Intervention de Jean Bizet

Réunion du 17 novembre 2010 à 14h30
Adaptation de la législation au droit communautaire — Adoption d'une proposition de loi en procédure accélérée

Photo de Jean BizetJean Bizet :

Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi, à mon tour, de vous féliciter de votre nomination au Gouvernement et de me réjouir de vous voir en charge du secteur des transports, ce qui nous donnera l’occasion de nous revoir à plusieurs reprises dans les mois qui viennent.

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les propositions de loi ont rarement les dimensions du texte soumis ce soir au Sénat. D’ordinaire, elles visent un domaine très précis, et je comprends que certains de nos collègues aient pu être surpris par une proposition de loi se rapprochant, dans son esprit, d’un texte « portant diverses dispositions ».

En réalité, si le domaine concerné est vaste, l’objectif est simple et précis : il s’agit d’assurer la transposition d’un certain nombre de directives européennes avant que la Commission européenne ne saisisse la Cour de justice de l’Union européenne d’un recours en manquement, avec le risque de voir prononcer de lourdes pénalités financières contre notre pays.

On aura compris que, bien que m’exprimant dans le temps de parole accordé au groupe UMP, c’est plutôt dans le cadre des fonctions que j’exerce au sein de la commission des affaires européennes que j’interviens. Je n’aborderai donc pas le fond même de la proposition de loi, qui relève de la compétence de la commission de l’économie, préférant insister sur la situation qui a conduit au dépôt de cette proposition de loi.

Les retards dans la transposition des directives européennes sont un problème récurrent dans notre pays. Lors de la présidence française de l’Union européenne, en 2008, nous avions fait un grand effort pour rattraper notre retard, puis les mauvaises habitudes sont revenues.

Or le traité de Lisbonne est en vigueur depuis un an et, avec lui, un renforcement de la procédure en manquement contre les États membres. Désormais, en cas de non-transposition d’une directive, la Commission européenne peut saisir la Cour de justice de l’Union européenne à la fois d’un recours en manquement et d’une demande de sanction pécuniaire, alors qu’auparavant la Commission devait d’abord saisir la Cour pour lui faire constater le manquement, puis la saisir à nouveau ultérieurement pour lui demander d’infliger des sanctions si le manquement persistait. La procédure est donc désormais bien plus rapide.

Or les pénalités financières peuvent être très lourdes. La France en a déjà fait la triste expérience ; je pense notamment à l’arrêt dit des « poissons sous taille » : notre pays n’avait pas respecté les règles européennes sur la taille minimale des poissons, ce qui lui a valu, à la fois, une amende de 20 millions d’euros et une astreinte de 58 millions d’euros par période de six mois.

La proposition de loi qui sera examinée ce soir intervient alors que deux autres textes importants portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire sont en cours d’examen. C’est dire que les retards pris nous obligent à légiférer dans la hâte : nous voyons en effet venir des sanctions. On ne peut se résigner à cette situation, qui a quelque chose d’humiliant pour un État.

Nous devons réfléchir à une rénovation du mécanisme de transposition des directives ; mon prédécesseur Hubert Haenel l’avait d’ailleurs demandé à plusieurs reprises.

Les données du problème sont bien connues : nous séparons trop les deux phases que sont l’élaboration d’une directive européenne et sa transposition, alors que les négociations devraient être conduites en ayant constamment à l’esprit la perspective de la transposition.

Dès le début des travaux du Conseil de l’Union européenne, le Gouvernement devrait travailler avec le Parlement pour que chacun ait à l’esprit l’échéance de la transposition et les problèmes qu’elle peut poser. Nous avons donc besoin, avant tout, de nouvelles méthodes de travail, car l’encombrement du calendrier parlementaire, souvent mis en avant, n’est pas la seule cause de nos retards. La preuve en est que nous connaissons aussi des retards pour les textes devant être transposés par décret.

Cela dit, le problème que pose le calendrier parlementaire est bien réel. Nous avions proposé, sur l’initiative d’Aymeri de Montesquiou, qu’un créneau soit réservé aux textes de transposition. Cette solution a été fugacement appliquée, puis, là encore, les anciennes habitudes ont repris le dessus.

L’exercice auquel nous allons nous livrer ce soir est indispensable, mais il est plus que temps de revoir nos méthodes pour nous adapter à la place qu’occupe désormais la législation européenne au sein de notre droit.

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