Pour conclure sur ce point, j’ajoute qu’il ne faut surtout pas donner l’impression qu’il est nécessaire d’attendre 2020 pour obtenir les premiers résultats concrets de la future stratégie. Les peuples européens ne nous le pardonneraient pas. Il faut obtenir des avancées dès maintenant. Le problème sera de définir des objectifs quantitatifs et de mettre en œuvre des moyens de gestion de cette stratégie qui fonctionnent efficacement et rapidement.
J’en viens maintenant à la question climatique et à la négociation post-Copenhague. Compte tenu de l’heure, je serai bref sur ce sujet.
Comme vous le savez, l’accord de Copenhague enregistre un certain nombre d’avancées, qui ne figuraient auparavant dans aucun document de portée mondiale. Même s’il n’a pas permis la conclusion d’accords, il comporte néanmoins, et je suis le premier à le reconnaître, des points nouveaux. J’en évoquerai brièvement six.
Premièrement, l’objectif du seuil des 2 degrés Celsius à ne pas dépasser et la diminution de 50 % des émissions de CO2 en 2050 sont désormais actés.
Deuxièmement, un cadre spécifique pour l’adaptation aux changements climatiques est créé.
Troisièmement, le principe de l’enregistrement des objectifs et actions de réduction d’émissions des principaux pays émetteurs, qu’il s’agisse des pays développés ou des pays en développement, a été adopté. À l’heure actuelle, 114 pays ont notifié aux Nations unies leur soutien à l’accord de Copenhague, 115 en comptant l’Union européenne en tant que partie, dont 43 au sein de l’annexe I à l’accord – pays développés – et 72 au sein de l’annexe II – pays en développement. L’accord de Copenhague a permis de franchir une étape importante en obtenant le soutien écrit des deux tiers des pays du monde, représentant 80 % des émissions, dont le ralliement de la Chine et de l’Inde au début du mois de mars.
Quatrièmement, des orientations pour le suivi de ces engagements ont été actées.
Cinquièmement, a été fixé l’objectif d’une augmentation significative des ressources financières pour aider les pays en développement à lutter contre le changement climatique, tant à court terme – 30 milliards de dollars pour le « fast start » – qu’à moyen terme – 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 –, avec la mise à l’étude de mécanismes qui vont nous permettre de tenir ces engagements.
Sixièmement enfin, il a été décidé d’instaurer rapidement des mécanismes pour lutter contre la déforestation et favoriser le développement de technologies propres.
Près de trois mois après le sommet de Copenhague, le calendrier des négociations dans les différents processus existants se met en place. La multiplication des réunions politiques témoigne d’une volonté de faire progresser les discussions.
Nous devons désormais préparer les grandes échéances de 2010, le rendez-vous de Bonn au mois de juin et celui de Mexico, du 29 novembre au 10 décembre prochains. Nous devrons veiller à intégrer les résultats de Copenhague dans les différents textes juridiques en négociation.
Nous devrons également maintenir le rôle de leader de l’Union européenne sur la scène internationale pour faire avancer l’ensemble de ce dispositif. Il nous faudra probablement faire évoluer la méthode de négociation, car, comme l’a justement déclaré le Président de la République, des négociations entre 192 pays ne sont pas possibles. Il conviendra de trouver un format plus adapté. Je n’en dirai pas plus ce soir, mais nous travaillons sur cette question.
Nous devons aussi avancer sur le front des financements. Je pense tout d’abord au financement rapide, le « fast start », notamment en faveur des pays les plus vulnérables, pour un montant de 10 milliards de dollars par an sur trois ans. Je rappelle à ce sujet que le Président de la République, lors de la conclusion de la grande conférence internationale sur les grands bassins forestiers qui s’est tenue à Paris le 11 mars a bien précisé que la France avait proposé que 20 % de ces 10 milliards de dollars annuels soient consacrés aux grands bassins forestiers.
Ensuite, le financement à long terme des pays en développement est également sur la table. L’accord de Copenhague prévoit un montant de 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020. Il faudra donc impérativement recourir à des financements innovants.
En outre, nous devons tous ensemble maintenir la pression pour que les pays acceptent des engagements qui permettent d’atteindre effectivement l’objectif de 2 degrés Celsius. Comme vous le savez, la France soutient l’idée d’une organisation mondiale de l’environnement.
Enfin, et c’est un point très important, sur lequel j’ai insisté de nouveau hier, le sommet de Copenhague a montré que l’exemplarité, la vertu et le verbe ne suffisent pas. L’Union européenne s’était mise d’accord sur des objectifs, qui étaient les bons, mais en l’absence d’instruments de dissuasion, le risque est élevé que les autres grands blocs ne les acceptent pas. Un instrument permettant de peser sur les choix des autres grands blocs est donc nécessaire : c’est le fameux mécanisme d’inclusion carbone, ce qu’on appelle « la taxe carbone aux frontières ».
À cet égard, nous avons invité la Commission à présenter d’ici au 30 juin 2010 un rapport comportant notamment des « propositions appropriées » sur la question des secteurs vulnérables au risque de fuite, qui inclurait la possibilité d’un mécanisme d’inclusion carbone, autrement dit d’une taxation. C’est la seule façon, pour nous les Européens, de peser sur les autres grands blocs économiques. À défaut, nous serons les seuls à être vertueux et à surtaxer nos entreprises