Intervention de Yannick Bodin

Réunion du 8 décembre 2006 à 22h00
Loi de finances pour 2007 — Sport jeunesse et vie associative

Photo de Yannick BodinYannick Bodin :

Prenez ce qualificatif dans le sens qui vous plaira !

Encore, si votre projet de budget profitait in fine au plus grand nombre... Mais, que constatons-nous ? Nous nous apercevons que la plupart des crédits sont destinés au sport de haut niveau ! Vous réservez la priorité au sport spectacle - et quel spectacle parfois, hélas ! - au détriment du sport pour tous.

Mais je voudrais aborder plus particulièrement les moyens budgétaires consacrés à la vie associative.

Monsieur le ministre, compte tenu des crédits mobilisés sur ce secteur, je me demande vraiment comment vous pouvez prétendre participer à la réussite du grand projet nommé « égalité des chances ». Vous affirmez que l'éducation populaire, le bénévolat et la vie associative constituent vos priorités, mais vous négligez le poids économique, le rôle éducatif et la place que tient le monde associatif dans la constitution du lien social.

Seulement 16 millions d'euros des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » sont consacrés à la vie associative, ce qui représente moins de 2 % du budget total du ministère.

Or les associations sont effectivement devenues des acteurs majeurs de la vie sociale. Selon un sondage IFOP effectué en novembre 2006, 82 % des Français en sont bien conscients. Les associations sont très présentes dans les domaines du sport - on en dénombre 243 000 - et de la culture et des loisirs - elles sont environ 200 000 pour chaque secteur. Elles s'impliquent fortement dans la santé et l'action sociale - c'est le domaine qui emploie le plus grand nombre de salariés, c'est-à-dire environ 650 000 - le développement local, l'éducation et la recherche.

Vous semblez l'oublier, monsieur le ministre, le monde associatif assume les politiques d'intérêt général que vous ne pouvez pas mettre en oeuvre depuis quatre ans. Ce sont les associations qui mobilisent pour l'emploi et la réinsertion là où il y en a le plus besoin. Ce sont elles qui prennent le relais auprès de nos concitoyens, sur le terrain, pour mettre en oeuvre les politiques que les pouvoirs publics ne peuvent pas assumer ; je pense, notamment, à la lutte contre la pauvreté, l'exclusion et les discriminations, ainsi qu'à l'information et à l'action sur des problèmes de santé et de société tels le Sida, les violences faites aux femmes, l'illettrisme ou le logement.

Les associations sont des maillons essentiels et que faites-vous ? Vous annulez et vous gelez certains crédits, ce qui les contraint à réduire leurs effectifs ! Vous ne les mettez pas en situation de pouvoir embaucher. Pire encore, vous fragilisez leurs emplois !

Depuis 2003, les crédits destinés aux associations et le nombre de postes financés sur trois ans par le FONJEP sont en chute libre. Les délais de versement sont trop longs pour assurer un financement pérenne des structures qui en dépendent. Cette année, vous prévoyez de rétablir quatre-vingt-quatorze postes FONJEP fermés en 2004. Cela reste bien en dessous des besoins !

Pour mémoire, sous le gouvernement Jospin, nous avions créé 350 postes FONJEP en 1998, puis 132 en 1999, afin de rétablir leur nombre après les suppressions qui avaient déjà été effectuées par le gouvernement Balladur. Or qu'a fait le gouvernement Raffarin ? En trois ans, il n'a créé, en tout et pour tout, que cinquante postes et a baissé leur montant.

Or, la diminution des postes FONJEP a des conséquences désastreuses sur l'emploi associatif, car elle gèle les participations locales des contrats locaux et renforce la précarité des emplois locaux, qui représentent 75 % de ces postes. Je voudrais souligner ici l'importance de tels postes, qui permettent à l'État de cofinancer des emplois, pour une durée de trois ans, de personnels remplissant des fonctions d'animation et de gestion dans les mouvements de jeunesse ou des actions d'éducation populaire et de permanents d'organismes privés à but non lucratif concourant à l'action sociale.

Je voudrais revenir également sur l'arrêt des emplois-jeunes, décidé en 2002 sous le gouvernement de M. Raffarin. Depuis lors, le secteur associatif a beaucoup souffert du manque d'une politique structurée dans ce domaine et de financements de remplacement. Je le rappelle, les emplois-jeunes étaient pris en charge à hauteur de 80 % du SMIC.

Actuellement, la difficulté pour les associations réside dans la manière d'enchaîner avec le plan de cohésion sociale sans que les activités disparaissent. Or, beaucoup d'entre elles ne peuvent pérenniser un emploi-jeune arrivant en fin de contrat, faute de moyens et de subventions. Du fait de ces suppressions d'emplois, certaines activités qui étaient préalablement portées par les associations n'existent plus.

Les associations comprennent mal ce paradoxe : d'un côté, on leur demande toujours plus, notamment en termes de création d'emplois d'insertion ; de l'autre côté, elles sont obligées de réduire leurs effectifs. Pour 67 % d'entre elles, les missions sont plus difficiles à assumer qu'auparavant, notamment pour des questions de manque de moyens financiers. Une étude réalisée au mois de juillet 2005 par la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, la DARES, a montré que le nombre d'emplois aidés dans ce secteur avait baissé de 93 000 entre 2003 et 2004.

Encore une fois, le présent projet de budget traduit le manque évident de volonté politique. Parce qu'il montre à quel point vous préférez de facto une France élitiste à une France solidaire, nous ne pouvons pas l'accepter et nous ne le voterons point.

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