Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 20 juin 2008 à 21h45
Modernisation des institutions de la ve république — Article 11

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Le 3° de cet article a soulevé des débats et suscité une inquiétude légitime de la part de plusieurs associations œuvrant dans le droit des étrangers, qui ont alerté certains d’entre nous.

Cette disposition, telle qu’elle a été défendue à l’Assemblée nationale par son promoteur, M. Jean-Luc Warsmann, vise à permettre au législateur d’unifier des blocs de compétences afin de faciliter l’accès des justiciables au juge ; je ne reviendrai pas sur son histoire, ni sur les travaux de la commission Mazeaud, que Mme Éliane Assassi a déjà évoqués.

Toutefois, ce texte fait planer une menace sur la justice administrative, car il augure de manière assez inquiétante du traitement qui sera réservé, demain, à certains contentieux, en particulier celui des étrangers.

En effet, l’amendement introduit par M. Warsmann n’est pas seulement technique : il tend aussi à traduire la volonté du Gouvernement de créer une justice d’exception pour les étrangers, en privant le juge administratif de ses compétences.

Pourtant, dans ce domaine, nous ne saurions douter ni de la compétence ni de l’efficacité des juridictions administratives, qui garantissent aux étrangers une protection rigoureuse de leurs droits et libertés. Mais peut-être certains considèrent-ils justement qu’elles remplissent trop bien cette mission ?

La réforme qui a été engagée afin, notamment, de garantir l’indépendance de cet ordre juridictionnel est bien entendu positive, mais il ne faudrait pas que cette disposition conduise, demain, à museler le juge administratif face aux comportements parfois indignes de certaines administrations, qui traitent les étrangers de manière quelque peu arbitraire.

Par ailleurs, nous considérons qu’il est préférable d’attendre le rapport de la commission Mazeaud pour discuter de cette question et de se contenter, pour l’instant, de supprimer la disposition adoptée par l’Assemblée nationale ; d'ailleurs, si cette dernière était maintenue, il serait à craindre que la commission ne soit privée de sa compétence.

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