avez prises ces derniers mois, monsieur le ministre, et qui visent notamment à soutenir les médecins actuellement en exercice dans des zones sous-médicalisées, sont donc très appréciées et vont dans le bon sens.
Par ailleurs, le dispositif permettant de faire connaître la médecine générale aux étudiants de deuxième cycle, grâce à la mise en place de stages, est encore parcellaire et expérimental.
Il faut faire plus pour rendre attractive la médecine générale, car là est bien le problème. Nous devons absolument rendre ses lettres de noblesse à cette discipline, ce qui passe en premier lieu par la mise en place d'une filière universitaire de médecine générale. En effet, la reconnaissance que vous avez proposée en 2004, monsieur le ministre, ne suffit pas.
La médecine générale doit être reconnue au même titre que toutes les disciplines universitaires, mais il faut aussi lui permettre de conserver sa spécificité clinique dans le monde médical : un exercice de la médecine centré sur les soins de premier recours, de proximité, de synthèse, et surtout sur la continuité du soin dans un système ambulatoire.
Les pistes pour la mise en place d'une telle filière ont été diagnostiquées et approuvées depuis longtemps par les principaux acteurs de ce secteur.
Il faut accroître la visibilité de la discipline en nommant des professeurs titulaires qui seront de véritables acteurs des enseignements de premier et deuxième cycles des études médicales.
Il faut aussi faire découvrir à tous les étudiants la pratique de la médecine générale, particulièrement sa spécificité ambulatoire, en facilitant la réalisation de stages de premier et de deuxième niveaux qui permettent de présenter les aspects positifs de cet exercice de la médecine, notamment en zone rurale, ou bien encore au sein de structures privées lorsque les terrains de stages sont insuffisants, comme c'est le cas en pédiatrie et en gynécologie. Il est temps de sortir du « 100 % CHU » afin que les étudiants bénéficient d'une véritable approche de la médecine générale.
Il faut également offrir aux étudiants qui le souhaitent la possibilité de mener une carrière universitaire en créant, au sein des services universitaires de médecine générale ambulatoire, des postes de chef de clinique, de maître de conférences et de professeur titulaire de médecine générale.
Mais il nous faut encore aller au-delà en donnant, d'une part, des garanties aux résidents et internes de médecine générale quant à la titularisation d'une partie des enseignants actuels associés à la discipline, en vue de l'encadrement des futurs chefs de clinique de médecine générale et, d'autre part, la possibilité aux résidents ayant validé les mêmes enseignements théoriques et pratiques que leurs collègues internes de pouvoir accéder au DES, le diplôme d'études spécialisées.
Monsieur le ministre, ces réformes sont attendues par les représentants de cette filière. Je vous serais donc reconnaissant de bien vouloir me faire connaître votre sentiment sur ces différentes propositions.
Monsieur le sénateur, la question de l'enseignement de la médecine générale retient toute l'attention du Gouvernement.
Vous avez souligné le succès de l'un des aspects essentiels de la réforme de l'assurance maladie, en faveur de laquelle vous vous étiez prononcé voilà bientôt deux ans. Aujourd'hui, dans leur très grande majorité, nos concitoyens ont fait le choix de leur médecin généraliste comme médecin traitant. C'était l'une des ambitions de cette réforme.
S'agissant plus particulièrement de la dimension universitaire de la médecine générale, plusieurs dispositions récentes, et d'autres que nous allons prendre, ont déjà donné à son enseignement un statut qui lui faisait jusqu'ici défaut.
L'enseignement universitaire de la médecine générale est désormais sanctionné par un diplôme d'études spécialisées qui en fait une spécialité à part entière. Les professeurs associés de la discipline peuvent exercer leurs fonctions jusqu'à la limite d'âge. Cette disposition a été instaurée à leur seul bénéfice.
Plus de vingt postes d'enseignant associé à temps partiel ont été créés au titre de l'année 2006, permettant de satisfaire plus des deux tiers des demandes formulées par les facultés de médecine en une seule opération de recrutement.
Au-delà des mesures déjà prises pour assurer le contact des étudiants de troisième cycle avec les médecins généralistes en exercice, il convient d'assurer la mise en oeuvre du stage d'initiation de deuxième cycle. M. Xavier Bertrand a ainsi pris la décision d'en assurer le financement dans le cadre du plan de démographie médicale.
Le ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche, M. François Goulard, est convaincu, comme nous le sommes, de la nécessité d'individualiser une filière universitaire complète de médecine générale, avec toutes les prérogatives qui s'y attachent. Aussi avons-nous mis en chantier l'élaboration de la maquette de cette filière avec tous les partenaires universitaires concernés.
Simultanément, des dispositions sont prises pour favoriser l'accès des médecins généralistes et des jeunes en formation qui souhaiteraient embrasser une carrière universitaire aux activités de recherche qui, avec les activités pédagogiques et la mobilité, fondent les critères universitaires de recrutement.
Jusqu'à ce que les nouvelles générations aient pu accomplir un cursus répondant à ces critères, il conviendra, à la faveur de dispositions transitoires, d'assurer l'intégration dans un corps de titulaires de ceux des professeurs associés qui ont su démontrer leur engagement dans la fonction universitaire. À cet effet, une option « médecine générale » sera associée à la sous-section de « médecine interne », en attendant que les conditions soient réunies pour qu'une sous-section spécifique puisse être constituée.
Enfin, je n'ignore pas que les résidents et les anciens résidents récemment qualifiés en médecine générale souhaitent obtenir une équivalence du diplôme d'études spécialisées de médecine générale, au motif qu'ils ont suivi un cursus analogue à celui qui est proposé aux internes. Si les dispositions législatives en vigueur ne prévoient pas cette équivalence, elles permettent cependant à un médecin qualifié d'obtenir le diplôme qui sanctionne la formation initiale.
C'est dans cette perspective que le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a élaboré un projet de décret autorisant un médecin qualifié à solliciter la délivrance d'un diplôme d'études spécialisées de la commission universitaire qui a qualité pour délivrer ce diplôme à l'issue de la formation initiale. Ce projet a reçu l'avis favorable du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.
Je vous demanderai cependant d'aller rapidement plus loin que ces mesures, même si elles vont dans le bon sens, notamment celles qui ont été prises dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie. Il ne faut pas oublier en effet que, pendant de longues années, cette spécialité n'était accessible que par le biais d'un internat qualifiant. Il était donc indispensable de répondre à ce besoin de reconnaissance exprimé par les acteurs de la médecine générale.
Par ailleurs, il est urgent aujourd'hui, à la suite de la réforme de 2004 et de la mise en place d'un internat pour tous, de donner rapidement à la médecine générale ses lettres de noblesse, pour des raisons non seulement d'attractivité mais aussi de maintien de la qualité de cette filière. En effet, la médecine générale représente pour nos concitoyens le pivot de la réforme de 2004 et, également, la médecine de première instance.
C'est donc à la fois pour ces motifs d'attractivité, de noblesse mais aussi de qualité de la médecine générale que je demande la mise en place de cette filière universitaire spécifique.
La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 1032, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
Monsieur le ministre, j'appelle votre attention sur les normes législatives et réglementaires qui encadrent le fonctionnement des CODERPA, les comités départementaux des retraités et personnes âgées.
En effet, la loi du 13 août 2004, en son article 57, transfère non seulement aux conseils généraux la présidence du comité, la nomination de ses membres, mais aussi et surtout la définition de ses modalités de fonctionnement. C'est l'objet, monsieur le ministre, de ma question, qui est double, car elle porte à la fois sur le fond et sur la forme.
Sur le fond, l'article L.149-1 du code de l'action sociale et des familles précise que les modalités de fonctionnement des CODERPA sont « fixées par délibération du conseil général ».
Dans le même temps, les articles D.149-7, D.149-8 et D.149-9 du même code, particulièrement les deux derniers, paraissent en contradiction avec l'article L.149-1 que je viens d'évoquer. Ils font en effet référence à une présidence de ce comité par le préfet du département, ce qui correspond au fonctionnement antérieur à 2004.
Contradictoires avec la loi, ces textes réglementaires comportent, par ailleurs, des précisions sur l'organisation des CODERPA, précisions dont certains membres demandent aujourd'hui l'application.
C'est la raison pour laquelle, soucieux de répondre en toute transparence aux membres du CODERPA de la Haute-Marne, très attentifs sur ce point, je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir me faire savoir, d'une part, si les textes réglementaires en cause restent applicables, d'autre part et le cas échéant, ce qui est prévu pour régler la contradiction entre la loi, c'est-à-dire l'article L. 149-1 du code de l'action sociale et des familles, et le règlement, c'est-à-dire les articles D. 149-7, D. 149-8 et D. 149-9 de ce même code.
Voilà pour le fond.
Quant à la forme, au-delà du respect de la lettre de l'article L.149-1, qui offre toute liberté aux conseils généraux pour déterminer par leurs délibérations les modalités d'organisation des CODERPA, je crois que, dans un souci de bonne administration des affaires publiques, l'esprit de la loi doit en guider l'application. « Ce n'est point le corps des lois que je cherche, mais leur âme », écrivait déjà Montesquieu en 1748, dans ce best-seller de l'époque qu'est De l'esprit des lois.
En l'espèce, parce que le Gouvernement est le rédacteur de l'article 57 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, article qui encadre les modalités de fonctionnement des CODERPA, je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir expliciter ses intentions concernant les modalités concrètes d'organisation et les moyens de fonctionnement des CODERPA.
Autrement dit, le respect de l'esprit de la loi contraint-il le conseil général à l'adoption d'un règlement de fonctionnement du CODERPA conforme à ce que prévoyaient les textes en vigueur jusqu'au vote de la loi du 13 août 2004, c'est-à-dire avec un bureau, des commissions, un secrétariat propre, des voitures, etc., ou, seconde hypothèse, d'autres modalités de fonctionnement, qui assurent la consultation du CODERPA, par exemple sur le schéma gérontologique, peuvent-elles valablement être mises en place, étant entendu - cela va de soi - que la majorité des membres de ce conseil consultatif est issue d'associations représentatives des personnes âgées ?
Je partage, monsieur Sido, votre préoccupation quant à la nécessité d'assurer une représentation de qualité des retraités et des personnes âgées auprès des institutions qui prennent les décisions les plus importantes les concernant. C'est la raison pour laquelle la loi du 13 août 2004 a prévu que, désormais, ce ne sera non plus auprès du préfet que siègeront les comités départementaux des retraités et personnes âgées, mais auprès du président du conseil général, car c'est à lui qu'il appartient d'animer, avec l'ensemble de ses services, les politiques en faveur des personnes âgées sur le plan territorial.
Monsieur le sénateur, les questions que vous posez sont parfaitement claires, et elles appellent des réponses claires elles aussi.
Premièrement, les textes réglementaires que vous citez, bien qu'ils subsistent dans le code de l'action sociale et des familles, ne sont en effet plus applicables, car ils contredisent la loi elle-même. Ce principe juridique d'interprétation s'impose, mais, pour plus de sûreté, je vais les supprimer : je profite d'un décret réglant les modalités d'organisation du conseil national représentatif des personnes âgées qui est en cours d'examen par le Conseil d'État pour effacer de nos textes ces dispositions qui pourraient induire certains en erreur.
Deuxièmement, la loi a donné aux présidents des conseils généraux toute compétence pour organiser comme ils l'entendent la composition des conseils départementaux des retraités et des personnes âgées. Il n'est pas prévu par conséquent que l'autorité réglementaire se substitue, sur le plan national, aux présidents des conseils généraux, qui doivent avoir toute latitude, pourvu, bien sûr, qu'ils constituent effectivement ces organismes de représentation et qu'ils les consultent, comme le prévoit la loi, sur toutes les politiques départementales. C'est dire que les modalités d'organisation et les moyens matériels qui doivent, je le souhaite, permettre à ces instances de fonctionner au bénéfice de tous relèvent exclusivement des départements, et non plus de l'État.
J'espère, par ces réponses, avoir été suffisamment clair et vous avoir donné tous les éléments qui permettront aux départements - mais je crois que, dans le vôtre, c'est déjà le cas - d'assurer tout à la fois une bonne consultation des représentants des personnes âgées et une bonne organisation des politiques départementales.
Je vous remercie, monsieur le ministre, des réponses particulièrement claires que vous m'apportez. Grâce aux technologies actuelles, nous avions déjà pu noter que vous aviez soumis au Conseil d'État un décret prévoyant, en son article 3, l'abrogation de ces décrets incompatibles avec la loi. Il valait en effet mieux les supprimer, car, si nous savons tous que la loi a une valeur normative supérieure à celle des décrets, quelques imprécisions demeuraient néanmoins s'agissant de l'organisation.
Il est d'une particulière importance de consulter, au niveau tant national, bien entendu, que départemental, les personnes âgées, parce qu'elles ont une grande expérience et aussi parce qu'elles sont de plus en plus nombreuses. Il convient donc que le conseil général et son président prennent l'avis des personnes âgées, par exemple sur l'organisation des maisons de retraite. Or, la question que je vous posais, monsieur le ministre, tous les présidents des conseils généraux se la sont posée ; grâce à vos réponses, sans qu'importe d'ailleurs leur sensibilité politique, ils sauront mieux comment organiser dorénavant le fonctionnement entre le conseil général et ces importantes instances que sont les CODERPA.
La parole est à M. Gérard Delfau, auteur de la question n° 1006, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.
Je souhaite attirer l'attention du ministre de la culture et de la communication sur l'inquiétude du secteur des radios associatives quant au maintien du pluralisme radiophonique institué par la libération des ondes en 1981. En effet, les 600 radios associatives, qui assument une mission d'intérêt général et irriguent l'ensemble du territoire national, se sentent menacées dans leur existence même.
D'une part, le plan de réattribution des fréquences, prévu par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, risque de favoriser les réseaux commerciaux, déjà bien implantés, au détriment des structures associatives à but non lucratif. Plus précisément, le CSA a-t-il l'intention de sauvegarder l'équilibre actuel entre les trois composantes, service public, secteur commercial et radios associatives, qui détiennent environ 30 % du total ?
D'autre part, le financement des radios associatives est pour l'essentiel assuré par le fonds de soutien à l'expression radiophonique, qui est assis sur une taxe parafiscale. Le montant de celle-ci risque-t-il d'être revu à la baisse sous la pression des grands médias privés, qui sont les premiers financeurs ?
Par ailleurs, est-il exact que la direction du développement des médias du ministère de la culture et de la communication travaille sur un projet de modification des règles d'accès à ce fonds et envisage de supprimer la partie quasi automatique de la subvention ?
S'il convient d'être rigoureux dans la sélection des dossiers, qui doivent correspondre à une vraie prestation d'intérêt général sur le terrain, il faut prendre garde à toute évolution des modes d'attribution qui introduirait des critères subjectifs, voire politiques, dans les choix de l'administration.
Enfin, il serait question d'élargir le plafond des 20 % de ressources publicitaires, qui est, à l'heure actuelle, compatible avec l'accès au fonds de soutien. Or, il importe de souligner que la rupture de cet équilibre, longuement négocié en 1989 - j'en sais quelque chose... - et voulu par le Sénat, poserait bien des problèmes à la fois au secteur associatif et aux réseaux commerciaux.
C'est pourquoi je demande à M. le ministre de la culture et de la communication de préciser sa position sur tous ces sujets. Je souhaite le voir réaffirmer la spécificité des radios associatives, ainsi que la mission d'information et d'animation de proximité qu'elles remplissent, généralement avec le soutien des collectivités territoriales. Je demande au Gouvernement que le pluralisme d'expression radiophonique, qui concourt au débat démocratique, soit conforté et non affaibli.
Monsieur Delfau, M. Donnedieu de Vabres, qui vous demande de bien vouloir l'excuser de n'avoir pu participer à cette séance de questions orales sans débat, m'a chargé de vous transmettre la réponse qu'il vous aurait sinon lui-même apportée.
Les radios associatives occupent une place essentielle pour assurer le pluralisme des courants d'expression socioculturels. C'est à ce titre que l'État s'est engagé et continue de s'engager à les soutenir à travers le fonds de soutien à l'expression radiophonique.
Pour traduire ce soutien de l'État, dont la base légale se trouve dans la loi de 1986, je retiens un nombre, celui des radios bénéficiant du fonds de soutien, nombre qui, en quinze ans, a presque doublé : en 2005, ce sont ainsi 562 radios qui sont subventionnées, ce qui représente un montant total de 24, 2 millions d'euros et une aide moyenne de près de 42 000 euros par radio.
Mais vous avez raison, monsieur le sénateur, de mettre en lumière les inquiétudes qui sont ressenties parmi les acteurs de ce secteur. C'est pour apaiser ces inquiétudes que Renaud Donnedieu de Vabres s'est rendu, le 13 mai dernier, au 13e congrès du Conseil national des radios associatives et s'est attaché à rassurer ce dernier sur les retards de paiement intervenus cette année, mais aussi à tracer les perspectives.
S'agissant des paiements des subventions de 2005, le ministre de la culture et de la communication a demandé que des mesures soient prises. C'est aujourd'hui chose faite : les subventions de fonctionnement, les aides à l'équipement et les- majorations accordées ont toutes été notifiées et elles seront toutes payées d'ici au mois de juin.
Par ailleurs, la commission du fonds de soutien, qui s'est réunie le 11 mai dernier, a estimé que la meilleure solution était de reprendre pour l'avenir le mode de fonctionnement habituel, ce qui lui permettra de délibérer sur l'ensemble des demandes de subvention de 2006 dans leur ordre d'arrivée.
Quant à l'avenir, il s'inscrit dans la réforme réglementaire que Renaud Donnedieu de Vabres a lancée et que vous évoquiez à l'instant.
Cette réforme, qui est actuellement soumise à une concertation que le Gouvernement souhaite la plus consensuelle possible, a pour objet de consolider, de renforcer et d'améliorer le fonctionnement et l'efficacité de l'outil exceptionnel que constitue le fonds de soutien à l'expression radiophonique.
Quelles en seront les grandes lignes ?
D'abord, les subventions d'installation, d'équipement et de fonctionnement seront regroupées sous le vocable unique de « subventions automatiques ». L'actuelle majoration, rebaptisée « aide sélective », sera désormais fondée non plus sur cinq mais sur six critères, incluant la proportion de programmes propres produits par la radio. Il n'est, bien sûr, pas question d'obérer l'indépendance éditoriale des radios : dans une démocratie comme la nôtre, la liberté d'expression est une valeur sacrée, incarnée par les radios associatives.
Ensuite, le mode de calcul de la subvention sera renvoyé à un arrêté mais, en tout état de cause, les crédits liés à l'aide sélective ne pourront excéder 25 % du total des crédits consacrés aux subventions de fonctionnement.
Les plafonds des subventions d'installation et d'équipement seront portés de 15 250 euros à respectivement 16 000 et 18 000 euros.
Les radios auront désormais la faculté de présenter deux demandes de subvention d'équipement par période de cinq ans, dans la limite de ces plafonds.
Enfin, la commission ne délibérera plus sur les subventions à caractère automatique. En revanche, elle acquiert une compétence consultative générale et le ministre de la culture et de la communication pourra la saisir de toute question concernant le secteur des radios associatives. Le Gouvernement tient à ce qu'elle devienne plus encore un lieu de dialogue et de concertation.
Monsieur le sénateur, cette réforme n'entrera en vigueur que le 15 février 2007, de sorte que les radios aient le temps de se familiariser avec ces nouvelles dispositions. Elle ne devrait avoir que peu de conséquences sur la présentation des demandes de subvention. Il en va de même du futur plan de fréquences du CSA, le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Je ne doute pas que l'équilibre global sera maintenu et que les radios associatives y trouveront toute leur place.
L'État, comme votre Haute Assemblée et les collectivités territoriales, confirme et consolide son engagement pour le pluralisme d'expression radiophonique. Le ministre de la culture et de la communication tenait, une nouvelle fois, à en prendre l'engagement devant vous, au nom du Gouvernement.
Monsieur le ministre, je suis évidemment heureux pour l'ensemble des radios associatives que le retard qui avait été pris dans le paiement des subventions du fonds de soutien à l'expression radiophonique se résorbe et que le ministre se soit engagé à ce que, très rapidement, toutes les sommes soient versées. Il y avait là, effectivement, une source d'inquiétude et de fragilisation.
S'agissant de l'évolution du fonds de soutien, je tiens à rappeler que la législation des années quatre-vingts - je le sais pour y avoir beaucoup participé, le Sénat y ayant pris une part active - s'est faite à partir d'échanges, dans le dialogue et l'accord de toutes les composantes. Je souhaite donc vivement que, comme vous l'avez indiqué, le Gouvernement continue dans ce sens. C'est un élément important de confiance et d'efficacité.
Sur deux questions que j'avais posées, en revanche, vous ne m'avez pas rassuré.
Périodiquement - et encore récemment - des menaces planent sur le montant du fonds de soutien, c'est-à-dire sur le montant de la taxe parafiscale, les gros financeurs estimant que cela pèse sur leur budget, alors que c'est quasiment dérisoire.
Vous ne m'avez pas apaisé sur ce point et je vais écrire au ministre pour qu'il me dise très exactement que ce montant ne pourra en aucun cas être diminué.
De même, je n'ai reçu aucune assurance sur le futur plan de fréquences. Je sais qu'il existe une autorité indépendante, le CSA. J'ai bien entendu quelle était l'orientation du Gouvernement ; je souhaite qu'elle se manifeste avec beaucoup de force. En effet, je le dis avec quelque solennité, une éventuelle amputation du secteur des radios associatives signifierait, au-delà du simple fait, une amputation du pluralisme démocratique. Mais, je le répète, j'ai bien entendu que ce n'est pas dans ce sens que vous voulez aller, que ce n'est pas ainsi que le CSA entend la philosophie du Gouvernement.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à seize heures cinq, sous la présidence de M. Christian Poncelet.