Intervention de Jean Boyer

Réunion du 18 mai 2006 à 15h00
Prévention des violences lors des manifestations sportives — Adoption d'une proposition de loi

Photo de Jean BoyerJean Boyer :

Cet esprit s'entend aussi bien au niveau des joueurs que, dans son prolongement, à tous ceux qui viennent les supporter.

Malheureusement, le racisme, l'intolérance, la violence ont fait leur oeuvre, y compris dans le milieu sportif. Car si la France a longtemps été épargnée, les actes de violences ont connu ces dernières années un accroissement significatif, sans parler de la recrudescence d'agissements et d'actes racistes.

Les chiffres cités par notre excellent rapporteur sont, à ce titre, édifiants. Au cours de la saison 2004-2005, pas moins de 512 interpellations ont été effectuées dans le cadre de matches de la Ligue 1, soit une augmentation de 50 % par rapport à la saison précédente. Ces interpellations avaient trait aussi bien à des agressions, à des violences qu'à des actes tels que l'introduction ou l'usage de fumigènes, les jets de projectiles, les dégradations de biens, ou encore l'incitation à la haine raciale.

Par ailleurs, comme le relève une étude de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme, la LICRA, 49 % des 225 communes interrogées déclarent connaître des problèmes de racisme dans le sport, que ce soit dans le cadre professionnel ou amateur.

Mais, reconnaissons-le ensemble, tout cela n'est que le pâle reflet d'une société en perte de vitesse, profondément marquée par la violence, la haine et les faux-semblants. En effet, la perte de nos repères et de nos valeurs est contagieuse. Elle atteint immanquablement l'enceinte de nos stades, qui sont avant tout tournés vers un esprit différent : celui de la sportivité et du pacifisme.

Comme dans notre société, il y a les vrais supporteurs, ceux qui aiment le sport dans sa pureté, dans sa beauté, dans sa vérité, et il y a malheureusement les autres, certes moins nombreux, mais ô combien négatifs !

En effet, il est dommage de connaître de telles exactions, car l'image du sport, c'est aussi l'image de ceux qui aiment leur ville, des spectateurs réellement passionnés, tout simplement de la France vraie et authentique. Oui, l'authenticité du sport, c'est aussi la nature, la beauté, la force de notre pays, la France.

Les désordres, les violences, qui ont lieu à l'intérieur comme à l'extérieur des stades, desservent l'ensemble des disciplines confrontées à ces difficultés.

Cependant, n'oublions pas que de telles expressions de violence ne se limitent pas aux grandes enceintes sportives, aux grands complexes réputés. Elles se développent aussi sur de petits terrains où rien, et notamment pas les enjeux sportifs, ne peut laisser présager de tels excès.

Je ne prendrai qu'un seul exemple pour confirmer mes propos. Voilà quelques semaines, dans une commune située dans le département voisin de celui dont je suis l'élu, un jeune arbitre a fait l'objet de violences physiques intolérables.

Les supporters en cause ne viennent d'ailleurs pas pour encourager leur équipe. Pour certains, un match est l'occasion de se livrer à la provocation ou tout simplement d'exprimer et de créer le désordre.

Aussi, notre arsenal juridique s'est enrichi peu à peu pour condamner l'ensemble de ces actes.

En particulier, la loi dite « loi Alliot-Marie » du 6 décembre 1993 a renforcé la répression contre les violences dans les stades et a développé le recours à des interdictions administratives de pénétrer dans une enceinte sportive.

La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui tend à renforcer ces instruments juridiques en les complétant par des dispositions s'attaquant aux violences collectives.

Il s'agit principalement, comme plusieurs orateurs l'ont déjà indiqué, de permettre, par décret, la dissolution d'organismes ou d'associations et de donner à l'autorité ministérielle la possibilité de dissoudre les organisations dont les membres se sont livrés de façon répétée au hooliganisme.

Bien entendu, nous saluons cette initiative, mais n'oublions toutefois pas que la violence n'a pas besoin d'association, de groupe, de bande pour s'exprimer ; elle peut être le fait d'éléments isolés. En effet, la violence n'est pas toujours organisée, hiérarchisée, et elle peut s'exprimer de différentes manières.

C'est pourquoi, par cette proposition de loi, nous devons marquer notre détermination à ce que les stades ou les axes qui permettent leur accès ne soient pas les rendez-vous des éléments violents de notre société, qui s'y trouvent seulement pour semer la violence ou la peur parmi les vrais amateurs et supporters.

Malgré cette volonté législative, nous devons redonner à notre société le sens des valeurs, faute de quoi nous aurons beau chercher tous les artifices, la violence épousera d'autres formes, gagnera d'autres enceintes et ne s'atténuera pas en raison d'une impunité relative. L'échelle de nos valeurs comme la graduation des peines doivent être de nature à poser les fondements essentiels de notre société. L'école doit également participer à cette dimension et trouver, par le sport, un moyen de répondre à ces préoccupations.

Et je ne vous parle ni du fait divers dont ont été victimes les élus de Saint-Denis lundi soir ni du scandale qui frappe actuellement l'Italie, événements qui sont très loin de participer à la promotion des valeurs du sport auxquelles nous sommes tous attachés.

« Donner, recevoir, partager : ces vertus fondamentales du sportif sont de toutes les modes, de toutes les époques. Elles sont le sport. Le sport est un dépassement de soi. Le sport est une école de vie », comme nous le rappelle, vous l'aurez deviné, mes chers collègues, Aimé Jacquet, qui, avec l'équipe de France, a fait monter le drapeau tricolore en haut du mât et a fait la fierté de notre pays en 1998.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les membres du groupe UC-UDF voteront avec détermination cette proposition de loi.

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