Intervention de Georges Othily

Réunion du 8 décembre 2006 à 10h45
Loi de finances pour 2007 — Santé

Photo de Georges OthilyGeorges Othily :

Monsieur le ministre, alors que nous examinons le dernier budget de cette législature, je vous demande de bien vouloir être notre messager auprès de M. Xavier Bertrand afin de le remercier des diverses actions qu'il a pu conduire, en particulier contre les fléaux du chikungunya à la Réunion et de la dengue en Guyane. Soyez assurés que vous laisserez tous les deux ainsi que vos collaborateurs un excellent souvenir à l'ensemble des acteurs de santé qui ont eu le privilège de travailler en votre compagnie.

Les crédits de la mission « Santé » progressent de 7, 8 %, malgré les contraintes budgétaires que nous connaissons. C'est la confirmation qu'elle reste au coeur des priorités du Gouvernement.

Cependant, quelle est la place de l'outre-mer dans ce budget lorsque l'on connaît les grandes difficultés qu'il rencontre ? Acceptez, monsieur le ministre, que je vous interpelle sur la situation très préoccupante de la Guyane, qui connaîtra une véritable catastrophe sanitaire si aucune mesure forte n'est rapidement proposée.

Dans cette région enclavée à 8 000 kilomètres de la capitale, tous les indicateurs sociaux et sanitaires sont manifestement mauvais : le chômage touche 26 % de la population, la mortalité périnatale et infantile est trois fois plus élevée que dans l'hexagone et l'espérance de vie est inférieure de quatre ans à la moyenne nationale.

Nos compatriotes ont le triste privilège d'être confrontés aux pathologies des pays modernes, aux pathologies des pays en voie de développement et aux pathologies environnementales émergentes non maîtrisées.

Ainsi, la Guyane est le département le plus touché par le sida en raison d'une très forte immigration. Elle est également menacée par la pollution au mercure - c'est dû au problème des chercheurs d'or -, par la fièvre jaune ou par le paludisme. À cet égard, malgré les multiples démarches que l'ensemble de la classe politique a déjà effectuées, les médicaments anti-palustres, dont les prix varient du simple au double, ne sont toujours pas remboursés.

Il faut impérativement prendre en compte la faiblesse de la démographie médicale. Certes, les généralistes et les spécialistes connaîtront d'ici à quelques années sur le territoire hexagonal un très lourd déficit, mais il est essentiel pour la Guyane de maintenir son tissu de professionnels de santé, qui sont malheureusement surchargés de travail, âgés, épuisés et réduisent de plus en plus leur activité.

Depuis peu, comme cela se fait à Saint-Pierre-et-Miquelon, le préfet est autorisé à recruter par arrêté des médecins de nationalité étrangère. Toutefois, ne pensez-vous pas qu'il serait souhaitable d'encadrer cette disposition afin d'éviter que ces médecins ainsi recrutés ne quittent le sol guyanais très rapidement pour aller exercer dans d'autres pays européens ?

Le défi que doit relever la Guyane en matière de santé est immense. Il constitue un véritable challenge pour notre région, une obligation de résultats pour la population. Il est temps de ne plus être que de simples spectateurs de nos insuffisances et de faire place à des acteurs engagés, hautement qualifiés et reconnus pour conduire la mise à niveau du secteur de la santé de la Guyane.

La situation est tout aussi alarmante sur le plan des moyens humains, puisqu'il y a 3, 5 fois moins de généralistes et de spécialistes que dans l'hexagone. Avec une population estimée entre 220 000 et 300 000 personnes, la Guyane a la démographie médicale la plus faible de France. Or la population guyanaise ne cesse de croître : elle a plus que triplé en vingt-cinq ans. Une forte natalité et un fort taux d'immigration en sont les principaux facteurs. Pour le cancer -la Guyane est le département le plus touché - il est à déplorer que les moyens humains soient déficients alors que les moyens techniques se mettent peu à peu en place.

Cet état des lieux bien connu depuis plusieurs années ne peut être perpétuellement décrit et analysé passivement en espérant une amélioration miraculeuse par l'usure du temps. Cette situation n'est évidemment pas acceptable.

L'une des pistes envisagées consisterait à créer une zone franche sanitaire afin de remettre à niveau le secteur de la santé, pilier incontournable du développement économique et social.

Conscient de cette nécessité, le ministre de la santé, M. Bertrand, et le ministre délégué au budget, M. Copé, ont demandé à l'Inspection générale des finances et à l'Inspection générale des affaires sociales de mener une mission conjointe afin de réaliser un bilan de la démographie médicale, de préciser les besoins en professionnels de santé en fonction des différentes zones de la Guyane et, surtout, d'évaluer la pertinence et la faisabilité de la zone franche médicale.

Monsieur le ministre, les conclusions de cette mission doivent être rendues ces jours-ci, si ce n'est déjà fait. Pouvez-vous m'apporter des précisions sur ce dossier afin que l'espoir soulevé par le projet de zone franche sanitaire ne risque pas de laisser rapidement la place à un sentiment d'exaspération et de renoncement ?

Cela étant, c'est bien volontiers que la très large majorité du groupe auquel j'appartiens votera les crédits de la mission « Santé ».

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