Intervention de Gilles de Robien

Réunion du 1er décembre 2005 à 15h00
Loi de finances pour 2006 — Enseignement scolaire

Gilles de Robien, ministre :

Cela n'interdit pas de penser que nous pouvons et que nous devons faire mieux, parce que tout dispositif mérite d'être amélioré. C'est pourquoi le Premier ministre m'a demandé de lui faire, d'ici à quinze jours, des propositions pour rendre les ZEP plus efficaces.

J'ai d'ailleurs pris bonne note de l'affirmation de M. Gérard Longuet selon laquelle il faut aider les individus. À cet égard, il a reconnu que les programmes personnalisés de réussite éducative, les PPRE, et les parcours de réussite éducative permettent déjà d'apporter une réponse individualisée à des cas particuliers, adaptée à la complexité de la nature humaine - disons les choses ainsi ! -, aux difficultés qui peuvent un jour apparaître, dans l'enfance ou dans l'adolescence, et que l'on espère très temporaires.

La mise en place de ces programmes personnalisés de réussite éducative, l'augmentation du nombre d'équipes de réussite éducative, la multiplication des bourses au mérite, la création d'internats : toutes ces mesures, qui sont inscrites dans ce projet de budget, s'inspirent déjà de cette nouvelle volonté d'instituer une démarche plus individualisée.

Ces dispositions résultent de la mise en oeuvre de la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école, qui fut adoptée au printemps dernier, ainsi que, ne l'oublions pas, de l'application de la loi du 3 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. §Certaines d'entre elles ont été renforcées par les décisions récentes du Premier ministre visant à promouvoir l'égalité des chances.

Avant d'approfondir ce sujet, je voudrais faire rapidement le point sur les chiffres et sur les effectifs.

Les chiffres traduisent très nettement la priorité donnée à l'éducation dans l'action du Gouvernement : l'enseignement scolaire voit son budget croître, à périmètre constant, de 3, 65 %, ce qui le porte à 59, 7 milliards d'euros.

Je précise que le coût des mesures spécifiques annoncées dans le cadre du « plan banlieue » - attribution de bourses au mérite, mise en place d'équipes de réussite dans les collèges difficiles, octroi de subventions aux associations -s'élève à 40 millions d'euros.

Ces efforts seront rendus possibles par une amélioration de la gestion interne du ministère et ne porteront en aucun cas atteinte à notre ambition commune de permettre la réussite de chaque élève. En effet, le ministère de l'éducation nationale, comme l'a dit très justement M. Gérard Longuet, doit inscrire son action dans une perspective de comparaison internationale et de performance. À cet égard, la LOLF représente une occasion formidable, et nous permettra, du moins je l'espère, de constater des progrès.

En ce qui concerne l'évolution des effectifs d'enseignants, elle répond tout simplement à l'évolution démographique des populations d'élèves : nous créerons 1 000 postes en 2006 dans le primaire, qui accueillera 50 000 élèves de plus, ce qui permettra le maintien du taux d'encadrement ; symétriquement, nous ne remplacerons pas 1 383 professeurs partant à la retraite dans le secondaire, où l'on comptera 42 800 élèves de moins.

En toute logique, à taux d'encadrement égal, nous aurions d'ailleurs pu réduire de 2 500 le nombre des professeurs dans le secondaire. Cependant, pour pouvoir mettre en oeuvre les programmes personnalisés de réussite éducative prévus par la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école et assurer l'accueil des handicapés, conformément à la loi du 3 février 2005, nous avons décidé de ne pas appliquer le ratio correspondant à la baisse démographique, de manière à disposer du nombre nécessaire d'enseignants .

Avec ces moyens, nos objectifs s'ordonnent selon trois axes.

Premier axe : améliorer le fonctionnement des établissements.

Cela suppose de renforcer l'encadrement des élèves au sein des établissements. Pour cela, nous consolidons les nouveaux contrats « emplois vie scolaire » créés lors de la dernière rentrée. À ce jour, 26 000 personnes ont déjà été recrutées, en priorité pour l'aide aux directeurs d'école en milieu rural et pour l'aide aux équipes pédagogiques accueillant des élèves handicapés.

Cela suppose aussi de garantir la continuité de l'enseignement. À cette fin, j'ai fait inscrire 51 millions d'euros au projet de budget pour le paiement des heures supplémentaires majorées des professeurs qui remplacent leurs collègues absents pour une courte durée. Sur ce point, je sais que la majorité des professeurs sont tout à fait conscients de la légitimité de la mesure. Je précise d'ailleurs que plus de 50 % des lycées et des collèges ont, à cette date, déjà adopté un protocole organisant, sur la base du volontariat, le remplacement de courte durée.

Cela suppose enfin, comme l'a dit M. Gérard Longuet, que nos responsables aient une culture de l'encadrement. J'ai fixé pour mission à l'École supérieure de l'éducation nationale de développer une telle culture.

Deuxième axe : mieux aider les élèves.

Pour cela, à l'école primaire, nous avons décidé de généraliser, à la rentrée de 2006, les programmes personnalisés de réussite éducative à tous les élèves en difficulté dès la classe de CE 1 - j'insiste sur ce point -, en fonction de l'évaluation qui sera faite en début d'année scolaire. Les PPRE seront aussi appliqués à tous les élèves redoublants.

Au collège, les PPRE seront étendus à tous les élèves jugés en difficulté à l'entrée en sixième - c'est un moment charnière -, ainsi qu'à tous les élèves redoublants. Ici, l'objectif est clair : il s'agit d'apporter une aide personnalisée aux élèves qui en ont besoin et, comme l'a souhaité M. Richert, cette aide concernera l'ensemble du territoire.

Par ailleurs, nous créerons 200 classes ou ateliers « relais » supplémentaires, et 200 unités pédagogiques d'intégration complémentaires pour les élèves handicapés.

J'ajoute que, à la suite des récents événements, nous avons décidé de recruter 5 000 assistants pédagogiques dans 1 200 collèges situés dans les quartiers sensibles. Il s'agit de faire aider les collégiens par des étudiants qui se destinent aux concours de l'enseignement : ils donneront des conseils aux élèves pour la préparation de leurs devoirs ou la révision de leurs cours. C'est là une formule assez proche, monsieur Richert, de celle des IPES, que vous avez évoquée.

Nous allons également accroître l'appui aux associations qui mènent des actions d'aide aux devoirs ou d'aide à la réinsertion scolaire. Un appel à candidatures sera lancé pour sélectionner les projets les mieux adaptés : 5 millions d'euros pourront être consacrés à cette action.

En outre, nous allons augmenter le nombre des bourses au mérite : 100 000 élèves pourront en bénéficier à la rentrée de 2006, contre 28 000 cette année. Le surcoût sera de 15 millions d'euros. Ceux qui veulent réussir, ceux qui travaillent régulièrement, ceux qui font des efforts doivent être encouragés et soutenus.

Enfin, nous allons améliorer la prévention et le suivi de la santé des élèves. À cette fin, nous avons prévu, à la rentrée de 2006, la création de 300 emplois d'infirmière.

Troisième axe : mieux préparer l'accession à la vie professionnelle.

Pour cela, nous ouvrons le collège sur le monde économique, en généralisant l'option de « découverte professionnelle » en classe de troisième : il s'agit non pas de « faire entrer l'entreprise à l'école », mais de donner aux élèves une vision concrète de ce que sont les métiers, de manière à lever les appréhensions à l'égard du monde professionnel et, éventuellement, de faire naître des vocations.

Nous allons aussi améliorer l'apprentissage des langues vivantes, en généralisant l'enseignement en petits groupes, qui est beaucoup plus efficace puisqu'il permet une pratique orale de la langue beaucoup plus intense. À partir de la rentrée de 2006, toutes les terminales générales bénéficieront de ce type d'enseignement, qui sera également étendu aux terminales technologiques et professionnelles.

En outre, nous voulons mieux préparer l'accession des futurs enseignants à la vie professionnelle. Ce sera l'objet du cahier des charges des IUFM que nous élaborons cette année et qui devra répondre aux préoccupations exprimées par M. Richert.

Par ailleurs, nous avons le souci, comme Mme David, de rénover les formations sanitaires et sociales pour créer, dans des secteurs où existent des besoins, tels que ceux de la petite enfance et des soins aux personnes âgées, une vraie filière de diplômes de l'éducation nationale.

Enfin, et même si cette mesure ne s'inscrit pas dans notre projet de budget, je voudrais vous dire que le Premier ministre a décidé de permettre aux jeunes qui le souhaitent d'entrer en apprentissage dès 14 ans. Cet apprentissage « junior », nous devons le concevoir de telle sorte qu'il soit compatible avec l'acquisition du socle commun des connaissances prévu par la loi.

Il ne s'agit pas, pour les élèves concernés, de quitter complètement le système, mais de se voir ouvrir un chemin différent. Cette voie ne sera d'ailleurs pas forcément définitive ! En effet, l'apprentissage peut être l'occasion, pour un jeune, de reprendre confiance en lui-même, de retrouver goût au travail, à l'effort et, éventuellement, de poursuivre vers un baccalauréat professionnel, voire vers une filière générale et l'enseignement supérieur. Cela ne doit pas être exclu. Il faudra construire des passerelles, car rien, à 14, 15, 16, 17 ou 18 ans, n'est irréversible.

Bien entendu, nous préférons tous un adolescent qui s'instruit, se forme et s'épanouit en apprentissage, à un jeune déscolarisé, sans avenir, abandonné aux marges de la société, devenant parfois hostile à l'idée même d'éducation.

J'en viens maintenant, très rapidement, au budget de l'enseignement agricole.

Le Gouvernement, faisant ainsi droit à une demande de la commission des finances de l'Assemblée nationale, a souhaité renforcer le financement du programme « Enseignement technique agricole ». Il a donc accepté, à l'Assemblée nationale, un amendement portant sur 15, 5 millions d'euros parce que l'enseignement agricole, comme l'a très justement souligné Mme Férat, est précisément un élément essentiel de l'égalité des chances.

Son action contribue, non seulement aux objectifs éducatifs de la mission « Enseignement scolaire » en matière d'insertion professionnelle, mais également au développement des territoires.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les sénateurs, vous le voyez, ce budget traduit vraiment la priorité nationale que constitue l'éducation. Il est inspiré par un objectif : la réussite des élèves ; il est guidé par une obligation : le bon usage des deniers publics ; il est porté par une ambition : donner tout simplement un sens aux valeurs de la République.

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