Monsieur le Premier ministre, il aura fallu les émeutes dans les banlieues pour que les questions de la lutte contre les discriminations et du rétablissement de l'égalité républicaine soient portées au devant de la scène. Ce n'est pourtant pas faute de vous avoir alerté !
Lors de la création de la HALDE, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, nous avions proposé à titre expérimental l'anonymat des CV dans les entreprises, pour permettre un égal accès au premier entretien d'embauche. Il s'agissait, somme toute, de transposer au secteur privé le principe républicain de sélection qui prévaut pour les examens et concours. Il nous a été répondu que ce n'était pas pertinent.
Nous avions également proposé d'inclure une disposition dans le bilan social des entreprises, afin que puisse être évalué, pour mieux le combattre, le phénomène du « plafond de verre », qui exclut de l'ascension hiérarchique les personnes issues de l'immigration, les femmes, les handicapés et les seniors.
Nous avons vu au Sénat, ici même, dans cet hémicycle, ces magnifiques modèles positifs d'identification que sont ces talents des cités. Pour la plupart, ils sont issus de l'immigration et ils sont les lumières des quartiers.
J'avais aussi appelé votre attention sur une mesure discriminatoire portant sur les élections professionnelles. Par décret, vous avez supprimé le droit de vote accordé aux artisans étrangers non européens alors qu'ils contribuent, comme leurs collègues, à la richesse de notre pays.
La même surdité a été constatée à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, au cours duquel nous avons dénoncé la diminution du minimum vieillesse pour les retraités immigrés. Toutes choses égales par ailleurs, un travailleur français souhaitant profiter de sa retraite là où il est né percevra au minimum 589 euros, alors qu'un travailleur immigré souhaitant rentrer dans le pays où il est né ne recevra, lui, que 150 euros !
Enfin, l'apprentissage à quatorze ans nous paraît de nature à aggraver les inégalités, d'autant que vous avez refusé ce matin même la proposition de loi du groupe socialiste visant à diversifier le recrutement des classes préparatoires.
Quant au rétablissement des subventions aux associations, cette mesure est évidemment indispensable, mais elle ne saurait remplacer l'égal accès à l'emploi et au logement.
Toutes ces dispositions convergentes touchent les parents ou les grands-parents de ceux qui cumulent les discriminations pratiquées en matière d'emploi, de logement et de loisirs.
À ces morts sociales s'ajoutent à présent des atteintes insupportables à la mémoire.
L'UMP a rejeté, et en toute connaissance de cause cette fois-ci, l'abrogation d'un texte qui vise à faire en sorte que les manuels scolaires montrent les aspects positifs de la colonisation. Monsieur le Premier ministre, ce texte n'a pas sa place dans notre législation.