Intervention de Bruno Sido

Réunion du 30 mai 2006 à 16h00
Gestion durable des matières et des déchets radioactifs — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Bruno SidoBruno Sido :

Non seulement les gens en vivent, mais ils représentent une certaine expertise rassurante ; ils savent ce qui s'y passe. Près d'une centrale, ce qui inspire confiance, c'est la connaissance des agents d'EDF ou des sous-traitants, leur implication dans la vie locale.

C'est un élément très important ; les installations industrielles se sont développées car elles font vivre un territoire qui les accepte. Ce n'est d'ailleurs pas spécifique à l'industrie : la Côte d'Azur a accepté les inconvénients de la pression touristique car le tourisme est le poumon économique du littoral.

Il doit en être de même pour les installations de l'aval du cycle nucléaire : elles doivent faire vivre directement ou indirectement un territoire, une population qui en assurera une forme de surveillance.

L'impact socioéconomique d'une centrale est donc bien de deux natures : la fiscalité locale générée, mais aussi et surtout l'activité économique induite. J'aborderai ces deux points distincts.

Je commence par l'impact financier.

Depuis l'an 2000, des groupements d'intérêt public ont été créés en Meuse et en Haute-Marne - je préside celui de la Haute-Marne ; ils ont fonctionné de manière satisfaisante et ont pu soutenir le développement des entreprises sur l'ensemble du territoire départemental, le déploiement des infrastructures et des superstructures, ainsi que les initiatives locales à proximité du site du laboratoire de Bure.

Il faut conforter ces moyens pour développer ces territoires au niveau départemental, tout particulièrement là où les enjeux de l'emploi sont les plus prégnants. M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie l'a reconnu et nous a invités à persévérer dans la voie qui est la nôtre pour la défense de l'emploi et de l'entreprise, tout particulièrement dans le bassin de vie de Saint-Dizier.

Le territoire de la Haute-Marne fait face à des évolutions démographiques pénalisantes et son tissu industriel connaît des mutations douloureuses. Or l'année 2007 sera marquée par la refonte de la politique régionale européenne, par le nouveau zonage de la prime à l'aménagement du territoire, la PAT, ainsi que par les nouveaux contrats de projets État-région, autant d'éléments qui préfigurent des modalités de financement public plus restrictives, plus contraintes. Il faut donc absolument que les territoires meusiens et haut-marnais disposent des moyens nécessaires pour investir et accompagner les projets de développement.

Sur ce point, je trouverais légitime que les dispositions de l'article 15 relatives au financement soient telles que, a minima, les dotations soient supérieures aux dotations actuelles, de l'ordre de 10 millions d'euros par an et par département.

Par ailleurs, sur proposition du rapporteur, la commission a proposé d'introduire une fongibilité temporaire entre les dotations d'accompagnement économique et les dotations de diffusion technologique. Je soutiens cette proposition, à même de donner aux GIP la souplesse dont ils ont besoin pour soutenir les bons projets, au bon moment, au niveau financier le mieux adapté.

De fait, même si nous le regrettons vivement, les territoires de la Meuse et de la Haute-Marne sont, comparativement à d'autres départements, moins bien lotis en termes d'équipements scientifiques et technologiques. En l'absence de centres de recherche et de formations supérieures dans les domaines technologiques, les projets répondant aux critères de diffusion technologique pourraient se faire attendre et les dotations afférentes ne pas résister au principe de l'annualité budgétaire...

À l'inverse, les projets d'accompagnement économique seront vraisemblablement les plus nombreux, au moins dans un premier temps, nécessitant un appui financier des GIP en conséquence. Les fonds confiés aux GIP doivent donc pouvoir être mobilisés à bon escient, avec pragmatisme, suivant l'évolution du contexte et des opportunités.

La notion de fongibilité constitue un réel principe d'efficacité ; je proposerai donc qu'elle soit portée de 50 % à 80 % du montant des dotations.

J'en viens à l'activité économique induite.

Au-delà des mesures financières, les entreprises concernées par la production de déchets radioactifs doivent s'impliquer dans le développement d'activités sur le territoire.

En créant un Comité de haut niveau, lors du CIADT - le comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire - du 12 juillet 2005, vous avez accédé, monsieur le ministre, à une requête que je formulais depuis plusieurs années avec mes collègues meusiens. Nous nous en félicitons.

Il est, en effet, de la responsabilité des producteurs de déchets de développer de nouvelles activités génératrices d'emplois autour des sites ; c'est une condition du succès de toute démarche engagée dans le cadre de la loi Bataille.

Il faut se féliciter des premiers engagements d'EDF, d'AREVA et du CEA sur cet enjeu difficile. Mais il faut que les acteurs du nucléaire amplifient et pérennisent ces engagements sur les territoires de la Meuse et de la Haute-Marne.

Leurs premières initiatives portent sur la biomasse, notamment d'origine sylvicole, sur la maîtrise de la demande d'énergie et sur les énergies renouvelables, ainsi que sur des partenariats industriels locaux. Certaines de leurs actions seront rapidement couronnées de succès, d'autres pourraient connaître un sort moins heureux. C'est pourquoi il est nécessaire que nous puissions apprécier régulièrement l'évolution des projets.

La publication, prévue à l'article 9 du projet de loi, de rapports annuels sur le développement économique des territoires, induit par l'action économique des acteurs de la filière, s'avérera à ce titre indispensable. Je peux vous dire, monsieur le ministre, que nous examinerons ces rapports avec beaucoup de vigilance.

En guise de conclusion, je formulerai une remarque. Qu'il s'agisse de faire avancer la recherche sur les trois axes retenus, de mieux informer les populations, avec l'aide de la communauté scientifique, pour organiser, le moment venu, une consultation réelle des habitants comme des collectivités les plus concernées, qu'il s'agisse également d'inscrire dans les textes et sur le terrain la priorité accordée à un développement économique porteur d'emplois, les éléments qui nous permettront d'avancer sur des bases solides sont connus : le Parlement doit aujourd'hui les conforter !

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