L’objet de cet amendement est de supprimer l’article 16 de la Constitution.
On a beau aménager les conditions d’exercice des pouvoirs exceptionnels, ils restent des pouvoirs exorbitants, puisqu’ils confèrent au Président de la République la faculté de se prononcer sur tout et à tout moment en ôtant littéralement au Parlement son pouvoir législatif. Quand un Président de la République décide seul, on n’est pas loin de la dictature, comme le disait tout à l’heure ma collègue Josiane Mathon-Poinat.
Aujourd’hui, on nous parle de monocratie contre la démocratie. Cela me rend inquiète, car je ne comprends pas dans quelle mesure il est possible de moderniser nos institutions sans supprimer une disposition qui avait, certes, son utilité de 1958 à 1962, mais qui est devenue aujourd’hui absolument inutile.
Dans les cas de crise grave, nous disposons de l’état d’urgence et de l’état de crise. Nul besoin de maintenir le fait du prince dans une Constitution modernisée.
On nous dit que cet article peut être utile dans des cas qui n’entrent pas dans le champ de l’état d’urgence ou de l’état de crise. On évoque les actes de terrorisme pour justifier son maintien.
Mais je vous le demande : dans quelle démocratie le Parlement est-il totalement destitué de ses pouvoirs au profit du Chef de l’État, qui, je le répète, peut se prononcer à tout moment, quand il le veut, en interrompant tout processus démocratique ?
On s’évertue à associer le Parlement pour toute intervention des forces armées, on lui soumet la prolongation de cette intervention et on lui permet de contrôler les états de siège et d’urgence. En somme, on associe le Parlement dans toutes les situations de crise. Voilà un article 16 qui est aujourd’hui une aberration constitutionnelle, car aucune démocratie, pas même les États-Unis, ne prévoit une telle suspension des pouvoirs du Parlement afin de donner tout pouvoir au Président !
Par ailleurs, en cherchant à encadrer l’article 16, qui n’a servi qu’une fois en avril 1961, vous ne faites que le restaurer et lui donner une actualité qu’il ne mérite plus. Je vous propose au contraire de le supprimer.