L’Assemblée nationale a proposé de proroger le tarif dit TaRTAM jusqu’au 30 juin 2010 et d’en ouvrir le bénéfice à toutes les entreprises qui le souhaitent, sans aucune discrimination.
Si nous approuvons les attendus de cette proposition, comment ne pas y voir un aveu d’échec de la libéralisation dans ce secteur si particulier ?
Après avoir fait voter des lois de déréglementation et d’ouverture à la concurrence du secteur de l’énergie, le Gouvernement est obligé de constater que, loin de créer une saine émulation entre les entreprises, comme il l’annonçait, ces politiques ne profitent pas aux usagers, particuliers ou entreprises.
Comment ne pas constater, en effet, la hausse vertigineuse et continue des tarifs sur le marché dit « libre » ?
Le facteur qui avait conduit, en 2006, à la création de ce tarif spécial, c’est-à-dire la hausse de 170 % du tarif libre, n’a fait qu’empirer. En 2006, le coût du mégawattheure était de 60 euros. Il atteint désormais 80 euros, soit une augmentation de 260 % depuis 2003.
Pourquoi un tel bond ? La création d’un marché boursier énergétique oblige les entreprises à faire des profits : c’est l’exigence des actionnaires !
De plus, le prix de marché de l’électricité est fixé à partir du coût de production de l’installation la plus obsolète et souvent la plus polluante, très éloigné des coûts réels moyens de production.
La mission d’information sur la sécurité d’approvisionnement considérait que « ce fonctionnement apparaît relativement aberrant puisqu’il conduit aussi bien à nier les lois de la physique que l’existence de moyens de production plus rentables que d’autres. En effet, ce modèle de marché conduit les prix à suivre des évolutions sans rapport avec les techniques utilisées par les producteurs d’électricité. »
Dans un courrier récent, l’Union des industries utilisatrices d’énergie, l’UNIDEN, revient sur cette question en soulignant la nécessité de reconnaître la particularité de la production énergétique, notamment la place de la production nucléaire dans la construction des prix de l’électricité.
Le choix de confier le nucléaire civil à une entreprise publique et la péréquation ont été particulièrement efficaces pour répondre aux besoins de notre pays.
La concurrence libre et non faussée dans le secteur énergétique est un échec cuisant, qui ne permet pas l’accès de tous à un bien essentiel et met gravement en cause la sécurité d’approvisionnement.
À ce titre, je citerai une nouvelle fois les travaux de la mission d’information, qui considère que « la libéralisation totale n’est ni le moyen adéquat, ni l’objectif souhaitable dans un domaine aussi essentiel et complexe que celui de l’électricité, compte tenu des singularités de ce bien. Ainsi, la mission estime que jusqu’à présent, le fonctionnement du marché électrique a eu des effets préjudiciables aux intérêts des consommateurs et pénalisants pour des industries soumises à une pression concurrentielle internationale.
« Elle estime donc, pour qu’une politique communautaire en la matière soit efficace et garantisse la sécurité d’approvisionnement, que cette notion de maîtrise publique doit s’imposer sans passer par l’étape funeste de la crise électrique. »
La mission considère que cette maîtrise publique passe notamment par le maintien des tarifs réglementés sans limite dans le temps. Le TaRTAM, simple mécanisme correctif, ne change donc rien sur le fond. C’est l’essence même de la libéralisation du secteur qui est néfaste pour les usagers.
En outre, le contexte international d’épuisement des ressources fossiles, l’exigence nouvelle de limiter l’émission de gaz à effet de serre sont autant de prétextes à une augmentation des tarifs. Cela explique également que très peu d’entreprises et de particuliers aient choisi d’abandonner les tarifs réglementés.
Il est clair que, en 2010, date d’expiration des dispositifs spécifiques et de la disparition programmée des tarifs réglementés, les questions resteront posées.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen appellent donc de leurs vœux la mise en œuvre d’une autre politique énergétique, notamment sur le plan européen.
La première urgence réside dans l’exigence du maintien des tarifs réglementés ainsi que des contrats d’approvisionnement dits de long terme.
Il est temps de fonder la politique énergétique européenne sur des coopérations entre services publics nationaux et non sur la concurrence libre et non faussée.
Nous attendons donc un engagement fort du Gouvernement et du Président de la République – puisque la France assure la présidence de l’Union – en vue de garantir la pérennité des tarifs réglementés pour ceux qui souhaitent en bénéficier non seulement jusqu’en 2010, mais également après cette date.