Intervention de Jean Arthuis

Réunion du 25 novembre 2004 à 15h15
Loi de finances pour 2005 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, président de la commission des finances :

Je ne reviendrai donc pas sur les aspects chiffrés, me limitant à quelques réflexions sur le projet de budget.

Nul ne le conteste, mes chers collègues, face aux attentes de la société française, la préparation des projets de loi de finances constitue certainement l'une des épreuves les plus rudes pour le Gouvernement, quelle que soit la majorité au pouvoir.

En effet, comment traduire dans un budget les options et les contraintes sans être suspect de volontarisme excessif ou de créativité comptable ? Comment répondre à une attente de vérité et d'équité ? Comment apaiser les revendications corporatistes et engager dans le même temps les réformes de fond, les réformes de structures ? En un mot : comment concilier l'inconciliable ? Comment susciter l'enthousiasme et l'adhésion du plus grand nombre sans altérer la cohérence et la crédibilité de l'exercice ?

Or, mes chers collègues, depuis plus de vingt ans - depuis vingt-trois ans exactement, M. le ministre d'Etat le rappelait ce matin - nos lois de finances se soldent par des déficits, et nous demandons aux experts en confection de budget de résoudre la quadrature du cercle : financer le budget d'un Etat qui, dès le 15 octobre - oui, dès le 15 octobre ! -, vit à crédit. Aussi, au fil des années, la dette publique n'a cessé de croître, pour représenter aujourd'hui 1 100 milliards d'euros - et je ne parle pas des dettes de retraite ! -, soit plus de 18 000 euros par Français.

Nos concitoyens sont bien conscients des dangers auxquels cette évolution les expose ainsi que leurs enfants. Ils attendent donc de ceux qui les gouvernent, mais aussi de ceux qui les représentent au Parlement, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, des actes conséquents pour mettre un terme à cette dérive qui hypothèque notre devenir collectif.

L'avènement de l'euro, c'est-à-dire l'absence de sanction monétaire, ne doit en aucune façon nous autoriser la facilité. En effet, désormais, plus aucune dévaluation ne vient sanctionner un budget déséquilibré et, ainsi, ruiner la crédibilité internationale de la France. Cet effet anesthésiant, Philippe Marini le rappelait ce matin, doit donc nous inciter à une vigilance accrue à l'égard de ces deux déséquilibres jumeaux que sont le déficit et la dette publique. Aussi, monsieur le ministre d'Etat, la commission des finances du Sénat salue votre volonté proclamée de rompre avec le cercle infernal des déficits.

Nous saluons votre volonté et nous saluons vos actes. Vous permettez ainsi à la France de respecter ses engagements européens, d'asseoir sa crédibilité, et vous redonnez confiance aux Français. Vous permettez ainsi à la France d'avoir les moyens financiers de son ambition et de sa vocation pluriséculaire. C'est à ce prix que la croissance peut reprendre du souffle et de la consistance, seule voie crédible pour espérer résorber le chômage.

En faisant redescendre le déficit en dessous du plafond de 3 % du PIB pour 2005 - et vous rappeliez, monsieur le ministre d'Etat, que 3 % du PIB représentent pratiquement 25 % des dépenses de l'Etat -, vous permettez que, dès l'année prochaine, nous respections notre parole envers nos partenaires de l'Union européenne. Nous retrouvons ainsi notre autorité au sein du Conseil de l'euro, l'institution pour laquelle vous avez mené un combat décisif, cette institution nouvelle dont nous attendons qu'elle fasse émerger une véritable gouvernance économique à l'échelon européen.

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