Monsieur le président, madame le ministre de la défense, mes chers collègues, la crise ivoirienne, son lourd bilan en morts et blessés pour nos forces engagées dans une mission de maintien de la paix, la situation dramatique de nos ressortissants sont là pour nous rappeler, s'il en était besoin, que le budget de la défense est un acte essentiel de la loi de finances et qu'il a des implications directes et graves sur l'action internationale de la France, sur son rôle dans le monde, sur la protection de nos compatriotes et de nos intérêts nationaux.
Je souhaite aujourd'hui que chacun d'entre nous, quelle que soit son appartenance, en examinant ce budget de la défense, n'oublie aucun de ces faits, aucun de ces drames.
Madame le ministre, soyez au premier chef remerciée et félicitée pour votre comportement et vos actions dans cette crise qui, malheureusement, n'en est peut-être qu'à ses débuts.
Le présent, c'est le présent.
Pour le passé, à votre arrivée au ministère de la défense, vous avez trouvé une situation très dégradée dans tous les domaines vitaux de la défense : des programmes majeurs désorganisés, des choix essentiels différés, des matériels délaissés et mal entretenus dont l'indisponibilité atteignait des taux records ! Une condition militaire négligée et un moral des militaires au plus bas hypothéquaient la réussite d'une professionnalisation déjà par ailleurs fort difficile. Tel était le bilan en 2002.
Madame le ministre, vous avez fait adopter une loi de programmation militaire volontariste, une loi de reconstruction ; et les deux premières années, 2003 et 2004, ont été marquées par le respect scrupuleux de ses prévisions. C'était une première pour une loi de programmation militaire !
En sera t-il de même en 2005 ?
Derrière l'affirmation rassurante selon laquelle cette année encore, et malgré des difficultés économiques bien connues, les crédits de la défense seraient conformes, force est de constater et de regretter deux faiblesses : un déficit dans les effectifs et une baisse des crédits d'entretien. La discussion permettra de préciser ces points.
Dans les faits, avec des crédits de rémunérations et charges sociales qui vous ont été trop strictement mesurés, il vous a bien fallu choisir entre les dépenses nécessaires pour la condition militaire, les mesures catégorielles attendues et certains recrutements.
Certes, le ministère de la défense a louablement, semble-t-il, participé aux efforts de réduction de la dépense publique ; mais il a dû le faire en limitant ses effectifs à 436 910 personnes là où la loi de programmation militaire en prévoit 440 719. Au 30 juin 2004, le décalage entre effectifs budgétaires et effectifs réels atteignait déjà 8252 personnes.
En outre, sur le plan qualitatif, comme il est hors de question d'envoyer en opération extérieure ou outre-mer des unités incomplètes avec des matériels en mauvais état, ces sous-effectifs pèsent exclusivement sur les unités de métropole ; celles-là-mêmes qui sont pourtant mises à contribution pour fournir les contingents nécessaires aux opérations extérieures.
Quel jugement portez-vous, madame le ministre, sur ces sous-effectifs ? Etes-vous d'accord sur les chiffres annoncés ? Les estimez-vous supportables ?
De tels sacrifices dans le domaine des effectifs ne risquent-ils pas, à terme, de remettre en cause le format des armées retenu et même l'étendue des missions qui leur sont confiées.
Nous avons eu beau dire, dès le début, qu'avec la professionnalisation, les rémunérations et charges sociales de l'armée et son budget de fonctionnement allaient croître, et croître fortement, cette notion est visiblement mal comprise en politique !