Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser Bruno Le Maire, actuellement retenu à Bruxelles par le Conseil européen « Agriculture et pêche ». Cela me donne le plaisir de répondre à votre question, étant moi-même élue de l’une des premières régions agricoles françaises, et suivant, à ce titre, ces questions avec beaucoup d’intérêt.
Vous avez tout à fait raison de souligner que l’agriculture traverse une crise exceptionnelle. Les radios ont annoncé ce matin la baisse du revenu des agriculteurs, donnant un retentissement médiatique à la réalité que vivent les exploitants agricoles. Tous les secteurs sont touchés. C’est une crise de revenu, mais c’est aussi une crise d’identité : le monde agricole se demande quelle est sa place dans la société. Nous devons lui offrir des perspectives.
Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour trouver des solutions à cette crise. À cet égard, le plan présenté le 27 octobre dernier par le Président de la République est sans précédent. Doté de 1, 6 milliard d’euros, il comprend deux volets : des mesures bancaires, d’une part, des mesures d’allégements de charges, d’autre part. Ce plan est composé d’une batterie de mesures pour répondre aux besoins de tous les exploitants en difficulté, quelles que soient les filières et les régions. Ce sont les résultats qui comptent. C’est un parlementaire, M. Nicolas Forissier, qui a été nommé médiateur national pour le plan d’urgence en faveur de l’agriculture, afin de s’assurer que les agriculteurs seront entendus.
La déduction pour aléas est un dispositif déjà inscrit dans le code général des impôts, en cas d’aléa climatique, naturel ou sanitaire, afin d’inciter les agriculteurs à constituer une épargne de précaution en vue d’y faire face.
Comme vous le demandiez, l’Assemblée nationale vient d’étendre aux aléas économiques cette disposition par un amendement déposé par le député Marc Le Fur, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2010.
Par ailleurs, le Gouvernement a pour ambition de généraliser l’assurance récolte. Il a décidé d’augmenter les moyens qui y sont consacrés en 2009 pour la développer dans les secteurs les plus exposés, comme les fruits et légumes ainsi que la viticulture, en portant le taux de subvention à 40 % et à 45 % pour les jeunes.
Dans le même temps, la couverture des risques climatiques et sanitaires a été inscrite dans le cadre du premier pilier de la politique agricole commune, la PAC. C’est une avancée majeure qui va permettre en 2010 de mobiliser 100 millions d’euros de crédits communautaires. Une nouvelle impulsion pourra ainsi être donnée au développement de l’assurance récolte en portant le taux de subvention à 65 % pour l’ensemble des secteurs agricoles concernés – grandes cultures, fruits et légumes, viticulture.
Cette évolution constitue une perspective pour l’après-2013 pour développer d’autres dispositifs assurantiels, de type assurance revenu ou chiffre d’affaires. À cet effet, le Gouvernement souhaite mettre en place rapidement une expérimentation d’un produit d’assurance couvrant les productions fourragères. Cette position de principe soulève la question de la réassurance publique. C’est la raison pour laquelle Bruno Le Maire préconise que les assureurs se lancent dans l’expérimentation de terrain. Au vu des résultats, nous pourrons en toute connaissance de cause examiner la question de la réassurance.
En parallèle, le Gouvernement prépare aussi – vous le savez d’ailleurs – un projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, qui a notamment pour priorité de stabiliser et de mieux garantir les revenus des agriculteurs et des pêcheurs. Ce projet permettra d’organiser l’indemnisation des calamités agricoles climatiques et le développement des assurances récoltes, notamment fourragères, en inscrivant dans la loi l’examen de la question de la réassurance, privée et publique.
Enfin, monsieur le sénateur, vous demandez que, pour leur imposition sur le revenu, les agriculteurs puissent bénéficier, comme pour leurs charges sociales, d’un dispositif d’étalement sur trois ans. Je vous confirme que ce mécanisme existe déjà : il s’agit de la moyenne triennale prévue à l’article 75-0 B du code général des impôts, qui permet de lisser les revenus imposables pour tenir compte de l’irrégularité des bénéfices agricoles. Ainsi, sur option du contribuable, le bénéfice agricole est déterminé en retenant la moyenne des bénéfices de l’année d’imposition des deux années précédentes.
Tels sont les éléments de réponse que je souhaitais vous apporter au nom de M. Bruno Le Maire, monsieur le sénateur.