Intervention de Bernard Murat

Réunion du 8 décembre 2006 à 22h00
Loi de finances pour 2007 — Compte d'affectation spéciale : cinéma audiovisuel et expression radiophonique locale

Photo de Bernard MuratBernard Murat :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les moyens du ministère de la culture progressent de 7, 8 % cette année.

Il faut saluer la continuité des efforts du Gouvernement, et même leur accentuation : entre 2004 et 2007, le budget de la culture a augmenté de 600 millions d'euros, tandis que nos prédécesseurs ne l'avaient accru entre 1997 et 2002 que de la moitié de cette somme.

Ces moyens croissants permettent de mener une politique culturelle ambitieuse, tournée vers l'aide aux artistes et favorisant l'accès de tous à la culture.

Les monuments historiques sont la première priorité du budget. Cet effort particulier avait été annoncé par le Premier ministre, Dominique de Villepin, à Amiens, à la veille des Journées du patrimoine.

En 2007, plus de 380 millions d'euros seront consacrés à la restauration et à l'entretien du patrimoine monumental.

Je tiens à saluer le rapport remarquable de notre ami Philippe Nachbar sur l'entretien et la sauvegarde du patrimoine architectural, remis à la commission des affaires culturelles dans le cadre de la mission d'information présidée par Philippe Richert.

Ce rapport contient plusieurs propositions tendant à sortir de la crise récente qui s'est traduite par l'arrêt d'un nombre important de chantiers de restauration - 200 en 2005, 300 en 2006 - et par le report de la plupart des nouveaux projets.

Il y est notamment suggéré d'étendre à la conservation et à l'entretien des monuments historiques privés ouverts au public les dispositions fiscales relatives au mécénat. En effet, la conservation et l'entretien des monuments privés représentent une charge de plus en plus lourde pour les propriétaires privés, et, compte tenu des limites du financement public, il convient de rechercher de nouvelles sources de financement.

Je me réjouis que cette disposition ait été adoptée dans le cadre de la première partie de la loi de finances, ce qui encouragera le versement de dons à la Fondation du patrimoine ou à des associations agréées. Il sera important, monsieur le ministre, de faire en sorte que les mécènes potentiels soient informés de l'ensemble des avantages que la loi leur propose.

Il faut préserver et embellir le patrimoine historique de notre pays, non seulement pour sa valeur esthétique et historique, mais aussi parce qu'il permet à des artisans d'exercer leur métier et qu'il contribue à l'attractivité de notre pays.

L'année 2006 a été riche, qui a vu notamment l'ouverture du musée du quai Branly et la réouverture du musée des Arts décoratifs.

Les objectifs pour 2007 sont tout aussi remarquables, avec la relance de 160 chantiers et la poursuite de grands projets : le schéma directeur de Versailles, la rénovation des façades du Grand Palais et la restauration du quadrilatère Richelieu de la Bibliothèque nationale de France.

Les travaux concernent également de nombreux musées, notamment le musée d'Orsay et le Louvre. La Cité de l'architecture et du patrimoine ouvrira l'année prochaine. Quant au lancement du futur centre européen de création contemporaine dans l'île Seguin, pour un million d'euros, il sera un événement majeur pour la production artistique française.

Paris et la région parisienne, parce qu'ils sont riches en monuments historiques, captent une grande partie des crédits, mais je tiens à souligner que la province n'est pas oubliée. Je citerai, par exemple, le chantier du Musée des civilisations à Marseille ou, dans le domaine du spectacle vivant, l'auditorium de Bordeaux et celui d'Aix-en-Provence.

La deuxième priorité du projet de budget, qui me tient particulièrement à coeur, porte sur le livre et la lecture.

Le secteur du livre représente la troisième industrie culturelle en France, avec un chiffre d'affaires d'environ 3 milliards d'euros pour l'édition, mais ce secteur se trouve aujourd'hui fragilisé du fait des mutations des pratiques de lecture et des effets de la révolution numérique.

Malgré cela, monsieur le ministre, lors de la Foire du livre de Brive-la-Gaillarde, deuxième manifestation nationale après le Salon de Paris, plus de 130 000 visiteurs ont contribué à une augmentation des ventes de 20 % par rapport à l'année précédente.

C'est pourquoi je me réjouis de ce que le Gouvernement ait défini une nouvelle politique du livre qui vise à la fois à accompagner ce secteur dans ses mutations par des aides renforcées et à anticiper les évolutions en modernisant l'action publique.

En particulier, la réforme élargissant la redevance sur la reprographie aux imprimantes et télécopieurs permettra de dégager 30 millions d'euros, contre 20 millions d'euros précédemment, ce qui contribuera à renforcer le soutien au secteur du livre.

Je souhaiterais aussi évoquer le projet de bibliothèque numérique européenne, qui bénéficiera en 2007 de 10 millions d'euros.

Ce projet a réellement pris corps à la suite de la décision de Google de numériser des millions de livres en vue « d'organiser l'information du monde ».

Lancée par le Président de la République, Jacques Chirac, lors de l'ouverture des rencontres pour l'Europe de la culture, le 2 mai 2005, la création de la bibliothèque numérique européenne est un grand projet d'avenir, car il est clair que demain, avec l'avancée des nouvelles technologies, la consultation à distance des oeuvres détenues par des bibliothèques sera appelée à se développer.

Une étroite collaboration va être mise en place entre les bibliothèques nationales de l'Union européenne, et l'on imagine l'ampleur de la tâche.

En France, il existe depuis 1997 une bibliothèque numérique créée par la Bibliothèque nationale de France : Gallica.

Gallica compte aujourd'hui 80 000 ouvrages et connaît une fréquentation croissante, avec plus d'un million de documents consultés chaque mois.

Dans la perspective de la bibliothèque numérique européenne, Gallica compte enrichir son offre d'ouvrages numérisés, au rythme de plus de 100 000 ouvrages supplémentaires chaque année, à partir de 2007. La France fait donc, là aussi, preuve de dynamisme et joue un rôle moteur dans le projet.

La Commission européenne estime que deux millions de livres, films, photographies, manuscrits et autres oeuvres culturelles seront accessibles via la bibliothèque numérique européenne d'ici à 2008. Ce chiffre atteindra au moins six millions en 2010, mais il devrait être encore beaucoup plus élevé toutefois puisque chaque bibliothèque, archive ou musée d'Europe sera alors, a priori, en mesure de relier ses ressources numériques à la bibliothèque numérique européenne.

Nous vous faisons toute confiance, monsieur le ministre, pour imposer le respect scrupuleux de la propriété intellectuelle et des droits d'auteur dans la mise en oeuvre de ce projet.

Par ailleurs, dans la mesure où la bibliothèque numérique européenne s'inscrit dans un contexte fortement concurrentiel, elle devra faire face à une situation marquée par la course à la mise en ligne de contenus de qualité.

Le sujet est complexe et le processus décisionnel européen prend du temps : il est donc souhaitable que la France prenne rapidement position et puisse proposer un modèle de plate-forme commune.

Je voudrais à présent évoquer la question de l'enseignement.

À la différence de ce qui se fait dans d'autres pays industrialisés, en France, l'histoire de l'art n'est pas enseignée dans le cadre de la scolarité obligatoire. Une option est seulement ouverte au lycée. Or il me semble que l'enseignement de l'histoire de l'art conditionne en partie l'accès du plus grand nombre à notre héritage culturel. Je voudrais connaître votre sentiment sur ce point, monsieur le ministre.

Je terminerai mon propos en évoquant en quelques mots le spectacle vivant, troisième priorité de ce budget.

Monsieur le ministre, je vous félicite de votre engagement en faveur du spectacle vivant et de votre détermination à résoudre la crise née de la réforme du régime de l'intermittence.

Ce sont 5 millions d'euros qui seront affectés au fonds de professionnalisation et de solidarité, comme le prévoyait le protocole d'accord de 2006.

Il est souhaitable que la signature des accords entre partenaires sociaux intervienne rapidement et que ces accords permettent de construire un système pérenne, adapté aux spécificités des métiers des artistes et techniciens du spectacle, tout en garantissant l'amélioration de la situation financière du régime.

La crise qui est née de la réforme du régime de l'intermittence a révélé la fragilité du secteur du spectacle vivant, alors que celui-ci est un rouage essentiel de notre engagement pour la création et la diversité culturelle, comme de l'animation de tous les villages et cités de notre pays.

Les crédits alloués au spectacle vivant auront augmenté de 17 % entre 2002 et 2007, leur hausse étant de 3 % pour l'année prochaine.

Près de la moitié des crédits sont affectés aux salles, comme la Comédie-Française, qui va bénéficier de nouvelles salles de répétition. Je citerai également le chantier très attendu du grand auditorium de la Ville de Paris, qui représente un coût de 3, 15 millions d'euros.

Quant aux dépenses de personnel, leur diminution de plus de 7 % traduit les efforts significatifs du ministère en faveur d'une meilleure gestion de ses effectifs.

Ce projet de budget traduit une politique ambitieuse et tournée vers l'avenir. Bien évidemment, notre groupe apportera son soutien à cette politique.

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