Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons est très important pour le Parlement, non seulement parce qu’il a été déposé par M. le président de l’Assemblée nationale, mais surtout parce qu’il est nécessaire à la mise en œuvre des dispositions que nous avons voulu inscrire dans la Constitution afin de revaloriser le rôle des assemblées parlementaires.
Précisément, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui a pour objet de donner au Parlement les moyens nécessaires au plein exercice de sa fonction de contrôle et d’évaluation des politiques publiques.
Je ne reviendrai pas sur le contenu du texte, qui a déjà été clairement exposé au cours de notre discussion, mais j’insisterai sur un point : il est d’autant plus important de renforcer les moyens de contrôle du Parlement que celui-ci exerce la plénitude de ses compétences seulement lorsqu’il accorde autant d’importance à sa fonction de contrôle qu’à sa fonction législative.
À mon sens, le Parlement serait même parfois plus utile au Gouvernement et au pays s’il prenait le temps du contrôle et de l’évaluation des dispositions législatives déjà votées, au lieu de multiplier les textes sur un même thème sans avoir pris préalablement le temps d’en dresser un bilan.
Force est de le reconnaître, si ce deuxième volet de l’action du Parlement dans notre pays a repris quelque vigueur, notamment grâce à la commission des finances et à la commission des affaires sociales, lesquelles, dans le prolongement de la LOLF, recourent de plus en plus aux expertises de la Cour de comptes, ce n’est pas ce volet que les parlementaires eux-mêmes considèrent comme le plus important de leur action.
Pour s’en convaincre, il suffit de comparer la présence des parlementaires à Paris respectivement lors des semaines de contrôle de l’action du Gouvernement et lors des semaines d’examen des textes d’initiative gouvernementale. Et encore ! Nous avons, notamment dans notre hémicycle, heureusement diversifié les modes d’exercice du contrôle. Je pense, en particulier, à la mise en place des questions cribles, dont nous avons eu un exemple cet après-midi.
Par ailleurs, il faut le dire, nous sommes nombreux à avoir regretté à plusieurs reprises, dans les années passées, que le Parlement se comporte parfois trop souvent en chambre d’enregistrement des volontés du Gouvernement et ne soit pas toujours suffisamment critique – oserai-je dire suffisamment autonome ? – par rapport aux projets de loi qui lui sont soumis.
Si nous avons insisté voilà deux ans, en réformant la Constitution, pour que les projets de loi déposés sur le bureau de notre assemblée soient accompagnés d’études d’impact, c’est bien parce que nous considérons majoritairement être trop souvent amenés à légiférer sur des dispositions dont nous ne sommes pas certains de l’opportunité ou de la pertinence au regard du problème posé.
D’ailleurs, je crois que certaines décisions prises récemment – je pense notamment à la création, sur l’initiative des présidents Bernard Accoyer et Gérard Larcher, du groupe de travail sur la qualité de la loi – résultent, d’une certaine manière, de ce constat.
En effet, les électeurs jugent une action non pas en fonction du nombre de lois adoptées, mais plutôt – je dirai même « surtout », notamment au vu des résultats des dernières échéances électorales – selon la manière dont sont menées les politiques publiques. En clair, le service après-vote est, me semble-t-il, aussi important que le vote.
Lorsqu’un électeur entend un parlementaire de la majorité qu’il a interpellé sur ce sujet lui répondre : « Nous n’y pouvons rien ; ce n’est pas nous ; c’est le Gouvernement », il faut reconnaître que la réponse est un peu courte. D’ailleurs, si elle ne satisfait pas l’électeur, elle ne nous satisfait pas non plus nous-mêmes.
Par conséquent, s’il est important de renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l’action du Gouvernement et d’évaluation des politiques publiques, encore faut-il que nous nous organisions pour mener ces missions à bon escient.
À cet égard, je dois vous le dire, je m’interroge sur la disposition de l’article 3 qui confère à l’ensemble des commissions permanentes des deux assemblées, au comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale, aux délégations des deux assemblées aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, à la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, ainsi qu’à la délégation sénatoriale à la prospective, les mêmes pouvoirs de saisir la Cour des comptes au titre de sa mission d’assistance au Parlement en matière d’évaluation des politiques publiques.