L’article 3 est l’un des cœurs du dispositif. Avec l’accord des auteurs de la proposition de loi, la commission des lois l’a remanié pour lui donner une force nouvelle. Le correspondant « informatique et libertés » n’est pas l’observateur, ni l’homme ou la femme de la CNIL. Il représente l’assurance, pour tous ceux qui ont à traiter des fichiers importants, que tout se passera bien.
Si vous me permettez la comparaison, à une époque, l’assurance automobile était facultative : elle a été rendue obligatoire parce que la vie des citoyens et la protection de leurs droits étaient en cause. Des assurances couvrant de tels risques sont justifiées.
Le CIL est donc une assurance : il faut l’envisager selon une approche nouvelle et ne pas le considérer comme étant l’œil de la CNIL, à l’origine de contrôles tatillons, comme une charge nouvelle ou une entrave à la liberté d’entreprendre ! Pour le citoyen, il représente une protection, qui doit être assurée de manière interactive. D’une part, la CNIL doit savoir ce qui se passe sur le terrain, connaître les difficultés rencontrées par les gestionnaires des fichiers pour effectuer leur mission dans les meilleures conditions. Ainsi, elle pourra parfois prendre des décisions plus adaptées au monde dans lequel l’informatique circule et vit. D’autre part, les gestionnaires de fichiers pourront également mieux connaître les exigences de la CNIL. On travaille beaucoup mieux en étant informé. Surtout, si l’on sait que le correspondant « informatique et libertés » est disponible en cas de difficulté et peut prendre les choses en main, on dispose d’une assurance importante et utile.
Avec l’article 3, la commission des lois recherche donc un changement d’état d’esprit et d’approche.
Le CIL doit être non plus le représentant de la CNIL qui supervise les actions, mais un partenaire, celui que j’ai appelé, pour reprendre le néologisme que j’ai utilisé dans mon discours liminaire, le « facilitateur », le conseiller et non le contrôleur, celui qui aide et non celui qui bloque. Tel est l’esprit de l’article 3.
Le correspondant est donc vraiment au cœur du dispositif, et il faut le rendre obligatoire ; si sa désignation est facultative, elle n’interviendra pas et l’état d’esprit ne changera pas. Or il importe de donner un signal fort afin que l’on puisse aller de l’avant.
Certes, le seuil de cinquante personnes est peut-être trop bas. Mais, monsieur le secrétaire d’État, si nous l’avons retenu, c’est parce que votre décret autorise la mutualisation à partir de cinquante personnes. Nous avons pensé en toute honnêteté que si vous aviez fixé ce chiffre, c’était parce que vous saviez ce qu’il représentait. Donc nous avons suivi le Gouvernement.
Cela étant, comme je l’ai également souligné lors de la discussion générale, la commission des lois est ouverte à certaines adaptations, et nous examinerons tout à l'heure un amendement visant à porter de cinquante à cent ce seuil numérique. La commission s’en remettra alors à la sagesse de la Haute Assemblée, ce qui montre bien son ouverture.
Mais il faut changer l’état d’esprit actuel et bien montrer que le CIL n’est pas un contrôleur, mais vient aider les entreprises et protéger ceux dont les données font l’objet d’un traitement informatique.
Pour toutes ces raisons, vous comprendrez que la commission des lois émette un avis défavorable sur l'amendement n° 30.