Je suis désolée, monsieur Souvet, je vais à nouveau prendre la parole durant un petit moment. Mais, d'ailleurs, vous le savez bien, les femmes sont bavardes... Vous connaissez tous ces clichés !
Il faut rendre cet hommage au Gouvernement et à sa majorité : une novation succède de près à une autre novation.
Vous avez commencé par une ouverture en fanfare avec la disparition des emplois-jeunes, la charge budgétaire contre le secteur de l'insertion et la diminution drastique des contrats aidés dans les secteurs public et associatif.
Mais il n'est pas de stratège qui ne sache se redéployer lorsqu'il s'aperçoit qu'il s'est étourdiment trop avancé et qu'il se retrouve encerclé par une conjoncture adverse.
Le ministre chargé des affaires sociales, M. Borloo, nous en a fait la brillante démonstration, chargé d'allumer les premiers contre-feux pour lutter contre l'épidémie des plans sociaux et contre l'augmentation non dissimulable du chômage et de la précarité.
Nous voici donc au moins riches de promesses, de maisons de l'emploi à réaliser, de contrats d'avenir à mettre en oeuvre, ou de chômeurs à responsabiliser.
Mais tout cela n'est que jargon et il s'agit dans les faits d'indiquer que seront regroupées l'ANPE, l'UNEDIC et l'AFPA, pour faire patienter les plus démunis en réactivant les contrats emploi-solidarité, au motif que les nouveaux types de contrats aidés dans les secteurs public et associatif ne sont pas prêts.
On pourrait aussi évoquer les menaces qui pèsent sur les contingents de chômeurs envoyés par l'ANPE dans des officines privées, où il leur est expliqué que s'ils n'acceptent pas n'importe quel emploi précaire, déqualifié et sous-payé éventuellement, l'allocation de chômage à laquelle ils ont droit leur sera supprimée. Il est vrai que, si les employés de ces nouveaux bureaux de placement, financés par les cotisations des salariés, sont contraints de proférer de telles menaces, c'est pour assurer leur propre emploi, eux-mêmes étant victimes d'un système profondément malsain et coercitif.
Il ne s'agit pourtant là que d'aspects factuels. Pour le long terme, on s'active, dans les arrière-cuisines du MEDEF, à modifier en profondeur le droit du travail et à faire sauter les si gênantes garanties collectives des salariés.
Tel a été l'objet de la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, dispositif que vous avez précipitamment ajouté à la loi relative à la formation professionnelle.
D'un mot, je rappelle que ce texte a permis d'avancer de manière décisive sur la voie de la modernisation de notre droit du travail, c'est-à-dire sur la voie de sa transformation en un droit anglo-saxon fondé sur l'idéologie libérale et sur la fiction de la relation individuelle égalitaire entre l'employeur et le salarié.
Les exigences des mouvements patronaux sont tellement effrayantes dans cette affaire que, par amendement, notre rapporteur a jugé nécessaire de rappeler au moins la limite de dix heures journalières.
Mais cela est évidemment trop peu. Les garanties collectives des salariés ont disparu ou ne seront bientôt plus qu'une illusion.
Nous entendons donc par cet amendement marquer notre opposition totale et résolue au processus en cours. C'est la destruction des fondements du droit du travail qui donnaient son équilibre à nos relations sociales et protégeaient les salariés structurellement en situation d'infériorité.
Nous persistons à nous étonner que, de tous les engagements pris lors de l'adoption de cette loi, ce soit celui qui est relatif précisément à la négociation préalable à toute intervention législative qui ait été si superbement ignoré.