Intervention de Pierre Fauchon

Réunion du 6 février 2007 à 16h00
Recrutement formation et responsabilité des magistrats équilibre de la procédure pénale — Articles additionnels après l'article 1er A, amendement 50

Photo de Pierre FauchonPierre Fauchon :

Je n'ai pas de chance, parce que mon idée n'est pas très bien comprise et a été caricaturée par un certain nombre d'intervenants !

Ainsi, vous avez évoqué le Conseil d'État, monsieur Dreyfus-Schmidt, or ce n'est pas cette instance qui est en cause. En outre, vous avez parlé de la formation juridique des magistrats, qui fera l'objet de l'amendement n° 50, que je n'ai pas encore présenté. L'amendement qui nous occupe porte sur l'exigence d'une expérience antérieure à l'entrée à l'École nationale de la magistrature.

Monsieur le garde des sceaux, vous avez cru devoir pourfendre le système britannique, en nous expliquant que, finalement, celui-ci, qui comporte des magistrats de haut niveau et des magistrates' courts, n'était pas très satisfaisant.

Permettez-moi de vous répondre d'abord que, précisément, je ne me suis pas référé à l'exemple britannique : je l'ai simplement cité, en indiquant qu'il fallait imaginer autre chose pour la France. Par conséquent, je suis tout à fait libre pour en parler ! Je n'imagine pas que l'on puisse décider demain que ne pourront devenir magistrats que des avocats confirmés, justifiant de vingt ans d'expérience, et que nous allons instaurer des magistrates' courts en grand nombre.

Cela étant, j'estime qu'il s'agit d'un assez bon système. Il est adapté à la culture anglaise et il ne faut pas transposer les choses d'une culture dans une autre, certes, mais les magistrates' courts, que je suis allé voir fonctionner sur place et dont je suis l'évolution, sont à l'origine des magistrats à titre temporaire ou des juges de proximité : là est l'élément de comparaison avec notre pays. Ce système perdure depuis l'époque d'Henri II, fort habile homme qui a régné sur la moitié de la France en même temps que sur l'Angleterre et qui a créé la Common Law, et il donne satisfaction.

Quoi qu'il en soit, je ne m'inspire pas de cet exemple, mes chers collègues, donc n'en parlons pas davantage.

Je n'ai pas non plus imaginé de supprimer le concours d'entrée à l'ENM ! Pourquoi prétend-on que telle serait mon intention ? J'approuve tout à fait l'existence de ce concours. Je souhaite simplement, rejoignant en cela Mme Borvo, qui va d'ailleurs en être bien surprise, que les candidats à l'ENM puissent justifier d'une expérience d'une dizaine d'années, prise en considération lors du concours, outre les connaissances théoriques, au travers d'un dossier et méritant d'être valorisée. Sur ce point, votre intervention, ma chère collègue, s'inscrit tout à fait dans l'esprit de ma démarche.

J'y reviens encore une fois, on ne peut pas juger des affaires de ce monde si l'on n'en a pas l'expérience. Or celle-ci ne s'acquiert pas dans les écoles, qui d'ailleurs ne sont pas faites pour cela : elles sont faites pour dispenser des connaissances théoriques. Les stages, qui vont certainement être développés, sont certes utiles, mais un stage de quelques mois n'équivaut nullement à des années de pratique professionnelle, avec ce que cela comporte de piétinement, peut-être, mais aussi d'assimilation.

Voilà ce que je souhaitais. Cela étant, je suis conscient du fait que nous n'allons pas apporter un tel bouleversement à notre système. Nous avions souhaité que la réflexion de la commission des lois s'approfondisse : je m'associe à M. Badinter pour vous demander, monsieur Hyest, non pas de prendre un engagement, qui suppose une délibération de la commission, mais de vous prononcer sur cette suggestion. Cela me suffirait. Vous paraît-elle intéressante ou la jugez-vous absurde ?

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