Madame la secrétaire d'Etat, l'examen des crédits consacrés aux personnes handicapées dans le cadre de cette discussion budgétaire intervient alors que le projet de loi relatif au handicap, réformant la loi de 1975, est toujours en cours d'examen par le Parlement. C'est sans nul doute un budget de transition, ce qui doit nous conduire à considérer certaines données avec prudence.
L'effort public consacré aux personnes handicapées dans notre pays s'élève à 30 milliards d'euros, soit 6, 2 % de nos dépenses sociales et 1, 8 % de notre PIB. Pourtant, la situation des personnes handicapées est toujours aussi précaire et la hausse affichée de 3, 7 % des crédits inscrits pour 2005 n'est pas la traduction de la priorité présidentielle.
L'exemple le plus parlant à ce sujet est celui de l'AAH, qui représente 40 % de la dépense budgétaire consacrée aux personnes handicapées ; c'est l'allocation qui focalise toutes les revendications. La hausse de 4 % des crédits consacrés à l'AAH tient seulement à la croissance continue de son nombre d'allocataires : entre plus 2% et plus 4 % en moyenne chaque année, soit 780 000 bénéficiaires en 2005.
Alors qu'elle représentait 78 % du SMIC en 1982, l'AAH atteint à peine 58 % aujourd'hui, hors exonération ; c'est un débat récurrent et je pense que nous y reviendrons.
L'annonce que vous avez faite, madame la secrétaire d'Etat, d'une enveloppe supplémentaire de 150 millions d'euros correspond à une revalorisation d'à peine 1, 5 %.
Vous le savez, les associations représentant les personnes handicapées demandent que l'AAH soit identique au SMIC pour les personnes incapables de travailler du fait de leur handicap. Jusqu'à présent, vous aviez fait la sourde oreille ; j'aime à croire que notre insistance au cours des deux lectures du projet de loi relatif au handicap au Sénat est pour quelque chose dans le pas que vous faites aujourd'hui. Mais ce ne peut être qu'un premier pas vers la mise en place d'un véritable dispositif de rattrapage.
En ce qui concerne le plan de création de places en établissements, soyons là aussi prudents, voire méfiants. Le plan se poursuit, en effet, mais d'ores et déjà, dans certaines régions comme la mienne, le nombre de places prévues est insuffisant.
Plus inquiétant est le fait que ce plan sera financé en quasi- totalité par la CNSA. Même notre rapporteur s'interroge sur l'opportunité et l'ampleur de ce report de charges de 690 millions d'euros. C'est plus que les capacités financières de la CNSA ! Associé à la sous- exécution chronique des contrats de plan Etat-région, c'est un signe supplémentaire du désengagement de l'Etat du champ social et médico-social.
Vous le savez, madame la secrétaire d'Etat, nombre d'associations s'inquiètent de l'évolution des concours de l'Etat au financement de ces établissements ; vous y avez déjà fait allusion.
La réforme n'entrera en vigueur que le 1er janvier 2006 au plus tôt. En attendant, les instances actuelles doivent continuer de fonctionner. Les moyens des sites pour la vie autonome, les SVA, devraient être renforcés, la CNSA abondant à hauteur de 110 millions d'euros les fonds départementaux de compensation attachés à chaque site.
Il n'en est pas de même pour les COTOREP : en 2000, le ministère de l'emploi et de la solidarité avait mobilisé des moyens supplémentaires pour leur fonctionnement dans le cadre d'un plan triennal. Ce plan a été respecté en 2001 et 2002 mais pas en 2003, aucun crédit nouveau n'étant inscrit au budget ; il en a été de même en 2004 et il en sera ainsi en 2005. Il eût pourtant été intéressant de s'appuyer sur l'expérience de ces instances pour la mise en place des futures commissions des droits et de l'autonomie.
J'aurais bien d'autres questions à vous poser, madame la secrétaire d'Etat, mais cinq minutes me sont imparties et je ne voudrais pas dépasser mon temps de parole.
Finalement, ce budget a le même défaut que le projet de loi relatif au handicap : il est en complet décalage avec les annonces.
Il reste à espérer que la régulation budgétaire ne viendra pas aggraver les choses ; en 2003, 32 % des crédits d'équipement social à destination des personnes âgées ou handicapées ont été annulés.