Intervention de Jean-Pierre Bel

Réunion du 20 octobre 2009 à 14h30
Débat sur la situation des départements d'outre-mer — Ii. - point de vue des groupes politiques

Photo de Jean-Pierre BelJean-Pierre Bel :

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je commencerai mon propos là où Mme Payet et M. le rapporteur ont terminé le leur, en essayant à mon tour, dans les cinq minutes qui me sont imparties, d’expliquer pourquoi les outre-mer sont une chance pour notre pays.

Comme tant d’autres territoires français, les départements d’outre-mer, sans oublier les autres collectivités ultramarines, comme la Polynésie ou la Nouvelle-Calédonie, apportent leur diversité et leurs particularités à ce grand creuset qu’est notre République, fondée sur l’attachement à des valeurs communes. C’est cette diversité et cet attachement partagé qui font la spécificité de la France.

Oui, nous sommes fiers de l’appartenance de ces territoires à notre République, et je voudrais, si cela était nécessaire, donner à tous les ultramarins des raisons de se sentir bien au sein de celle-ci.

Cela étant, nous le savons, beaucoup de questions se posent.

Elles sont le fruit d’une histoire souvent douloureuse, suivant un chemin qui lui est propre.

Elles sont, aussi, la conséquence d’une géographie : les départements d’outre-mer sont localisés dans des régions éloignées de la métropole, connaissent d’autres climats, d’autres contraintes, d’autres chances, d’autres partenariats que les territoires métropolitains. Or, et c’est peut-être là que réside le problème, ces particularités sont insuffisamment prises en compte.

Elles sont, enfin, la conséquence d’une crise économique et sociale, mondiale depuis que la crise financière a éclaté, voilà un an, mais aussi française du fait des choix fiscaux, industriels, sociaux souvent malheureux opérés depuis 2002 – choix encore défendus avec entêtement par le Président de la République il y a quelques jours. Quelque 50 % des jeunes ultramarins sont au chômage : ce seul chiffre illustre l’ampleur de la crise sociale.

Les mouvements sociaux en Guadeloupe, à la Martinique, à la Réunion, en Guyane sont nés de ces éléments et ont agi comme un révélateur. Oui, il est plus que temps que le Gouvernement de la République apporte des réponses essentielles pour l’avenir de ces territoires. Sinon, on ne pourrait que comprendre que leur population éprouve un sentiment d’abandon.

Aussi me suis-je réjoui que le Sénat ait décidé, à la suite d’une demande formulée notamment par les présidents de groupe politique en conférence des présidents, de créer une mission sénatoriale pour tenter de faire la lumière sur les événements que je viens de rappeler.

De même, je me réjouis que, sur l’initiative de Serge Larcher et de la plupart des sénateurs ultramarins, le présent débat puisse avoir lieu au sein de notre assemblée, qui représente tous les territoires de la République.

La mission commune d’information sur la situation des départements d’outre-mer s’est donnée pour objectif de revisiter le lien entre les territoires ultramarins et la métropole, de mettre en lumière les contraintes et les atouts afin de préconiser les moyens d’un développement endogène.

Disons-le tout net : le travail accompli par la mission est remarquable. Je tiens ici à rendre hommage à tous ses membres, en particulier à son président, Serge Larcher, qui a su conduire ses travaux de main de maître, à son rapporteur et aux douze sénateurs du groupe socialiste qui y ont participé.

La mission a élaboré cent propositions, qui peuvent être réparties selon trois objectifs principaux.

Le premier objectif est d’offrir une plus grande capacité d’action aux collectivités territoriales d’outre-mer, sans qui rien ne se fera. La préconisation la plus attendue est bien entendu celle d’une évolution institutionnelle fondée sur l’article 73 de la Constitution. D’autres propositions concernent l’évolution des services de l’État, qui ne manquent pas de courage et ont la volonté de faire bouger le système, ou l’accroissement des capacités d’investissement des collectivités territoriales.

Le deuxième objectif est de permettre une meilleure prise en compte de l’environnement régional des départements d’outre-mer. Comme je l’ai déjà dit, la spécificité géographique de ces territoires est trop souvent niée. La mission préconise en particulier de renforcer la coopération régionale pour des projets concrets et d’inciter l’Union européenne à lancer une politique de « grand voisinage ».

Enfin, le troisième objectif est d’assurer une meilleure prise en compte des spécificités de ces départements, d’abord en ce qui concerne la formation des prix. On ne peut nier que ce problème, qui a été un élément central des conflits sociaux, soit récurrent et important. Je signale d’ailleurs qu’il se pose également de plus en plus en métropole, notamment dans le secteur des fruits et légumes. En outre, il convient de mettre en place des politiques industrielles et économiques tenant compte des spécificités du tissu économique ultramarin, de ses contraintes et de ses atouts particuliers.

Je pourrais énumérer bien d’autres propositions dont la mise en œuvre est nécessaire, mais le président et le rapporteur de la mission les ont déjà exposées avec talent. Je n’y reviendrai donc pas.

En conclusion, je voudrais insister sur l’importance de mettre en pratique toutes ces préconisations. La création d’un comité de suivi a été annoncée ; il sera intéressant de voir ce qu’il en adviendra. Les états généraux de l’outre-mer n’ont certainement pas tout réglé et, comme dans d’autres domaines, nous attendons toujours des avancées concrètes. Or, il y a urgence à agir, et je crois que la mission sénatoriale a su identifier les voies de l’action. Je souhaite instamment que les propositions de la mission commune ne restent pas lettre morte, que le comité de suivi puisse être rapidement mis en place et que l’on fasse confiance aux élus de la République.

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