Quoi qu’il en soit, la situation actuelle peut être l’occasion de réfléchir à des outils.
S’agissant de la taxation sur les transactions financières, ne me demandez pas de me prononcer sur un taux, car je ne veux pas qu’on dise un peu partout que le ministre chargé des affaires européennes a affirmé que le taux serait de tant. Vous ne me ferez pas non plus me prononcer sur l’assiette de cette taxe. Je dirai seulement que nous ne sommes pas restreints. En dehors des règles européennes qui empêchent le passage des liquidités, aucune restriction ne vient limiter l’assiette de la taxation sur les transactions financières.
Cela dit, si la France seule décidait d’instaurer une telle taxe, non seulement elle se trouverait isolée, par définition, mais cela entamerait l’idée que nous nous faisons de l’Europe. Je ne doute pas que la France, l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie et un certain nombre de pays soient capables de s’entendre en fixant un taux suffisamment bas pour éviter les déplacements de nos marchés financiers.
Je veux dire un mot de la réforme institutionnelle. Comment mettre en place le fédéralisme économique ? En organisant deux fois par an des rencontres entre chefs d’État et de gouvernement, mais c’est insuffisant. En donnant plus de pouvoir à Écofin ; c’est déjà mieux. En instaurant un pilotage du Fonds européen de stabilité financière qui, en coordination avec la BCE, soit capable d’intervenir plus rapidement et indépendamment des décisions de chaque État ; ce serait une étape supplémentaire. À terme, bien sûr, il faudrait que cette organisation puisse agir de façon autonome à partir de directives politiques tracées de manière consensuelle par l’ensemble des chefs d’État et de gouvernement de la zone euro.
Tels sont les éléments de réponse, bien modestes, que je peux apporter aux questions que vous m’avez posées.
Vous m’avez dit, madame, que je n’avais pas réponse à tout. En effet, et j’oserai dire que c’est heureux ! Mais j’ai l’intime conviction que l’Europe est en train de franchir une étape décisive.
On peut imaginer le chaos : une destruction générale, nos économies à terre et, de propagation en contamination, la chute dans la récession.
On peut aussi imaginer que de ces difficultés naîtra quelque chose de nouveau, une autre Europe, une Europe avec des frontières, une Europe qui arrête de s’étendre et qui s’approfondit, une Europe qui retrouve ses valeurs et son sens, une Europe qui décide de ce qu’est son économie : non pas seulement des marchés financiers, mais aussi un socle de solidarité et une croissance au service de l’emploi.
Je suis persuadé que la plupart d’entre vous, sur l’ensemble des travées, partagez ma conviction.
Le Conseil européen va se réunir le 23 octobre : je ne doute pas qu’il ait l’ardente obligation de décider. C’est cette obligation de décider qui a toujours fait avancer l’Europe.
On dit souvent que l’Europe avance étape par étape, presque de crise en crise. Avec la crise que nous avons subie et que nous subissons encore, nous pouvons franchir une grande étape. Et nous pouvons peut-être la franchir ensemble.