Intervention de Anne-Marie Escoffier

Réunion du 2 février 2010 à 9h30
Questions orales — Réprimer le sexting

Photo de Anne-Marie EscoffierAnne-Marie Escoffier :

Madame le ministre d’État, chacun sait que nous vivons une nouvelle révolution de notre société et – c’est le sujet qui me préoccupe aujourd'hui – une révolution sexuelle. Les sociétés, les technologies, en particulier le téléphone portable et internet, les mentalités et les mœurs évoluent très rapidement actuellement.

La sexualité, tout comme l’utilisation des outils modernes de communication, suppose une première expérience, une éducation et surtout une pratique responsable. Aussi, sans diaboliser le phénomène d’échange de photos et d’images à caractère sexuel par téléphone portable, plus connu sous le nom de sexting, appréhendé à l’origine comme un jeu coquin entre adultes consentants, nous nous devons de prévenir les dangers et les dérives de cette pratique, déjà relevés et étalés dans la presse, et d’établir des règles de bonne conduite.

Il s’agit non pas de confondre apprentissage de la sexualité, même virtuelle, et diffusion pornographique, mais bien de protéger les jeunes adultes dans l’éducation du jeu amoureux. Certes, les études montrent que, si un jeune sur cinq fait l’objet d’avances sur le net, 90 % de celles-ci se font entre adolescents consentants du même âge. Mais combien de ces mêmes jeunes acceptent de telles avances sous la contrainte, craignant des représailles ou une vengeance ? N’existe-t-il pas déjà des sites spécialement conçus pour « se venger de son ex » ? Combien faudra-t-il de victimes dépressives ou suicidaires ? Combien faudra-t-il de Jessica Logan pour nous faire prendre conscience de nos responsabilités de parents, d’élus et surtout d’éducateurs expérimentés ?

Certains argueront que la loi Grenelle II apporte un élément de réponse en interdisant les téléphones portables dans les écoles et les collèges. Certes ! Mais qu’en est-il des lycéens, bien souvent plus vulnérables ? D’autres se fonderont sur les articles du code pénal, particulièrement sur l’article 226-1 et sur l’article 226-2, qui punissent la diffusion, la conservation et l’enregistrement de l’image et des paroles d’une personne sans son consentement. Mais dans la mesure où le consentement et la volonté de nuire sont des éléments constitutifs de l’infraction, seront-ils réellement suffisants et efficaces pour sanctionner les dérives du sexting ? L’article 227-23, quant à lui, ne vise qu’à réprimer la pornographie. N’est-il pas restrictif à l’égard de nos jeunes de réduire leurs jeux amoureux à la seule pornographie ?

Au regard de ces éléments, madame le ministre d’État, je voudrais que vous puissiez nous dire si les articles du code pénal permettent à eux seuls la répression du sexting. J’aimerais également que soient définis des moyens légaux suffisamment performants pour préserver l’équilibre indispensable entre éducation sexuelle et préservation de la vie privée et intime. Enfin, voyez-vous d’autres moyens d’améliorer la prévention et la répression dans ces domaines ?

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