… mis en avant par la Commission soient de nature à susciter une adhésion enthousiaste aux objectifs en question.
J’en viens au troisième point important que je retiens de la communication de la Commission sur la stratégie UE 2020.
La stratégie de Lisbonne avait en partie échoué, car elle ne reposait que sur la contribution des politiques nationales à la croissance et à l’emploi. Le changement majeur introduit ici, et dont je me félicite, consiste à reconnaître le fait que les institutions européennes, et les politiques européennes qu’elles définissent, peuvent apporter une valeur ajoutée, un plus, pour la réussite de la future stratégie. Encore faut-il que cette stratégie inclue des éléments qui nous paraissent importants. La politique agricole commune, je reviens sur ce point, ne fait pas l’unanimité autour de la table du Conseil. Certains États n’ont en effet pas envie de voir la PAC figurer parmi les objectifs de la stratégie 2020 pour l’emploi et la croissance, ce qui est naturellement très difficile pour nous.
Cette reconnaissance de la contribution des politiques européennes à la croissance doit nous permettre d’examiner certaines questions majeures, comme la mise en place d’une politique industrielle et d’une politique énergétique communes, ainsi que d’une politique de la concurrence à la fois interne et externe.
J’évoquerai d’abord la politique industrielle. Comme l’a rappelé le Président de la République le 4 mars dernier à Marignane lors des premiers États généraux de l’industrie, il ne saurait être question d’une Europe désindustrialisée qui se contente uniquement d’une économie de services. Nicolas Sarkozy a raison de poser la question : « le jour où l’industrie sera partie, pour qui les services travailleront-ils ? ».
Alors qu’il était jusqu’à présent impossible d’évoquer une politique industrielle commune autour de la table du Conseil, le risque de désindustrialisation est aujourd'hui compris par tous. Une véritable politique européenne, tournée résolument vers l’industrie, l’innovation et le développement durable, qui encourage les nouvelles sources de croissance et privilégie les investissements du futur est, je l’espère, sur le point de voir le jour de façon forte. En France, c’est l’objectif du grand emprunt. L’accent est mis sur l’enseignement supérieur et sur la recherche ; 35 milliards d’euros sont mobilisés en faveur de secteurs considérés comme étant stratégiques pour l’économie de demain. Telles sont les raisons pour lesquelles nous insistons beaucoup sur la nécessité d’une politique industrielle commune et sur l’excellence technologique, que nous souhaitons inclure dans la stratégie.
L’Union européenne devrait en outre favoriser l’émergence d’acteurs européens compétitifs à l’échelle mondiale, ce qui impose très certainement de réexaminer la politique de la concurrence telle qu’elle existe actuellement à l’échelon européen.
La politique de la concurrence doit inclure un volet externe. Or celui-ci a été plutôt ignoré jusqu’à présent, et c’est un euphémisme. Le problème en Europe, mesdames, messieurs les sénateurs, est non pas de savoir si la concurrence est libre entre les Français et les Italiens ou entre les Belges et les Allemands – la concurrence entre eux est libre –, mais de savoir si elle est équitable entre l’Europe et les autres grands pôles économiques. Dans ce domaine, nous avons beaucoup de progrès à réaliser.
Le Premier ministre, que j’ai accompagné à Berlin le 10 mars dernier, a notamment soulevé la question de la politique de change afin que la parité de l’euro ne constitue pas un frein à la croissance, comme c’est aujourd’hui le cas, face au dollar, mais aussi face au yuan. La France, qui présidera à compter de la fin 2010 à la fois le G20 et le G8, compte bien, le Président de la République l’a déjà annoncé, prendre à bras-le-corps ce problème et poser la question d’un nouveau système monétaire international.
Il est également indispensable de ne plus faire preuve de naïveté et de faire évoluer la politique européenne en matière commerciale. Un tel discours, mesdames, messieurs les sénateurs, s’il est parfaitement admis en France, n’est pas audible dans nombre de pays du Conseil, même si les idées évoluent peu à peu, au rythme des difficultés rencontrées par l’Union européenne. Les grands pays émergents – la Chine, l’Inde, le Brésil – et même la nation du libéralisme par excellence – les États-Unis –, tous tiennent à défendre leur industrie. Or, le moins que l’on puisse dire, c’est que la compétition n’est pas toujours très égale. Les entreprises chinoises construisent des autoroutes en Pologne, mais il n’est pas certain que la réciproque soit vraie. De la même façon, les Asiatiques remportent des marchés publics en Grande-Bretagne pour la construction de centrales électriques, alors même que les entreprises européennes, qu’il s’agisse de Siemens ou d’Alstom, n’ont pas nécessairement accès à de tels marchés en Asie. Et je n’évoquerai pas l’épisode récent de la scandaleuse annulation du contrat qui liait le Pentagone à EADS et la redéfinition de spécifications destinées à favoriser le concurrent américain.
Nous devons donc accepter d’ouvrir les yeux – c’est le cas en France, c’est moins le cas à l’échelon européen – sur la notion de réciprocité dans les échanges commerciaux, en particulier dans l’accès aux marchés publics. La France se bat dans ce domaine depuis plusieurs mois. Comme l’a souligné le Président de la République, « la pire situation pour l’Europe serait celle où son marché serait ouvert quand les autres lui sont fermés ».