... comme le souhaite MM. Sarkozy ou de Villepin, et qu'il vous donnera des pistes sérieuses pour atteindre ce but !
L'une de ces pistes sera sans doute de créer les postes permettant réellement de diminuer les effectifs dans les classes des quartiers sensibles.
Aussi, je vous propose d'inscrire cette ambition comme un axe majeur de votre mission et de consigner cet indicateur : quinze élèves maximum par classe en maternelle et dans le primaire, dix-huit élèves maximum par classe au collège et vingt élèves maximum par classe au lycée, pour les établissements situés en ZEP.
Une autre de ces pistes sera certainement de lancer une politique plus ambitieuse de formation initiale et continue des personnels, afin de permettre la mise en oeuvre de pédagogies novatrices.
Or les prévisions montrent que les recrutements d'enseignants stagiaires seront équivalents au nombre de départs à la retraite dans le premier degré, malgré de nouvelles et importantes hausses prévisibles d'effectifs d'élèves, et très inférieurs au nombre de départs à la retraite pour le second degré.
Ces recrutements ne permettront pas de mener cette politique ambitieuse de formation, ce qui peut s'interpréter de deux manières : soit vous prévoyez de continuer à supprimer des emplois en nombre important au cours des prochaines années, au risque d'aggraver encore la situation de notre école, soit vous prévoyez un recours massif à des personnels précaires, ce qui serait simplement injustifiable.
Je vous demande, monsieur le ministre, de renoncer à cette politique lourde de conséquences et de prévoir la mise en place dès aujourd'hui du plan pluriannuel de recrutement - d'ailleurs voté au Sénat en mars 2005 lors du débat sur la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école -, qui passe, je vous le rappelle, par la formation de 150 000 enseignants.
De plus, votre volonté de réaliser des économies vous conduit à diminuer de façon drastique et insidieuse la scolarisation des enfants de deux à trois ans en maternelle. Pourtant, selon la revue, n° 66 de juillet-décembre 2003, « entrer à l'école maternelle à deux ans au lieu de trois améliore les chances d'accès au CE2 sans redoublement » et « à l'entrée en CP, les évaluations cognitives des élèves montrent que ce sont les élèves des catégories sociales défavorisées [...] qui bénéficient le plus de la scolarisation précoce ».
En Seine-Saint-Denis, il y avait, voilà quelques années, plus de 20 % d'enfants de deux ou de trois scolarisés en maternelle ; ce taux est tombé en trois ans en dessous de 8 %, alors que plus de 40 % de la population scolaire globale du premier degré est scolarisée dans les établissements concernés !
À la suite des événements qui se sont produits dans certains quartiers de nos banlieues, M. le Premier ministre, à grand renfort médiatique, a fait diverses annonces, dont la création de 5 000 postes d'assistants pédagogiques et l'augmentation des bourses au mérite, mais sans pour autant en prévoir le financement !
Résultat : vous décidez de ponctionner à hauteur de 40 millions d'euros le programme de l'enseignement scolaire public du second degré, qui est pourtant déjà bien loin de répondre aux besoins ! Où est votre cohérence éducative ?
On aurait pu espérer que, face à ces événements dramatiques, le Gouvernement, comprenant enfin l'urgence de changer de politique éducative, octroie de véritables moyens supplémentaires à l'école de la République. Hélas, il n'en est rien ! Vous vous contentez d'un transfert au sein de votre mission sans apporter aucun moyen nouveau et vous nous présentez l'apprentissage dès quatorze ans comme « la » réponse à donner à ces jeunes en rupture scolaire !
Non seulement cette proposition met fin au collège unique et constitue un renoncement aux ambitions démocratiques de l'école publique, mais, de plus, elle revient sournoisement sur l'âge limite de la scolarité obligatoire - malgré ce que vous nous avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre - et sur le code du travail, qui interdit l'apprentissage avant l'âge de seize ans !
Elle est, par ailleurs, principalement destinée aux jeunes des populations défavorisées, ceux-là même qui réclament plus de justice sociale, plus d'égalité, plus de reconnaissance de leur citoyenneté !
En réponse à leur détresse - vous nous avez vous-même dit, monsieur le ministre, qu'il s'agissait de jeunes en détresse -, vous leur refusez l'accès à l'école républicaine et vous choisissez de les priver des instruments dont ils ont besoin en vue de leur émancipation.
De plus, il est reconnu que beaucoup d'apprentis ne vont pas au bout de leur contrat, que ceux ayant préparé un BEP ou un CAP ne s'insèrent pas mieux dans l'emploi que les jeunes sortant de la vie scolaire et que les formations par apprentissage sont foncièrement discriminatoires : les jeunes d'origine maghrébine ou africaine ont les plus grandes difficultés à trouver un employeur qui accepte de leur signer le contrat de travail sans lequel il n'y a pas de scolarisation en apprentissage possible.
C'est pourtant cette réponse que vous apportez à ces jeunes !
J'en viens, monsieur le ministre, au programme 230 de votre mission, intitulé « Vie de l'élève ».
Alors que la finalité générale de ce programme est censément d'assurer la « mission d'éducation aux comportements et au savoir être » et de contribuer « à l'égalité des chances au travers, notamment, du suivi individualisé des élèves », les crédits affectés à cette mission sont en baisse de 11, 21 % !
Parmi les explications, figurent la suppression de 50 postes de conseiller principal d'éducation, ou CPE. Le nombre de ces postes ne devrait-il pas augmenter, au contraire, pour contribuer à revitaliser le travail éducatif nécessaire dans les établissements difficiles ?
En réalité, hormis l'action « santé scolaire », qui bénéficie de la création de 300 postes d'infirmière supplémentaires, toutes les autres actions prévues dans ce programme voient leurs crédits baisser, y compris ceux qui sont consacrés à l'accompagnement aux élèves handicapés ou à l'action sociale.
Par ailleurs, ne faudrait-il pas prévoir, par exemple, un programme « Formation des élèves à la citoyenneté » ? Dans une proposition de loi que nous avons déposée en mars dernier, nous préconisions la création d'un statut de citoyen en formation : monsieur le ministre, accepterez-vous d'examiner cette proposition ?
S'agissant de l'apprentissage de la citoyenneté, la mesure de suppression de 800 postes de mis à disposition, ou MAD, auprès des associations d'éducation populaire n'a pas d'autre justification qu'une volonté d'étrangler financièrement ces dernières !
Je terminerai par un regret, un de plus, concernant l'enseignement agricole, et principalement son secteur public, qui se retrouve pour la première fois sous votre tutelle.
Le rapport rédigé par M. Longuet fait apparaître que, « selon le ministère, la situation budgétaire actuelle conduirait à la rentrée 2006 à refuser 5 000 élèves en raison de l'insuffisance des moyens dont dispose le programme ».
Pour ma part, j'ai relevé que cette insuffisance de moyens relevait d'une baisse drastique des crédits affectés à l'action n° 4 « évolution des compétences et dynamique territoriale », c'est-à-dire à la suppression d'environ 200 postes en équivalent temps plein, qui viennent s'ajouter aux 300 suppressions déjà réalisées dans les budgets de 2003, 2004 et 2005.
Pourtant, M. Longuet lui-même l'écrit : « Compte tenu de l'efficacité du système, [...] votre rapporteur spécial estime nécessaire que des moyens supplémentaires soient donnés à l'enseignement technique agricole afin que la rentrée 2006 ne conduise pas à refuser 5 000 élèves », ce qui serait en effet tout à fait inadmissible et injustifiable. J'ajouterai, pour ce qui me concerne que c'est l'enseignement technique agricole public qui devrait bénéficier de ces moyens supplémentaires.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, j'interviendrai lors des explications de vote pour compléter cette intervention et vous donner le sentiment de mon groupe sur la mission « Enseignement scolaire », dont nous ne voterons pas, vous vous en doutez, les crédits tels qu'ils sont inscrits dans ce projet de loi de finances.