En outre, ces textes anciens n’étaient applicables qu’au secteur privé. Ils méritaient donc – vous le reconnaîtrez, monsieur le sénateur – d’être sérieusement actualisés : nous avons enregistré des évolutions lourdes, comme le vieillissement et l’accroissement des pathologies chroniques, et, bien entendu, le niveau d’exigence de nos compatriotes en matière de sécurité et de qualité des soins a augmenté, ce qui est d'ailleurs tout à fait légitime au regard des énormes progrès scientifiques et technologiques qu’a connus la médecine pendant cette période.
À partir de ce constat, un travail de refonte de ces textes réglementaires a été engagé par l’un de mes prédécesseurs, en l’occurrence Xavier Bertrand.
Les services du ministère de la santé ont mené une démarche de concertation étendue avec tous les acteurs publics et privés concernés, les fédérations d’établissements, les syndicats médicaux, les sociétés savantes, le Conseil national de la chirurgie – vous l’avez évoqué, monsieur Mézard –, le Conseil national de l’ordre des médecins et la Haute autorité de santé.
Ce travail de concertation et de confrontation scientifique ne vise pas, comme je l’ai lu ici ou là, à fermer des établissements ! Il s'agit d’identifier les principes qui garantissent la sécurité et la qualité des soins afin d’améliorer la prise en charge des patients.
Parmi ces critères figure, entre autres, le nombre des actes effectués par les praticiens, car, nous le savons, ce que l’on fait bien, c’est ce que l’on fait souvent ! À l’évidence, la qualité d’un acte chirurgical ou obstétrical est directement liée à la fréquence avec laquelle celui-ci est pratiqué par un médecin ou un chirurgien.
Cette démarche nous a conduits à définir un seuil minimal d’activité. Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu rappeler que le Conseil national de la chirurgie avait proposé de fixer celui-ci à 2 000 actes. J’ai pour ma part beaucoup insisté pour que ce seuil soit établi à 1 500 actes, et on pourrait d’ailleurs me reprocher de ne pas avoir suivi les préconisations du Conseil national de la chirurgie ; 1 500 actes, c’est bien le minimum pour qu’une activité chirurgicale se déroule dans des conditions de sécurité et de qualité optimales. C’est ce seuil qui figure dans le projet d’arrêté annexé aux deux décrets. Il garantit également que les opérateurs – chirurgiens, anesthésistes, équipes soignantes présentes au sein du bloc – ont une pratique suffisante pour conserver le niveau de compétence et d’expertise requis pour des opérations souvent spécialisées.
Les patients le savent d’ailleurs, qui votent avec leurs pieds. Les établissements de proximité dont l’activité est faible connaissent souvent des taux de fuites importants : les patients choisissent de ne pas se faire opérer dans ces établissements et ont recours à des plateaux techniques plus éloignés, mais plus importants. Ce taux de fuites peut atteindre 80 %, voire 90 %, et c’est tout à fait considérable. Nous ne pouvons nous satisfaire de ces situations où nos concitoyens ont certes accès aux soins, mais sans que l’offre qui leur est proposée réponde à toutes les exigences de qualité et de sécurité.
J’ai souhaité renforcer le rôle propre aux établissements de proximité, afin qu’ils répondent au mieux aux besoins de la population. Si cette réponse peut passer par une reconversion partielle d’activités, elle ne conduit jamais – j’insiste sur ce point – à une fermeture d’établissement : je n’ai en effet jamais fermé d’établissement !
Les centres hospitaliers voient ainsi leur rôle de proximité renforcé, en développant des services de soins de suite et de réadaptation ou des services de médecine gériatrique et en s’intégrant dans des filières de soins, notamment au moyen de formules de coopérations hospitalières. Je suis particulièrement attachée à la prise en charge graduée et coordonnée des patients en tout point du territoire.
Enfin, monsieur le sénateur, vous avez évoqué les urgences. Celles-ci ont vocation à faire partie intégrante des activités de l’hôpital de proximité. C’est l’une de ses missions, avec la médecine courante, les soins post-aigus et la gériatrie. C'est la raison pour laquelle j’ai tenu à renforcer les services d’urgence et j’ai pris des engagements chiffrés très précis pour que 90 % de la population, au lieu de 80 % actuellement, puisse être prise en charge par une structure adéquate dans un délai très rapide. Et vous savez bien, monsieur le sénateur, que ce sont les 10 % supplémentaires qui sont les plus difficiles à obtenir !
Les textes réglementaires qui sont publiés ne sont pas un couperet, loin s’en faut. Un établissement dont le service de chirurgie n’atteint pas le seuil minimal d’activité ne ferme pas pour autant. C’est l’occasion de se poser un certain nombre de questions, de se demander ce qui se passe, comment apporter des améliorations, notamment en matière de qualité des soins, quelles coopérations seraient les plus opportunes pour remédier aux difficultés rencontrées, quelles activités pourraient être transformées. Il s’agit de tout mettre en œuvre pour éviter que ce ne soit considéré comme une relégation.