Madame Blondin, vous connaissez le contexte qui a conduit Mme Albanel, prédécesseur de M. Frédéric Mitterrand dans les fonctions de ministre de la culture, à évoquer, voilà bientôt deux ans, la possibilité de déposer un texte de loi relatif aux langues historiquement parlées sur notre territoire. L’objectif était alors de « donner une forme institutionnelle au patrimoine linguistique » de la nation.
Depuis, la situation a changé : le Parlement réuni en Congrès a inséré dans la Constitution, au titre XII, un article 75-1 affirmant que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ». Ainsi, pour la première fois dans notre histoire, les langues régionales sont reconnues dans notre texte fondamental comme une partie essentielle de notre identité.
Le législateur a conféré aux collectivités territoriales, comme de juste, une responsabilité particulière pour la promotion de ces langues. Mais la Constitution affirme aussi la dimension nationale de ces langues qui font partie d’un patrimoine partagé par tous. C’est pourquoi leur usage et leur transmission relèvent également de l’État.
L’État consacre des moyens importants à l’enseignement des langues régionales, en termes tant de postes d’enseignants, de formation des maîtres, de dotations horaires, que de réalisation de supports pédagogiques et éditoriaux. Dans le domaine des médias, le Gouvernement s’attache à ce qu’aucune entrave réglementaire ne fasse obstacle à leur libre expression. Chaque jour, plusieurs centaines de programmes sont diffusés sur le territoire français dans une dizaine de langues régionales, notamment outre-mer. De nombreux efforts se font jour aussi dans le champ culturel.
Nous pouvons évidemment aller plus loin encore. Il est envisageable, par exemple, de systématiser la mise en place d’une signalisation urbaine et routière en langue régionale, à côté de sa formulation en français. Les actes officiels des collectivités locales, notamment les actes d’état civil, peuvent être publiés en langue régionale, du moment qu’ils le sont aussi dans la langue nationale. Ma conviction est en tout cas que le cadre législatif actuel laisse d’importantes marges de progrès.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement s’interroge sur la pertinence d’une intervention législative supplémentaire, tant que toutes les possibilités existantes n’auront pas été explorées ni appliquées. Nous réfléchissons en ce moment, dans un esprit de concertation interministérielle et en association avec les collectivités locales, les offices publics des langues régionales et les acteurs concernés, à la manière la plus adéquate de répondre à l’exigence de promotion de ce patrimoine irremplaçable.