Intervention de Richard Yung

Réunion du 11 octobre 2011 à 15h00
Débat préalable au conseil européen du 23 octobre 2011

Photo de Richard YungRichard Yung :

Mais, dans les faits, en quoi consistera cette gouvernance économique européenne ? Si j’ai bien compris, les chefs d’État se réuniront deux fois par an pour débattre des questions économiques, sous la direction de M. Van Rompuy. C’est une bonne initiative. Mais quels pouvoirs auront-ils concrètement ?

En d’autres termes, quelle sera la nature du fédéralisme que vous appelez de vos vœux, ce en quoi je vous rejoins ? Il faudrait de nouveaux transferts de souveraineté en matière économique et financière, afin de permettre une prise effective de décisions et de ne plus tergiverser, comme c’est le cas actuellement. Nous voyons bien que le calendrier, les modes de fonctionnement, les procédures et, plus généralement, les institutions en vigueur ne sont pas efficaces. Nous ne pouvons plus nous permettre d’attendre le bon vouloir du parlement slovaque pour agir alors qu’il y a le feu dans la maison !

Pourriez-vous donc nous donner quelques éclaircissements sur la gouvernance économique ?

D’autre part, j’aimerais que vous nous apportiez également des précisions supplémentaires concernant la taxe sur les transactions financières. Nous nous réjouissions que vous ayez avancé cette idée. Nous l’avons nous-mêmes portée pendant de nombreuses années. Que n’avons-nous entendu lorsque nous plaidions pour la taxe Tobin ! On nous traitait alors de « doux rêveurs »… À présent, tout le monde défend cette proposition. Tant mieux ! Mais comment comptez-vous la mettre en œuvre ? Vous avez raison de dire que l’Europe devrait instituer une telle taxe même si elle était la seule à le faire. Mais quelle en sera l’assiette ? Quel en sera le taux ? Vous avez avancé le chiffre de 0, 005 %. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Beaucoup a été dit sur les banques. Je me réjouis du rapprochement des points de vue entre l’Allemagne et notre pays, ce qui n’était pas du tout acquis voilà encore une semaine. La France traînait les pieds, affirmant qu’il n’était pas nécessaire de recapitaliser nos banques. Apparemment, les positions ont évolué. Je ne sais pas s’il faut y voir un « effet Dexia », mais j’observe que la France est aujourd'hui prête à une action forte en matière de recapitalisation.

À mon sens, c’est d’abord sur le bilan des banques qu’il faut agir. Je suis un partisan de la séparation des banques commerciales et des banques d’affaires. Je sais bien qu’une telle idée ne fait pas l’unanimité, mais je pense qu’elle offre beaucoup d’avantages. D’ailleurs, les Britanniques, qui ne sont tout de même pas des enfants en matière de finance, l’ont eux-mêmes retenue. Je crois que nous devrions en faire autant. J’ajoute que, s’il faut faire baisser le bilan des banques, cela doit porter non pas sur le volet « prêts aux entreprises », mais plutôt sur le volet « spéculation et outils dérivés ».

Il faut également accélérer la mise en œuvre – je crois qu’elle est en cours – des normes de Bâle III sur les ratios de solvabilité des banques. Les banques doivent être encouragées à réinjecter leurs bénéfices dans leur capital au lieu de les distribuer très largement. On peut comprendre qu’elles en redistribuent un peu, mais elles doivent prioritairement renforcer leur capital, et peut-être aussi appeler leurs actionnaires à souscrire. Ensuite, et ensuite seulement, on pourra envisager un appel à la puissance publique.

À cet égard, nous défendons – c’est ce que vous avez esquissé – une démarche européenne coordonnée, en vue d’une politique similaire dans les différents pays. Au besoin, cela pourrait passer par le Fonds européen de soutien financier, même si les Allemands ne veulent pas en entendre parler pour l’instant. D’aucuns avancent les chiffres de 200 milliards d’euros ou 300 milliards d’euros ; je pense qu’il faudrait être plus précis.

Par ailleurs, sur la situation économique générale, je suis tout de même assez pessimiste. Il faut avoir bien conscience que nous sommes au bord de la récession. Notre croissance a été nulle au troisième trimestre et sera de 0, 2 % au quatrième trimestre !

Et c’est pareil en Allemagne ! On érige souvent les Allemands en modèles. Il est vrai qu’ils ont beaucoup de vertus, malgré quelques menus défauts.

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