Intervention de Philippe Bas

Réunion du 8 décembre 2006 à 10h45
Loi de finances pour 2007 — Santé

Philippe Bas, ministre délégué :

Il est du devoir de l'État d'offrir à tous nos concitoyens non seulement les armes les plus efficaces pour lutter contre les grandes pathologies, mais également les moyens de s'en prémunir et de les prévenir, ainsi que l'égalité d'accès à des soins de qualité. C'est cette triple priorité qui a guidé notre action dans l'élaboration de cette mission « Santé » pour 2007.

À présent, je voudrais revenir sur chaque programme de la mission « Santé ».

Comme je le rappelais voilà un instant, le programme « Santé publique et prévention » disposera de 290 millions d'euros, soit une hausse de plus de 20 % par rapport à 2006. Cette progression s'explique tout d'abord par la montée en régime du plan cancer, auquel M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, M. Murat et d'autres orateurs ont exprimé leur attachement.

Bien entendu, cette mission « Santé » vise également à assurer l'égalité d'accès à des soins de qualité. J'ai été particulièrement attentif aux propos de M. Othily sur l'outre-mer, la Guyane en particulier. Cette année, j'ai décidé d'élargir les conditions de financement des traitements prophylactiques et, compte tenu des problèmes posés par l'insuffisance de la démographie médicale, de lancer une mission conjointe de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale des affaires sociales. Xavier Bertrand et moi-même en attendons les conclusions dans les prochaines semaines.

De même, monsieur Othily, nous sommes particulièrement attentifs aux zones franches sanitaires, que vous avez évoquées dans votre intervention.

Bien entendu, cette démarche doit s'inscrire dans une réflexion d'ensemble. En effet, il ne s'agit pas simplement d'aides financières pour inciter les médecins à s'installer sur certaines zones géographiques, comme le prévoient d'ailleurs plusieurs dispositifs comme la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux ou le plan pour la démographie médicale, qui a été présenté par Xavier Bertrand au début d'année 2006.

À côté des incitations financières, nous devons développer les mesures permettant d'améliorer la qualité de vie des médecins et de leur famille en créant un tissu éducatif et social de qualité pour pouvoir les attirer et les inciter à s'installer, ce qui est naturellement très important en outre-mer, comme d'ailleurs en métropole.

Je voudrais le souligner, la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2007 prévoit également de donner une nouvelle impulsion à la prévention. Ainsi, elle renforce le rôle de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, ou INPES, qui est doté de 24 millions d'euros sur le budget de l'État, soit une progression de 1, 4 million d'euros par rapport à 2006. Cela nous permettra d'entreprendre de nouvelles campagnes de prévention et d'information notamment autour des problèmes de la nutrition, que M. Murat a développés tout à l'heure, du plan cancer et aussi du plan contraception.

Monsieur Murat, vous avez souligné l'importance de la lutte contre le cancer. C'est une priorité nationale, qui est assignée par le Président de la République au Gouvernement depuis 2002. Le plan de lutte contre le cancer bénéficiera de 120 millions d'euros en 2007. Les crédits affectés à cette priorité nationale progresseront de près de 25 %.

Comme vous l'avez rappelé, notre volonté est de généraliser totalement le dépistage du cancer du sein, avec pour objectif un taux de participation des femmes concernées de 70 % à la fin de l'année 2006 et de 85 % à la fin de l'année 2007, en orientant tout particulièrement notre action vers les femmes les plus défavorisées et les plus difficilement atteignables par les campagnes de prévention.

À la fin de l'année 2006, la moitié des départements seront en situation de proposer le dépistage du cancer colorectal. Dès le début de l'année 2007, nous lancerons un troisième appel d'offres, afin de nous permettre de généraliser ce dépistage à tous les départements désireux de le mettre en place.

Une autre nécessité dans la mise en oeuvre du plan cancer est d'en prévenir l'apparition des causes, quand elles sont de nature environnementale ou liées aux habitudes de vie. Cela passe par la lutte contre l'alcoolisme et toutes les addictions. Je vous le rappelle, l'interdiction de fumer dans l'ensemble des lieux publics entrera en vigueur à partir du 1er février 2007. Comme vous le savez, un cancer sur quatre est lié au tabagisme, ce qui occasionne chaque année 34 500 décès. Il était important de prendre nos responsabilités pour combattre ce fléau, dont nous avons naturellement pris toute la mesure de longue date.

Le rôle de l'Institut national du cancer, l'INCa, comme tour de contrôle de l'ensemble du plan, se voit confirmé et renforcé, grâce à l'attribution d'une dotation de plus de 50 millions d'euros. L'effort public concernant la prévention et le traitement des infections sexuellement transmissibles, du Sida et des hépatites est également fortement augmenté, avec près de 100 millions d'euros.

Vous le voyez, nous attribuons 120 millions d'euros à la lutte contre le cancer et 100 millions d'euros pour la prévention et le traitement des maladies que je viens de mentionner. Ainsi, contrairement à ce que j'ai entendu tout à l'heure, le développement de la lutte contre le cancer ne s'effectue pas au détriment des autres actions de santé publique, qui sont évidemment tout aussi indispensables.

Cette dotation de 100 millions d'euros représente une progression de près de 12 millions d'euros par rapport à l'an dernier, ce qui nous ouvre de nouvelles capacités d'action à plusieurs titres.

Je voudrais d'abord évoquer le rôle des associations. Les crédits consacrés à la lutte contre le VIH seront reconduits à l'identique en 2007. Ceux de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé représentent 23, 3 millions d'euros. Monsieur Milon, vous m'avez interrogé sur le budget total de cet établissement, qui a été adopté mercredi 6 décembre : il s'élève à 119, 7 millions d'euros, soit une hausse de près de 5 % par rapport à l'année précédente.

Parmi ces actions de prévention des maladies sexuellement transmissibles figurent également la mise à disposition du public du préservatif à vingt centimes d'euros, la mise en place généralisée de distributeurs de préservatifs dans les lycées et dans les hôpitaux, qui doivent contribuer au changement des comportements.

Comme vous l'avez souligné à juste titre, monsieur Michel, il n'y a pas de population à risques ; il y a des comportements à risques. M. le ministre de la santé et des solidarités le déclarait encore tout récemment.

Il s'agit également d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de cette terrible maladie qu'est le Sida, tant à domicile qu'à l'hôpital. C'est la raison pour laquelle nous allons financer, en 2007, 150 nouvelles places en appartements de coordination thérapeutique.

D'autres actions tout aussi ambitieuses témoignent de notre volonté de ne délaisser aucun plan de santé publique. Je tenais à en apporter ici l'assurance, en particulier à MM. Milon et Murat.

En 2007, 47 millions d'euros seront consacrés au deuxième programme national nutrition santé, dont près de 5 millions d'euros sont inscrits dans la mission « Santé ». Je connais la forte mobilisation de beaucoup d'entre vous ici sur ce sujet, notamment la vôtre, monsieur Murat, qui avez fait signer dans votre belle ville de Brive-la-Gaillarde une charte en la matière.

D'ci à la fin de l'année, les premiers engagements des industriels de l'alimentaire seront signés dans le cadre du nouveau plan et porteront sur la composition nutritionnelle des aliments, sur leur présentation et sur leur promotion.

Vous savez que, à partir de l'année prochaine, obligation sera faite à ces industriels d'apposer un bandeau sur les publicités en faveur des aliments comportant des risques sur le plan nutritionnel, et que, à défaut, ils se verront imposer une taxe de 1, 5 % sur le montant des publicités, ce qui nous permettra d'améliorer notre lutte contre l'obésité.

Avec le dispositif « Santé mentale », qui finance une partie du plan « Psychiatrie et santé mentale », à hauteur de plus de 6 millions d'euros, nous avons voulu - je le dis à l'intention de M. Michel, qui est intervenu sur ce sujet tout à l'heure - adopter une démarche globale de prise en charge des troubles de la santé mentale, afin d'offrir à l'ensemble des patients, à tout moment de leur pathologie, des soins adaptés et de qualité.

Ce que nous souhaitons, en 2007, c'est renforcer tout particulièrement la prévention de la dépression et du suicide, qui est un grand fléau national - M. Godefroy a eu raison de le souligner -, notamment grâce à des campagnes d'information de l'INPES et à la formation des professionnels sur le terrain.

Je crois aussi nécessaire de développer les structures d'accueil téléphonique, notamment le soir, qui permettent, à ce moment de la journée souvent critique pour le passage à l'acte, de trouver quelqu'un à qui se confier et parfois d'éviter ainsi le pire. Nous nous donnons les moyens de développer ces centres d'appel téléphonique.

Avec la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2007, nous avons également la volonté d'améliorer la qualité de vie des malades. J'ai évoqué cet aspect à propos des appartements de coordination thérapeutique, mais c'est également l'enjeu du plan « Qualité de vie et maladies chroniques », que Xavier Bertrand lancera avant la fin de l'année. Plus globalement, la mission « Santé » contribue à hauteur de 6, 61 millions d'euros dans le cadre de l'action « Qualité de vie et handicaps ».

Tel est également le sens du plan « Périnatalité », auquel la mission « Santé » consacre près de 1, 25 million d'euros, qui doivent permettre notamment d'améliorer l'information de la femme enceinte sur les pratiques à risques pendant la grossesse.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez adopté l'été dernier le projet de loi relatif à la protection de l'enfance. Je voudrais répondre à M. Michel sur cette question absolument essentielle. Oui, il faut davantage de prévention. Oui, il faut faire en sorte que les futures mamans, quand elles se trouvent en situation de détresse mais qu'elles ont néanmoins décidé de garder leur enfant et de le mettre au monde, soient accompagnées. Pour cela, il convient de détecter leurs difficultés suffisamment tôt, c'est-à-dire chaque fois que l'on est en contact avec elles, ainsi qu'à la maternité, après la naissance de l'enfant.

C'est tout le sens du premier volet de ce projet de loi, dont je suis par ailleurs heureux de vous confirmer qu'il sera débattu à l'Assemblée nationale au mois de janvier prochain, afin, comme le souhaite le Président de la République, que la loi puisse entrer en vigueur avant la fin de la présente législature.

Cela dit, notre système de santé doit prendre en compte de nouveaux défis ; certes, bien souvent, nous les connaissons déjà, mais ils ont pris une importance toute particulière. Je pense, notamment, à la maladie d'Alzheimer, qui occasionne aujourd'hui 70 % des entrées en maisons de retraite et concerne 70 % des demandeurs de l'allocation personnalisée d'autonomie. Or, nous ne savons pas encore détecter ce mal dès ses premiers signes ; nous mettons en moyenne deux ans pour établir le diagnostic.

Pour remédier à cette situation, j'ai voulu que soit créée la visite de prévention pour les septuagénaires, de manière à leur proposer une consultation qui permettra de détecter en même temps d'éventuels problèmes d'équilibre, de nutrition ou cardio-vasculaires, indépendamment, bien sûr, des visites aux médecins généralistes que peuvent faire nos aînés quand ils souffrent de telle ou telle affection. Cette visite de prévention va permettre, je crois, d'améliorer la détection de la maladie d'Alzheimer.

Plus de 520 000 euros sont consacrés sur la mission « Santé » à la lutte contre cette maladie. Dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, nous allons augmenter de façon considérable les structures d'accueil de jour : 2 500 nouvelles places créées par an, pendant cinq ans.

Mais l'effort de recherche sur la maladie d'Alzheimer doit être lui aussi important. Le Premier ministre, Dominique de Villepin, a voulu faire de la recherche sur ce type de maladie une grande cause nationale pour 2007. Nous en trouvons la traduction dans l'effort budgétaire qui leur sera consacré l'an prochain : 20 millions d'euros supplémentaires pour la recherche sur les maladies du cerveau sont inscrits dans le programme que M. François Goulard vous a présenté dans la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

La prévention est l'élément central du troisième programme de la mission « Santé », le programme « Drogue et toxicomanie ».

À cet égard, il s'agit de renforcer, en 2007, la coordination des volets sanitaire, préventif et répressif de la lutte contre la toxicomanie, en accentuant le rôle du centre interministériel de formation antidrogue et de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie. Celle-ci a pour vocation de coordonner des services dépendant de plusieurs ministères différents ; elle s'acquitte de cette tâche grâce à des chargés de mission. Elle est placée directement auprès du Premier ministre, et non auprès du ministre de la santé ou du ministre de l'intérieur, comme certains le souhaitaient en d'autres temps.

Le caractère interministériel de cette mission doit être souligné, car il est la condition même de son efficacité. Il nous faut réussir à mettre autour de la table aussi bien ceux qui s'occupent de lutte contre l'exclusion que ceux qui sont en charge de la santé et de la répression, pour fédérer toutes les énergies.

Le travail de coordination effectué par cette mission interministérielle appelle une clarification des rôles entre l'administration du ministère de la santé, qui finance des actions sanitaires, et la mission interministérielle, dont le rôle de coordination, j'y insiste, doit être accentué.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité, après l'expérience que nous avons menée cette année, attribuer directement à la mission interministérielle la gestion des crédits de subventions aux associations et rétablir l'organisation qui prévalait avant, même si ce choix pose des problèmes de cohérence s'agissant de la présentation de notre programme, ce que Jean-Jacques Jégou a eu raison de souligner.

Je tiens, cependant, à préciser que nous privilégions l'aspect pratique des choses à la lisibilité, sans naturellement être pour autant fermés à de nouvelles évolutions qui pourraient conduire, un jour, à regrouper le programme « Drogue et toxicomanie » et le programme « Santé publique et prévention », puisqu'il s'agit en effet, pour le ministère en charge de la santé, d'actions qui portent sur la prévention.

Le Gouvernement a, par ailleurs, annoncé, le 15 novembre dernier, un plan global de prise en charge et de prévention contre les addictions, souhaité par le Président de la République. Le suivi en sera confié à la commission « addictions ». Ce plan mobilise, en 2007, 77 millions d'euros dans le cadre d'un engagement quinquennal : chaque année pendant cinq ans, en effet, lui sera consacrée une enveloppe de 77 millions d'euros.

Je voudrais répondre sur ce point à M. Guy Fischer que nous veillons naturellement à ce que les jeunes bénéficient particulièrement de ces actions. À cet égard, monsieur le sénateur, je tiens à préciser que les étudiants ne sont pas seuls concernés ; ces actions s'adressent également aux apprentis et aux jeunes en activité ou en recherche d'emploi.

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