Il est temps que l’ensemble de notre société ramène le numérique à ce qu’il doit être, un instrument de progrès, de connaissance, de lien social, et l’empêche de devenir un instrument de surveillance, de domination, de pouvoir sans contrôle, sans règles, car nous le savons, mes chers collègues, il n’est point de vie en société sans règles de droit.
Soyons bien conscients qu’Internet est certes un instrument de liberté, mais qu’il peut aussi être un instrument de contrôle du citoyen. N’oublions pas les mises en garde de George Orwell dans son 1984. N’oublions pas Big Brother, les « télécrans », le « Ministère de la Vérité » et ses formules sinistres : « La guerre, c’est la paix. La liberté, c’est l’esclavage. L’ignorance, c’est la force. »
Merci à Anne-Marie Escoffier et Yves Détraigne de leur initiative, de leur travail empreint des principes qui nous sont chers de respect des libertés, du respect de la liberté.
Internet ne doit pas être l’instrument de tous les désordres, le vecteur de tous les conflits, le véhicule de la délation. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que le Sénat a voté récemment, en première lecture, un texte allongeant les délais de prescription de l’action publique pour les diffamations, injures ou provocations commises par l’intermédiaire d’Internet.
Le respect du droit à la vie privée participe de la liberté et de l’autonomie des individus. Sans qu’il existe de définition légale de ce droit, l’article 9 du code civil le protège et, outre les nombreux instruments internationaux qui y font référence, il a été érigé en principe de valeur constitutionnelle par le Conseil constitutionnel en 1999.
Le contexte le justifie. Le consumérisme ambiant a fait de l’intimité des individus des objets commerciaux et encourage une course toujours plus cynique à l’exposition du corps, de la vie et des mœurs.
Peu de personnes ont conscience aujourd'hui que le moindre clic sur Internet est tracé, conservé, voire utilisé à des fins de profilage publicitaire. En l’état actuel des choses, le droit à l’oubli demeure une chimère.
La lutte contre l’insécurité sous toutes ses formes sert aussi de prétexte à la banalisation des outils de surveillance de la population, sans d’ailleurs que celle-ci ait toujours conscience de pouvoir être suivie à la trace. La vidéosurveillance a ainsi benoîtement été renommée « vidéoprotection », dans un élan paternaliste qui honore nos pouvoirs publics !