Intervention de Daniel Raoul

Réunion du 11 octobre 2011 à 15h00
Débat préalable au conseil européen du 23 octobre 2011

Photo de Daniel RaoulDaniel Raoul, président de la commission de l’économie :

Ce principe est certes affiché clairement dans la stratégie européenne définie en avril 2007 par la Commission européenne. On peut se féliciter que l’Union européenne ait enfin défini sa stratégie commerciale autour de la notion de réciprocité, même si on peut regretter le caractère un peu tardif de sa prise de conscience.

Cependant, il faut maintenant transformer l’objectif affiché en réalité, car il y va de la croissance et de l’emploi sur notre continent. Pour mémoire je rappellerai que, rien qu’avec la Chine, le déficit commercial de l’Union européenne avoisine annuellement cent soixante-dix milliards d’euros et, en l’occurrence, la situation de l’Allemagne n’est guère meilleure que celle de la France. Combien d’emplois perdus un tel déficit commercial représente-t-il ? Nous devons donc rééquilibrer les échanges dans le sens d’une plus grande équité dans les concessions mutuelles.

Je voudrais illustrer les enjeux que soulève cette question en prenant en exemple l’accès aux marchés publics. L’Union européenne a donné accès à 85 % de ses marchés publics aux entreprises des pays tiers, dans le cadre de l’accord sur les marchés publics de l’OMC, ou AMP. Or nos partenaires sont beaucoup plus restrictifs que nous.

Les États-Unis, tout en étant partie à cet accord, excluent certains marchés publics au niveau fédéral, notamment dans le domaine de la défense – vous avez tous en mémoire l’exemple d’un marché dans le domaine de l’aéronautique… Au niveau fédéré, treize États américains excluent complètement l’application de l’AMP et trente-sept autres l’appliquent en excluant des secteurs sensibles, comme l’acier de construction en Pennsylvanie.

Le Japon n’est pas plus vertueux, puisque seuls 25 milliards d’euros de marchés publics sur un total de 570 milliards d’euros sont ouverts aux concurrents étrangers avec, en particulier, une exclusion totale dans le domaine ferroviaire. On peut se demander pourquoi…

Quant à la Chine, elle n’est même pas partie à l’accord sur les marchés publics, son offre d’adhésion ayant été rejetée en raison du caractère extrêmement restrictif de l’ouverture concédée.

Bref, il existe un déséquilibre manifeste dans ce domaine entre l’Europe et ses partenaires. On arrive parfois à des situations totalement absurdes. C’est le cas de l’affaire COVEC, évoquée par M. le ministre : une entreprise publique chinoise a remporté, en Pologne, un marché de construction d’autoroute en présentant une offre tarifaire anormalement basse, alors même que ce projet était cofinancé par des fonds structurels européens. L’Union européenne n’est-elle pas un peu masochiste en la matière ?

Dans ces conditions, le prochain Conseil européen doit être l’occasion de réaffirmer clairement l’attachement de l’Union européenne et de la France à une ouverture équitable des marchés publics, que cette ouverture soit acquise dans le cadre de l’AMP ou d’accords bilatéraux. Il importe également, pour répondre aux déséquilibres les plus manifestes, que l’Union adopte rapidement un outil lui permettant de se défendre contre les mesures protectionnistes d’États tiers et de mettre un terme à ce désarmement unilatéral.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion