Cet amendement vise à supprimer la solution proposée par les députés pour résoudre les difficultés que rencontrent les habitants des zones grises, qui sont couvertes par un ou deux opérateurs de réseaux mobiles, mais pas par les trois. Par conséquent, dès lors qu’ils se déplacent, ces habitants voient leurs communications interrompues à chaque « trou » dans la couverture de leur opérateur.
Les députés suggèrent de remédier à cet état de fait en obligeant le ou les opérateurs présents sur une zone grise à offrir une prestation d’itinérance locale aux autres opérateurs, c’est-à-dire à accueillir leurs clients sur son réseau.
Or la généralisation de l’itinérance locale pose de sérieux problèmes, en termes à la fois de qualité de service, d’équité concurrentielle entre opérateurs et d’incitation au déploiement des réseaux.
D’abord, l’itinérance locale ne permet pas d’offrir la totalité des services que peut proposer un opérateur. Ainsi, à ce jour, elle ne permet d’accéder qu’au service de voix et de messages courts, les SMS. Les utilisateurs ne peuvent pas bénéficier, notamment, des services de données, qui constituent aujourd’hui la part la plus importante de la croissance du trafic. Les habitants des zones grises risquent donc d’être déçus par l’itinérance locale.
De plus, lorsqu’un utilisateur entre ou sort d’une zone d’itinérance locale, la communication est coupée, la fonction de hand over ne fonctionnant pas entre les parties de réseau en itinérance locale et le reste du réseau « natif » de l’opérateur. Cela engendre un désagrément pour le client qui, obligé de rappeler plusieurs fois son correspondant, subit ainsi une hausse de sa facture téléphonique puisque chaque connexion au réseau lui est facturée.
C’est la raison pour laquelle, au moment de la mise en place du plan national de couverture des zones blanches en téléphonie mobile – zones qui ne sont couvertes par aucun des trois opérateurs de réseaux mobiles –, il avait été procédé avec soin, pour les zones à couvrir, à la répartition entre zones de « mutualisation », où les trois opérateurs mobiles installent leurs équipements actifs sur un site commun partagé, et zones d’« itinérance locale », où un seul opérateur installe ses équipements et accueille les clients des deux autres sur ce réseau partagé, selon des critères objectifs liés notamment à la possibilité de constitution de « plaques » d’itinérance locale suffisamment importantes pour justifier le recours à cette technique et limiter les inconvénients liés à ces coupures à chaque sortie de la zone d’itinérance locale.
De surcroît, l’itinérance locale conduirait à un traitement discriminatoire des opérateurs mobiles et n’inciterait pas ceux-ci à renforcer leur déploiement, alors même que les opérateurs le poursuivent de manière continue dans les zones grises, avec quelques centaines de sites supplémentaires par an.
En effet, l’obligation pour les opérateurs présents dans une zone d’accorder la prestation d’itinérance locale aux opérateurs absents conduirait à une égalisation des couvertures. Cette solution reviendrait à donner aux opérateurs l’accès à de nouvelles zones de couverture sans investir dans des capacités de réseau en propre. Elle ferait peser la charge de l’extension de la couverture sur les opérateurs ayant déjà le plus investi dans leur réseau, au bénéfice de ceux qui ont le moins investi.
En empêchant les opérateurs de se différencier par la qualité de couverture de leur réseau et le niveau des services offerts, l’itinérance stopperait l’investissement dans l’extension de la couverture des réseaux.
En outre, un tel précédent serait un mauvais signal au moment où les opérateurs mobiles doivent investir lourdement pour le déploiement des réseaux de troisième génération, celle de l’UMTS, et risquerait de conduire à freiner, voire paralyser, ces déploiements.
Pour toutes ces raisons, la commission a jugé bon de ne pas retenir l’itinérance locale comme solution à la problématique des zones grises. En revanche, elle estime essentiel de donner aux habitants de ces zones des perspectives leur permettant d’espérer une solution aux difficultés qu’ils rencontrent en matière de téléphonie mobile.
En conséquence, par cet amendement, nous proposons que les collectivités territoriales soient tenues informées des investissements effectués par les opérateurs dans le déploiement des réseaux de téléphonie mobile de deuxième génération en zones grises et de leur donner une visibilité, via l’ARCEP, sur les perspectives de déploiement des réseaux sur leur territoire.