Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 20 décembre 2005 à 16h00
Loi de finances rectificative pour 2005 — Article 32

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

Pour présenter cet amendement, je prendrai un exemple tiré de l'immédiate actualité.

Une ville importante de la région Champagne-Ardenne, Saint-Dizier, est confrontée depuis plusieurs semaines à une situation particulièrement préoccupante. Deux des entreprises les plus importantes de la ville, la société Mac Cormick France et la fonderie de machinisme agricole Bragarde, sont concernées par une procédure de redressement judiciaire faisant planer le risque de centaines de licenciements dans un bassin d'emplois déjà lourdement marqué par les restructurations.

Pour que chacun mesure la situation, il faut se souvenir que la ville de Saint-Dizier comptait, dans les années soixante-dix, près de 40 000 habitants et que, du fait de la baisse continue des emplois industriels dans le bassin d'emplois, elle n'en compte plus que 30 000 environ aujourd'hui.

Les coups portés à l'activité économique, notamment dans les secteurs historiques de la métallurgie et du textile, ont contribué à dégrader la situation de l'emploi. Ils ont évidemment pesé aussi sur la situation sociale des habitants, dont la plus grande partie ne dispose que de ressources modestes. En effet, près de 60 % des foyers ne sont pas imposables, tandis que le principal quartier d'habitat social de la ville est l'objet d'un grand projet de ville et d'une convention de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine.

L'annonce des difficultés financières de ces entreprises a provoqué la légitime colère des salariés des deux unités. Ceux-ci ont ainsi multiplié les actions depuis plusieurs semaines, afin de se faire entendre des pouvoirs publics mais aussi de l'actionnaire de référence, le groupe italien Argo Spa, qui a maintes fois manqué au respect des demandes des élus locaux, y compris à celles du député-maire UMP de la localité.

Il y a quelques raisons de penser que ce groupe italien, qui s'est porté voilà quelques années acquéreur des deux entreprises, ne s'est pas conduit de manière optimale du point de vue du droit en matière de gestion comptable et financière de l'activité.

Il a de surcroît obtenu, pour la fonderie du moins, le soutien financier de la région, pour un montant d'aides que l'on peut estimer, sous des formes diverses, à 3, 5 millions d'euros. Cette situation pose des questions importantes.

L'argent des collectivités locales a-t-il été employé à bon escient, d'autant que les bilans de la société Mac Cormick France comme de la fonderie ont été sciemment détériorés pour présenter les résultats les plus négatifs possible ?

Les éléments financiers connus sont en effet troublants : on a ainsi pu observer la progression sensible du chiffre d'affaires de Mac Cormick France, tout en constatant la dégradation de la valeur ajoutée produite. Tout semble avoir été conduit pour dégrader la situation financière de l'entreprise et justifier ensuite les licenciements.

Nous pouvons même penser que, dans cette situation qui n'est pas isolée - citons, par exemple, la société Gomma, qui avait repris les activités de fabrication de pièces détachées de Citroën à Rennes -, nous sommes en présence de véritables patrons « voyous » - pour reprendre l'expression que certains avaient employée -, comme nous l'avions vu avec l'usine Flodor.

Les collectivités territoriales ne sont-elles pas en droit, au nom des habitants de la région, de demander des comptes sur l'utilisation qui a été faite de l'argent public ?

C'est d'ailleurs sous le bénéfice de ces considérations que le conseil régional de Champagne-Ardenne, par une délibération de portée générale, s'est pourvu d'une commission de contrôle, de suivi et d'évaluation des aides publiques régionales. Celui-ci a, en quelque sorte, anticipé la faculté que nous vous proposons de lui accorder, avec l'insertion des dispositions prévues par notre amendement dans le code général des collectivités territoriales.

Nous vous invitons à inscrire dans la loi ce qui est déjà, dans les faits, au menu de l'action de certains conseils régionaux, naturellement soucieux d'une bonne utilisation des deniers publics.

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